Généralités sur la toxicomanie, les drogues et leurs modes d’action

Généralités sur la toxicomanie

Définition de la toxicomanie

« Toxicomanie » est un terme ancien, figé par la tradition, recouvrant en fait des réalités diverses. Il englobe des pratiques consommatoires hétérogènes concernant la nature des produits, la fréquence d’utilisation et les motivations du sujet. Contrairement aux termes en « isme » (alcoolisme, etc.) qui désignent des intoxications, ou aux formes passives (drogué, morphinisé, etc.), qui eurent le même sens, la « manie » ou folie du toxique renvoie au début du 20ème siècle, à l’époque de la dégénérescence comme grand cadre explicatif des troubles psychiatriques. Dès l’origine, le terme générique de « toxicomanie » est donc synonyme de nos actuelles « polytoxicomanies ». En raison de la diversité des professionnels intervenant dans le champ de la toxicomanie (et de la multiplicité des références utilisées), le besoin s’est fait sentir d’uniformiser et de standardiser la définition afin d’établir une base commune d’observation en ce qui concerne les comportements de consommation de substances psychoactives. Les critères diagnostiques des deux classifications internationales (CIM, 1992 ; DSM, 1994) sont proches ; ils ont permis d’unifier la littérature et les recherches, en distinguant trois grands types de comportements de consommation : la dépendance, l’abus ou utilisation nocive pour la santé, et l’usage.

Après avoir tenté, dans les années 1950, de définir la toxicomanie, l’organisation mondiale de la santé (OMS) recommandait en 1964 l’abandon de ce concept peu opérant pour le remplacer par la notion de « dépendance ». L’OMS définissait en 1969 la « pharmacodépendance » comme : « Un état psychique et quelquefois également physique, résultant de l’interaction entre un organisme vivant et une drogue, se caractérisant par des modifications de comportement et par d’autres réactions, qui comprennent toujours une pulsion à prendre le produit de façon continue ou périodique afin de retrouver ses effets psychiques et quelquefois d’éviter le malaise de la privation. Cet état peut s’accompagner ou non de tolérance. Un même individu peut être dépendant de plusieurs produits. » [14].

Dépendance, abus et usage

Cette définition est globalisante et prend en compte les notions de dépendance psychiques (autrefois appelée accoutumance), de dépendance physique, et enfin de tolérance :

● La dépendance psychique correspond à état mental caractérisé par une impulsion qui requiert l’usage périodique ou continu d’une drogue dans le but de créer un plaisir ou d’annuler une tension.
● La dépendance physique, correspond à une exigence de l’organisme nécessitant, pour conserver son équilibre, l’apport régulier d’une substance chimique exogène. Cette dépendance se manifeste à travers les symptômes physiques survenant lors du sevrage et par la tolérance.
● La tolérance est le processus d’adaptation d’un organisme à une substance, qui se traduit par l’affaiblissement progressif des effets de celle-ci et entraîne la nécessité d’augmenter la dose pour obtenir les mêmes effets.

L’introduction du concept de dépendance a permis de mieux cerner le champ de la toxicomanie :
● De façon réductrice, en évitant d’assimiler les phénomènes culturels ou sociologiques à la consommation pathologique d’un produit.
● En élargissant son domaine : plutôt que de rester limité aux substances illicites (héroïne, cocaïne, etc.), le concept de pharmacodépendance intègre toute substance dont le sujet ne peut se passer, il permet de désigner le noyau commun aux différents produits, interdits ou autorisés : héroïne, cannabis, mais aussi l’alcool (éthanol), tabac,…

Les critères diagnostiques des classifications internationales ont provoqué une autre évolution sensible des idées dans ce domaine : le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) proposé par l’association américaine de psychiatrie (APA), ainsi que la CIM élaborée par l’OMS pour établir un diagnostic psychiatrique après l’examen d’un patient, se réfèrent à une classification des syndromes reposant uniquement sur la description de symptômes et de troubles du comportement, sans préjuger de leur étiologie et pathogénie. Dans le DSM IV (1994) comme dans la CIM 10 (1992), les critères diagnostiques de la dépendance, communs à l’ensemble des substances psychoactives, n’impliquent pas la présence nécessaire ou suffisante des éléments de sevrage et de tolérance (dépendance physique). Celle-ci n’est plus indispensable pour porter le diagnostic de dépendance à une substance. Il existe une nette prédominance numérique des éléments concernant les troubles comportementaux et psychologiques, par rapport aux symptômes psychobiologiques de tolérance et de sevrage. C’est le mode d’utilisation compulsive de la substance qui caractérise désormais la dépendance.

Dans cette perspective, la dépendance ne concerne pas tant l’objet (le produit) mais le sujet. Ainsi, au lieu de focaliser son intérêt sur la nature des produits, ce concept permet de se recentrer sur la problématique de ceux qui s’y adonnent. Sans doute sommes-nous (mais il s’agit de classements de maladies) dans le cadre d’un « modèle de maladie », essentiellement « bivarié » (interaction sujet-produit), discuté par nombre d’écoles de psychologie ou de sociologie. Mais il redonne une place centrale au sujet, soulignant que le potentiel pharmacologique d’une substance ne suffit pas à expliquer la dépendance. C’est l’amorce d’une évolution vers la notion globale d’addiction, qui regroupe sous un même terme la dépendance à un produit ou à un comportement (jeu, achats, etc.) [9].

Dépendance à une substance : (DSM IV) 

Elle est définie comme le mode d’utilisation inadapté d’une substance conduisant à une altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement significative, et caractérisée par la présence de trois (ou plus) des manifestations suivantes :
1. Une tolérance définie par l’un des symptômes suivants :
– Un besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet désiré.
– Un effet notablement diminué en cas d’utilisation continue d’une même quantité de la substance.
2. Un sevrage caractérisé par l’une ou l’autre des manifestations suivantes :
– Un syndrome de sevrage caractéristique de la substance.
– La même substance (ou une substance très proche) est prise pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage.
3. La substance est souvent prise en quantité plus importante ou pendant une période plus longue que prévu.
4. Il y a un désir persistant, ou des efforts infructueux, pour diminuer ou contrôler l’utilisation de la substance.
5. Un temps important est consacré à des activités nécessaires pour obtenir la substance (par exemple la consultation de nombreux médecins ou déplacement sur de longues distances), à utiliser le produit (par exemple fumer sans discontinuer) ou à récupérer de ses effets.
6. Des activités sociales, professionnelles ou de loisirs importants sont abandonnés ou réduites à cause de l’utilisation de la substance.
7. L’utilisation de la substance se poursuit alors que la personne sait qu’elle souffre d’un problème psychologique ou physique persistant ou récurrent, susceptible d’avoir été causé ou exacerbé par la substance (par exemple, poursuite de la prise de cocaïne, bien que la personne admette une dépression liée à la cocaïne, ou poursuite de la prise de boissons alcoolisées, bien que le sujet reconnaisse l’aggravation d’un ulcère du fait de la consommation d’alcool).

Il faut préciser :
– avec dépendance physique : signe de tolérance ou de sevrage (éléments 1 ou 2 présent).
– sans dépendance physique : pas de signe de tolérance ou de sevrage (éléments 1 et 2 absents). Cette définition de la dépendance a le mérite d’intégrer des données d’ordre biologique (critère 1 et 2), psychologique (critères 3 et 4), et comportemental (critères 5,6 et 7). Les critères de la CIM 10 sont proches de ceux du DSM IV, les sept critères du DSM étant condensés en cinq de la CIM qui ajoute un autre élément concernant le désir puissant ou compulsif d’utiliser une substance (le « craving ») [14].

Syndrome de dépendance : (CIM 10) 

Au moins trois des manifestations suivantes doivent habituellement avoir été présentes en même temps au cours de la dernière année pour diagnostiquer un syndrome de dépendance :
● Désir puissant ou compulsif d’utiliser une substance psychoactive.
● Difficultés à contrôler l’utilisation de la substance (début ou interruption de la consommation ou niveaux d’utilisation).
● Syndrome de sevrage physiologique quand le sujet diminue ou arrête la consommation d’une substance psychoactive, comme en témoignent la survenue d’un syndrome de sevrage caractéristique de la substance ou l’utilisation de la même substance (ou d’une substance apparentée) pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage.
● Mise en évidence d’une tolérance aux effets de la substance psychoactive : le sujet a besoin d’une quantité plus importante de la substance pour obtenir l’effet désiré (certains sujets dépendant de l’alcool ou des opiacés peuvent consommer des doses quotidiennes qui seraient létales ou incapacitantes chez les sujets non dépendants). ● Abandon progressif d’autres sources de plaisir et d’intérêt au profit de l’utilisation de la substance psychoactive, et augmentation du temps passé à se procurer la substance, la consommer, ou récupérer de ses effets.
● Poursuite de la consommation de la substance malgré la survenue de conséquences manifestement nocives (par exemple l’atteinte hépatique due à des excès alcooliques, épisode dépressif après une période de consommation importante ou altération du fonctionnement cognitif liée à la consommation d’une substance). On doit s’efforcer de préciser que le sujet était au courant, ou qu’il aurait dû être au courant, de la nature et de la gravité des conséquences nocives.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION
1ère partie : Généralités sur la toxicomanie, les drogues et leurs modes d’action
1 : Généralités sur la toxicomanie
1.1 : Définition de la toxicomanie
1.2 : Dépendance, abus et usage
1.3 : La drogue, les drogues
2 : Mode d’action des drogues
2.1 : Notions de base sur le fonctionnement des cellules nerveuses
2.2 : Mode d’action moléculaire des drogues
2.3 : Système de récompense
2.4 : Neurones dopaminergiques
2.5 : Drogues et plaisir
2.6 : Impact des drogues sur la neurotransmission
2ème partie : Les principales drogues
1 : Opiacés
1.1 : L’opium : La plante, sa composition et son usage
1.2 : La morphine
1.3 : L’héroïne
2 : Cannabis et dérivés
2.1 : La plante, sa culture et sa composition
2.2 : Préparations à base de cannabis
2.3 : Action pharmacologique du cannabis
2.4 : Conséquences cliniques de l’usage du cannabis
2.5: Dépendance et tolérance au cannabis
2.6 : Toxicologie analytique
3 : Cocaïne et “crack”
3.1 : La drogue et son usage
3.2 : Action pharmacologique
3.3: Conséquences Cliniques de l’usage de cocaïne
3.4: Tolérance et dépendance
4 : Amphétamines et anorexigènes centraux
4.1 : Pharmacologie cellulaire
4.2 : Conséquences cliniques de l’usage d’amphétamines
4.3 : Intoxication aiguë par les amphétamines
4.4 : Anorexigènes centraux
5 : Ecstasy
5.1 : La drogue et son usage
5.2 : Pharmacologie cellulaire
5.3 : Conséquences cliniques de l’usage d’ecstasy
6 : Le tabac
6.1 : Le tabac, la plante, sa culture et sa composition
6.2: Action pharmacologique du tabac
6.3 : Conséquences cliniques du tabagisme
6.4 : Dépendance au tabac
7 : L’éthanol
7.1 : Ethanol, Origine et composition
7.2 : Action pharmacologique de l’éthanol
7.3 : Conséquence cliniques de l’alcoolisme
7.4 : Dépendance à l’éthanol
8 : Autres drogues
8.1 : Le LSD
8.2 : Solvants organiques
3ème partie : Traitement de substitution et prise en charge chez les toxicomanes
1 : L’héroïne, traitements de substitution et prise en charge
1.1 : Les substituts et stratégie thérapeutique du sevrage à l’héroïne
1.2 : Prise en charge psychologique et socio-éducative
2 : Traitement de substitution et sevrage au cannabis
2.1: La psychothérapie
2.2 : La thérapie familiale
2.3: La prise en charge médicamenteuse
3 : Sevrage à la cocaïne
3.1 : La psychothérapie
3.2 : La prise en charge médicamenteuse
3.3 : Le vaccin anticocaïne
4 : Sevrage aux amphétamines
5 : Traitement de substitution à la nicotine
5.1 : L’arbre décisionnel
5.2 : Les substituts nicotiniques
5.3 Le bupropion LP (Zyban®LP)
5.4 : La Varenicline (ou Champix®)
5.5 : La psychothérapie
6 : Sevrage alcoolique
6.1 : Principe et gestion du sevrage
CONCLUSION

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *