Généralités sur la symbiose mycorhizienne

Revue Bibliographique

Généralités sur la symbiose mycorhizienne

Le sol renferme des micro-organismes extrêmement diversifiés parmi lesquels figurent des champignons. Ces derniers peuvent induire au niveau des racines de plantes, des organes appelés mycorhizes que sont les symbioses végétales les plus répandues dans les écosystèmes terrestres (Fortin et al. 2008). Les champignons mycorhiziens sont des partenaires essentiels aux plantes dans la relation sol-plante-microorganisme. En effet, certaines espèces végétales sont fortement dépendantes de leurs symbiotes fongiques avec qui elles ont évolué et sans qui elles se développent difficilement (Brundrett 2002; Gobat et al. 2003). La symbiose mycorhizienne est une association ubiquiste, durable et à bénéfice réciproque pour les deux partenaires (Smith & Read 2008). Selon certains auteurs (Strullu & Plenchette 1991; Smith & Read 2008), dans la nature, l’état de mycorhization est la règle et celui de non mycorhization l’exception. Scotland et al. (2003) ont estimé le nombre d’espèces de plantes terrestres entre 220 000 et 420 000. Plus de 10 000 espèces constituées en majorité par des angiospermes ont été examinées et 86 % d’entre elles possèdent des mycorhizes (Brundrett 2004; Tedersoo & Nara 2010). Aux échelles de l’écosystème et du peuplement, les mycorhizes participent au maintien de la biodiversité végétale et fongique, à la régénération naturelle et au fonctionnement des cycles biogéochimiques par une minéralisation de la litière et une altération des minéraux primaires (Leake & et Read 1990; Read et al. 2004; Selosse et al. 2006). Au niveau de la plante, les mycorhizes améliorent la nutrition hydrominérale, protègent les racines des agents pathogènes et renforcent la résistance à des stress abiotiques (Selosse et al. 2006 , Bâ et al. 2011). En effet, les champignons colonisent les racines et forment un réseau mycélien extramatriciel qui explore un grand volume de sol mobilisant ainsi des nutriments essentiels aux plantes. Ce réseau mycélien relie également les racines de plantes et peut même assurer le transfert de de nutriments d’une plante à une autre (Selosse et al. 2006). Les champignons bénéficient en retour de composés carbonés issus de la photosynthèse pour accomplir leur cycle biologique (Read et al. 2004). Sept types d’associations mycorhiziennes ont été identifiées et classés selon leur écologie, leur morphologie et leur structure: les mycorhizes à vésicules et à arbuscules (MVAs) ; les ectomycorhizes; les ectendomycorhizes ; les mycorhizes arbutoïdes ; les mycorhizes monotropoïdes ; les mycorhizes éricoïdes ou endomycorhizes à pelotons des éricacées et les mycorhizes orchidoïdes ou endomycorhizes à pelotons des orchidées. La figure 1 illustre l’ensemble de ces sept types d’associations mycorhiziennes (Duhoux & Nicole 2004).

La symbiose ectomycorhizienne

La symbiose ectomycorhizienne (EM) est une association mutualiste entre la racine d’une plante et un champignon supérieur. Elle se traduit par la formation d’ECM, organe mixte constitué de la racine de la plante et du mycélium du champignon. Un changement des conditions environnementales qui peut provenir du sol, des microorganismes, des facteurs climatiques ou des animaux, constituent des signaux perçus par les cellules des deux partenaires. Ces dernières traduisent probablement ces informations dans leurs noyaux et entrainent une modification des gènes exprimés et par conséquent des phénotypes (Tagu et al. 2002). La formation de ces ECMs entraîne des modifications importantes de la racine: disparition des poils absorbants, multiplication des racines latérales, allongement des cellules du cortex et formation d’un manteau d’hyphes, appelé « manteau fongique », visible à l’œil nu, entourant les racines nourricières (Martin et al. 2001; Marmeisse et al. 2004). De ce manteau partent des hyphes qui s’insèrent entre les cellules corticales de la racine, sans jamais traverser la paroi, pour former le réseau de Hartig. Ce réseau qui peut se limiter à l’épiderme chez les feuillus ou s’étendre jusqu’à l’endoderme chez les résineux (Voiry 1981), constitue le lieu d’échanges bidirectionnels entre les deux partenaires de la symbiose. Vers l’extérieur, des hyphes partent du manteau fongique et explore un grand volume de sol allant au-delà de la rhizosphère, formant ainsi un réseau extra-matriciel. Ce dernier détermine la mycorhizosphère et est relié aux fructifications des ECMs ou sporophores qui peuvent être épigés ou hypogés sous le houppier des plantes hôtes (Bâet al. 2011). Cependant, la structure, l’épaisseur et la couleur du manteau fongique sont très variables selon les partenaires symbiotiques et les conditions environnementales (Agerer 1995). Caravaca et al. (2002) ont montré que le développement de la symbiose ectomycorhizienne, grâce à son mycélium extramatriciel, influencerait significativement la structure des sols, ainsi que les caractéristiques et le fonctionnement de la microflore tellurique symbiotique et non symbiotique de son environnement. Après les mycorhizes à arbuscules, la symbiose ectomycorhizienne est la plus représentée dans les écosystèmes forestiers. Les espèces de plantes qui forment des ECMs sont majoritairement des angiospermes (Taylor & Alexander 2005; Tedersoo et al. 2010b). Ces espèces sont essentiellement des arbres appartenant aux familles et sous-famille des Betulaceae, Cesalpiniaceae, Dipterocarpaceae, Fagaceae, Myrtaceae, Papilionaceae, Polygonaceae, Pinaceae , Casuarinaceae , Cistaceae, Fabaceae , Ericaceae , Euphorbiaceae , Tiliaceae, Sapindaceae , etc, bien qu’il existe quelques, herbacées et lianes qui possèdent aussi des ECMs (Selosse et al. 2006; Bâet al. 2011). La majorité des arbres à ECMs, en particulier les Ericaceae , possèdent aussi des MA et/ou plus rarement des ectendomycorhizes avec une dominance des MA sur les jeunes plants et des ECMs sur les arbres adultes (Read 1997; Egerton-Warburton & Allen 2001; Dos Santos et al. 2002). La coexistence de ces deux types de symbioses sur la même plante et parfois sur le même apex racinaire, peut avoir un effet inhibiteur sur la croissance chez Quercuspar exemple (Egerton-Warburton & Allen 2001) ou un effet additif sur celle-ci chez Alnus et Uapaca (Fraga-Beddiar & LeTacon 1990; Ramanankierana et al. 2007). Les champignons responsables des ECMs sont des Basidiomycètes (Russules, Lactaires, Amanites, Bolets, Chanterelles, Sclerodermes etc…) et quelques Ascomycètes (Truffes, Cenococcum geophilum , etc.) (Hibbett et al. 2000). Certains de ces champignons ectomycorhiziens sont comestibles et à forte valeur ajoutée (Truffes, Matsutake) dont Phlebopus sudanicus récoltée dans les plantations littorales du sud du Sénégal (Ducousso et al. 2003). Très peu de champignons ectomycorhiziens sont cultivables in vitro ; certains sont spécifiques d’une plante hôte et d’autres ont un spectre d’hôte très large(Thoen & Bâ 1989).

Le Cycle de vie des champignons ectomycorhiziens

Le cycle de développement des champignons EMs se résume en deux phases principales : une phase végétative comprenant la formation et le développement du mycélium ou thalle à partir de la germination des spores, et une phase fructifère marquée par l’apparition de sporophores épigés ou hypogés, et la production de spores.

Caractérisation morphologique

Les champignons EMs peuvent se présenter sous trois entités distinctes (sporophore, ECM et mycélium) utilisées pour l’étude des communautés et des populations EMs. La description et l’identification des sporophores sur la base de caractères morphologiques et anatomiques sont largement effectuées chez les champignons qui produisent des fructifications épigées (ex : Amanita, Boletus, Pisolithus , Russula, Suillus , Scleroderma).
Cependant, une première contrainte s’impose pour les champignons qui produisent des fructifications hypogés telles que les truffes, les Rhizopogonet les Hydnellum , ainsi que pour ceux qui ne produisent aucune fructification comme le Cenococcum geophilum pourtant très répandu (Cairney et al. 1999). De plus, la fructification des champignons est un processus complexe qui est dépendant de plusieurs facteurs et dont le déterminisme varie selon les espèces (Gardes & Bruns 1996; Dahlberg et al. 1997; Gehring et al. 1998; Jonsson et al. 1999). Les variations climatiques (sécheresse) peuvent aussi diminuer la fructification. L’âge du peuplement forestier et les traitements sylvicoles comme la fertilisation (Egli & Ayer 1997) ou l’éclaircie affectent également la fructification.
L’inventaire des ECMs permet aussi d’accéder à la composition des communautés fongiques (Agerer 1995). Il est basé sur le morphotypage des ECMs qui consiste à décrire leurs caractères morphologiques, anatomiques et histologiques souvent peu stables. En effet, ces caractères peuvent changer en fonction de l’âge de la plante-hôte ou de l’environnement (Thoen & Ducousso 1989b; Diédhiou et al. 2004).
Il n’est souvent pas possible d’observer des connexions entre le mycélium à la base du pied des sporophores et celui des ECMs (Thoen & Bâ 1989; Rivière et al. 2007). De ce fait, pour identifier les ECMs, il faut les relier aux sporophores en utilisant des outils moléculaires et avoir ainsi une image exhaustive des communautés fongiques (Gehring et al. 1998; Taylor &Bruns 1999; Kõljalg et al. 2000).

La caractérisation moléculaire des CEMs

L’approche couramment utilisée dans les études de diversité des champignons ectomycorhiziens, consiste à amplifier par PCR une région de l’ADN ribosomique (ADNr) nucléaire à l’aide d’amorces nucléotidiques universelles ou spécifiques (White et al. 1990; Gardes & Bruns 1993). L’ADNr existe en plusieurs copies (Srivastava & Schlessinger 1991) 50 à 100 copies (Cassidy et al. 1984) et est donc déjà pré-amplifié au sein du génome.
L’ADNr nucléaire comprend des séquences très conservées codantes pour des ARN ribosomiques (ARNr) (5S, 18S, 28S et 5.8S) (fig 3), utilisables en phylogénie moléculaire (Begerow et al. 1997), séparés par des espaceurs transcrits (ITS, variables d’une espèce à l’autre mais très rarement au sein d’une même espèce) (Bruns et al. 1991) et des espaceurs non transcrits (IGS, peu conservés à l’échelle de l’espèce). L’espace transcrit ITS (ITS1 et ITS2) conjointement amplifié avec le gène 5.8S, est un bon marqueur spécifique, mais très rarement au sein de l’espèce bien qu’une forte variation de cette zone a été observée au sein de l’espèce Tricholoma scalpturatum (Gryta et al. 2006). L’espaceur ITS, d’environ 600 à 1000 pb, est amplifié par des amorces universelles (ITS1/ITS4), spécifiques aux champignons (ex : ITS1f/ITS4) ou spécifiques au Basidiomycota (ex : ITS1f/ITS4b) (White et al. 1990; Gardes & Bruns 1991) (Fig. 3). Après amplification, une digestion est pratiquée sur la région amplifiée à l’aide d’endonucléases de restriction (PCR-RFLP) pour permettre une séparation rapide et relativement fiable des CEMs. Une étape supplémentaire de séquençage et de comparaison de séquences avec des banques de référence (ex : Genbank, Unite) est généralement nécessaire afin d’identifier les champignons. Une simple comparaison avec des banques de données RFLP, réalisées préalablement sur des sporophores clairement identifiés peut également suffire (Agerer 2001; Gardes & Bruns 1996; Dahlberg et al. 1997). La plupart des études de systématique des champignons sont réalisées grâce à l’analyse de la région ITS qui sert de code-barres génétique des champignons en général. De plus, il existe sur cette région une base de données de plus d’une centaine de séquences référencées dans NCBI (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/blast/Blast.cgi) et UNITE (http://unite.ut.ee/). Actuellement, la plupart des études d’écologie et de taxonomie moléculaires sur les champignons ectomycorhiziens sont basées sur l’analyse des régions ITS (Tedersoo et al. 2007b; Sanon et al. 2009).
Il a été montré qu’il est également possible d’utiliser la grande sous-unité de l’ADNr mitochondrial (« mtLSU rRNA ») en particulier le fragment d’environ 450 pb amplifié par les amorces ML5/ML6 pour l’identification et la phylogénie d’espèces fongiques (Bruns et al. 1998; Stendell et al. 1999, Rivière et al. 2007). Cette région est polymorphe d’une espèce à l’autre, tout comme l’ADNr nucléaire. Cependant, l’ADNr mitochondrial semble être mieux conservé et est donc surtout utilisé pour faire de la reconstitution phylogénétique d’espèces fongiques plus éloignées taxonomiquement.
L’analyse de l’ADN total est également utilisée par des techniques comme l’AFLP (« Amplified Fragment Length Polymorphism ») qui consiste à digérer l’ADN avec 2 enzymes de restriction puis à fixer des adaptateurs aux extrémités des fragments digérés avant leur amplification par PCR. Cette technique permet la recherche de polymorphisme de longueur de fragment de restriction au niveau de l’ADN. La RAPD (« Random Amplified Polymorphism DNA ») consiste à utiliser un seul type d’amorce qui va se fixer sur l’ADN cible au hasard et générer des fragments variés qui peuvent être analysés. Plus récemment, des marqueurs moléculaires appelés ISSR (« Inter Simple Sequence Repeat ») ont été développés pour les études de variations génétiques. Les ISSR correspondent à des séquences très courtes de 3 à 4 nucléotides répétés dans le génome. Le principe consiste en une amplification intermicrosatellites à l’aide d’une amorce unique (Zietkiewicz et al. 1994). Ces marqueurs réputés très variables, permettent de discriminer finement les individus génétiques chez les champignons basidiomycètes ectomycorhiziens (Gherbi et al. 1999).

Les études génétiques sur les CEMs: nouvelles approches

Les premières études en génétique des populations ont été principalement destinées à la discrimination entre les genets et étaient basées sur l’incompatibilité somatique (SI). Elles consistaient à déterminer les barrières reproductrices entre espèces par des essais d’accouplement. Cependant, cette approche présenterait des limites dans la faisabilité des tests pour beaucoup de taxon fongiques ectomcorhiziens. En effet, les spores de champignons EMs germent difficilement en conditions de laboratoire et même si elles parviennent à germer, elles ne produisent souvent pas de monocaryon viable.
Les récentes études en génétique des populations sont surtout basées sur des techniques et méthodes de biologie moléculaire. La plupart de ces techniques sont aussi utilisées dans les études de diversité des communautés de champignons EMs décrites précédemment. Il s’agit de marqueurs dominants tels que les RAPD (Gryta et al. 2000, Jany et al. 2002) et les AFLP (Muller et al. 2004). Une variante de RAPD appelée répétitions de séquences simples inter- (ISSR), à l’aide de di-ou tri-nucléotides répétées amorces de PCR, a également été très populaire dans les études génétiques de populations (Carriconde et al. 2008; Grelet et al. 2010). L’inconvénient majeur des marqueurs dominants, c’est qu’ils ne permettent pas de distinguer les loci des hétérozygotes de ceux des homozygotes et par conséquent, rendent difficile le calcul statistique de fréquence des allèles en assumant pas l’équilibre d’Hardy-Weinberg. Ils ne permettent pas de déterminer les variations génétiques basées sur les calculs de distance génétique à l’intérieur d’une population ou d’une communauté.
Beaucoup d’auteurs ont utilisé des marqueurs moléculaires co-dominants telle que la technique de PCR/RFLP principalement de la région ITS de l’ADNr nucléaire (Kretzer et al. 2005; Lian et al. 2006; Xu et al. 2008) ou de la région IGS (Carriconde et al. 2008; Roy et al. 2008) dans les études de génétique des populations. Le polymorphisme très important de cetterégion intergénique (ITS) fait que ce marqueur est potentiellement co-dominant.
Des études plus récentes ont utilisé des marqueurs co-dominants à locus unique tels que les microsatellites et les SNP (Single Nucleotide Polymorphism) qui permettent de distinguer les locus des hétérozygotes de ceux des homozygotes. Les microsatellites sont des séquences d’ADN constituées de courts motifs répétés de 1 à 6 nucléotides en tandem, dispersés dans le génome nucléaire des eucaryotes. Ils présentent un grand polymorphisme de longueur dû à une variation très importante du nombre de répétition des motifs en tandem (Nakamura et al. 1987). Ils sont multialléliques, et facilement sécables. Les SNP encore appelés polymorphisme d’un seul nucléotide correspondent à la variation d’une seule paire de base du génome entre individus d’une même espèce.
Le principal inconvénient des microsatellites et SNP est le temps et les coûts associés au développement et à la collecte des données. De plus, la conception des microsatellites pour les champignons EMs présente quelques difficultés liées aux contaminations de l’ADN des sporophores ou aux échecs possibles dans les différentes étapes de la création d’une banqueenrichie en motifs microsatellitaires (Dutech et al. 2007).

L’établissement de la symbiose ectomycorhizienne

L’établissement de la symbiose EM entraîne des modifications profondes de la morphologie des racines et de la composition des exsudats racinaires. Ces changements matérialisent un cloisonnement de la rhizosphère en deux compartiments microbiens caractérisés par une structure et une diversité fonctionnelle qui leurs est propre : Le compartiment mycorhizosphèrique soumis à l’activité des mycorhizes sensu stricto et le compartiment hyphosphèrique soumis à l’activité du mycélium extramatriciel issu de la mycorhize (Linderman 1988). Des résultats ont montré que l’amélioration des capacités de la plante hôte à accéder aux ressources minérales et organiques du sol peut résulter de l’action conjuguée des champignons EMs et de leur microflore bactérienne associée, formant ainsi un complexe trophique associant la plante hôte, les symbiotes fongiques et la microflore hyphosphérique et mycorhizosphérique (Assibetse et al. 2005). Certaines bactéries de ces deux compartiments microbiens ont été nommées bactéries auxiliaires de la mycorhization (BAM) du fait qu’elles améliorent significativement l’établissement de la symbiose EM. Ce concept a surtout été développé sur le couple symbiotique Douglas-Laccaria bicolor (FreyKlett et al. 2007). L’effet des BAMs sur l’établissement de la symbiose mycorhizienne peut se manifester lors de la phase pré-symbiotique en améliorant la germination des spores et en fournissant aux champignons des composés carbonés simples pour faciliter leurdéveloppement saprophytique dans le sol.
Il est bien connu que la structure de base des ECMs est identique bien qu’il existe différents morphotypes. Cela suggère qu’il existe un programme de différenciation commun aux ECMs. Selon Perret et al. (2000), si l’on se référait aux relations entre bactéries fixatrices d’azote et légumineuses, il s’établirait des signaux de reconnaissance assurant un dialogue moléculaire entre les deux partenaires de la symbiose EM. Cependant, la nature des molécules de signalisation et les bases moléculaires de la perception et de la traduction du signal dans les mycorhizes sont peu connues. L’identification des processus qui régulent les flux d’informations entre les champignons EMs et les racines de leurs plantes hôtes est encore un domaine de recherche très actif (Felten et al. 2010). D’après Lagrange et al. (2001), la plante hôte peut secréter dans la rhizosphère des métabolites tels que le flavonol, la rutine, la cytokinine et la zéatine, qui peuvent remarquablement modifier la morphologie des hyphes.
En conditions contrôlées, lorsqu’elle est présente dans le milieu de croissance à des concentrations très faibles, la rutine stimule la croissance de Pisolithus , tandis que la cytokinine et la zéatine modifient l’angle que forment les ramifications du mycélium avecl’hyphe principal. Ces molécules rhizosphériques sont donc capables d’induire des changements morphologiques similaires à ceux observés au cours du développement de la symbiose ectomycorhizienne réelle (Martin et al. 2001). Les exsudats racinaires d’Eucalyptus déclenchent une accumulation accrue de molécules d’hypaphorine au niveau des hyphes de Pisolithus tinctorius (Béguiristain & Lapeyrie 1997). Cet alcaloïde fongique stimule la formation des racines latérales courtes, inhibe l’élongation des poils absorbants et entraîne un arrondissement de l’apex de la racine. Les pisolithes synthétisent également de l’acide indole-3 acétique (AIA) qui restaure la croissance apicale de leurs plantes hôtes. Ceci suggère des effets antagonistes de hypaphorine et de l’AIA sur les modifications morphologiques observées au niveau des racines (Ditengou et al. 2000). Récemment, le séquençage du génome de Laccaria bicolor a révélé la présence d’un gène codant pour une petite protéine effectrice (MiSSP7) indispensable à la mise en place de l’ECM (Plett et al. 2011). En effet, la transformation de L. bicolor par une réduction de l’expression de la MiSSP7 empêche l’établissement de la symbiose entre ce champignon et les racines des peupliers (Plett et al. 2011). Les stimulis et les régulateurs qui déterminent les événements morphogénétiques de l’établissement de la symbiose sont encore peu connus.

Le fonctionnement de la symbiose ectomycorhizienne

Le rôle des CEMs dans la nutrition minérale et organique des plantes

L’un des principaux rôles des hyphes des CEMs est le prélèvement et le transport vers la plante hôte d’éléments nutritifs très peu mobiles dans le sol, après que la plante ait épuisé ses réserves. La dépendance des plantes vis-à-vis de la mycorhization est inversement corrélée au contenu en phosphore des cotylédons (Zangaro et al. 2003). Elle est d’autant plus importante que les sols sont pauvres en certains nutriments majeurs (ex. : N, P) notamment dans les régions tropicales. Le phosphore est l’un des éléments nutritifs principaux apporté par le champignon à la plante (Duponnois et al. 2005; Lambers et al. 2008). En effet, selon le pH du sol, le phosphore se retrouve en grande partie immobilisé par le fer et l’aluminium au pH acide ou par le calcium au pH alcalin. Dans ces conditions, il est peu soluble et donc difficilement utilisable par les plantes. Grâce à leurs activités phosphatasiques acides, les champignons EMs hydrolysent les phosphates peu solubles (ex. : phosphates d’inositol, polyphosphates inorganiques) peu accessibles directement aux plantes dépourvues d’ECMs (Colpaert & Van Laere 1996). Ils peuvent également solubiliser les phosphates organiques peu solubles par l’excrétion de protons et d’acides organiques (Lapeyrie et al. 1991).
L’exploration d’un plus grand volume de sol facilitant l’accès aux minéraux par les ECMs permet ainsi une meilleure nutrition phosphatée des plantes (Landeweert et al. 2001).
L’absorption du P soluble par les hyphes se fait contre son gradient de concentration par transport actif secondaire. Il s’accumule sous forme de polyphosphates dans la vacuole des hyphes du manteau fongique dont la concentration en cet élément peut doubler en 24 h (Smith& Read 2008).
Dans les écosystèmes forestiers, l’azote assimilable par la plante est souvent limité tout comme le phosphore, du fait généralement de la lenteur des processus de minéralisation (Read & Perez-Moreno 2003). Dans ce contexte, les ECMs permettent à la plante d’améliorer l’absorption et l’assimilation de l’azote inorganique sous forme d’ammonium et de nitrate (Plassard et al. 2002). Grâce à leurs activités protéasiques, les champignons EMs peuvent rendre accessibles certaines formes d’azote organique (ex. : azote organique de l’humus, protéines) (Boukcim & Plassard 2003). En effet, plusieurs espèces de champignons EMs sont décrites sur la base de variations fonctionnelles dans l’utilisation des sources d’azote et de phosphore. La pertinence dans le fonctionnement de plusieurs enzymes différe selon l’espèce EM. En effet, huit principales enzymes extracellulaires sont impliquées dans la dégradation des celluloses, des hémicelluloses, de la chitine et de certaines protéines, dans l’oxydation des phénols et la mobilisation du phosphore. Le profilage de ces enzymes s’est avéré être un outil utile pour caractériser les espèces fongiques selon leurs capacités d’acquisition des nutrimentsdans des conditions environnementales données (Courty et al. 2005; Pritsch et al. 2011).
Les CEMs jouent également un rôle important dans l’absorption d’autres éléments nutritifs du sol (ex. : potassium, calcium, magnésium) et de certains oligoéléments (ex. : cuivre, zinc) (Blaudez et al. 2000). Ils peuvent avoir un effet protecteur des plantes en accumulant des métaux lourds et participer ainsi aux processus de dépollution des sols.
Par ailleurs, il a été également démontré que les associations EMs pouvaient jouer un rôle majeur dans la décomposition, la minéralisation des matières organiques végétales et la mobilisation des nutriments au bénéfice de la plante hôte (Gobat et al. 2003; Lambers et al. 2008). He & Nara (2007) ont même suggéré que les mycorhizes pourraient jouer un rôle fondamental dans la réduction de la malnutrition humaine du fait que de nombreux nutriments se retrouvaient dans la biomasse des plantes mycorhizées (biofortification) et pourraient alimenter l’organisme humain.
Une nette amélioration de la structure du sol a souvent été notée en présence des mycorhizes. Le vaste réseau d’hyphes extramatriciel et la libération dans le sol par les hyphes mycorhiziens d’une glycoprotéine, la glomaline, entraîneraient une meilleure stabilisation du sol par la formation d’agrégats beaucoup plus stables (Lovelock et al. 2004; Rillig & Mummey 2006).

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Table des matières

1. Introduction générale 
1.1. Problématique de la thèse
1.2. Objectifs et présentation de la thèse
2. Chapitre I : Revue bibliographique 
2.1. Généralités sur la symbiose mycorhizienne
2.2. La symbiose ectomycorhizienne
2.2.1 Le Cycle de vie des champignons ectomycorhiziens
2.2.2. Diversité morphologique et génétique des champignons ectomycorhiziens et des ectomycorhizes
2.2.2.1 Caractérisation morphologique
2.2.2.2 La caractérisation moléculaire des CEMs ..
2.3. La spécificité d’hôte des CEMs
2.4. Les populations de champignons ectomycorhiziens
2.4.1. La structure et la dynamique des CEMs
2.4.2. Les études génétiques sur les CEMs: nouvelles approches
2.5. L’établissement de la symbiose ectomycorhizienne
2.6. Le fonctionnement de la symbiose ectomycorhizienne
2.6.1. Le rôle des CEMs dans la nutrition minérale et organique des plantes
2.6.2. Le rôle des CEMs dans l’alimentation en eau des plantes
2.6.3. Le rôle des ECMs dans la protection phytosanitaire
2.6.4. Les Transferts de nutriments viales réseaux mycorhiziens dans les écosystémes forestiers
2.6.5. La tolérance au stress hydrique des plantes et de leurs symbiotes fongiques ectomycorhiziens
2.6.6 La Tolérance au stress salin des plantes et de leurs symbiotes fongiques ectomycorhiziens
2.6.7 L’effet de la composition de la communauté fongique sur la performance de la plante hôte
2.3. Les symbioses ectomycorhiziennes en milieu tropical
2.4. Introduction des arbres exotiques à ectomycorhizes dans les régions tropicales
2.4.1. Le processus d’invasion
2.4.2. Effets écologiques de l’introduction d’espèces d’arbres et de leurs associés fongiques
2.5. Notre modèle d’étude : Coccoloba uvifera(L.) L
2.5.1. Botanique
2.5.2. Reproduction
2.5.3. Quelques usages deC. uvifera
2.5.4. Statut ectomycorhizien
3. Chapitre II : Les communautés fongiques ectomycorhiziennes des arbres adultes et jeunes plants de coccoloba uviferadans les forêts cotiéres néo-tropicales de la Guadeloupe (Petites Antilles)
3.1. Introduction
3.2. Matériel et méthodes
3.2.1. Sites d’échantillonnages
3.2.2. Analyse physico-chimique des sols
3.2.3. Morphotypage des EMs et échantillonnage des sclérotes
3.2.4. Echantillonnage et identification des sporophores
3.2.5. Extraction d’ADN et amplification de la région ITS
3.2.6. Séquençage de l’ADN et identification des EMs fongiques
3.2.7. Analyse statistique des données de séquences
3.3. Résultats
3.3.1. Analyse physico-chimique des sols
3.3.2. Identification des sporophores et des sclérotes
3.3.3. Caractérisation moléculaire des champignons au niveau des racines
3.3.4. Distribution des champignons EMs suivant les sites d’échantillonnages
3.3.5. Distribution des champignons EMs suivant l’âge (arbre adultes et plantules)
3.4. Discussion
3.6. Conclusions
4. Chapitre III : Co-introduction de coccoloba uviferaavec son symbiote fongique ectomycorhizien Scleroderma bermudense au Sénégal
4.1. Introduction
4.2. Matériel et méthodes
4.2.1 Description des sites d’échantillonnage
4.2.2. Mise en évidence des propagules fongiques dans des sols rhizosphériques de C. uviferaen Guadeloupe
4.2.3 Mise en évidence des spores fongiques sur les téguments de graines de C. uvifera collectées en Guadeloupe
4.2.4 Caractérisation des champignons ectomycorhiziens des plantations de C. uvifera, E. camaldulensis et C. equisetifoliaau Sénégal
4.2.4.1 Récolte de sporophores et d’ECMs in situ
4.2.4.2 Piégeage d’ECMs de C. uvifera, d’E. camaldulensis et de C. equisetifoliaen serre
4.2.4.3. Piégeage d’ECMs de C. uvifera, d’E. camaldulensis et de C. equisetifolia in situ
4.2.5 Caractérisation moléculaire des MTs et sporophores
4.2.6 Analyse statistique
4.3. Résultats
4.3.1. Propagules fongiques dans le sol rhizosphérique de C. uviferaen Guadeloupe
4.3.2. Spores de S. bermudense sur les téguments de graines de C. uvifera collectées en Guadeloupe
4.3.3. Les champignons ectomycorhiziens des plantations de C. uvifera, E. camaldulensis et C. equisetifoliaau Sénégal
4.3.3.1. Identification morphologique des sporophores et ectomycorhizes in situ
4.3.3.2. Piégeage d’ECMs de C. uvifera, d’E. camaldulensis et de C. equisetifoliaen serre
4.3.3.3. Piégeage d’ECMs de C. uvifera, d’E. camaldulensis et de C. equisetifolia in situ
4.3.4. Analyse moléculaire des sporophores et des ectomycorhizes
4.4. Discussion
4.5. Conclusion
5. Chapitre IV : Diversité et structure génétiques des populations de Scleroderma bermudense associées au Coccoloba uviferaen zones d’origine et en zones d’introduction
5.1. Introduction
5.2. Matériel et méthodes
5.2.1 Echantillonnage de sporophores et d’EMs
5.2.2. Extraction d’ADN, amplification et séquençage de la région ITS
5.2.3. Production d’une banque de microsatellites à haut débit
5.2.4. Amplification PCR de l’ADN par les marqueurs microsatellites
5.2.5 Génotypage
5.2.6. Diversité Génétique
5.2.7. Assignation des individus à des populations génétiques
5.2.8. Différentiation génétique des populations
5.3. Résultats
5.3.1. Identification moléculaire de populations de S. bermudenseà partir des sporophores, ECMs et spores incrustées dans les téguments de graines de C. uvifera
5.3.2. Diversité génétique
5.3.3. Assignation des individus à des populations génétiques
5.3.4. Différentiation génétique des populations
5. 4. Discussion
5.5. Conclusion
6. Discussion générale
6.1. Des communautés fongiques ectomycorhiziennes de C. uvifera pauvres en espèces en Guadeloupe
6.2. Des communautés fongiques EMs similaires sur les arbres adultes et sur les jeunes plants de C. uvifera
6.3. Co-introduction probable de S. bermudense viases spores incrustées sur les téguments de graines de C. uvifera
6.4. Une préférence d’hôte du S. bermudensepar rapport à C. uvifera
6.5. Une diversité génétique réduite au sein des populations de S. bermudense des zones d’introduction comparée à celles des zones d’origine
7. Conclusion générale et perspectives
8. Annexes
8.1. Communications
8.2 Article 1
8.3 Article 2
8.4. Article 3
8.5. Article 4
9. Bibliographie

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