Généralités sur la propulsion spatiale
Poussée et consommation des propulseurs
Dans un environnement spatial, l‟absence de matière pouvant servir d‟appui à un véhicule représente un problème pour se déplacer et la gravité constitue souvent la principale force. Cependant, même en l‟absence de matière, l‟espace est homogène ce qui implique, par le théorème de Noether, que l‟impulsion est conservée.
En effet, il existe actuellement trois différentes familles de technologies de propulseurs de satellites qui offrent chacune des avantages et des inconvénients :
♦ La propulsion dite « gaz froids » qui utilise des gaz comprimés qui sont simplement relâchés pour produire la poussée.
♦ La propulsion dite « chimique », la plus répandue, qui utilise une réaction chimique (en général une oxydation) pour augmenter la pression et la température d‟un (ou de plusieurs) ergol(s) dans le but d‟accélérer les gaz à l‟échappement.
♦ La propulsion électrique créé un plasma avec l‟ergol (en général un gaz noble) et l‟accélère ensuite à l‟aide de champs électromagnétiques externes.
Contrairement aux deux premières technologies pour lesquelles l‟énergie générant la poussée est stockée sous forme d‟énergie interne, les propulseurs électriques, comme leur nom l‟indique, utilisent une source d‟énergie externe de type électrique pour générer la poussée. Cela a pour principal avantage d‟augmenter le contrôle sur la poussée et les performances du propulseur, notamment la vitesse d‟éjection. Cependant, cela engendre également l‟apparition de nouvelles difficultés techniques, comme par exemple la question du couplage de l‟énergie électrique au plasma, la capacité à produire et accélérer efficacement les ions du plasma pour générer de la poussée. Dans le cas des propulseurs gaz froids ou des propulseurs chimiques, les principaux défis se trouvent dans l‟accélération des gaz dans les tuyères physiques et dans l‟optimisation de l‟efficacité de la combustion (pour les propulseurs chimique).
Contexte économique et intérêt de la propulsion électrique
Avec le lancement de Spoutnik-1 en octobre 1957, le premier objet artificiel est mis en orbite terrestre, inaugurant l‟histoire de la conquête spatiale. Historiquement, l‟exploration et l‟utilisation de l‟espace était l‟apanage des États les plus puissants, pouvant financer des programmes spatiaux coûteux. Les motivations de ces dépenses, au-delà des avancées scientifiques engendrées, étaient principalement de natures politiques, dans un contexte de compétition technologique entre les deux nations les plus avancées dans le domaine, les États-Unis et l‟URSS. De ce fait, l‟histoire de la conquête spatiale est étroitement liée à la course à l‟armement pendant la Guerre Froide dans les années 1960 et 1970. De nos jours, les motivations au niveau des États sont d‟ordre scientifique, militaire mais surtout économique. A savoir que, dans les années 2000, le marché des satellites commerciaux était d‟environ 50 Mds$/an. D‟un autre côté, les projets scientifiques actuels les plus ambitieux sont très souvent issus d‟une coopération internationale comme c‟est le cas, par exemple, pour la station spatiale internationale. De manière générale, l‟investissement actuel des États dans le domaine spatial est beaucoup moins élevé que pendant les années 1960-1970, d‟où des programmes d‟exploration spatiale moins ambitieux.
Cependant, avec l‟arrivée récente de nouveaux acteurs du secteur privé, l‟exploitation de l‟espace commence à ne plus être le monopole des États. Cet élargissement du nombre d‟acteurs sur le marché provoque une diversification des moyens technologiques, tant en terme d‟engins spatiaux qu‟en terme de moyens de lancement, permettant de surcroît une réduction des coûts.
En effet, l‟arrivée de la miniaturisation des composants électroniques proposés à des prix de plus en plus compétitifs a conduit de plus en plus de petites structures, comme des centres spatiaux étudiants ou des start-ups, à concevoir et fabriquer leurs propres satellites. Il s‟agit souvent de satellites plus petits, technologiquement moins complexes que ceux développés par les agences spatiales nationales et qui se situent dans la gamme des Smallsat et Cubesat. Certaines entreprises, encore plus ambitieuses, prévoient même l‟envoi de constellations de satellites ou d‟engins d‟exploration spatial habités. Par exemple, l‟entreprise « One Web » planifie d‟envoyer en orbite basse une constellation de plus de 600 satellites de télécommunication à l‟horizon 2022 avec l‟objectif de fournir une couverture internet partout dans le monde. Il est également possible de citer les entreprises « Planetary Ressources » ou « Deep Space Industries » qui ont pour ambition d‟exploiter les ressources (métaux précieux) de certains astéroïdes. On peut noter également que l‟entreprise « Bigelow Aerospace » développe des habitats spatiaux pour proposer des « hôtels » en orbite dans lesquels des touristes « de l‟espace » pourraientt séjourner.
Néanmoins, il existe de nombreux freins à l‟exploration et à l‟exploitation de l‟espace dont les risques forts à l‟investissement et les coûts très élevés. En effet, le taux d‟échec d‟une mission spatiale est encore relativement élevé et le retour sur investissement n‟est pas toujours garanti. Mais le principal frein reste toujours le prix de lancement de charges dans l‟espace. À savoir que, dans les années 2010, les coûts de lancement en orbite sont de l‟ordre de 10 à 20 k€/kg.
C‟est pourquoi, les acteurs du secteur, quelles que soit leurs tailles ou leurs implantations, cherchent à réduire ou à optimiser les coûts de lancement sans sacrifier pour autant la qualité et la fiabilité exigée dans le domaine. De ce fait, une stratégie adoptée par les grandes entreprises est d‟augmenter la proportion de la charge utile embarquée sans devoir augmenter le budget alloué. Pour réduire les coûts de lancement des engins spatiaux, il existe plusieurs facteurs en jeu et pouvant amener à une réduction des coûts. Les deux principaux sont : la libéralisation du secteur avec l‟émergence de nouveaux acteurs privés ayant pour effet de stimuler la compétitivité du marché du lancement, l‟allègement de la masse embarquée notamment par l‟utilisation de nouvelles technologies de propulsion permettant de réduire la masse de carburant.
Il est, en effet, attendu que les prix de mise en orbite diminuent sous l‟effet de l‟entrée du secteur privé sur le marché du lancement. Ce phénomène a notamment été initié par le programme COTS (Commercial Orbital Transportation Services) de la NASA annoncé en 2006 et qui a aidé au financement d‟entreprises du secteur privé en établissant des contrats de sous-traitance du ravitaillement de la station spatiale (ISS). Des entreprises comme SpaceX et son PDG Elon Musk, qui ambitionne notamment d‟envoyer des Hommes sur la planète Mars avant 2030 [4], ont pu démontrer qu‟il est possible de réduire significativement les coûts de lancement, notamment en réutilisant le premier étage des lanceurs Falcon 9 (nom des fusées de SpaceX). En réalité, le simple fait que les entreprises privées puissent accéder au marché des lancements peut déjà réduire les coûts du fait de la compétitivité. Il y a d‟ailleurs de plus en plus d‟acteurs privés sur le marché (ce qui peut notamment être observé par le nombre de participants du Ansari X-Prize) comme par exemple l‟entreprise d‟origine néo-zélandaise Rocket Lab qui vise le lancement à relativement bas coût de smallsat (satellite < 200 kg) et dont le premier lancement commercial est prévue en novembre 2018.
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Table des matières
Chapitre I Introduction
I – 1. Généralités sur la propulsion spatiale
I – 1.1. Poussée et consommation des propulseurs
I – 1.2. Contexte économique et intérêt de la propulsion électrique
I – 1.3. Les technologies de propulseurs électriques
I – 1.4. Propulseurs sans cathode à tuyère magnétique
I – 2. Propulseur ECR à plasma
I – 2.1. Principe de fonctionnement
I – 2.2. Panorama mondial de la technologie
I – 2.3. Le propulseur ECR à l‟ONERA
I – 3. Démarche de la thèse
Chapitre II Eléments théoriques et bibliographiques
II – 1. Physique des plasmas
II – 1.1. Généralités sur les plasmas
II – 1.2. Modélisation des interactions à courte distance entre particules
II – 1.3. Spécificités des plasmas froids de laboratoires
II – 1.4. Ondes dans les plasmas
II – 2. Confinement et accélération d‟un plasma dans un champ magnétique inhomogène
II – 2.1. Champ magnétique inhomogène et confinement
II – 2.2. Tuyère magnétique dans le contexte de la propulsion électrique
II – 3. Sources plasmas à Résonance Cyclotron Electronique
II – 3.1. Notions de coupures et de résonances d‟une onde
II – 3.2. Résonance sur une particule individuelle
II – 3.3. Applications et sources ECR dans le monde
II – 4. Performances des propulseurs électriques
II – 4.1. Définition des indicateurs de performances
II – 4.2. Vue d‟ensemble des performances actuelles des propulseurs électriques
Chapitre III Matériel et méthodes
III – 1. Installations et chambres à vide
III – 2. Génération, transmission et mesure de la puissance micro-onde
III – 2.1. Génération des micro-ondes
III – 2.2. Transmission des micro-ondes
III – 2.3. Mesure de la puissance
III – 3. Diagnostic du propulseur et du jet de plasma
III – 3.1. Estimation de la poussée
III – 3.2. Mesure de la densité de courant ionique
III – 3.3. Mesure de l‟énergie moyenne du faisceau d‟ion
III – 3.4. Incertitude de la mesure
III – 3.5. Potentiel propulseur
III – 4. Montage, acquisition et conditionnement
III – 5. Code de simulation PIC
III – 5.1. Benchmark du code
III – 5.2. Modélisation du propulseur ECR : géométrie et approximations
III – 5.3. Entrées et sorties
Chapitre IV Prototypes du propulseur ECR
IV – 1. Etude du cas de référence : Prototype à solénoïde
IV – 1.1. Description du prototype
IV – 1.2. Etude du champ magnétique du prototype à solénoïde
IV – 1.3. Principaux résultats obtenus avec sonde de Faraday
IV – 2. Développement d‟un prototype de propulseur à aimants permanents : PM-V1
IV – 2.1. Objectifs liés au développement d‟un prototype à aimants permanents
IV – 2.2. Conception et réalisation du modèle mécanique de PM-V1
IV – 3. Développement d‟un prototype plus compact et possédant une topologie magnétique en double miroir magnétique : PM-V2
IV – 3.1. Topologie magnétique de PM-V2
IV – 3.2. Conception et réalisation de la mécanique du prototype PM-V2
IV – 4. Développement d‟un prototype à aimant permanent permettant de tester les effets de l‟injection de gaz : PM-V3
Chapitre V Conclusion
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