Généralités sur la maladie d’Alzheimer

La maladie d’Alzheimer est une pathologie neurodégénérative progressive liée à l’âge qui détériore premièrement les fonctions liées aux mémoires de travail et épisodique, avant de s’étendre à l’ensemble des procédures mémorielles dans les stades plus avancés. Les symptômes sont d’abord caractérisés par des confusions quotidiennes, des difficultés à planifier ainsi que des troubles du langage, de la perception du temps et des lieux. Le comportement et le caractère de la personne atteinte sont ensuite altérés, avec une augmentation de l’agressivité, de l’anxiété, ainsi qu’une propension à l’isolement. Dans les stades terminaux de la maladie, la personne perd totalement son autonomie et présente des difficultés sévères d’expression et un comportement apathique prononcé et doit être placée sous surveillance médicale permanente. Bien que rarement mortelle en elle-même, cette maladie rend le traitement d’autres pathologies difficile et réduit significativement l’espérance de vie des personnes touchées. Pour le moment, il n’existe aucun traitement efficace pour cette maladie.

Généralités sur la maladie d’Alzheimer

Épidémiologie et diagnostic

La maladie d’Alzheimer porte le nom de son principal découvreur au cours des années 1900, le neuropathologiste et psychiatre Aloïs Alzheimer. Depuis sa mise en évidence, le nombre de cas de maladie d’Alzheimer en France n’a cessé d’augmenter, atteignant le chiffre de 900,000 cas en 2015, avec 225,000 nouveau cas diagnostiqués chaque année. Au niveau mondial, en 2015, 46,7 millions de personnes sont atteintes d’une démence, les prédictions annonçant un doublement de ce chiffre tous les 20 ans, ce qui porterait le nombre de cas de démence dans le monde à 131 millions en 2050 (Alzheimer World Report 2015), 60 à 70% de ces démences sont de type Alzheimer. La maladie d’Alzheimer étant une maladie progressive et incapacitante pouvant dégénérer sur une décennie ou plus, les coûts humains et médicaux de la pathologie sont parmi les plus élevés (Rapport Alzheimer’s Association 2016). L’absence de traitements définitifs ainsi que l’augmentation toujours plus grande de la prévalence de la maladie appellent à un devoir d’implication fort de la recherche dans ce domaine.

Le diagnostic de la maladie d’Alzheimer est longtemps resté tardif, après une manifestation des principaux symptômes et basé sur des critères d’exclusion. Bien que toujours complexes, les méthodes de diagnostic ont progressé et permettent aujourd’hui un dépistage plus précoce, notamment grâce à des tests neuropsychologiques plus spécifiques et des avancées concernant les différentes techniques d’imagerie médicale. Le diagnostic formel de la pathologie est cependant toujours post-mortem, la recherche de nouveaux marqueurs biologiques de la maladie reste donc cruciale.

Les marqueurs histopathologiques

Les analyses post-mortem de cerveaux provenant de patients atteints de la maladie d’Alzheimer ont révélé différentes lésions qui sont devenues caractéristiques de la pathologie. À l’échelle macroscopique, une atrophie cérébrale plus rapide peut être observée si on compare des cerveaux de patients atteints de maladie d’Alzheimer à différents âges relativement à des cerveaux contrôles (Fotenos A. F. et al., 2005). Cependant, l’atrophie cérébrale n’est pas unique à la pathologie et peut se produire dans d’autres maladies neurodégénératives. Ce critère de diagnostic n’est pas abandonné puisque les techniques d’imagerie récentes montrent que certaines altérations du volume cérébral sont beaucoup plus spécifiques à la maladie d’Alzheimer, notamment au niveau de l’hippocampe, du cortex enthorinal et du lobe temporal médian (Adlar P. A. et al., 2014).

D’autres lésions, considérées comme canoniques de la pathologie, sont révélées par des examens plus poussés. Elles peuvent être extra-cellulaires : Les plaques bêta-amyloïdes (appelées aussi plaques séniles), ou intracellulaires : les dégénérescences neurofibrillaires. Enfin, on observe également des déficits synaptiques plus importants chez les personnes atteintes de maladie d’Alzheimer (Terry R. D. et al., 1991). Il est essentiel de souligner que ces lésions peuvent être présentes chez des personnes qui ne montrent pas les altérations cognitives associées à la maladie d’Alzheimer, notamment dans la population âgée de plus de 85 ans (Arriagada P. V. et al., 1992). C’est donc la mise en évidence de ces lésions par différentes techniques combinées à des examens psychologiques qui permettent de diagnostiquer la pathologie.

Les déficits synaptiques 

Le phénotype neurodégénératif des cerveaux de patients atteints de maladie d’Alzheimer est caractérisé par une diminution importante du nombre de terminaisons synaptiques entre les neurones, notamment dans la région du cortex frontal, avec une réduction de 40 à 50% de la quantité de boutons pré-synaptiques observés par immuno-marquage ou par microscopie électronique quantitative (Scheff S. W. et al., 2001 ; Terry R. D. et al., 1991). Ces diminutions sont également accompagnées d’un remodelage pathologique du réseau synaptique, traduit principalement par une augmentation du nombre de neurites dystrophiques. Les déficits cognitifs associés à la maladie d’Alzheimer sont fortement corrélés à ces perturbations du réseau synaptique.

Les dégénérescences neurofibrillaires 

Cette lésion est considérée comme la plus précoce de la maladie d’Alzheimer et fut l’une des premières à y être associée. Sa présence seule n’est cependant pas spécifique à cette pathologie, les dégénérescences neurofibrillaires (NFT) pouvant êtres observées dans d’autres maladies plus généralement appelées taupathies (Wisniewski K. et al., 1979 ; Iwatsubo T. et al., 1994). C’est la distribution particulière des NFT dans le cerveau des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, notamment dans le cortex entorhinal et l’hippocampe, qui rend cette lésion caractéristique (Haroutunian V. et al., 2007). Les NFT sont provoquées par l’hyperphosphorylation de la protéine tau entraînant son agrégation (Goedert M., 1996). Normalement associée aux microtubules des cellules nerveuses, tau contribue à leur polymérisation et à la formation des dendrites et axones neuronaux ainsi qu’au trafic cellulaire. Lorsqu’elle n’est plus liée aux microtubules, la protéine tau libre et hyperphosphorylée va former de longs filaments appelés PHF (Paired Helical Filament). Ces filaments intracellulaires, combinés à la perte de fonction de la protéine tau sont corrélés à une augmentation de la mort neuronale (Gendron T. F. et al., 2009).

Les plaques séniles 

Les plaques séniles sont majoritairement formées par l’accumulation et l’agrégation du peptide bêta-amyloïde (Aβ) en feuillets bêta insolubles (Masters C. L. et al., 1985). Ces feuillets constituent le cœur de la plaque sénile et réagissent à la coloration au rouge Congo devenue caractéristique de leur identification en histopathologie. Classiquement, une couronne d’axones ou dendrites (neurites) malformés ou immatures viennent entourer les plaques, ces dysfonctions de la structure neuronale pouvant contribuer de façon importante aux symptômes de la pathologie (Marin M. A. et al., 2016).

Le peptide Aβ lui-même est le produit du clivage séquentiel de son précurseur, la protéine APP (Amyloid precursor protein), par deux enzymes, les bêta- et gamma- sécrétases (Zhang H. et al., 2012). Le fragment final obtenu peut varier de façon importante en taille, de par la nature des différents types de clivages enzymatiques impliqués (Voir Chapitre II). Les formes les plus longues, en particulier le peptide Aβ 1-42, sont sensibles à l’agrégation et sont supposées entraîner les autres peptides amyloïdes monomériques solubles à former des oligomères, puis des fibrilles, et enfin, les plaques séniles (Seeman P. et al., 2011). L’augmentation de la formation des plaques extra-cellulaires peut déclencher une réaction inflammatoire localisée, caractérisée par la présence de cellules microgliales activées et d’astrocytes aux abords des plaques séniles (Dickson D. W. et al., 1988). Ce profil cellulaire pro inflammatoire peut contribuer aux neurodégénérescences observées dans le cerveau des patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Outre ces dépôts inter neuronaux, d’autres amas insolubles de peptide amyloïde peuvent s’accumuler dans les parois des vaisseaux sanguins périphériques du cortex, entraînant alors une rupture des artérioles ainsi que des microangiopathies (ou Angiopathies  Congophiles), qui peuvent s’avérer mortelles dans les stades avancés de la maladie (Pearl D. P., 2010).

L’hypothèse amyloïde 

Malgré l’accumulation de connaissances toujours plus importante à propos de la maladie d’Alzheimer, la recherche d’une étiologie claire est toujours en cours. L’une des premières théories à avoir été construite fut l’hypothèse de la cascade amyloïde, par Hardy et Higgins au début des années 1990 (Hardy J. A., 1992). Ce modèle considère le peptide Aβ, son accumulation et son agrégation en plaques séniles comme déclencheur de la pathologie, entrainant ensuite l’ensemble des perturbations observées (NFT, déficits synaptiques, inflammation, perturbation de l’homéostasie calcique, stress oxydatif et métabolique). Les bases de l’hypothèse de la cascade amyloïde reposent sur des arguments génétiques forts. En effet, les cas familiaux très agressifs et précoces de maladie d’Alzheimer impliquent des mutations sur des gènes associées à la production de peptide Aβ, comme l’APP ou les présénilines, protéines porteuses du site catalytique responsable du clivage amyloïdogènique de l’APP (Price D. L. et al., 1998). Au niveau moléculaire, un corpus d’évidences conséquent soutient le rôle toxique des agrégats de peptide Aβ, autant in vitro que in vivo (Walsh D. M. et al., 2002 ; Walsh D. M. et al., 2007). La puissance de cette hypothèse a donc dirigé une vaste partie des efforts de recherche autour du peptide Aβ et au développement de moyens pharmaceutiques visant à réduire sa production ou à stimuler sa dégradation. Cependant, au cours des décennies qui ont suivi, plusieurs critiques se sont levées contre l’hypothèse amyloïde. Des études plus récentes utilisant des techniques d’imagerie in vivo ont révélé une corrélation finalement incomplète entre la quantité de plaques séniles et la sévérité des symptômes de la pathologie, avec des patients asymptômatiques possédant également des plaques et représentant une fraction non négligeable de la population âgée (Nordberg A. et al., 2008 ; Villemagne V. L. et al., 2008). D’autre part, bien que les modèles murins de la maladie surexprimant des formes mutées de la protéine APP et/ou des présénilines accumulent du peptide amyloïde et des plaques séniles dans leur cerveau, ils apparaissent incomplets pour plusieurs raisons :
– Ils ne développent pas de NFT comme suggéré par l’hypothèse amyloïde, des mutations supplémentaires sur le gène tau ou sur des gènes associés à tau comme p73 doivent être introduites pour reproduire cette lésion (Phinney A. L. et al., 2003 ; Wetzk M. K. et al., 2008).
– Ces modèles présentent bien des déficits cognitifs, qui sont réversibles via la diminution ou la suppression de la quantité de peptide amyloïde (par pharmacologie ou génétique) mais ces déficits ne sont pas toujours comparables à ceux identifiés chez l’humain (Webster S. J. et al., 2013). De plus, l’utilisation de fonds génétiques différents pour la mise au point des modèles murins introduit des biais supplémentaires sur les critères comportementaux étudiés (Brown R. E. et al., 2007). D’autres essais sur des modèles murins surexprimant uniquement le peptide Aβ 1-42, considéré comme l’espèce la plus toxique de peptide Aβ, et non son précurseur, ne montrent aucun signe de neurodégénération ou de déficits cognitifs (Jungsu K. et al., 2013).

Un autre coup porté à l’idée que le peptide Aβ est seul déclencheur de la maladie d’Alzheimer fut l’échec relatif des thérapies visant à réduire la quantité de peptide Aβ dans les cerveaux des patients affectés. Les molécules pharmacologiques ou les immunothérapies anti-peptide Aβ arrivées au stade d’essai clinique III ont bien réussi à réduire la quantité de plaques séniles et d’amyloïde dans les cerveaux des patients, mais les améliorations cognitives étaient légères et au mieux temporaires. Des effets secondaires parfois graves se sont ajoutés aux résultats mitigés (Karran E. et al., 2011). En conséquence, l’hypothèse amyloïde s’est donc adaptée. Les plaques séniles elles-mêmes ne sont plus considérées comme l’élément toxique de la pathologie, ce sont les oligomères de peptides Aβ 1-42, capables de s’accumuler au niveau intracellulaire et à la surface des neurones qui engagent une série de cascades moléculaires conduisant à la dégénérescence des cellules (Laferla F. M. et al., 2007 ; Selkoe D. J., 2006 ; Naslund J. et al., 2000). Il est également suggéré que ces oligomères configurent des réponses cellulaires délétères capables de s’auto alimenter, expliquant l’échec des thérapies anti-peptide Aβ qui seraient alors administrées trop tardivement, lorsque les symptômes de la pathologie sont déjà présents (Montoliu-Gaya et al., 2016 ; Guëll-Bosch et al., 2016). Si la toxicité des oligomères de peptide Aβ n’est pas contestée, leur rôle comme unique déclencheur de la pathologie ne fait plus l’unanimité. L’étiologie de la forme sporadique de la maladie d’Alzheimer devient alors complexe et multifactorielle, avec une part génétique révélée par les études génomiques globales (GWAS) combinée à une collection de facteurs environnementaux (traumas, ischémie cérébrale, diabète…) dont le plus important reste l’âge de l’individu (Cacabelos R. et al., 2005 ; Querfurth H. W. et al., 2010 ; Swerdlow R. H., 2007). Il paraît alors logique de s’intéresser aux mécanismes cellulaires affectés par le vieillissement, dont la perturbation pourrait précéder l’apparition des stigmates déjà connus de la maladie d’Alzheimer. En parallèle, il ne s’agit pas d’abandonner les hypothèses émises précédemment, mais plutôt d’essayer un nouvel angle de recherche plus large et fondamental. Les sécrétases et le peptide Aβ occupent toujours une place de premier plan, mais les mécanismes sous-jacents permettant de maintenir la pathologie malgré les traitements pharmacologiques doivent être élucidés.

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Table des matières

Introduction
I – Généralités sur la maladie d’Alzheimer
I.1 – Épidémiologie et diagnostic
I.2 – Les marqueurs histopathologiques
– Les déficits synaptiques
– Les dégénérescences neurofibrillaires
– Les plaques séniles
I.3 – L’hypothèse amyloïde
II – Le métabolisme du peptide amyloïde-β
II.1 Le précurseur APP
– Expression, structure et génétique
– Un rôle physiologique et neuronal majeur
II.2 – Le clivage alpha-sécrétase
– Une coupure dépendante des ADAM
– Un clivage neurotrophique
II.3 – Le clivage béta-sécrétase
– La protéase acide BACE1
– Des isoformes aux rôles indéfinis
– L’activité enzymatique neuronale de BACE1
II.4 – La coupure gamma-sécrétase
– Une fonction pour les fragments cytosoliques de l’APP
– Le complexe γ-sécrétase
– Une activité enzymatique vitale
– Isoformes et génétique du complexe
II.5 – Le peptide amyloïde-β
– Les espèces critiques de la maladie d’Alzheimer
– Un peptide sécrété et intraneuronal ?
– Les mécanismes affectant la localisation du peptide amyloïde-β
II.6 – Le peptide amyloïde-β oligomérique
– Une neurotoxine potente
III – Les mécanismes de la protéostasie cellulaire
III.1 – La physio-pathologie de l’homéostasie protéique
III.2 – Mécanismes de la néosynthèse protéique
III.2.a – Le réticulum endoplasmique
III.2.b – Les chaperonnes
– Les lectines du RE
– Les HSP du RE
III.2.c – Les systèmes EDEM/ERAD
– Reconnaissance par le système EDEM
– Rétro-translocation hors du RE
– Le système ERAD
– Les ubiquitines-ligases
– Les complexes ERAD-L/M et C
III.3 – Alzheimer : Une maladie du RE ?
– Les chaperonnes altérées et relocalisées
– Les dysfonctionnements de l’ubiquitination
– L’inhibition du protéasome
III.4 – Le système UPR
– Trois senseurs complémentaires
– BiP, modulateur majeur de l’UPR
III.4.a – Perk
– Une inhibition de la traduction nécessaire à l’activation d’ATF4
– L’activation pro-apoptotique de CHOP
– Un senseur aux réponses opposées
III.4.b – ATF6
– Un régulateur des chaperonnes en association à XBP-1s
– ATF6β et d’autres homologues aux rôles indéfinis
III.4.c – Ire1
– La fonction kinase d’Ire1
– La fonction endoribonucléasique atypique d’Ire1
– La fonction RIDD
– Ire1 : Le lien critique entre homéostasie et apoptose ?
Conclusion

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