Un poison ou toxique peut être défini comme étant une substance capable de troubler gravement ou d’interrompre les fonctions vitales d’un organisme auquel il a été administré délibérément ou accidentellement. Il peut être naturel, auquel cas il s’agit d’une toxine d’origine animale, végétale ou microbienne ; ou synthétique. La différence entre un poison et un médicament est très faible car c’est la dose qui fait qu’une substance est un poison (BRUNETON, 1987).
Depuis des millénaires, une longue expérience a été accumulée par des générations d’hommes et des femmes vivant en contact étroit avec la nature. Les utilisations empiriques des poisons sont les plus anciennes. Ainsi les poisons sont employés :
➤ pour la chasse : certains Indiens d’Amérique confectionnent des flèches empoisonnées grâce aux plantes à curare comme Chondrodendron tomentosum (BRUNETON, 1987) ;
➤ pour la pêche : les principes actifs d’Euphorbia laro sont très toxiques pour les poissons (RAHERINIAINA, 2004) ;
➤ pour la lutte contre les animaux nuisibles comme les chiens errants ou les rats (RAJEMIARIMOELISOA, 2000).
Les progrès des disciplines scientifiques comme la chimie, la biochimie, la physiologie, la pharmacologie et la médecine ont permis à la toxicologie reconnue comme étant la science des poisons de se développer et d’approfondir les connaissances sur plusieurs toxines diverses. Leur nature chimique et leurs mécanismes d’actions sont bien connus. Ainsi :
❖ la toxine botulinique produite par Clostridium botulinum provoque un désordre neurologique dont le principal symptôme est la paralysie de l’activité neuromusculaire et autonome. La libération de l’acétylcholine dans la fente synaptique est inhibée, entrainant ainsi des faiblesses et des paralysies musculaires (FEISS, 2003) ;
❖ l’ochratoxine A est une mycotoxine élaborée par différentes espèces fongiques. Elle a un pouvoir hépatotoxique entrainant une hépatopathie et est néphrotoxique chez les animaux et potentiellement cancérigène pour l’homme (FAUCET-MARQUIS, 2006) ;
❖ les ciguatoxines sont des toxines extrêmement puissantes produites par certaines souches d’une microalgue marine, Gamberdiscus toxicus. Elles provoquent chez l’homme la maladie appelée ciguatera qui se caractérise par une atteinte neurologique et gastro-intestinale (RAMIALIHARISOA et coll, 1996).
La connaissance des propriétés des toxines a permis d’une part de comprendre plusieurs phénomènes biologiques, et d’autre part d’élucider certaines voies métaboliques. Mais les toxines peuvent être utilisées à des fins thérapeutiques (DORLING et CHEVALIER, 2001). On peut énoncer quelques substances telles que :
● la morphine, le principal alcaloïde du pavot somnifère (opium) utilisée contre la douleur (analgésique) constituant ainsi un outil biomédical intéressant (BRUNETON, 1993) ;
● la colchicine, un alcaloïde aux propriétés antimitotiques empêchant la division cellulaire qui est utilisée dans le traitement de la goutte (SCHORDERET et DAYER, 1998) ;
● la toxine tétanique produite par une bactérie anaérobie, Clostridium tetani qui est un outil précieux dans l’exploration du fonctionnement du système nerveux central. En effet, elle joue un rôle important dans la migration cellulaire (GALLI et PROUX-GILLARDEAUX, 2005) ;
● la digitoxine, un stéroïde isolé de Digitalis purpurea (SCROFULARIACEAE), qui accroît la contractilité du muscle cardiaque et augmente l’efficacité cardiaque (MOORE et STAUB, 1975) ;
● la cocaïne des feuilles de coca, chef de file des anesthésiques locaux, est une drogue à action stimulante. Elle est maintenant peu utilisée, mais son emploi illicite comme stupéfiant est très préoccupant (N’GUYET, 1987).
Mais malgré l’évolution de la toxicologie, de nombreuses toxines restent encore à étudier.
De nombreuses plantes malgaches sont réputées toxiques (PERNET et MEYER, 1957 ; DEBRAY et coll. ; 1971 ; BOITEAU, 1979 ; RAKOTORATSIMAMANGA, 1998). Ainsi le Laboratoire de Biochimie Appliquée aux Sciences Médicales (LABASM), de la Mention Biochimie Fondamentale et Appliquée (MBFA) de la Faculté des Sciences, Université d’Antananarivo, notre laboratoire d’accueil, s’est intéressé aux plantes toxiques depuis les années 80. Nombreuses sont les plantes prospectées dans le cadre de ces travaux de recherche dont :
♦︎ des Cucurbitaceae, Xerosicyos danguyi (RAKOTONDRAZANAKA, 1999), Xerosicyos perrieri (RANDRIAMIHARISOA, 2000) ;
♦︎ des représentants du genre Albizia appartenant à la famille des Fabaceae, qui possèdent une activité toxique importante : Albizia polyphylla (RAJEMIARIMOELISOA, 1996) ; Albizia boivini (ARISOA, 2001) ; Albizia arenicola (RANDRIANARIVO, 1996 et 2003); Albizia tulearensis (RAONIHARISOA, 2003) ; Albizia greveana (RAHELIARISATA, 2014) ; Albizia androyensis (RASOLOFOMANANA, 2015) ; Albizia bernieri (RANDRIAMAMPIANINA, 2016) ;
♦︎ des Connaraceae, Rourea orientalis (RAKOTO-RANOROMALALA, 1984) ainsi que Cnestis polyphylla et C. glabra (JEANNODA, 1986) ;
♦︎ une Gentianaceae, Tachiadenus longiflorus (RAKOTO-RANOROMALALA, 1989);
♦︎ des Crotalaires, Crotalaria trichotoma Bojer (RAZAFINORO, 2015), Crotalaria aculeata (RANDRIAMANANTSOA, 2015).
Pour notre part, notre choix s’est fixé sur les écorces de racines d’une plante endémique malgache, Ampelosicyos humblotii appartenant à la famille des Cucurbitaceae pour les raisons suivantes :
♦︎ Ampelosicyos humblotti est une plante endémique disponible sur l’ile de Madagascar ;
♦︎ d’après les enquêtes ethnobotaniques, les villageois utilisent cette plante comme anti diarrhéique ;
♦︎ l’activité toxique de deux Cucurbitaceae, Xerosicyos danguyi (RAKOTONDRAZANAKA, 1999) et Xerosicyos perreiri (RANDRIAMIHARISOA, 2000) a été bien établie ;
♦︎ une activité toxique sur souris a été mise en évidence pour les racines d’Ampelosicyos humblotii lors du test préliminaire.
♦︎ d’après la littérature, aucune étude chimique ni toxicologique n’a été effectuée sur cette espèce.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1. GENERALITES SUR LA FAMILLE DES CUCURBITACEAE
2. GENERALITES SUR LE GENRE Ampelosicyos
PREMIERE PARTIE: ETUDE CHIMIQUE
INTRODUCTION
I. MATERIELS ET METHODES
I.1. MATERIELS
I.1.1. Matériel végétal
I.1.1.1. Classification de la plante
I.1.1.2. Date et lieu de récolte
I.1.1.3. Distribution géographique
I.1.1.4. Préparation et conservation du matériel végétal
I.1.2. Les produits chimiques
I.2. METHODES
I.2.1. Méthodes d’extraction des principes toxiques
I.2.1.1. Extraction à froid
I.2.1.2. Extraction à chaud
I.2.2. Méthodes de purification
I.2.2.1 Traitement par la chaleur
I.2.2.1.1. Principe
I.2.2.1.2. Mode opératoire
I.2.2.2. Traitement par l’éthanol 50%
I.2.2.2.1. Principe
I.2.2.2.2. Mode opératoire
I.2.2.3. Fractionnement par le n-butanol
I.2.2.3.1. Principe
I.2.2.3.2. Mode opératoire
I.2.3. Méthode de concentration
I.2.4. Calcul du rendement
I.2.5. Méthodes d’analyse
I.2.5.1. Chromatographie sur couche mince
I.2.5.1.1. Principe
I.2.5.1.2. Mode opératoire
a) Dépôt des échantillons
b) Développement du chromatogramme
c) Révélation du chromatogramme
I.2.5.2. Criblage phytochimique
I.2.5.2.1. Préparation des extraits à tester
a) Extrait aqueux
b) Extrait hydroéthanolique
c) Extrait acide
d) Extrait chloroformique
I.2.5.2.2. Détection des familles chimiques
a) Alcaloïdes
b) Flavonoïdes et leucoanthocyanes
c) Stéroïdes et triterpènes
d) Saponines
e) Tanins et polyphénols
f) Anthraquinones (Test de BORNTRAGER)
g) Désoxyoses (Test de KELLER-KILIANI)
h). Iridoïdes
II. RESULTATS
II.1. PREPARATION DES EXTRAITS TOXIQUES
II.1.1. Extraction
II.1.2. Purification
II.1.2.1. Traitement par la chaleur
II.1.2.1. Traitement par l’éthanol 50%
II.1.1.3. Fractionnement par le n-butanol
II.2. ANALYSE DES EXTRAITS PAR CHROMATOGRAPHIE SUR COUCHE MINCE
II.3. RENDEMENT DE PURIFICATION
II.4. CARACTERISATION CHIMIQUE
II.4.1. Propriétés physico-chimiques
II.4.2. Nature chimique
III. DISCUSSION ET CONCLUSIONS
DEUXIEME PARTIE : ETUDE TOXICOLOGIQUE
INTRODUCTION
I. MATERIELS ET METHODES
I.1. MATERIELS
I.1.1. Les animaux d’expérimentation
I.1.2. Les plantes d’expérimentation
I.1.3. Les matériels de microbiologie
I.1.3.1. Les souches
I.1.3.2. Les milieux de culture
I.1.3.3. Les disques pour les tests d’antibiogramme
I.2. METHODES
I.2.1. Méthodes d’étude des effets sur les animaux
I.2.1.1. Estimation de la toxicité
I.2.1.1.1. Toxicité par voie intrapéritonéale
I.2.1.1.2. Toxicité par voie orale (ou per os)
I.2.1.2. Détermination de la DL50
I.2.2. Méthodes d’étude des effets sur les végétaux
I.2.2.1. Effets sur le pouvoir germinatif des graines
I.2.2.2. Effets sur la croissance des jeunes plantules
I.2.2.2.1. Principe
I.2.2.2.2. Mode opératoire
a) Trempage
b) Croissance des jeunes plantules
I.2.3. Méthodes d’étude des effets sur les microorganismes
I.2.3.1. Stérilisation
I.2.3.2. Etude de l’activité antimicrobienne des extraits
I.2.3.2.1. Principe
I.2.3.2.2. Mode opératoire
a) Repiquage des souches
b) Préparation de l’inoculum et ensemencement dans le milieu de culture
c). Dépôt des disques et lecture des résultats
I.2.3.3. Détermination de la CMI
I.2.3.3.1. Principe
I.2.3.3.2. Mode opératoire
II. RESULTATS
II.1. EFFETS DES EXTRAITS SUR LES SOURIS
II.1.1. Injection par voie intrapéritonéale
II.1.1.1. Description des symptômes d’intoxication
II.1.1.2. Détermination de la DL50 (24h)
II.1.2. Administration par gavage
II.2. EFFETS DES EXTRAITS SUR LES VÉGÉTAUX
II.2.1. Effets de l’extrait brut sur le pouvoir germinatif de graines
II.2.2. Effets de l’extrait brut sur la croissance des jeunes plantules
II.3. EFFETS DES EXTRAITS SUR LES MICROORGANISMES
II.3.1. Activité antibactérienne des extraits
II.3.2. Détermination de la CMI
III. DISCUSSION ET CONCLUSIONS
IV. CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
RESUME