La drรฉpanocytose ou anรฉmie falciforme est une maladie gรฉnรฉtique hรฉrรฉditaire grave, ร transmission autosomique rรฉcessive. Elle est due ร une mutation unique et ponctuelle du gรจne ฮฒ-globine situรฉ sur le chromosome 11. Cette mutation est caractรฉrisรฉe par le remplacement dโun acide aminรฉ par un autre (acide glutamique remplacรฉ par une valine). La consรฉquence est la synthรจse dโune molรฉcule anormale dโhรฉmoglobine dรฉnommรฉe hรฉmoglobine S (HbS), qui prรฉsente une diminution de solubilitรฉ ร lโรฉtat dรฉsoxygรฉnรฉ. Elle est la maladie gรฉnรฉtique la plus frรฉquente au monde, avec un taux de prรฉvalence de plus de 50%, dont beaucoup dโenfants (Weatherall, 2000). Elle cause un vรฉritable problรจme de santรฉ publique. La maladie drรฉpanocytaire comprend :
โจ Le syndrome drรฉpanocytaire majeur correspondant aux formes homozygotes SS et hรฉtรฉrozygotes composites S/C, S/D, S/bรชta thalassรฉmie, etc.
โจย Le trait drรฉpanocytaire correspondant ร la forme hรฉtรฉrozygote AS.
Pour lโOMS, lโUNESCO et lโONU, la drรฉpanocytose occupe le quatriรจme rang dans leur prioritรฉ de santรฉ publique mondiale, derniรจre le cancer, le VIH /SIDA et le paludisme. Au Sรฉnรฉgal, le portage du trait drรฉpanocytaire est de 10% dans la population alors les formes majeurs dโhรฉmoglobinopathies reprรฉsentent 0,5% des naissances (Cissรฉ, 1998). Les symptรดmes de cette maladie apparaissent dรจs lโรขge de six mois. La maladie se manifeste par หธ
– des crises douloureuses qui nรฉcessitent parfois des hospitalisations,
– par de la fatigue liรฉe ร lโanรฉmie et traitรฉe par transfusion,
– une sensibilitรฉ aux infections (dโoรน une antibiothรฉrapie quotidienne jusquโร lโadolescence).
Des risques de complications graves peuvent survenir.
Certes la mรฉdecine moderne a fait ses preuves, et son efficacitรฉ est dans une large mesure incontestable avec lโutilisation des nouvelles tendances thรฉrapeutiques telles que la greffe de la moelle osseuse, lโutilisation des agents anti drรฉpanocytaires. A cรดtรฉ de ces traitements la thรฉrapie gรฉnique peut รชtre utilisรฉe selon lโรฉtat de la maladie. On considรจre ร l’heure actuelle que prรจs de 75% de la population africaine utilisent les plantes comme traitement de premiรจre intention. Ces populations par leur niveau social dรฉfavorable, et leur manque dโรฉducation ร la santรฉ utilisent de maniรจre inappropriรฉe les plantes qui les entourent pour se soigner et n’ont pas accรจs aux mรฉdicaments dits ยซmodernes ยป (Diop, 2012). Au Burkina Faso, lโassociation de Fagara zanthoxyloides (encore appelรฉ Zanthoxylum xanthoxyloides) et du Calotropis procera appelรฉ le ยซFACA ยป est utilisรฉ dans le traitement de la drรฉpanocytose (Kerharo, 1974). Au Sรฉnรฉgal certains tradipraticiens utilisent lโassociation Fagara zanthoxyloides et Maytenus senegalensis dans le traitement des crises de la drรฉpanocytose (Diagne, 1999). De mรชme une รฉtude ethnobotanique a montrรฉ que la macรฉration des racines de Maytenus senegalensis, le pelรฉ vert ou รฉpicarpe de Carica papaya et des racines de Leptadenia hastata ont des effets antifalcรฉmiants sur les hรฉmaties falciformes (Yuma, 2013). Dans le cadre de cette รฉtude nous avons comme objectif gรฉnรฉral dโรฉtudier lโeffet des groupes chimiques des racines de Maytenus senegalensis sur les globules rouges falciformes. Cet objectif est dรฉclinรฉ en objectifs spรฉcifiques. Il sโagit dโabord de faire lโextraction des groupes chimiques, de les doser et ensuite de les รฉvaluer en le comparant avec une rรฉfรฉrence (arginine).
GENERALITES SUR LA DREPANOCYTOSE ET LE MAYTENUS SENEGALENSIS
GENERALITES SUR LA DREPANOCYTOSEย
HISTORIQUE
Cโest en 1910, que JAMES HERRICK a dรฉcouvert pour la premiรจre fois la maladie chez un รฉtudiant noir la prรฉsence dโhรฉmaties dรฉformรฉes en forme de faucille. Cette caractรฉristique drepanos= faucille en grecque donnera ร la maladie le nom dโanรฉmies ร cellules falciformes. En 1917, EMMEL รฉvoqua le caractรจre familial de la maladie et dรฉmontra la dรฉformation des globules rouges chez un parent dโun malade. En 1929, HAHAN et GILLEPSIE dรฉcouvrirent que la dรฉformation cellulaire est rรฉversible et nโapparait quโร basse tension dโoxygรจne, lorsque la pression partielle dโoxygรจne (PO2) est infรฉrieure ร 50 mmHg Puis NEEL, en 1947, dรฉfinit le trait drรฉpanocytaire et รฉtablit le mode de transmission gรฉnรฉtique selon les lois de Mendel. En 1949, PAULING et COLL ont dรฉmontrรฉ la diffรฉrence รฉlectrophorรฉtique entre lโhรฉmoglobine drรฉpanocytaire S et lโhรฉmoglobine du sujet normal. En 1972, Kan et COLL envisagent le diagnostic prรฉnatal de la maladie pour une prise en charge prรฉcoce vu le risque pathologique encouru dans la petite enfance par les porteurs de la tare.
EPIDEMIOLOGIE
Transmission gรฉnรฉtiqueย
La drรฉpanocytose est une maladie gรฉnรฉtique hรฉrรฉditaire de lโhรฉmoglobine. Lโhรฉmoglobine S diffรจre de lโhรฉmoglobine A au niveau du sixiรจme codon de la chaรฎne bรฉta, oรน lโacide glutamique est remplacรฉ par la valine. Sur le plan gรฉnรฉtique, on note une substitution qui est sous la dรฉpendance dโune mutation portant sur le gรจne de structure de la chaรฎne bรฉta (GAG est remplacรฉ par GTG) situรฉe sur le chromosome 11 (Dieye, 2013).
Selon Mendel seuls les sujets homozygotes prรฉsentent des manifestations cliniques de la maladie.
Distribution gรฉographiqueย
La drรฉpanocytose est la maladie gรฉnรฉtique la plus rรฉpandue, et on estime que 50 millions dโindividus en sont atteints dans le monde (Weatherall, 2000). Il est vrai quโelle est frรฉquente en Afrique subsaharienne, mais on la retrouve aussi dans dโautres rรฉgions. Sa rรฉpartition varie avec les migrations des populations noires africaines. La drรฉpanocytose est frรฉquente, en Amรฉrique du Nord (Etats-Unis), en Amรฉrique du Sud (Brรฉsil), au Moyen-Orient, en Inde et dans les Antilles. Elle est maintenant rรฉpandue en France, en Angleterre, au Portugal, en Belgique, aux Pays Bas, en Allemagne etc. Selon lโOrganisation Mondiale de la Santรฉ (OMS), chaque annรฉe 300.000 enfants naissent avec cette maladie dans le monde (Fall, 2008). Ainsi, mรชme si elle est largement rรฉpandue en Afrique et quโelle est lโhรฉmoglobinopathie la plus frรฉquente en Afrique noire, la drรฉpanocytose nโest pas une maladie des noirs comme on le dit souvent. Les taux les plus รฉlevรฉs du trait drรฉpanocytaire sont enregistrรฉs entre le 15รฉme parallรจle nord et le 20รฉme parallรจle sud (figure 3) atteignant entre 10 ร 40% de la population dans certaines rรฉgions (Fall, 2008). Dans les pays comme le Cameroun, la Rรฉpublique du Congo, le Gabon, le Ghana et le Nigรฉria, les taux de prรฉvalence varient entre 20 et 30%. Tandis que dans certaines rรฉgions de lโOuganda, ils atteignent 40% (Diagne, 2013).
PHYSIOPATHOLOGIE
La drรฉpanocytose a รฉtรฉ lโune des premiรจres maladies dont les mรฉcanismes molรฉculaires ont รฉtรฉ identifiรฉs. Cโest une maladie autosomique rรฉcessive, consรฉquence de la substitution dโun acide glutamique par une valine en position 6 de la chaรฎne ฮฒ de lโhรฉmoglobine. Cette hรฉmoglobine anormale (hรฉmoglobine S) polymรฉrise, lors de la dรฉsoxygรฉnation, en longues fibres entraรฎnant rigidification et dรฉformation รฉrythrocytaire ร lโorigine des deux manifestations principales de la maladie : hรฉmolyse chronique et accidents vaso-occlusifs, chez les patients homozygotes SS ou des patients hรฉtรฉrozygotes composites (figure 4). La cinรฉtique de polymรฉrisation dรฉpend du degrรฉ de dรฉsoxygรฉnation cellulaire, du contenu intracellulaire en hรฉmoglobine, et de la prรฉsence ou non dโhรฉmoglobine fลtale (HbF), puisque celle-ci inhibe la polymรฉrisation. La concentration en HbF dans les hรฉmaties est hรฉtรฉrogรจne, celles qui en contiennent trรจs peu ont une durรฉe de vie trรจs courte et sont sujettes ร des modifications biochimiques irrรฉversibles, formant le principal contingent des cellules soumises au phรฉnomรจne de falciformation et dโhรฉmolyse (Girot, 2003).
Lโalternance de cycles dรฉsoxygรฉnation-polymรฉrisation partielle et rรฉ oxygรฉnation-dรฉpolymรฉrisation provoque la formation dโun contingent dโhรฉmaties appelรฉes ยซcellules densesยป, caractรฉrisรฉes par une perte dโeau et dโions, responsable dโune CCMH (concentration corpusculaire moyenne en hรฉmoglobine) trรจs augmentรฉe (jusquโร 45โ
), et une atteinte permanente du cytosquelette membranaire aboutissant ร lโapparition de drรฉpanocytes irrรฉversibles. Lโaugmentation de lโadhรฉsion des rรฉticulocytes drรฉpanocytaires ร lโendothรฉlium vasculaire a aussi รฉtรฉ mise en รฉvidence. Celle-ci ralentirait le flux sanguin et favoriserait la falciformation des globules rouges. Des liaisons molรฉculaires complexes existent entre หธ
– lโintรฉgrine ฮฑ4 ฮฒ1, rรฉcepteur de la fibronectine sur les rรฉticulocytes et le VCAM (vascular cell lesion molecule) sur la cellule endothรฉliale ;
– le rรฉcepteur CD36 qui lie la thrombospondine et le collagรจne, prรฉsent ร la surface des cellules endothรฉliales, des plaquettes et de la sous-population enrichie en rรฉticulocytes ;
– les glycolipides sulfates qui lient la thrombospondine et les multimรจres du facteur Von Willebrand (vWF) qui stimulent lโadhรฉsion des globules rouges drรฉpanocytaires.
Ainsi, les cellules jeunes, rรฉticulocytes immatures, anormalement adhรฉsives (rรฉticulocyte de stress), seraient responsables du dรฉclenchement du processus vaso-occlusif. Par ailleurs, des anomalies de la sรฉcrรฉtion du monoxyde dโazote (NO), rรฉgulateur principal du tonus vasculaire, ont รฉtรฉ mises en รฉvidence. La libรฉration dโhรฉmoglobine libre induite par lโhรฉmolyse rรฉduit lโeffet vasodilatateur du NO (Favier, 2003).
MANIFESTATIONS CLINIQUES ET BIOLOGIQUES
Drรฉpanocytose homozygote SSย
Les signes cliniques de la maladie font leur apparition aprรจs les premiers mois de vie, quand lโhรฉmoglobine drรฉpanocytaire a progressivement remplacรฉ lโhรฉmoglobine fลtale. Des rรฉvรฉlations cliniques plus tardives, ร lโรขge de 2-4 ans, ne sont pas exceptionnelles. La symptomatologie clinique de la drรฉpanocytose homozygote comporte quatre types de situations : les phases stationnaires ; les crises vaso occlusives ; les complications aiguรซs ; et les complications chroniques.
Phases stationnairesย
Signes cliniques
Elles sont marquรฉes par un tableau dโanรฉmie hรฉmolytique chronique avec subictรจre et splรฉnomรฉgalie constituant la triade de chauffard, caractรฉrisรฉ par :
– La pรขleur des tรฉguments et muqueuses, tรฉmoin de lโanรฉmie hรฉmolytique chronique.
– un ictรจre cutanรฉo-muqueux, liรฉ ร lโhรฉmolyse chronique
– une splรฉnomรฉgalie frรฉquente et constante chez les nourrissons mais au fur et ร mesure des annรฉes apparaรฎt une atrophie splรฉnique liรฉe aux infarctus rรฉpรฉtรฉs. Elle peut รชtre accompagnรฉe dโune hรฉpatomรฉgalie qui persiste longtemps dans lโenfance (Benkerrou, 2003).
Signes biologiques
Lโhรฉmogramme montre une anรฉmie hรฉmolytique plus ou moins sรฉvรจre avec un taux dโhรฉmoglobine entre 4% et 10%, normochrome normocytaire rรฉgรฉnรฉrative et prรฉsence de drรฉpanocytes. Un volume globulaire moyen normal, une hyperleucocytose ร polynuclรฉaires neutrophiles pouvant atteindre 300000 avec un thrombocyte modรฉrรฉ. Dans le frottis sanguin on retrouve des drรฉpanocytes et de corps de Jolly (Benkerrou, 2003).
Crises douloureuses vaso-occlusives
Elles sont les manifestations les plus frรฉquentes de la maladie drรฉpanocytaire. Elles rรฉsultent de lโobstruction de petits vaisseaux sanguins par les globules rouges falciformes. Elles dominent souvent la symptomatologie dans la petite enfance et lโadolescence. Elles sont favorisรฉes par la dรฉshydration, le manque dโoxygรจne (sรฉjour en altitude, infection pulmonaire, crise dโasthme, voire simple gros rhume avec gรชne respiration nocturne), lโexposition au froid et les efforts physiques trop intenses.
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
PREMIER PARTIEหธ GENERALITES SUR LA DREPANOCYTOSE ET SUR LE MAYTENUS SENEGALENSIS
Chapitre I หธ GENERALITES SUR LA DREPANOCYTOSE
I. HISTORIQUE
II. EPIDEMIOLOGIE
II.1.Transmission gรฉnรฉtique
II.2. Distribution gรฉographique
III. PHYSIOPATHOLOGIE
IV.MANIFESTATIONS CLINIQUES
IV.1. Drรฉpanocytose homozygote SS
IV.1.1. Phase stationnaire
IV.1.1.1. Signes cliniques
IV.1.1.2. Signes biologiques
IV.1.2. Crises douloureuses vasoโ occlusives
IV.1.3. Complications aigues
IV.1.3.1. Anรฉmies aigues
IV.1.3.2. Infections graves
IV.1.3.3.Complications vaso-occlusives graves
IV.1.4. Complications chroniques
IV.1.4.1. Ulcรจres de jambes
IV.1.4.2. Atteintes osteoarticulaires chroniques
IV.1.4.3. Atteintes oculaires
IV.1.4.4. Autres complications
IV.2. Drรฉpanocytose hรฉtรฉrozygote AS
V. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE LA DREPANOCYTOSE
V. 1. Les Tests de dรฉpistages
V. 1.1. Le Test dโEMMEL
V .1.2. Le Test dโITANO
V. 2. Tests dโidentification
V.2.1. Hรฉmogramme
V.2.2. Electrophorรจse de lโhรฉmoglobine
V.2.3. Isoelectrofocalisation ou focalisation isoรฉlectrique
V.2.4. Diagnostic antรฉ natal
VI. PRISE EN CHARGE DE LA DREPANOCYTOSE
VI.1. Correction de lโanรฉmie
VI.2. Prise en charge des douleurs
VI.3. Prise en charge des infections
VI.4. Prise en charge des complications
VI.5. Thรฉrapeutiques intensives
VI.6. Mรฉdecine traditionnelle face ร la drรฉpanocytose
Chapitre II หธ GENERALITES SUR LE MAYTENUS SENEGALENSIS
I. DESCRIPTION BOTANIQUE
II. PLACE SYSTEMATIQUE
III. DIFFERENTES APPELLATIONS
IV. COMPOSITION CHIMIQUE
V. PHARMACOLOGIE
VI. UTILISATIONS EN MEDECINE TRADITIONNELLE
DEUXIEME PARTIE TRAVAIL EXPERIMENTAL
I.OBJECTIFS DE LโETUDE
II.CADRE DE LโETUDE
III.MATERIEL ET METHODE
III.1. Matรฉriel
III.1.1. Matรฉriel vรฉgรฉtal
III.1.2. Matรฉriel chimique
III.1.3. Matรฉriel de laboratoire
III.1.4. Matรฉriel biologique
III.2. Mรฉthodes
III.2.1 Extractions et dosages des composรฉs chimiques prรฉsents
III.2.1.1. Extractions des tanins
III.2.1.2. Extraction des Polyphรฉnols totaux
III.2.1.3. Extraction des saponosides
III.2.1.2. Dosages des polyphรฉnols totaux
IV.ETUDE DE LโACTIVITE DES EXTRAITS OBTENUS
IV.1. Principe
IV.2. Prรฉparations des solutions
IV.2.1. Prรฉparation de la solution tampon phosphate ร pH 7,4
IV.2.2. Prรฉparation des solutions ร tester
IV.3. Test dโEmmel
V.RESULTATS ET DISCUSSION
V.1. Rรฉsultats
V.1.1. Rendement de lโextraction des groupes chimiques
V.1.2 Teneur des polyphรฉnols totaux
V.1.3 Test dโEmmel
V.2. Discussion
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES