La dépression est une pathologie commune et un réel enjeu de santé publique. L’OMS (Organisation mondiale pour la Santé) estime que les troubles dépressifs représentent le 1er facteur de morbidité et d’incapacité sur le plan mondial (communiqué de mars 2017) ; ce qui correspond à plus de 300 millions de personnes dans le monde qui souffrent de dépression. La progression est majeure avec une augmentation de 18% entre 2005 et 2015.
En France, l’INPES estime que près d’une personne sur cinq a souffert ou souffrira d’une dépression au cours de sa vie. Une étude récente au sein d’une population de patients consultant leur médecin généraliste a pu montrer que 15% des 1151 patients interrogés présentaient les critères du DSM-IV d’un trouble dépressif ou anxieux .
Le médecin généraliste apparait de plus en plus comme le médecin de premier recours. 20 % des personnes ayant eu un épisode dépressif caractérisé dans les douze derniers mois avaient consulté un médecin généraliste pour cette raison en 2005, ils sont désormais près de la moitié (47 %) en 2010. Ce constat met en valeur la place majeure du praticien de médecine générale, il devrait être capable de détecter les signes cliniques en faveur d’un syndrome dépressif, d’évaluer l’efficacité, l’observance et la tolérance des traitements et d’orienter en cas de nécessité. Il devra également être en mesure de mener une psychothérapie de soutien.
GENERALITES SUR LA DEPRESSION
DEFINITION
L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) définit la dépression comme un « trouble mental courant, caractérisé par la tristesse, la perte d’intérêt ou de plaisir, des sentiments de culpabilité ou de faible estime de soi, des troubles du sommeil ou de l’appétit, d’une sensation de fatigue et d’un manque de concentration ».
CLASSIFICATION
Selon le DSM 5
Le DSM (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) (1) est un manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux publié par l’Association Américaine de Psychiatrie. La cinquième édition est parue en 2013 et sa version française en 2015. Outil international de référence, il est utilisé par les cliniciens et chercheurs pour la classification des pathologies psychiatriques. Il repose sur une approche descriptive, chaque catégorie diagnostique comporte des critères d’inclusion et d’exclusion aussi précis que possible, ceci afin de pouvoir parler dans les mêmes termes des mêmes maladies.
Critères diagnostiques du DSM-5 :
A. Au moins 5 des symptômes suivants ont été présents durant la même période de 2 semaines et représentent un changement par rapport au fonctionnement précédent : au moins un des symptômes est soit (1) une humeur dépressive, soit (2) une perte d’intérêt ou de plaisir. Remarque : Ne pas inclure les symptômes qui sont attribuables à une autre condition médicale.
1. Humeur dépressive présente la plus grande partie de la journée, presque tous les jours, comme signalée par la personne (par exemple : se sent triste, vide, désespérée) ou observée par les autres (par exemple : pleure) Remarque : chez les enfants ou adolescents, peut être une humeur irritable.
2. Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir pour toutes, ou presque toutes, les activités, la plus grande partie de la journée, presque tous les jours (signalée par la personne ou observée par les autres)
3. Perte de poids significative en l’absence de régime ou gain de poids (par exemple : changement de poids excédant 5 % en un mois), ou diminution ou augmentation de l’appétit presque tous les jours. Remarque : Chez les enfants, prendre en compte l’absence de l’augmentation de poids attendue.
4. Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours.
5. Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (observable par les autres, non limités à un sentiment subjectif de fébrilité ou de ralentissement intérieur).
6. Fatigue ou perte d’énergie presque tous les jours.
7. Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours (ne pas seulement se faire grief ou se sentir coupable d’être malade).
8. Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision presque tous les jours (signalée par la personne ou observée par les autres).
9. Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider.
B. Les symptômes entraînent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants.
C. L’épisode n’est pas imputable aux effets physiologiques d’une substance ou d’une autre affection médicale.
D. L’apparition de l’épisode dépressif majeur n’est pas mieux expliquée par un trouble schizoaffectif, une schizophrénie, un trouble schizophréniforme, un trouble délirant, ou un autre trouble du spectre schizophrénique et un autre trouble psychotique.
E. Il n’y a jamais eu d’épisode maniaque ou d’épisode hypomaniaque. Remarque:Cette exclusion ne s’applique pas si tous les épisodes similaires à la manie ou l’hypomanie sont induits par une substance ou sont imputables aux effets physiologiques d’une autre condition médicale .
Dans la nouvelle version du DSM, on introduit un nouveau diagnostic, le « trouble dépressif persistant » (dysthymie) qui est diagnostiqué lorsque la perturbation de l’humeur se poursuit pendant au moins 2 ans chez les adultes ou 1 an chez les enfants. Il inclut à la fois la dépression majeure chronique du DSM-IV et la dysthymie, qui est moins sévère que la dépression majeure, mais chronique.
Selon la CIM
La CIM (classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes) (7) est une classification avant tout statistique de morbidité et de décès, publiée par l’Organisation Mondiale de la Santé. Actuellement, nous utilisons la CIM-10 publiée en 1990 mais une nouvelle version (CIM-11) doit être validée par l’Assemblée Mondiale de la Santé en mai 2018.
Critères généraux (obligatoires)
G1. L’épisode dépressif doit persister au moins 2 semaines.
G2. Absence de symptômes hypomaniaques ou maniaques répondant aux critères d’un épisode maniaque ou hypomaniaque (F30) à un moment quelconque de la vie du sujet.
G3. Critères d’exclusion les plus couramment utilisés : l’épisode n’est pas imputable à l’utilisation d’une substance psychoactive (F10-19) ou à un trouble mental organique, selon la définition donnée en F00-F9.
Présence d’au moins deux des trois symptômes suivants :
(1) Humeur dépressive à un degré nettement anormal pour le sujet, présente pratiquement toute la journée et presque tous les jours, dans une large mesure non influencée par les circonstances, et persistant pendant au moins 2 semaines.
(2) Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir pour des activités habituellement agréables.
(3) Réduction de l’énergie ou augmentation de la fatigabilité.
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Table des matières
I- INTRODUCTION
II- GENERALITES SUR LA DEPRESSION
II-1 Définition
II-2 Classification
II-2-1 Selon le DSMV
II-2-2 Selon la CIM
II-2-3 Qualification de la sévérité
II-3 Epidémiologie
II-4 Impact socio-économique
III- EVALUATION DE LA SEVERITE D’UN SYNDROME DEPRESSIF
III-1 Les différentes échelles d’évaluation
III-1-1 L’échelle d’Hamilton ou HDRS
III-1-2 L’échelle de dépression de Montgomery et Asberg ou MADRS
III-1-3 L’inventaire de dépression de Beck
III-2 Intérêt de l’utilisation d’une échelle d’évaluation
III-3 Présentation du QIDS-SR16
III-3-1 Construction
III-3-2 Validation
III-3-3 Utilisation
III-3-4 Forces
Cohérence interne
Validité externe
III-3-5 Faiblesses
III-3-6 Administration
III-3-7 Calcul du score
III-3-8 Interprétation
III-3-9 Traductions disponibles
III-4 Le QIDS-SR16 en médecine générale
IV- L’ENQUÊTE
IV-1 Présentation de l’étude
IV-1-1 Objectifs
Objectif principal
Les objectifs secondaires
IV-1-2 Matériel et méthode
Déroulement du premier entretien avec les médecins généralistes
Les consignes
Le retour des questionnaires
Analyse des données
IV-2 Résultats
IV-2-1 Caractéristiques des médecins recrutés
IV-2-2 Déclaration des médecins avant l’étude
IV-2-3 Distribution des QIDS-SR16 par les médecins
IV-2-4 Résultats concernant les QIDS-SR16
IV-2-5 Interprétation des QIDS-SR16 par les médecins généralistes
IV-2-6 Opinion des médecins généralistes concernant le QIDS-SR16
V- DISCUSSION
V-1 Forces et faiblesses
V-1-1 Matériel d’étude
Pourquoi utiliser une échelle de dépression en médecine générale ?
Pourquoi un auto-questionnaire ?
Choix du QIDS-SR16.
V-1-2 La méthode
Biais de recrutement
Biais d’auto-sélection
Biais de déclaration
V-2 Evaluation d’un syndrome dépressif par les médecins participants
V-3 Les 104 QIDS-SR-16 récupérés au cours de notre étude
V-4 Perception du QIDS-SR16 par les patients
V-5 Perception du QIDS-SR16 par les médecins participants
V-5-1 L’acceptabilité du QIDS-SR16
V-5-2 L’utilité pour le clinicien
V-5-3 L’interprétation du QIDS-SR16
V-6 Pistes pour l’amélioration de la prise en charge de la dépression.
VI – CONCLUSION
Annexes
Bibliographie