Les consultations prénatales ou CPN ont une importance capitale dans la surveillance de la grossesse. En effet c’est au cours des CPN qu’on réalise le dépistage des facteurs de risque et des pathologies de la grossesse. La mortalité maternelle à Madagascar est passée de 507 pour 100.000 naissances vivantes en 1992, à 488 pour 100.000 naissances en 1997, et à 469 pour 100.000 en 2004. La mortalité infantile est passée de 93 pour 1.000 en 1992, à 88 pour 1.000 en 2000, et 58 pour 1.000 en 2004. On ne peut pas dire que ces améliorations constatées dans les taux de mortalité maternelle et infantile soient satisfaisantes. Beaucoup d’efforts restent encore à faire notamment dans le suivi de la grossesse.
Dans beaucoup d’endroits à Madagascar, notamment en zone rurale, la grossesse est encore considérée comme un état physiologique que les coutumes et les croyances héritées des ancêtres doivent favoriser dans son aboutissement à la naissance des enfants. Ces coutumes et croyances entraînent souvent les femmes enceintes vers l’adoption de comportements qui risquent de compromettre le déroulement normal de la grossesse. Parmi ces comportements voulus ou imposés par la famille, on peut par exemple citer le massage des accoucheuses traditionnelles, les interdits concernant l’alimentation normale des femmes enceintes, la non pratique des consultations prénatales. En 2005, le taux d’utilisation de la consultation prénatale (4 CPN par grossesse) était de 20,9% au niveau national. Le Ministère chargé de la Santé se propose dans son document intitulé « politique nationale de santé de l’enfant » (1) de réaliser d’ici 2010 un taux d’utilisation des CPN de 50% (4 CPN). L’atteinte de cet objectif nécessite une meilleure connaissance de la situation au niveau de chaque localité notamment, les habitudes et coutumes des familles dans le domaine de la reproduction, les perspectives de changement de comportement en faveur des CPN compte tenu de la profession, de l’accessibilité aux services de santé, de la façon dont les femmes enceintes utilisent les consultations prénatales.
GENERALITES SUR LA CONSULTATION PRENATALE ET LE SYSTEME DE SANTE
LE SYSTEME DE SANTE
Un concept central pour faire des études sociales et culturelles en médecine est l’idée que dans toutes les sociétés, les activités de santé sont plus ou moins en corrélation les unes avec les autres. Pour cette raison, ces activités ont besoin d’être étudiées d’une manière globale, c’est-à-dire comme faisant partie d’un tout.
Système de santé et réalité sociale
La réalité sociale signifie le mode d’interaction humaine qui existe entre individus et en dehors de l’individu. L’individu intériorise le contenu de la réalité sociale pendant le processus de socialisation, sous la forme d’un système de significations symboliques et de normes qui gouvernent son comportement, sa perception du monde et sa communication avec d’autres personnes. La réalité sociale varie souvent quand on change de région. Elle peut varier selon des différences familiales dans l’expérience du passé, différences de classe sociale, d’éducation, de profession, de religion ou d’ethnie. Tout ceci a un effet déterminant sur la manière dont les individus conçoivent les phénomènes physiologiques de la vie et les maladies, et influe sur leur comportement dans le domaine de la santé.
Système de santé et réalité clinique
Les aspects de la réalité sociale sont en relation avec la réalité clinique, en particulier les attitudes et normes vis-à-vis de la maladie et évènement physiologiques de la vie (menstruation, grossesse, ménopause … etc).
• Le point de vue sur un système de santé peut varier autant que le point de vue sur un système social, d’une famille à une autre, d’un individu à un autre. La raison est que les systèmes de santé existent et fonctionnent selon des normes légitimées en société, normes qui gouvernent la manière dont le groupe social et les individus dans le groupe réagissent devant la maladie.
• Des facteurs sociaux tels que la classe, l’éducation, la religion, l’ethnie, la profession et le réseau social ont tous la possibilité d’exercer une influence sur la perception de la santé et l’utilisation des services de soins.
Système de santé et structure interne
Le système de santé distingue trois secteurs qui se chevauchent :
– le secteur populaire,
– le secteur professionnel,
– le secteur traditionnel.
Le secteur populaire
Le secteur populaire ou familial du système de santé est la plus vaste et le moins étudié. On peut l’imaginer comme une matrice avec plusieurs niveaux :
– l’individu,
– la famille,
– la communauté,
– le réseau social.
Le secteur populaire est l’arène de la culture populaire non professionnelle, non spécialiste où la maladie est définie pour la première fois, et où les activités de prévention et de soins commencent. Aux Etats-Unis, on estime que 70 à 90% de tous les épisodes de maladies sont gérés dans le secteur populaire. Quand les gens ont recours aux deux autres secteurs (professionnel ou traditionnel), leurs choix sont ancrés dans les orientations cognitives et les valeurs de la culture populaire.
Après leurs traitements dans ces 2 secteurs, les malades rentrent dans le secteur populaire pour évaluer les traitements reçus et pour prendre des décisions sur la suite à donner. Le secteur populaire est donc le lieu entre les différents secteurs. On y trouve les points d’entrée et de sortie des différents secteurs et leurs points d’interaction. On pense souvent que ce sont les professionnels de la santé qui organisent les soins pour le public. Mais d’une manière générale, les gens initient eux-mêmes leurs soins en prenant des décisions dans les domaines suivant : quand et qui il faut consulter ; s’il faut suivre le régime prescrit ou pas ; quand il faut changer de traitement ; juger si les soins sont efficaces et s’ils sont satisfaisants. Dans ce sens, le secteur populaire fonctionne comme la source principale et le déterminant le plus immédiat des soins. Quand les gens décident d’entrer dans le secteur professionnel ou traditionnel, ils font face à des croyances et valeurs différentes dans la structure cognitive des praticiens et personnels de ces secteurs.
Le secteur professionnel
Après le secteur populaire, le secteur professionnel ou médical constitue une autre composante du système de santé. Il est composé de professions organisées de soins. Ce secteur représente la médecine moderne et scientifique. De nos jours, la dominance du secteur professionnel est devenue telle que les études faites sur les soins dans la plupart des sociétés prennent souvent la médecine moderne comme la seule composante du système de santé.
Le secteur traditionnel
La médecine traditionnelle est un mélange de nombreuses composantes différentes ; certaines composantes sont apparentées au secteur professionnel ou au secteur populaire. Les guérisseurs traditionnels s’occupent, en dehors des symptômes physiques et émotionnels, de tous les aspects de la vie du patient, y compris ses rapports avec autrui, avec l’environnement naturel et avec les puissances surnaturelles. Dans beaucoup de sociétés non occidentales, tous ces aspects de la vie font partie de la définition de la santé. Une perturbation dans un de ces domaines (par exemple un comportementimmoral, des conflits familiaux, des pratiques religieuses mal faites), peut avoir comme résultats des symptômes physiques ou une détresse émotionnelle qui demandent les services d’un guérisseur sacré. Pour ses usagers, la médecine traditionnelle peut avoir plusieurs avantages sur la médecine moderne et scientifique. D’abord, la famille fait souvent partie du processus diagnostique et de soins. Dans certaines sociétés, la maladie demande la participation, non seulement du malade mais aussi de sa famille aux rites de guérison. Ensuite entre le guérisseur, le malade et sa famille, existe souvent une intimité, une chaleur, un point de vue commun et l’utilisation partagée d’un langage quotidien. De plus, le praticien professionnel est souvent séparé de ses clients par la classe sociale, l’éducation, et parfois l’appartenance culturelle. Pour ces raisons, les guérisseurs traditionnels sont plus à même de définir et de traiter l’expérience sociale, psychologique et morale de la maladie et du malheur de leurs clients que les praticiens de la médecine moderne qui utilisent un modèle étranger de la santé.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES SUR LA CONSULTATION PRENATALE ET LE SYSTEME DE SANTE
1. LE SYSTEME DE SANTE
1.1. Système de santé et réalité sociale
1.2. Système de santé et réalité clinique
1.3. Système de santé et structure interne
1.3.1. Le secteur populaire
1.3.2. Le secteur professionnel
1.3.3. Le secteur traditionnel
2. LA CONSULTATION PRENATALE
2.1. Les objectifs de la consultation prénatale
2.2. Le dépistage des grossesses à risque
2.2.1. Les principaux facteurs de risque
2.3. La fréquence des CPN
2.3.1. Calendrier des CPN
2.3.2. La fiche de surveillance de la mère et du nouveau-né
2.4. Organisation et conduite à tenir
2.4.1. Organisation
2.4.2. Conduite à tenir
DEUXIEME PARTIE : ETUDE DE LA PRATIQUE DES CPN CHEZ LES FEMMES ENCEINTES A AMBOAVORY
1. METHODOLOGIE
1.1. Le CSB2 d’Amboavory
1.1.1. Organisation
1.1.2. Personnel
1.2. Le secteur sanitaire
1.2.1. Fokontany et démographie
1.2.2. Accessibilité géographique
1.3. Matériel et méthode
1.3.1. Type d’étude
1.3.2. Période d’étude
1.3.3. Population d’étude
1.3.4. Echantillon et mode d’échantillonnage
1.3.5. Mode de collecte des données
1.3.6. Traitement
1.3.7. Limite de l’étude
1.3.8. Ethique
1.3.9. Paramètres d’étude
2. RESULTATS
2.1. Nombre de femmes enceintes attendues
2.2. Nombre de femmes enceintes vues en CPN
2.3. Etude épidémiologique
2.3.1. Les tranches d’âge
2.3.2. La situation matrimoniale
2.3.3. La parité
2.3.4. Le nombre de CPN
2.3.5. Le niveau d’instruction
2.3.6. La profession
2.3.7. Le domicile
2.4. Facteurs de risque dépistés
2.5. Influence de l’accessibilité géographique
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES, DISCUSSIONS ET SUGGESTIONS
1. COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
1.1. Situation générale
1.2. Résultats de l’étude
1.2.1. Etude épidémiologique
1.2.2. Les facteurs de risque
2. SUGGESTIONS
2.1. Renforcement de l’information, l’éducation et de la communication
2.1.1. Objectif
2.1.2. Stratégies
2.2. Implantation d’un centre de santé dans les fokontany éloignés
2.2.1. Objectif
2.2.2. Stratégies
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE