Généralités sur les capteurs de gaz résistifs : Principe et Réalisation
L’idée d’utiliser un matériau semi-conducteur comme élément sensible au gaz vient de M. Brattain et M. Barden en 1952 avec des matériaux tel que le germanium. Plus tard, Seiyama a démontré l’effet de la sensibilité au gaz sur des oxydes métalliques. Taguchi commercialise finalement les premiers capteurs de type semi-conducteur dans les années 1970. Le TGS (Taguchi Gas Sensors) est toujours commercialisé par la société Figaro, mais bien d’autres capteurs sont disponibles sur le marché (Microsens, FIS, UST, MiCS, Capteur etc). Dans ce chapitre, nous allons nous attacher à rappeler un certain nombre de principes de base sur le fonctionnement et les performances des capteurs. Puis, compte tenu de l’objectif du travail de thèse sur l’étude de la compatibilité entre sérigraphie et substrats microélectroniques, nous présenterons un état de l’art sur les capteurs sérigraphiés et sur les capteurs développés sur des supports silicium avec micro-chauffage intégré appelés « microhotplates ».
Principe de détection
Les capteurs de gaz de type résistif sont composés d’une part, d’un système de chauffage pour permettre une autonomie de travail à différentes température (domaine d’utilisation 300°C500°C pour le dioxyde d’étain) et d’un matériau sensible dont le principe de détection repose sur la variation de la résistance engendrée par l’adsorption d’espèces gazeuses à sa surface. Dans la majorité des cas, cet élément sensible est un oxyde métallique semi-conducteur de type NiO, ZnO, MgO,WO3, SnO2, etc. Ces oxydes présentent de nombreux avantages, tels que de bonnes conductivités électriques directement mesurables et exploitables sans système d’amplification électronique dans les domaines de température d’utilisation des capteurs. De plus, ils présentent généralement une bonne sensibilité aux gaz. Mais l’inconvénient majeur de ces matériaux pour la détection des gaz est leur faible sélectivité. Néanmoins, il existe différentes solutions pour palier à cet inconvénient : dopage du matériau sensible, utilisation de filtres, dépôt de membranes sélectives ou réalisation de systèmes multi-capteurs [réf 1].
Comme nous venons de le dire précédemment, la détection des gaz se fait par mesure de la variation de résistance électrique du matériau sensible. Cette mesure électrique globale du matériau met en jeux des phénomènes physico-chimiques que l’on peut schématiquement classer en trois contributions principales : le grain avec les phénomènes intrinsèques du matériau, les joints de grains avec les effets de la microstructure et enfin l’interface métal/semi-conducteur localisée aux électrodes (Figure A.1).
Joints de grains et effets de tailles
De nombreuses études ont montré l’influence de la microstructure du matériau sur sa conductivité et sa sensibilité aux gaz. Le modèle proposé par N. Yamazoé [réf 4] est basé sur le système d’une chaîne unidimensionnelle de cristallites reliées par des cols issus du frittage et de joints de grains résultant d’un simple contact mécanique (Figure A.3 ). La conductivité de ce système est contrôlée par le rapport entre le diamètre des cristallites « D » et la largeur la zone de déplétion « Ld ».
Dans la cas où la largeur de la zone de déplétion est négligeable devant le diamètre des cristallites (D>>2Ld ), la conductivité du matériau est contrôlée par les joints de grains et elle est donc peu influencée par les processus d’adsorption de surface . Lorsque la taille des cristallites est de l’ordre de grandeur de la zone de déplétion (D³2Ld), la conductivité est contrôlée au niveau des cols qui peuvent devenir brusquement « bloquants » ou « passants » . Enfin, quand la taille des cristallites est très faible (D<2Ld), celles-ci sont entièrement déplétées et la conductivité est contrôlée à la fois par le grain lui même et les joints de grains .
Interaction métal/semi-conducteur et effet de l’épaisseur
La zone de contact entre le métal et l’oxyde métallique constitue une interface de type hétérogène qui se comporte comme une barrière de Shottky, car chacun des deux matériaux possède un niveau de Fermi différent (Figure A.5), ce qui crée une barrière de potentiel dont la zone de charge se développe essentiellement au sein du semi-conducteur. La présence d’une électrode métallique en contact avec la couche sensible induit donc une zone résistive. Ainsi la zone de charge d’espace créée, modifie la conductivité du matériau. L’influence de cette zone de charge est variable selon l’état de l’interface métal / oxyde et selon l’épaisseur de la couche d’oxyde métallique [réf 5]. Par exemple, la Figure A.6 montre l’évolution des sensibilités à CO en fonction de l’épaisseur de couches sensibles sérigraphiées d’après les travaux de Pierre Montméat [réf 7].
Les performances des capteurs
Les performances des capteurs sont très souvent explicitées par ce que l’on appelle communément « la règle des 3S », à savoir : Sensibilité, Sélectivité et Stabilité. La sensibilité est la performance la plus facile à satisfaire étant donné la grande réactivité entre le matériau et les principaux gaz à détecter pour la plupart des applications visées. Il n’en est pas de même pour la sélectivité et la stabilité du matériau sensible [réf 8] .
La sensibilité
La première qualité que l’on recherche pour un capteur est sa sensibilité aux gaz, c’est à dire son aptitude à déceler de faibles concentrations avec une réponse électrique mesurable. Dans ce rapport nous utiliserons l’équation A.2 pour calculer la réponse (notée « R ») d’un capteur à un gaz. Cette définition de la réponse présente un certain nombre d’inconvénients tel que la réelle évolution de la sensibilité du matériau lorsque la valeur de la conductance sous air varie beaucoup. Mais n’ayant pas effectué des mesures de conductance en fonction de différentes concentrations en gaz, nous ne pouvons pas utiliser la réelle définition de la sensibilité (notée « S ») qui s’exprime par la dérivée de la conductance en fonction de la concentration en gaz à une température de fonctionnement donnée.
Dans la plupart des cas, la sensibilité n’est pas la problématique principale dans l’utilisation d’un capteur à base d’un semi-conducteur. Les matériaux couramment utilisés tels que SnO2, WO3 présentent de fortes sensibilités et permettent la détection de gaz à des concentrations de l’ordre du ppb [réf 13].
La sélectivité
Contrairement à la sensibilité, l’un des inconvénients majeurs des capteurs de type résistif est le manque de sélectivité, c’est à dire leur aptitude à détecter un gaz donné dans un mélange. Pour répondre à ce problème, plusieurs solutions telles que des modifications du matériau (dopage), des dépôts de membranes, des conditions de fonctionnement particulières (par exemple la température) ou encore des méthodes basées sur du traitement du signal ont été étudiées .
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Table des matières
Introduction
A : Généralité sur les capteurs de gaz résistifs principe et réalisation
A.1. Principe de détection
A.1.1 Conductivité intrinsèque du matériau : interaction solide/gaz
A.1.2 Joints de grains et effets de tailles
A.1.3 Interaction métal/semi-conducteur et effet de l’épaisseur
A.2. Les performances des capteurs
A.2.1 La sensibilité
A.2.2 La sélectivité
A.2.3 La stabilité
A.2.4 Conclusion
A.3. Applications et développement technologique des capteurs
A.3.1 Les capteurs sérigraphiés
A.3.1.1 Les avantages
A.3.1.2 Conceptions de capteurs
A.3.2 Les capteurs sur microhotplates
A.3.2.1 La conception des microhotplates
A.3.2.2 Dépôt de la couche sensible
A.3.2.2.1 Les dépôts physiques
A.3.2.2.2 Les dépôts chimiques
Références biographiques
B : Introduction à la sérigraphie et techniques de caractérisations des matériaux sensibles
B.1. La sérigraphie
B.1.1 Principe de la sérigraphie
B.1.1.1 les encres
B.1.1.2 L’écran
B.1.1.3 L’impression
B.1.1.4 Le séchage et la cuisson
B.1.2 Etudes sur l’aptitude des encres à la sérigraphie
B.1.2.1 La composition des encres
B.1.2.2 La viscosité et les conditions d’impression
B.1.3 Description de l’appareillage
B.2. Préparation des capteurs
B.2.1 Procédure de réalisation des capteurs par sérigraphie
B.2.2 Contrôle de la température de l’élément chauffant
B.3. Caractérisations des matériaux
B.3.1 Mesures électriques des couches sensibles
B.3.1.1 Circuit électrique de mesure des résistances
B.3.1.2 Banc de mesure électrique sur » matériau »
B.3.1.3 Banc de mesure électrique sur « capteur »
B.3.2 Autres caractérisations physico-chimiques des matériaux
B.3.2.1 La mouillabilité et mesure de l’angle de contact
B.3.2.2 Le viscosimètre
B.3.2.3 Le rugosimètre
Références bibliographiques
C. Développement d’une encre de sérigraphie standard
C.1. Bibliographie
C.1.1 Traitement thermique
C.1.1.1 Le frittage
C.1.1.2 La densité de lacune d’oxygène
C.1.1.3 La diffusion du métal dans le matériau
C.1.1.4 Conclusion
C.1.2 Liants permanents
C.1.2.1 Phénomènes de percolation
C.1.2.1.1 Variation de conductivité au voisinage du seuil de percolation
C.1.2.1.2 Propriétés géométriques des mélanges
C.1.2.1.3 Influence du rapport des diamètres de grains
C.1.2.1.4 Evolution des propriétés électriques du mélange au cours des différents traitements : compression et traitement thermique
C.1.2.2 Les verres
C.1.2.3 Conclusion
C.2. Elaboration d’une encre : matériau actif + liant organique
C.2.1 Sélection d’une poudre commerciale
C.2.1.1 Caractérisations Physico-chimiques des poudres
C.2.1.1.1 Analyse par diffraction aux rayons X
C.2.1.1.2 Granularité des poudres
C.2.1.1.3 Surfaces spécifiques des poudres
C.2.1.1.4 Récapitulatifs des caractéristiques physico-chimiques des poudres
C.2.1.2 Caractérisations électriques des poudres
C.2.1.3 Caractérisation électrique des couches épaisses
C.2.2 Influence du pourcentage de liant organique
C.2.2.1 Conditions de préparation des encres
C.2.2.2 Caractérisations morphologique et texturale des couches
C.2.2.2.1 Etat de surface et épaisseur des couches
C.2.2.2.2 Textures des couches
C.2.2.3 Propriétés électriques des couches
C.2.2.3.1 Mesure de conductance à 500°C
C.2.2.3.2 Mesure d’impédance complexe
C.2.2.4 Conclusion
C.2.3 Mélange de poudres SnO2 commerciales : influence de granularité
C.2.3.1 Distributions granulométriques des mélanges de poudres
C.2.3.2 Caractérisations morphologiques des couches épaisses
C.2.3.3 Propriétés électriques
C.2.3.4 Conclusion
C.3. Etude des paramètres d’impression et de traitement thermique
C.3.1 Etude des conditions d’impression et du séchage
C.3.1.1 Réglage de la raclette
C.3.1.1.1 Hauteur de raclette
C.3.1.1.2 Vitesse de raclette
C.3.1.2 Réglage de l’écran
C.3.1.3 Procédure de séchage
C.3.2 Traitement thermique
C.3.2.1 Etude de l’évolution des couches pendant leur recuit
C.3.2.1.1 Décomposition du liant organique
C.3.2.1.2 Evolution de la microstructure des couches
C.3.2.1.3 Evolution de la conductance électrique pendant le traitement thermique
C.3.2.2 Influence du recuit sur les performances de la couche sensible en fonctionnement
C.3.2.2.1 Influence du recuit sur la stabilité des conductances électriques sous air
C.3.2.2.2 Influence du recuit sur la détection des gaz à 500°C
C.3.2.2.3 Test sous air
C.3.3 Conclusion
C.4. Etude de l’ajout du liant permanent
C.4.1 Etude des phénomènes de percolation
C.4.2 Etude du liant permanent
C.4.2.1 Sélection des verres
C.4.2.2 Influence du liant permanent au sein du mélange
C.4.2.2.1 Influence des proportions dans le mélange semi-conducteur / liant permanent.
C.4.2.2.2 Influence de la nature du verre sur les performances de l’élément sensible
C.4.2.3 Sous couche de liant permanent
C.4.3 Conclusion
Conclusion du chapitre C
Références
Conclusion
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