L’aluminium est un élément métallique alliant profusion et qualité. Il est le troisième élément le plus abondant sur terre, après l’oxygène et la silice, avec 8% de la masse totale de la terre. Il n’est jamais retrouvé sous sa forme pure du fait de sa forte affinité chimique avec les autres éléments. Conséquemment, il est retrouvé sous forme d’environ 270 composés différents. Dans sa forme pure, l’aluminium possède de grandes qualités. Sa masse volumique faible ainsi que sa résistance à la corrosion en font un métal massivement utilisé dans des domaines comme l’aéronautique, le transport automobile ou encore dans la construction de bâtiments où ses caractéristiques l’avantagent par rapport à d’autres métaux. D’ailleurs, plus de 40 millions de tonnes d’aluminium en première fusion sont produites annuellement partout dans le monde . Les trois plus grands pays producteurs sont, par ordre d’importance, la Chine (18 000 millions de tonnes), la Russie (4 000 millions de tonnes) et le Canada (2 970 millions de tonnes) . Au Canada, la grande majorité de cette production se situe au Québec par l’entremise des usines d’Alcoa, d’Aluminerie Alouette Inc. et de Rio Tinto Alcan.
Afin de pouvoir utiliser l’aluminium, il doit être extrait à partir de minerais, principalement la bauxite. Celle-ci est composée à plus de 50% d’oxyde d’aluminium (Al₂O₃ ), ce qui en fait un minerai de choix pour ce type d’extraction. Via le procédé Bayer, l’oxyde d’aluminium, également appelé alumine, est extraite du minerai de bauxite. Ce composé chimique est par la suite dissocié par électrolyse à haute température afin d’en extraire l’aluminium. En 1886, Paul Louis Toussaint Héroult et Charles Martin Hall ont développé indépendamment et simultanément cette méthod d’extraction de l’aluminium par électrolyse. Cette méthode porte aujourd’hui le nom de procédé Hall-Héroult. La quasi-totalité des producteurs d’aluminium dans le monde, dont Rio Tinto Alcan, utilise toujours ce procédé.
Dans le but d’assurer l’extraction de l’aluminium, l’alumine doit être dissoute dans un bain de cryolite fondu à haute température et soumis à un courant électrique de forte intensité. Dans le but de maintenir le procédé à la température nécessaire et de contenir le métal en fusion, la production est réalisée dans une enceinte appelée cuve d’électrolyse . La cuve est composée d’un caisson en acier dans lequel sont disposés divers matériaux permettant de maintenir un équilibre thermomécanique favorable au procédé. L’un de ces matériaux, appelé pâte monolithique est essentiellement utilisé dans le but d’assurer le scellement du plan cathodique et ainsi, d’empêcher les infiltrations de métal liquide à l’extérieur de la zone d’électrolyse durant la production d’aluminium. Il est considéré, par les producteurs d’aluminium, comme étant un matériau critique ayant une influence directe sur le bon fonctionnement ainsi que la durée de vie des cuves d’électrolyse.
PROBLÉMATIQUE
L’industrie de l’aluminium fait aujourd’hui l’objet d’une compétition internationale féroce qui oblige tous les producteurs d’aluminium de première fusion à assurer le maintien d’un processus d’amélioration continue. La consommation des matériaux servant à la réduction de l’alumine ainsi que la perte de rendement énergétique des cellules d’électrolyse sont à l’origine de coûts comptant parmi les plus importants au niveau de la production de métal primaire. De plus, le nouveau système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre instauré par le gouvernement québécois [4] oblige les usines de production à réduire leurs émissions et leurs résidus. Dans ce contexte, l’industrie canadienne de l’aluminium, principalement située au Québec, ne peut se permettre aucun relâchement.
Dans l’optique d’améliorer le processus de production d’aluminium, l’augmentation de la durée de vie des cuves d’électrolyses joue un rôle clé. À lui seul, le remplacement d’une seule cuve demande des investissements de l’ordre de 80 000 $ à 500 000 $ selon la technologie utilisée. Une augmentation de leur durée de vie permet non seulement d’amortir cet investissement sur une période plus grande, mais également, de réduire les rejets à l’environnement conséquent de l’importante quantité de matériaux de cuve à traiter en fin de vie. On notera que chaque tonne d’aluminium produit environ 25 kg de brasques usées. Le Québec, à lui seul, produit actuellement près de 2.8 millions de tonnes d’aluminium, ce qui correspond à environ 70 000 tonnes de brasques à traiter.
Afin d’éviter d’importants chocs thermiques lors de la versée du bain, la cuve d’électrolyse doit préalablement être chauffée. Dans l’industrie, la méthode de préchauffage la plus largement utilisée est la méthode dite «résistive». Lors de ce processus, un lit de carbone est placé sur les blocs cathodiques et les anodes y sont déposées. Par la suite, la totalité ou une partie du courant de la ligne est forcée dans la cuve [8]. L’effet Joule génère de la chaleur dans les matériaux conducteurs et devient ainsi le principal moteur du préchauffage. Ce processus permet, entre autres, d’éviter les fissures dans les blocs cathodiques, les chocs thermiques lors du versement du bain et la création d’interstices entre la pâte monolithique et la cathode [3]. En minimisant les facteurs responsables des infiltrations de bain et de métal, qui peuvent causer la mort technique de la cuve, le préchauffage permet d’accroître sa durée de vie. Il est donc primordial d’effectuer un préchauffage adéquat, qui permettra au plan cathodique d’atteindre une température qui diminuera le gradient thermique lors de la versée du bain. L’assurance d’un scellement adéquat du plan cathodique, essentielle au bon fonctionnement de la cuve, passe donc nécessairement par une bonne connaissance du comportement de la pâte monolithique, matériau étant utilisé à cette fin.
La pâte monolithique est un matériau à base de carbone dont les agrégats sont liés par une huile goudronnée. C’est un matériau poreux ayant un comportement thermomécanique particulier. Étant thermoreactif, le processus de préchauffage influence directement son comportement. En effet, tout au long de cette étape, plusieurs changements au niveau de la microstructure de la pâte se produisent, et ce, de façon irréversible. Ces changements d’origine chimique ont une grande influence sur la réponse mécanique du matériau au niveau macroscopique. De plus, la pâte subit initialement une expansion d’origine thermochimique qui est suivie d’une contraction . Toutes ces déformations de la pâte ne doivent cependant pas créer d’ouverture au niveau du plan cathodique. C’est pourquoi la compréhension de son comportement est essentielle à l’amélioration de la durée de vie des cuves d’électrolyse.
Composition de la pâte monolithique
La pâte monolithique est un matériau poreux ayant une forte ressemblance, au niveau de sa texture lorsqu’elle est crue, avec l’asphalte utilisé sur nos routes. On parle d’un matériau poreux à l’échelle macroscopique composé de 85% d’agrégats d’anthracite calcinés et de 15% d’un liant à base de brai de goudron et d’huile carbochimique. Plusieurs fabricants y ajoutent aussi quelques stabilisants [10]. On distingue 2 types de pâte : la pâte chaude et la pâte froide [8]. Une pâte froide peut être appliquée à température ambiante alors que la pâte chaude doit préalablement être chauffée et appliquée dans une cuve ayant une température plus élevée. Ceci s’explique par une température de ramollissement du brai plus élevée qui rend la manipulation du matériau difficile à température ambiante. Ainsi, pour une pâte chaude, la température de ramollissement se situe entre 140 à 180°C alors que pour une pâte froide, on parle de température de l’ordre de 10 à 40°C. Pour abaisser la température de ramollissement d’une pâte, un diluant est généralement ajouté au mélange.
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Table des matières
CHAPITRE 1 PRÉSENTATION DU PROJET DE RECHERCHE
1.1 GÉNÉRALITÉS SUR L’ALUMINIUM
1.2 PROBLÉMATIQUE
1.3 OBJECTIFS
1.4 ÉTAT DES CONNAISSANCES
1.4.1 Composition de la pâte monolithique
1.4.2 Caractérisation du comportement élastoplastique
1.4.3 Comportement spécifique en cours de cuisson
1.4.4 Survol des modèles de comportement existants
1.5 MÉTHODOLOGIE
1.5.1 Sélection et implémentation de la loi de comportement
1.5.2 Validation du banc d’essai pour validation expérimentale
1.6 ORGANISATION DU DOCUMENT
CHAPITRE 2 MODÈLE CONSTITUTIF ÉLASTOPLASTIQUE POUR LA PÂTE MONOLITHIQUE
2.1 GÉNÉRALITÉS
2.2 DÉFINITION DU MODÈLE ÉLASTOPLASTIQUE AVEC ADOUCISSEMENT POUR LA PÂTE MONOLITHIQUE
2.2.1 Justification de la stratégie retenue
2.2.2 Introduction du modèle
2.2.3 Définition de la surface de charge
2.2.4 Définition du potentiel d’écoulement plastique
2.2.5 Écrouissage isotrope
2.2.6 Adoucissement isotrope
2.2.7 Effets de la température sur le comportement du matériau
2.2.8 Formulation généralisée de la loi de comportement élastoplastique
2.3 PROCÉDURE D’IDENTIFICATION DES PARAMÈTRES DU MODÈLE
2.3.1 Réalisation des essais mécaniques
2.3.1 Méthode d’identification des paramètres physiques
2.3.2 Détermination des paramètres du potentiel de charge
2.3.3 Détermination des paramètres du potentiel d’écoulement plastique
2.3.4 Prise en compte du niveau de cuisson du matériau
CHAPITRE 3 INTÉGRATION DE LA LOI ET MISE EN ŒUVRE INFORMATIQUE
3.1 GÉNÉRALITÉS
3.2 RÉSOLUTION DU PROBLÈME MÉCANIQUE PAR ÉLÉMENTS FINIS
3.2.1 Travail virtuel
3.2.2 Prise en compte des non-linéarités matérielles et géométriques
3.2.3 Calcul de la contrainte
3.2.4 Calcul de la matrice tangente élastoplastique
3.2.5 Calcul des gradients et du Hessien des différents potentiels
3.2.6 Algorithme de calcul
3.3 RÉSOLUTION DU PROBLÈME THERMOCHIMIQUE
3.3.1 Schéma explicite
3.3.2 Schéma implicite
3.4 MISE EN ŒUVRE INFORMATIQUE
3.4.1 Présentation de l’interface avec ANSYS®
(UserMat)
3.4.2 Conception structurée de la loi de comportement
CHAPITRE 4 VALIDATION NUMÉRIQUE DE LA LOI DE COMPORTEMENT
4.1 GÉNÉRALITÉS
4.2 LOGICIELS UTILISÉS
4.3 VALIDATION MÉCANIQUE
4.3.1 Modèle numérique
4.3.2 Simulation avec effort en compression
4.3.3 Simulation avec effort en traction
4.3.4 Poutre avec effort en flexion
4.3.5 Extension au cas de l’acier
4.4 VALIDATION THERMO-CHIMIO-MÉCANIQUE
4.4.1 Modèle numérique
4.4.2 Simulation d’une cuisson libre
4.4.3 Simulation d’une cuisson confinée
4.5 EN RÉSUMÉ
CHAPITRE 5 VALIDATION THERMOMÉCANIQUE DU BANC D’ESSAI BERTA
5.1 MISE EN CONTEXTE
5.1.1 Historique
5.1.2 Spécification du banc d’essai
5.2 OBJECTIFS DE LA VALIDATION DU BANC D’ESSAI
5.3 MÉTHODOLOGIE
5.3.1 Hypothèses de base et définition
5.4 RETOUR SUR LES TESTS MÉCANIQUES SUR BERTA (2008)
5.4.1 Configuration de BERTA pour les tests
5.4.2 Résultats expérimentaux
5.4.3 Modèle analytique
5.4.4 Analyse des résultats
5.4.5 Analyse de sensibilité
5.4.6 Conclusions partielles
5.5 RETOUR SUR LES TESTS THERMOMÉCANIQUES SUR BERTA (2009)
5.5.1 Configuration de BERTA pour les tests
5.5.2 Résultats expérimentaux
5.5.3 Modèle analytique
5.5.4 Analyse des résultats du modèle
5.5.5 Analyse de sensibilité
5.5.6 Conclusions partielles
5.6 NOUVELLE SÉRIE DE TESTS EXPÉRIMENTAUX
5.6.1 Généralités
5.6.2 Tests de frottement à température ambiante
5.6.3 Tests thermomécaniques
5.7 EN RÉSUMÉ
5.8 MODIFICATIONS PROPOSÉES À LA MÉTHODE DE MESURE
5.9 CONCLUSION
CHAPITRE 6 CONCLUSION
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