Généralité sur la mycorhization

L’aubergine africaine (Solanum spp.) est un des légumes-fruits ou légume-feuilles les plus couramment consommés en Afrique notamment dans la sous région occidentale (De Bon, 1984). Il se situe en troisième position après la tomate et l’oignon et avant le gombo. Peu de statistiques sur la production sont disponibles en l’Afrique subsaharienne. Une estimation pour quelques pays donne une production annuelle de fruits de 8 000 t au Sénégal, 60 000 t en Côte d’Ivoire et 4 500 t au Burkina Faso. Les petits producteurs représentent au moins 80 % de la production totale (Grubben et al., 2004). Au Sénégal, cette culture connaît une forte expansion liée à son importance économique et alimentaire.

Plusieurs travaux ont été réalisés au CDH sur l’amélioration variétale et l’étalement de la culture (Collingwood et al., 1981 ; Seck, 1984 ; 1986a). Les variétés disponibles sur le marché sont entre autres, Soxna et Keur Mbir Ndaw. Elles sont productives et possèdent de bonnes qualités organoleptiques. Malheureusement, elles sont sensibles aux acariens (Tetranychideae et Tarsonemideae). Il a été rapporté que les acariens peuvent provoquer sur les variétés tolérantes des chutes de rendement allant de 25 à 50% et jusqu’à 100 % dans le cas des variétés sensibles (Ka, 1995). Malgré l’existence de variétés tolérantes (Lignée10 et Cabrousse), les acariens continuent à provoquer d’importants dégâts sur la culture. Pour venir à bout de ces déprédateurs les paysans font recours aux pesticides à des doses suboptimales. Et pourtant l’usage abusif des produits phytosanitaires (ou pesticides) constitue une menace pour l’environnement et les consommateurs. Ce qui suscite au niveau de tous les acteurs du système de protection agricole, la recherche d’alternatives durables conciliant les préoccupations des petits producteurs avec la préservation de l’environnement.

De ce fait, le Laboratoire d’Amélioration des Plantes du CDH/ISRA en collaboration avec le Laboratoire de Biotechnologies des Champignons de l’UCAD ont initié l’inoculation de l’aubergine africaine (ou jaxatu) par les champignons mycorhiziens arbusculaires (MA). L’étude a été entreprise par Diop et al., (2003). L’utilisation des champignons mycorhiziens en agriculture est justifiée par leur rôle avéré dans l’amélioration de la nutrition hydrominérale de la plante. Les inocula MA ont été largement étudiés pour leurs propriétés bio fertilisantes et bio stimulantes qui induisent les bienfaits de la symbiose mycorhizienne sur l’amélioration de la croissance, du rendement (Menge, 1982b ; Miller et al., 1986 ; Jeffries, 1987 ; Plenchette, 1991) et sur la protection des cultures (Caron et al., 1986).

GénéralitéS sur la mycorhization

Historique

Depuis qu’on a crée le terme mycorhize pour décrire l’association symbiotique qui existe entre les racines des plantes et les champignons, la recherche sur les mycorhizes n’a cessé de progresser. Cependant, ce n’est que depuis quelques décennies seulement que les mycorhizes ont réellement connu un essor international par la publication de nombreux ouvrages de référence (Schenck, 1982 ; Harley et Smith, 1983 ; Powell et Bagyaraj, 1984 ; Diop, 1996 ; Smith et Read, 1997 ; Strullu et al., 1991). Malgré de nombreux résultats, les applications n’en sont qu’à leur début. La symbiose mycorhizienne est rencontrée chez 95 % des plantes supérieures vivant dans des zones tropicales humides, ou sèches et désertiques (Strullu, et al., 1991). En effet, dans la nature, l’absence de mycorhization constitue l’exception (Gerdemann, 1971).

Les progrès réalisés au cours des dernières années l’ont été sur le plan de la compréhension d’aspects fondamentaux. Ceux ci englobent le domaine de l’anatomie, de la morphologie, de l’écologie, de la taxonomie, de l’étude des phénomènes physiologiques associés à la présence des champignons mycorhiziens, de l’obtention de cultures axéniques et des interactions biologiques (Powell et Baggaraj, 1984). L’importance des mycorhizes est largement appuyée par les microbiologistes, les physiologistes et les pathologistes. Ainsi les mycorhizes occupent une place de plus en plus importante dans l’agriculture notamment dans la production et le développement des cultures (Bagyaraj et al., 1988).

Concept général

Parmi les nombreux micro-organismes qui vivent dans la rhizosphère, on trouve des champignons microscopiques dont les filaments s’associent aux racines des plantes pour former un nouvel organe appelé mycorhize. Ainsi, l’association mycorhizienne est basée sur des bénéfices réciproques et s’articule autour d’échanges bidirectionnels d’éléments nutritifs entre les symbiotes. Il s’agit donc d’une union mutualiste et durable entre les racines d’une plante et les champignons. On distingue plusieurs types de mycorhizes en fonction du partenaire fongique. Certains champignons supérieurs  (ascomycètes, basidiomycètes et gastéromycètes) s’associent à des ligneux (bétulacées, fagacées, pinacées) pour former des ectomycorhizes. On trouve un autre type de mycorhize chez les orchidées et les éricacées, mais le plus répandu est celui des mycorhizes à arbuscules dont le partenaire fongique est un champignon inférieur (zygomycétes).

La symbiose mycorhizienne arbusculaire 

La symbiose endomycorhizienne à arbuscules est de loin la plus répandue des symbioses mycorhiziennes puisqu’elle s’exprime chez prés de 90 % de l’ensemble des végétaux et qu’on la retrouve à l’échelle mondiale, dans tous les types de sols et sous toutes les conditions climatiques. Le terme «arbuscule» caractérisant les champignons mycorhiziens arbusculaires (MA) décrit la structure typique formée par toutes les espèces de cet ordre. Les arbuscules prennent l’apparence d’un arbuste (Brundrett et al., 1984 ; Gallaud, 1995) et on ne les retrouve qu’à l’intérieur des cellules corticales de la racine. Cette particularité permet de caractériser les MA comme endomycorhiziens en opposition aux champignons ectomycorhiziens où les hyphes s’intercalent entre les cellules racinaires de leur hôte sans jamais y pénétrer.

La taxonomie

Les champignons MA appartiennent à une catégorie très ancienne de champignons (les Zygomycètes) et ont été regroupés récemment en un ordre, les Glomales (Morton et Benny, 1990) qui comprend toutes les espèces capables de vivre en symbiose avec les plantes. L’essentiel des espèces connues appartient à la famille des Glomacées formées des genres Glomus et Sclerocystis. L’ensemble des champignons MA compte actuellement environ 160 espèces distribuées en trois familles et 6 genres, avec une distribution mondiale (Dalpé, 1995). L’essentiel des espèces connues a été décrit durant les deux dernières décennies ; ce qui indique d’une part l’intérêt accru pour ces organismes et d’autre part la difficulté inhérente à leur traitement taxonomique. En fait, la plus grande difficulté vient de ce que toute la taxonomie de ces organismes repose actuellement sur les caractères morphologiques des spores. Il s’agit de structures unicellulaires, de forme généralement globoïde, à paroi épaisse formée de plusieurs couches de différentes textures, relié en réseau filamenteux par un hyphe suspenseur de morphologie variée. Une classification récente regroupe les champignons MA sous l’embranchement des Glomeromycota (Schübler et al., 2001 ; Walker et Schübler, 2004). Dans cette classification, les champignons MA sont placés dans la classe des Glomeromycetes, ordre des Glomerales et la famille des Glomeraceae.

La biologie

La morphologie et fonctionnement

Le processus d’infection d’une racine hôte par un champignon MA se divise en plusieurs étapes de changements complexes chez le champignon (Giovannetti et al., 1994). Il débute par la germination d’un hyphe fongique issue d’une propagule, qui peut être une spore, une vésicule ou un fragment de champignon. En arrivant à la surface d’une racine hôte, l’hyphe va généralement différencier un appressorium, premier signe de reconnaissance pour ensuite pénétrer les tissus racinaires externes (Gianinazzi-Pearson, 1996). L’appressorium ne peut se former que 36 heures après le début de l’interaction entre un champignon MA et la racine hôte (Giovannetti et Citernesi, 1993). Les hyphes se faufilent entre les cellules corticales et se propagent rapidement en différenciant des arbuscules intracellulaires et dans certains cas des vésicules intercellulaires. Les arbuscules s’établissent plus rapidement et ont une vie éphémère variant de une à trois semaines (Miller et al., 1986). Ils sont considérés comme étant le site préférentiel d’échanges de nutriments ente les symbiotes (Bonfante-Fasolo, 1984). Les vésicules, organes de réserve (principalement lipidique), deviennent de plus en plus nombreuses avec la maturité des plantes. Parallèlement à sa croissance intraracinaire, le champignon va aussi développer un important réseau mycélien dans le sol environnant. Ce dernier peut s’étendre sur plusieurs centimètres à partir de la surface racinaire, augmentant ainsi le volume de sol exploré par la plante (Plenchette, 1991). Au niveau de ces hyphes extra matriciels, il y aura une production de spores qui assurent la survie du champignon dans le sol en absence de plante hôte. Une fois la symbiose s’établie, le champignon devient partie intégrante du système racinaire de la plante et les échanges peuvent avoir lieu.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. SYNTHESEBIBLIOGRAPHIQUE
1. Généralité sur la mycorhization
1. 1. Historique
1.2. Concept général
1.3. La symbiose mycorhizienne arbusculaire
1.3.1. La taxonomie
1.3.2. La biologie
1.3.2.1. La morphologie et le fonctionnement
1.3.2.2. La nutrition
1.3.3. Le partenaire végétal
1.4. Le rôle des champignons MA en agriculture
1.4.1. La nutrition phosphatée
1.4.2. La nutrition azotée et hydrique
1.4.3. L’absorption des autres éléments minéraux
1.4.4. La protection
1.5. La dépendance mycorhizienne
1.6. Les conditions initiales de culture
1.6.1. L’interaction dans la mycorhizosphère
1.6.2. La fertilisation
1.6.3. La sélection génétique
2. Les Pesticides
2.1. Définition
2.2. La classification des pesticides
2.2.1. La classification par origine
2.2.2. La classification selon la cible
2.3. Les modes d’action des pesticides
2.4. La fréquence d’utilisation des pesticides
2.5. La toxicité des pesticides
2.6. L’application des pesticides sur la mycorhization
3. Généralités sur le jaxatu
3.1. Quelques éléments de systématique du genre Solanum
3.2. Le Solanum aethiopicum
3.2.1. L’appareil végétal et la morphologie florale
3.2.2. La biologie florale
3.3. Le Solanum macrocarpon
3.3.1. L’appareil végétal et morphologie florale
3.3.3. La biologie florale
3.4. L’importance économique et alimentaire du jaxatu
3.4.1. La production
3.4.2. La consommation
3.4.3. Les autres usages
3.5. Les contraintes liées à la culture du jaxatu
3.5.1. Les ennemis de la culture du jaxatu
3.5.1.1. Les parasites
3.5.1.1.1. Le complexe Alternaria-Stemphylium
3.5.2.1.2. Les nématodes à galle
3.5.1.2. Les ravageurs
3.5.1.2.1. Les jassides
3.5.2.2.2. Les Phycita
3.5.1.2.3. La foreuse des fleurs (Scrobipalpa ergasima)
3.5.1.2.4. Les acariens
3.5.2. Les méthodes de lutte
3.5.2.1. La lutte chimique
3.5.2.2. La lutte biologique
3.5.2.3. La lutte génétique
3.6. Les travaux effectués sur la mycorhization du jaxatu
II : PARTIE EXPERIMENTATION
2.1. Le Matériel
2. 1.1. Le matériel végétal
2.1.2. Le matériel fongique
2.1.3. Les produits phytosanitaires utilisés
2.2. La méthodologie
2.2.1. La présentation du site
2.2.2. La mise en place de la pépinière et son suivie
2.2.3. L’inoculation des champignons mycorhiziens arbusculaires
2.2.4. Le repiquage
2.2.4.1. La préparation du site de repiquage
2.2.4.2. Le dispositif expérimental
2.2.5. L’entretien
2.2.5.1. L’irrigation et l’élimination des mauvaises herbes
2.2.5.2. La fertilisation
2.2.5.3 L’application des pesticides
2.2.6. Les observations effectuées en cours de culture
2.2.6.1. Le développement végétatif
2.2.6.2. L’évaluation de nombre de plants attaqués par génotype
2.6.3.3. Les caractéristiques de la production
2.2.6.4. Les étapes de la détermination des paramètres de mycorhization
2.2.6.5. L’expression des résultats de la mycorhization
2.2.7. L’analyse des résultats
III : RESULTATS ET DISCUSSION
3.1. Les résultats
3.1.1. Les paramètres de croissance
3.1.1.1. La hauteur
3.1.1.2. L’encombrement
3.1.2. Les aspects phytosanitaires
3.1.3. Les paramètres de production
3.1.3.1. Le calibre des fruits
3.1.3.1.1. Le diamètre équatorial
1.3.1.1.2. Le diamètre polaire
3.1.3.2. Le nombre de fruit par plant
3.1.3.3. Le rendement
3.1.4. La mycorhization
3.1.4.1. La fréquence de colonisation
3.1.4.2. L’intensité de colonisation
3.2. La discussion
IV : CONCLUSION ET PERSPECTIVES
La Conclusion générale et les perspectives
V : RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
VI : ANNEXES

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