GBM primaires et secondaires : des différences moléculaires

GBM primaires et secondaires : des différences moléculaires

Herpes simplex virus

Intérêt du virus

L’Herpes simplex virus 1 ou Human Herpes Virus 1 (HHV1) est un virus à ADN double brin de la famille des Hesperviridae à l’origine de symptômes mineurs chez l’Homme
(stomatite, kératite). La caractéristique principale est sa capacité à entrer en latence. Cette latence semble à l’origine de sa forte prévalence puisque les deux tiers de la population sont séropositifs pour l’HHV1. De plus, le HHV1 possède un neurotropisme naturel qui en fait un virus intéressant dans la thérapie des tumeurs intracrâniennes comme les gliomes. L’HHV1 a été l’un des premiers virus à être étudiés à des fins oncolytiques. En 1991, Martuza et al. (Martuza et al., 1991) ont mis au point un virus mutant d’HHV1 déficient pour la TK capable d’épargner les cellules qui se divisent peu et de détruire les cellules cancéreuses à la fois in vitro (lignée cellulaire de glioblastome humain U87) et in vivo sur des souris immunodéprimés ayant subi une injection intracrânienne de ces cellules U87. Ceci fut la première preuve de la capacité oncolytique de l’HHV1.

Des virus oncolytiques atténués

Depuis, de nombreux autres mutants ont été conçus : R3616, HSV-1716, hrR3, G207 et G47Δ sont les plus étudiés dans le cadre des GBM. L’objectif de ces virus est alors de diminuer la neurovirulence afin d’en faire un candidat idéal pour traiter les gliomes. Un, puis deux, puis trois gènes ont alors été délétés afin d’augmenter l’innocuité du virus, on différencie alors 3 générations de virus :  Les virus de première génération (R3616 et HSV-1716) qui présentent une délétion du gène γ134.5 (Chou et al., 1990) codant pour une protéine ICP34.5 à l’origine de la déphosphorylation de elF2α. L’absence de cette protéine entraine un arrêt de la synthèse protéique dans la cellule « normale » infectée. A l’inverse, la cellule tumorale, qui présente une altération de sa réponse antivirale permet la réplication du virus malgré la délétion de ce gène (Braidwood et al., 2013). De plus, Verpooten et al. en 2009, ont montré que ce gène était indispensable à la neuro-invasion (Verpooten et al., 2009) et donc à la neurovirulence.  Les virus de seconde génération (hrR3 et G207) présente, en plus, la délétion du gène UL39 qui code pour une ribonucléotide réductase (RR) qui permet la multiplication du virus dans des cellules qui ne sont pas en division (Yamada et al., 1991) : sa délétion permet donc théoriquement d’empêcher la multiplication du virus dans des cellules normales, à l’inverse des cellules tumorales pour lesquelles la RR est présente en quantité importante. Pour le virus G207, un gène rapporteur lacZ a été inséré au sein du gène UL39, empêchant de ce fait sa transcription (Mineta et al., 1995).
 Les virus de troisième génération (G47Δ) pour lesquels une délétion du gène α47 codant pour la protéine ICP47 a été ajoutée (la séquence de ce gène se recoupe avec le promoteur US11) : cette délétion permet d’augmenter la présentation des antigènes de classe I et l’infiltration par les lymphocytes T au sein de la tumeur. En outre cette délétion est à l’origine d’une réplication virale amplifiée et plus rapide (Todo et al., 2001). Ce virus est alors aussi inoffensif que les virus de 2ème génération mais présente une efficacité accrue.

Des virus « armés »

A partir de ces virus inoffensifs, des éléments ou « transgènes » visant à augmenter l’efficacité anti-tumorale peuvent être ajoutés: on les appelle les virus « armés ». Plusieurs objectifs sont visés par ces transgènes :  Augmenter l’action immuno-stimulatrice : De nombreuses cytokines comme l’interleukine 18 (IL-18), IL-9, IL-4 ou GM-CSF ont été étudiées (Todo, 2008) mais c’est l’utilisation de l’interleukine 12 (IL-12) qui semble être la plus prometteuse. L’IL12, capable de stimuler la réponse anti-tumorale, a été insérée à des virus de 1ère génération (M002 avec l’IL-12 murine et M032 avec l’IL-12 humaine). Le virus ainsi modifié est très efficace contre les gliomes in vitro et in vivo sur des modèles murins (syngéniques et xénogreffes) (Hellums et al., 2005). Le transgène codant pour l’IL-12 a aussi été inséré sur un virus de 3ème génération (T-mfIL12) : ce virus semble très intéressant. Des injections de cellules tumorales (cellules Neuro2a) ont été réalisées sur des souris à deux endroits différents, une seule des deux tumeurs a ensuite été traitée avec le virus. Or, une activité anti-tumorale a été observée à la fois au sein de la tumeur traitée et au sein de la tumeur non traitée, évoquant une efficacité accrue du virus (Todo, 2008).
 Ajouter une action anti-angiogénique : Liu et al. ont construit un virus exprimant le platelet factor 4 (PLF4) à partir du virus G47Δ (bG47Δ-PF4). Le PLF 4 est capable d’inhiber la prolifération des cellules endothéliales à l’origine d’une diminution de la croissance tumorale par effet anti-angiogénique comme cela a été montré sur le cancer colorectal (Belman et al., 1996). Le virus bG47Δ-PF4 est toujours capable de se répliquer au sein d’une lignée cellulaire de gliome humain, mais peut aussi diminuer la prolifération des cellules endothéliales. Cette propriété semble liée à une inhibition de la croissance tumorale (injection sous-cutanée de gliome humain sur souris immunodéprimées), et permet une augmentation de la survie des souris utilisées.
 Augmenter l’efficacité en utilisant des gènes suicides. Le principe de cette stratégie est d’utiliser une enzyme produite par le virus (naturellement ou après insertion d’un gène codant pour l’enzyme d’intérêt) afin de produire une substance active à partir d’une prodrogue injectée par voie systémique. Plusieurs virus ont alors été conçus : le HHV1 contient une TK capable d’activer la prodrogue Gangiclovir, mais les études sur modèles murins de gliomes ont été décevantes (Todo et al., 2000). D’autres virus armés d’un gène suicide ont été testés sur des modèles de gliomes avec plus de réussite. En effet, le cytochrome p450 2B1 et la carboxyestérase intestinale humaine sont capables d’activer le cyclophosphamide et l’irinotecan respectivement. L’insertion du gène codant pour ces enzymes est l’origine d’un effet anti-tumoral accru sur des modèles murins immunodéprimés de gliomes. Ces virus sont donc un moyen de combiner chimiothérapie ciblée et virothérapie.
De plus, l’ensemble de ces virus, armés ou non, peuvent être utilisés en combinaison avec des thérapies conventionnelles comme la chimiothérapie, la radiothérapie et la chirurgie afin d’augmenter leur efficacité (Braidwood et al., 2013).

Une innocuité confirmée par les essais cliniques

L’innocuité des virus oncolytiques est une caractéristique majeure et doit être évaluée à la fois sur des modèles animaux mais aussi sur l’Homme avant d’envisager leur utilisation en tant qu’agent thérapeutique. Cette propriété est d’autant plus importante pour l’HHV1 qui est pathogène chez l’Homme et qui présente un tropisme cellulaire varié (Shen and Nemunaitis, 2006). Après des essais prometteurs sur les rongeurs, quelques herpesvirus oncolytiques ont été testés chez l’Homme afin d’attester de leur innocuité (Tableau 6). Les deux virus, G207 et HSV-1716, ont déjà été testés lors d’essais cliniques de phase I et II, les essais de phase III sont en cours (clinicaltrials.gov) dans le cadre de la thérapie du GBM. Pour le virus G207, Markert et al. ont publié les résultats des essais de phase I en 2000 (21 patients) (Markert et al., 2000), 2009 (6 patients) (Markert et al., 2009) et 2014 (9 patients) (Markert et al., 2014). Dans les trois cas, le virus a été injecté dans la tumeur à l’aide d’un cadre stéréotactique ou lors de la résection de la tumeur. Trois régimes d’administration ont alors été étudiés : augmentation progressive de la dose (2000), combinaison à la résection de la tumeur (2009) et combinaison avec la radiothérapie (2014). La dose maximale tolérée n’a pas été atteinte dans l’étude de 2000 bien que 3.109 UFP (Unité Formant Colonie) ait été injectées. Dans tous les cas, aucun signe d’encéphalite (clinique, IRM, analyses de laboratoire) n’a été objectivé bien que quelques effets secondaires notables aient été observés (maux de tête, nausées, hémiparésie, anxiété), sans qu’un lien direct avec l’injection du virus n’ait été clairement démontré. Pour HSV-1716, trois essais cliniques de phase I ont été menés. A l’image du virus G207, la première étude de 2000 (9 patients) consistait en une augmentation progressive de la dose injectée à l’aide d’un cadre stéréotactique (103-105) ; la dose maximale tolérée n’a pas été atteinte évoquant alors l’innocuité du virus (Rampling et al., 2000). En 2002 (12 patients), les injections intra-tumorales ont été réalisées 5-7 jours avant la résection de la tumeur et n’ont pas entrainé d’effets secondaires majeurs (Papanastassiou et al., 2002). En 2004, Harrow et al. ont injecté le virus dans le parenchyme entourant le gliome à la suite de la résection de la tumeur et n’ont pas objectivé de toxicité due au virus (Harrow et al., 2004).

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Table des matières

Liste des abréviations
Table des illustrations
Introduction
I- Etude bibliographique
I.1. Les gliomes
I.1.1 Définition
I.1.2 Epidémiologie
I.1.2.1. Les cancers du SNC
I.1.2.2. Les gliomes
I.1.3 Classifications
I.1.3.1. Evolution des classifications au cours du temps
I.1.3.2. Classifications OMS 2007
I.1.4 Le glioblastome multiforme (GBM) : une entité particulière
I.1.4.1. Généralités
I.1.4.2. Bases moléculaires du développement des GBM
a. Voies de signalisation oncogéniques
i. p16INK4a/CDK-Cycline/Rb
ii. p14ARF-MDM2/4-p53
iii. PI3K-PTEN-Akt-mTOR
iv. Ras-Raf- MAPK
b. Altérations épigénétiques
I.1.4.3. Une classification moléculaire des GBM
a. GBM primaires et secondaires : des différences moléculaires
b. Vers une classification plus fine des différents types de GBM
I.1.4.4. Diagnostic
a. Présentation clinique
b. Imagerie
I.1.4.5. Traitement
a. Chirurgie
b. Radiothérapie
c. Chimiothérapie
I.1.4.6. Pronostic
I.2. Utilisation des virus oncolytiques dans la thérapie des gliomes
I.2.1 La naissance de virus oncolytiques
I.2.2 Virus oncolytique : principe
I.2.2.1. Deux types de virus oncolytiques
a. Les virus naturellement oncolytiques
b. Les virus oncolytiques génétiquement modifiés (ou virus recombinants)
I.2.2.2. Une stimulation de la réponse immunitaire
I.2.3 Utilisation des virus oncolytiques dans le traitement des gliomes
I.2.3.1. Herpes simplex virus
a. Intérêt du virus
b. Des virus oncolytiques atténués
c. Des virus « armés »
d. Une innocuité confirmée par les essais cliniques
e. Une efficacité qui reste à déterminer
I.2.3.2. Adenovirus
a. Intérêt en tant que VO
b. Différents types d’Adénovirus oncolytiques
i. Deux protéines à l’origine de la sélectivité tumorale : les virus de première génération
ii. Augmenter la sélectivité : les virus de deuxième et troisième génération
c. Une innocuité intéressante mais remise en question
d. Une efficacité qui reste encore à prouver
I.2.3.3. Le virus de la maladie de Newcastle
a. Intérêt en tant que VO
b. Différents types de NDV oncolytiques présentant des innocuités et efficacités variées
i. Des souches mésogéniques
ii. Des souches lentogéniques
I.2.3.4. Réovirus
a. Intérêt en tant qu’OV
b. Une innocuité et une efficacité intéressante
i. Etudes précliniques : un virus prometteur
ii. Essais cliniques : une innocuité et une efficacité limitée
I.2.3.5. D’autres virus prometteurs dans le traitement des gliomes
I.3. Le virus myxomateux : un Poxvirus particulier
I.3.1 Classification, structure et organisation du virus
I.3.1.1. Classification au sein des Poxviridae
I.3.1.2. Structure des virions
I.3.1.3. Organisation du génome
I.3.2 Cycle viral
I.3.2.1. Entrée dans la cellule
I.3.2.2. Réplication et formation des virions
a. Expression des gènes précoces
b. Réplication du génome viral
c. Expression des gènes intermédiaires et tardifs
d. Assemblage du virion
I.3.3 Pathogénicité
I.3.3.1. Un virus responsable de la myxomatose
I.3.3.2. Des facteurs de pathogénicité variés
a. Inhibition de l’apoptose
b. Inhibition de la réponse aux interférons
c. Inhibition de la réponse immunitaire
d. Activation du cycle cellulaire
e. Facteurs d’hôte
f. Bilan facteurs de virulence
I.4. Intérêt du virus myxomateux dans le traitement des gliomes
I.4.1 Le MYXV est sélectif et inoffensif
I.4.1.1. Le MYXV est très spécifique des lagomorphes
I.4.1.2. Le MYXV est sélectif envers les cellules tumorales
I.4.1.3. L’injection intracrânienne du MYXV est inoffensive pour les cellules cérébrales normales
I.4.1.4. Le MYXV est capable d’infecter et de détruire sélectivement diverses lignées cellulaires de gliomes
I.4.2 Efficacité du MYXV sur des modèles rongeurs de gliomes
I.4.2.1. Une efficacité optimale sur les souris immunodéprimées
I.4.2.2. La combinaison MYXV-Rapamycine semble efficace
I.4.2.3. L’association avec les cellules Natural Killer est prometteuse
I.4.2.4. Améliorer la délivrance du MYXV
I.4.2.5. Une comparaison entre les différentes stratégies est-elle possible ?
I.4.2.6. Persistance de l’infection in vivo : le rôle du système immunitaire
I.4.3 Les limites du MYXV dans le traitement du gliome
I.4.3.1. Un manque relatif d’efficacité
I.4.3.2. Le système immunitaire à l’origine de l’élimination du virus
I.4.3.3. La délivrance du MYXV n’est pas optimale
I.4.3.4. Le modèle rongeur n’est pas idéal
I.4.4 L’avenir du MYXV
I.4.4.1. Améliorer l’efficacité du MYXV
I.4.4.2. Optimiser la délivrance et la répartition du MYXV au sein du cerveau
I.4.4.3. Le modèle canin : un modèle d’intérêt
II- Etude expérimentale
Introduction
II.1. Matériels et méthodes
II.1.1 Virus
II.1.2 Lignées cellulaires
II.1.3 Titrage des virus sur RK13
II.1.4 Quantification de la charge virale par PCR quantitative
II.1.5 Détermination de la viabilité cellulaire après infection
II.1.6 Western blot : détermination du niveau endogène de p-Akt dans les différentes lignées cellulaires
II.1.7 Analyses statistiques
II.2. Résultats
II.2.1 La lignée J3T : une lignée permissive et sensible au MYX
II.2.1.1. Une permissivité majeure au MYXV souche SG33
II.2.1.2. Influence de la MOI dans l’étude de la permissivité des J3T
a. J3T est permissive au MYXV
b. Une cinétique modifiée par la mortalité cellulaire
c. Une pénétration cellulaire facilitée pour SG33
II.2.1.3. Le MYXV est cytotoxique pour les J3T
II.2.2 Cytotoxicité de SG33 et T1 envers d’autres lignées cellulaires de gliomes canins
II.2.2.1. Une sensibilité différente en fonction des lignées
II.2.2.2. SG33 est plus cytotoxique que T1
II.2.3 Cinétique de mortalité cellulaire au cours du temps
II.2.4 Une permissivité différente en fonction des lignées cellulaires
II.2.4.1. Une pénétration cellulaire facilitée pour SG33
II.2.4.2. La capacité de réplication du MYXV est différente selon la souche et la lignée cellulaire considérée
II.2.5 Le niveau d’Akt phosphorylé semble impliqué dans la sensibilité et la permissivité au MXYV
II.3. Discussion
Conclusion générale
Bibliographie

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