LE SUJET PHOTOGRAPHIÉ
L’objet de la photographie, ou sujet, tient une grande importance et va déterminer le regard du photographe. Mais lorsque l’on prend une photographie, le sujet peut être dans plusieurs situations, et ces dernières vont modifier considérablement l’image et traduire différentes choses au spectateur. La premièreest une situation où le sujet n’a pas conscience d’être photographié, il sera alors dans son état le plus naturel, et le photographe déterminera l’instant de la photographie. Dans un second cas, le sujet se rend compte qu’il est sur le point d’être photographié, son attitude changealors, et l’instant de la photographie enest modifié. La troisième situation est celle où le sujet poseréellementpour le photographe, il va donc adopter l’attitude qui lui est demandée ; ainsi le photographe nous livre un double regard sur lesujet : son regard à travers sa photographie, mais également la manière dont ila fait poser le sujet, qui devient modèle. Ainsi le sujet pose devant l’objectif, tout comme en peinture les modèles posent devant le pinceau du peintre.
Dans son ouvrage La chambre claire, Roland Barthes développe la seconde situation, ce sentiment de se sentir photographié lorsque l’on ne pose pas, mais que l’on sent l’objectif se poser sur nous. Pour lui, cela change considérablement l’attitude du sujet : « Dès que je me sens regardé par l’objectif, tout change : je me constitue en train de « poser », je me fabrique instantanément un autre corps, je me métamorphose à l’avance en image.Cette transformation est active : je sens que la Photographie crée mon corps ou le modifie, selon son bon plaisir. »
Il explique l’angoisse que va traduire son image, la peur que ce ne soit pas lui, qu’elle ne traduise pas l’essence de ce qu’il est. Il se questionne sur la manière dont le regardeur va percevoir cette image, et la manière dont il va la percevoir lui-même, l’impact de cette image sur laquelle il pose furtivement.
En dépit du fait qu’un sujet conscient d’être photographié peut changer d’attitude et adopter, comme le dit Roland Barthes, la « métamorphose en image », il n’en est pas moins lui même à mon sens. Au contraire, un sujet qui regarde l’objectif de l’appareil photographique se dévoile certainement plus au photographe que celui qui est pris a son insu. Mais tout dépend de la manière dont le modèle pose ; ici encore, j’aimerais faire une distinction. Dans un premier cas, le photographe peut mettre en scène son sujet, et donc le faire passer de modèle à acteur de la photographie. En effet, dans ce cas l’intention n’est pas de capturer une image emprunte de la réalité, mais l’image d’une scène fictive. Le modèle peut alors feindre de ne pas voir le photographe, afin de donner une impression de naturel dans la photographie et ainsi éviter d’accentuer la mise en scène. A l’inverse, le sujet ou modèle, peut poser à la demande du photographe en regardant l’objectif, sans mise en scène, uniquement lui, afin de capturer son image dans une grande sincérité.
C’est ce que je tente de faire lorsque je réalise mes portraits photographiques, je place mon modèle devant l’appareil, et ne lui donne qu’une indication : regarder l’objectif et oublier de poser, seulement regarder. J’essaie ainsi de capturer l’image de son visage tel qu’il est, tel qu’il m’apparaît. En faisaitcela, je ne cherche pas à le neutraliser, à le banaliser, bien au contraire.
Roland Barthes dit : « Ah, si au moins la Photographie pouvait me donner un corps neutre, anatomique, un corps qui ne signifie rien ! Hélas, je suis condamné par la Photographie, qui croit bien faire, à avoir toujours une mine : mon corps ne trouve jamais son degré zéro, personne ne lui donne. »
MÉMOIRE ET MÉMOIRES
Il me paraît nécessaire de définir ici la manière dont j’envisage la notion de mémoire dans mon travail. Lorsque l’on parle de mémoire dans les différents champs artistiques, il s’agit souvent de rendre hommage à un ou des disparus.
Qu’il s’agisse d’une histoire personnelle ou d’un drame historique, la notion de mémoire est communément liée à la disparition, à la mort, et donc chargée de douleur. Dans l’exposition Photographies d’Oscar Muñoz, certaines œuvres font référence à la mort, et plus particulièrement, à la mémoire des disparus. Biografias (Biographies), présente des portraits d’anonymes, issus de rubriques nécrologiques, qui disparaissent au fond d’une vasque pour réapparaitre. Proyecto para un mémorial (projet pour un mémorial), suit cette idée du refus de disparition. La destruction de la matière évoque symboliquement la mort, et le fait que la matière réapparaisse traduit ce refus de disparaître. Ces œuvres m’ont bien entendu rappelé les installations photographiques de Christian Boltanski, hommages à la mémoire des juifsdisparus durant la seconde guerre mondiale.
Dans mon cas, la mémoire du souvenir fraternel ne fait pas allusion à la disparition d’un frère, mais relate du souvenir d’une image. J’envisage d’avantage la mémoire dans mon travail comme une tentative de conserver et restituer une image de mes frères à un moment de notre histoire commune.Si mes images sont fragmentées, cela traduit d’avantage la difficulté de retranscrire un souvenir, et symbolise donc la complexité de fixer une image dans la mémoire. Mon écriture photographique est ma manière de restituer un souvenir, au même tire qu’on écrit ses mémoires. Il s’agit donc d’avantage de mémoire au sens littéraire du terme : « mémoires », comme récits de vie, témoignages autobiographiques. La manière dont je choisis de traiter le sujet,ainsi que mes supports pourraient en effet évoquer une disparition et porter à confusion sur mon propos.
« Maman tient dans ses bras un bébé qui n’est pas moi ; je porte une jupe plissée, un béret, j’ai deux ans et demi, et ma sœur vient de naître. (…) Aussi loin que je me souvienne, j’étais fière d’être l’aînée : la première. »
Dans Mémoires d’une jeune fille rangée, Simone de Beauvoir décrit avec beaucoup de précision ses souvenirs d’enfance, et témoigne de la construction de son identité avec comme point de départ, son environnement familial,duquel elle se détachera par la suite. Dans une certaine mesure, à travers ma pratique, j’écris plastiquement mes mémoires, un portrait autobiographique à travers la figure fraternelle ; une construction identitaire à travers l’autre dont le point de départ est la famille, et plus particulièrement la fratrie. Un souvenir, si précis soit-il dans la mémoire, ne sera jamais sur papier ce qu’a été la réalité, car un souvenir est toujours un témoignage de mémoire, avec toute l’interprétation que l’on en fait. Il peut être embellit ou assombrit dans sa retranscription selon l’émotion ou le ressenti qu’il a laissé au sujet. Ainsi, lorsqu’un auteur écrit ses mémoires, c’est toujours le témoignage subjectif du ressenti d’une époque, guidé par la tentative de le retranscrire de la manière la plus proche de la réalité possible. Il en est de même dans mon travail :
L’image fragmentée symbolise la difficulté de retranscrire un souvenir de façon fidèle. Si la photographie n’est pas, comme je l’expliquais précédemment, « objective », c’est au même titre que le souvenir. La photographie n’est pas plus proche de la réalité que l’est le souvenir, car elle révèle le sujet à travers l’œil du photographe.
L idée de mémoire, de souvenir est souvent liée à l’accumulation. On le voit chez Christian Boltanski, puisqu’il accumule des objets ayant appartenus à des disparus afin d’en constituer leur mémoire : boîtes en métal, effets personnels, vêtements etc… Henri Bergson dit :« Toute conscience est donc mémoire, conservation et accumulation du passé dans le présent. »
FRAGMENTS : COMPOSITION ET DÉCOMPOSITION
Comme je l’ai abordé précédemment avec la question du support, la fragmentation, et donc le fragment tiennent une place importante dans mon travail plastique. Le fait de découper, de fragmenter mes portraits trouve son sens dans l’idée de recherche identitaire de l’autre et de soi. L’autre étant lefrère, personne la plus proche de soi : à travers le questionnement sur son identité, on questionne la sienne. En fragmentant l’image de mes deux frères, il y a l’idée de déconstruction, de décomposition, mais une fois encore, ne s’inscrivant pas dans une optique de mort ou de deuil. Ou alors de manière inconsciente ? La fragmentation de l’image de mes frères pourrait elle traduire une peur inconsciente de leur perte ? Dans mon travail, je mets en évidence la fratrie comme un tout. La perte d’un des membres d’unefratrie est un événement dramatique, et provoqueun déséquilibre irréversible.
Les mythes antiques, bibliques, et les contes qui traitent de fratries et de rapports fraternels le font à travers la mort, que ce soit la perte d’un frère, ou son meurtre. Je ne pouvais donc pas obstruer cette notion dans mes recherches. René Kaës explique :« L’imago du frère mort apparaît comme le double mortel et mortifère de l’enfant survivant, comme une image de son narcissisme destructeur. »
En décomposant mes frères, je ne cherche pas à évoquer un quelconque fantasme de mort, mais au contraire, à les déconstruire, afin de les reconstruire, les reconstituer, et ainsi mieux les comprendre. Un visage fragmenté, laissant apparaître des vides, des parties cachées, peut traduire la frustration laissée par les vides de connaissance de personnes si proches de soi. Je n’ai pas réalisé d’autoportrait fragmenté seul,comme j’ai pu le faire avec mes frères, car ce qui me questionne me concernant n’est pas mon identité propre, mais dans sa relation avec les deux autre. Mon autoportrait apparaît dans ma pratique, comme mis en relation avec les autres. Cette deuxième partie aura donc pour but de développer cette notion de fragmentation à travers le processus de création, et donc les supports abordés précédemment ; ainsi qu’approfondir cette idée de perte du frère à l’aide des contes, de la bible, et de mythes antiques.
PAPIERS COLLÉS
Les post-it, ces morceaux de papier que je colle ne sont pas sans évoquer un artiste majeur dans l’art du XX ème siècle, l’inventeur de ce que l’on appelle justement les « papiers collés » : Georges Braque. Lorsque ce dernier met au point cette technique, vers 1912, les papiers collés constituent une innovation majeure dans la composition de la toile. La technique consiste à découper des morceaux de papier ou de toile, d’un dessin ou d’une peinture et de les coller sur une peinture en cours de réalisation. Dans le travail de Georges Braque, comme dans celui de Picasso, les papiers collés vont apporter une grande liberté dans la possibilité de composition de la toile.
Il est vrai que ma technique est bien différente de celle de l’artiste malgré tout : dans son cas, le papier collé vient se fondre dans une toile, une peinture ou un dessin, et ainsi en appuyer et en modifier sa composition. Les lignes du papier découpé viennent apporter un écho à celles peintes sur le tableau. De plus, Georges Braque utilise différentes natures de papier, que ce soit du papier lisse, papier à musique, journal ou papier peint, on retrouve chez lui à partir de 1912, une grande diversité de matière au sein de ses toiles.
La seconde exposition cette année, dont je faisais allusion précédemment, qui a été déterminante dans l’évolution de mon travail, est donc celle de GeorgesBraque au Grand Palais, qui s’est déroulée du 18 septembre2013 au 6 janvier2014 à Paris.Ce qui m’a frappé en découvrant les papiers collés de Braque, c’est la matérialité du tableau, la dimension sculpturale que prennent ses toiles. Les ajouts de différents types de papiers découpés apportent une force à la peinture et au dessin. Pour ma part, mes papiers collés ne sont pas ajoutés à une toile, ou à quoi que ce soit de créé en amont. Ils réalisent eux-mêmes et à eux seuls la composition. De plus, cette composition n’est pas totalement libre comme elle l’est pour Georges Braque car une fois ces papiers imprimés, leur place dans la composition sera régie par la partie de la photographie qu’ils contiendront. Ma liberté est alors de réaliser la composition avant de tirer ma photographie, puisque je choisis leur place avant l’impression.
Dans le cas de César, la composition renvoie à une grille, s’inscrivant dans un rectangle, et donc évoquant le format des tableaux. Cette composition est donc plutôt ennuyeuse par rapport auxcompositions dynamiques de Braque, mais elle existe pour restituer une photographie, et ma volonté étaitde rester sur un format structuré. Avec Gabin, j’ai cherché à dynamiser ma composition, tout en gardant un format final proche du précédent. En revanche, l’intérieur de la composition est plus dynamique. En effet, les papiers collés sont entremêlés, dévoilant des pleins et des vides, laissant apparaître le papier brut, et cachant des parties de la photographie. La composition est donc moins structurée ou du moins plus aléatoire ; les morceaux de papier, en se chevauchant, apportent plus de dynamisme, ainsi qu’une fragmentation plus forte dans ce portrait. Entre César et Gabin, les formats et la composition différente des morceaux de papier collés traduisent donc deux notions plastiques différentes : l’image de César semble sedécomposerou se construire, tandisquecelle deGabinsemble dévoiler despleins et des vides dans l’image.
En littérature, Georges Perros a écrit Papiers collés, un ouvrage en trois volumes, dont un posthume. Cet ouvrage, que l’on peut qualifier d’ « écriture fragmentaire » regroupe une multitude de notes prises par l’auteur surdifférents supports, morceau de papier, ticket de métro etc… Ces annotations sont de vrais fragments de vie : citations de ses lectures, poèmes, idées,humeurs du moment, Georges Perros réalise avec cet ouvrage un véritableautoportrait, à travers une multitude de prélèvements de quotidien.
Dans sa pratique littéraire, comme dans ma pratique plastique, « les papiers collés » sont signe de fragments de vie. Le récit autobiographique que je dresse à travers les visages photographiés de mes deux frères, et leur fragmentation, constitue en quelque sorte mes « Mémoires de fratrie ». Le fragment est donc lié à cette idée de morceau de vie, qu’il soit constitué de texte, de notes, ou d’une écriture photographique. Si Georges Perros est dans la composition, je suis, en revanche, dans la décomposition, un processus plastique qui tend à faire disparaître mon image. Car en composant ses « Papiers collés » et en les publiant sous forme d’ouvrage, Georges Perrosveut immortaliser ces fragments de vieen les fixant dans le temps. Le titre Papiers collésaccentue d’ailleurs cette idée de morceaux de papiers récoltés, puis figés ensemble, dans une idée de durabilité. Au contraire, en décomposant mes portraits et en les tirant sur ces supports post-it, j’en fais un portrait éphémère, qui est voué à disparaître lorsque les papiers ne colleront plus. Contrairement à l’auteur, mes « papiers collés » sont donc voués à se décoller.
Dans le double portrait Fratrie hybride, je joue justement avec l’aspect éphémère et repositionnable des papiers collés. Afin de mettre en avant les liens entre mon frère et moi, j’effectue deux doubles portraits, constitués chacun de la moitié de mon visage et de celui de mon frère. A la manière d’un damier, j’intervertie un morceau de papier sur deux, composant ainsi deux visages fictifs. Le choix du format est volontairement relativement petit (90 x 78 chacun) car je voulais que le résultat présente un côté « monstrueux » . Je souhaitais accentuer le fait que malgré les ressemblances d’un frère et d’une sœur, un mélange grossier en fait des monstruosités. Ici, les morceaux de papiers ne traduisent aucunement l’idée de mémoire ou de souvenir, puisque ces deux personnes n’existent pas. Au contraire, ils créent des possibilités. Le fait de pouvoir les déplacer, les échanger, permet un jeu de transformation, et d’hybridation des portraits. Oscar Muñoz s’est également prêté à ce jeu, mais en mélangeant uniquement sa propreimage. Il a créé des autoportraits fictifs à partir de plusieurs photographies de lui-même. Cette œuvre s’appelle d’ailleurs El juego de las probabilidades (Le jeu des probabilités)et cherche à traduire plastiquement des différents visages qu’aurait pu avoir l’artiste, en réalisant des hybridations de lui-même. Le résultat ici aussi a quelque chose de grotesque, moins monstrueux que le serait un mélange de plusieurs personnes différentes, mais présente tout de même un aspect ridicule.Cette œuvre ouvre l’exposition de l’artiste, peut être une manière d’évoquer les différents visages de ce dernier, à l’image de presque quarante ans de carrière artistique.
LES LIENS FRATERNELS
Qui dit fratrie dit liens. Quelques soient les relations qu’entretiennent les frères et sœurs : amour, haine, envie, jalousie, rivalité, complicité etc…, ils sont inéluctablement liés. Que ce lien soit affectif ou conflictuel, le frère et la sœur auront toujours un lien qui les uni depuis la naissance, ils partagent le même héritage génétique. C’est ce lien que je vais tenter de mettre en évidence dans cette partie. René Kaës, dans Le complexe fraternel, intitule sa deuxième partie «Essais sur les liens fraternels ». Il l’introduit en expliquant :« Le complexe fraternel est une structure intrapsychique, les liens entre frèreset sœurs sont des organisations intersubjectives. »
Pour lui, ces liens dans la fratrie sont régis par deux axes : un axe horizontal et un axe vertical, l’un représentant le rapport de chacun avec le couple parental, et l’autre, les liens spécifiques à la fratrie, régis par le « complexe fraternel ». Pour ma part, les rapports avec le couple parental ne font pas parti de mes préoccupations actuelles, cette partie est en lien avec le complexe d’ Œdipe, sur lequel je n’ai pas développé mon propos. Je me concentrerai donc dans cette partie sur les liens « intrapsychiques » et « intersubjectifs » dont parle René Kaës.
Mais de quelle manière mettre en avant des liens plastiquement ? Mes recherches plastiques dans cette partie se tourneront vers le tissagephotographique. D’une autre part, je traiterai des dominances et récessivités dans un ensemble fraternel, par le biais de la transparence du verre. Cela mettra en évidence des notions d’équilibre et de tension au sein de la fratrie et posera la question de l’être comme individu, ou come parti d’un tout, dans lastructure fraternelle.
L’accumulation et la fragmentation, très présentes dans ma réflexion sur le rapport aux frères et à la mémoire ont trouvé écho dans la pratique de Chiharu Shiota, dans sa manière de fragmenter l’espace, et de le redessiner, par le biais de l’accumulation démesurée de fils, et l’acte de tissage.
Oscar Muñoz a également réalisé des tissages photographiques, mettant également en scène son autoportrait. Dans mes tissages, j’entremêle mon visage avec celui d’un de mes frères (Le cadet dans Lienset le benjamin dans Lié/délié) ; tandis que l’artiste a réalisé deux types d’autoportraits tissés. Le premier constitue un tissage réalisé à partir de différentes photographies de lui-même, le résultat se composant de douze autoportraits, à l’aspect pour le moins bizarre, presque grotesque. Cette œuvre s’intitule El juego de las probabilidades (Le jeu des probabilités) et livre une multitude de visages fictifs et fragmentés de l’artiste. Le second type d’autoportrait qu’il propose à travers la technique du tissage, est un mélange entre son visage, une nouvelle fois, une photographie de lui même, mais cette fois-ci, tissée avec une photographie de la vielle de Cali, que l’on a pu voir avec l’installation Ambulatorio, (Déambulatoire) qui présentait une vue aérienne de cette ville, recouverte de verre fragmenté. L’artiste nous indique donc ici l’importance de cette ville dans sa construction personnelle et artistique, puisqu’on enretrouvera des évocations tout au long de sa carrière. Encore une fois, par letissage, il exprime le caractère indéfectible, sentimental qu’il existe entre luiet cette vielle ; au même titre que le fais avec les deux frères.
Dans Le complexe fraternel, René Kaës développe ce qu’il appelle « Le jeu des identifications croisées », il dit : « Frères et sœurs ont en commun un lien de génération ; ils sont liés par un héritage partagé. S’identifier comme frère et sœur est alors pour une part le résultat d’être identifié comme tels par l’effet de l’investissement de l’infans par le désir parental. »
ÉQUILIBRE ET TENSION DANS LA FRATRIE
La notion d’équilibre se traduit de plusieurs manières dans mon travail : Tout d’abord plastiquement, qu’il s’agisse des tissages ou de l’installation de plaques de verre, ma composition globale tente de traduire d’un équilibre visuel. Les tissages s’accordent et se complètent, Liens etLié/délié peuvent également se lire ensemble, en une seule composition, afin trouver un meilleur équilibre. Dans Dominances, l’équilibre visuel est permis par la superposition de trois groupes de trois plaques chacun, qui vont permettre un roulement de l’ordre d’arrivée des images et donc en équilibrer l’hybridation dans trois formes différentes et complémentaires.
Si la notion d’équilibre se définit comme « Juste proportion, juste mesure » ou encore comme « l’équilibre d’une composition, la distribution égale des masses » , elle inclue une idée équité et dedosage. Dans Dominances, chaque portrait est traité dans un même format, sur le même support,le même nombre de fois. L’équilibre visuel, qui pourrait être apparenté à une formed e symétrie est donc respecté. Mais au delà de l’équilibre visuel, définit comme la répartition des masses il y a l’idée de l’équilibre dans l’accrochage. En effet, les plaques de verre de l’installation Dominances, sont en équilibre au dessus du vide, tenues par quatre clous. Elles ne touchent pas le mur dans lequel sont plantés les clous,elles ne tiennent que par leurs seules forces. De plus, chaque petite installation comporte trois plaques de verre, légèrement espacées mais qui ne sont pas non plus en contact les unes avec les autres. Cet équilibre reste également un équilibre visuel, mais qui réside dans la matérialité du projet, dans son rapport aux matériaux, avec les notions de poids que cela engendre ; contrairement à l’équilibre de répartition des masses visuelles, quireprésentent plutôt le contenu des images.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : L’ÉCRITURE PHOTOGRAPHIQUE
Chapitre 1 : Le sujet photographié
Chapitre 2 : Le support
Chapitre 3 : Mémoire et Mémoires
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
DEUXIÈME PARTIE : FRAGMENTS : COMPOSITION ET DÉCOMPOSIION
Chapitre 4 : Papiers collés
Chapitre 5 : Frères et sœurs dans la mythologie et les contes
Chapitre 6 : Le double insaisissable
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE
TROISIÈME PARTIE : LES LIENS FRATERNELS
Chapitre 7 : Les liens tissés
Chapitre 8 : Equilibre et tensions dans la fratrie
Chapitre 9 : L’individu et le tout
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE
BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE
CATALOGUES D’EXPOSITIONS FILMS
TABLE DES REPRODUCTIONS
TABLE DES ILLUSTRATIONS
TABLE DES MATIÈRES