Les staphylocoques sont des cocci à Gram positifs appartenant à la famille des micrococcaceae. Les critères de virulence de la bactérie in vitro sont directement corrélés à un équipement toxinique et enzymatique complexe avec en premier lieu la capacité ou non à produire une enzyme de type coagulase. Ainsi on distingue l’espèce Staphylococcus aureus (S. aureus) à coagulase positive appelée également staphylocoque dorée (par élaboration d’un pigment caroténoïde donnant une couleur dorée à la colonie), des autres espèces de staphylocoques à coagulase négative (SCN) que l’on regroupe aussi sous le nom de staphylocoques blancs (par opposition à doré) [1]. Ces bactéries sont dotées, en outre, de capacités d’adhérence aux cellules humaines et aux corps étrangers avec formation de biofilm. Celles-ci semblent jouer un rôle clé dans l’initiation des processus de colonisation et d’infection [2]. Les staphylocoques sont, dès les premières heures de la vie, des commensaux naturels de l’homme. Les espèces S. epidermidis et S. hominis des SCN sont les principaux germes de la flore cutanée [2]. S. aureus est particulièrement isolé au niveau des zones chaudes et humides de l’organisme, colonisant volontiers la muqueuse des fosses nasales antérieures, l’oropharynx, la muqueuse vaginale, le périnée, la peau, la région axillaire et le tube digestif. Il est estimé que 20% des sujets hébergent le S. aureus de façon permanente « porteurs dits sains », 30% de façon intermittente et 50% ne sont pas porteurs [1]. Les infections bactériennes à staphylocoques demeurent d’une grande fréquence aussi bien en milieu hospitalier qu’en communauté. Leurs expressions cliniques diverses confrontées par les praticiens sont remarquables. Le réservoir naturel des staphylocoques est l’homme et les animaux à sang chaud. Cependant, éliminées dans le milieu extérieur, ces bactéries très résistantes sont fréquemment retrouvées dans l’environnement. En milieu hospitalier, en tant que bactéries commensales de la peau et des muqueuses, elles donnent le plus souvent lieu à des infections cutanées, mais peuvent aussi entrainer des infections bien plus graves, souvent liées au terrain ou à l’expression de facteurs de virulence, qu’il est important de savoir diagnostiquer. Au contact des antibiotiques, Staphylococcus aureus a acquis progressivement des résistances multiples aux antibiotiques, dont celle à la méticilline et ce, sans perdre de sa virulence. La souche S. aureus est réputé beaucoup plus sensible à l’acquisition de résistance aux antibiotiques par rapport aux autres souches de Staphylocoque dont les facteurs d’acquisition de la résistance sont multiples et variés tout autant les mécanismes.
RAPPELS
DEFINITION
Staphylococcus aureus est une bactérie à Gram positif, disposés en amas ou diplocoque, aéro-anaérobie facultative, mésophile (+15°C à +45°C), chimioorganotrophe et halophiles. Il appartient au règne Bacteria, de la division Firmicutes, de la classe Bacilli, de l’ordre des Bacillales, de la famille des Micrococcaceae, du genre Staphylococcus dont le plus pathogène est celui à coagulase positive. Pour le genre Staphylococcus, ce sont les espèces les plus couramment isolées chez l’homme. L’espèce S. aureus et S. epidermidis sont commensales de l’homme car si l’hôte, c’est-à-dire l’homme, fournit une partie de sa propre nourriture au commensal, il n’obtient en revanche aucune contrepartie évidente de ce dernier, mais n’en subit aucun inconvénient car la relation est à bénéfice non-réciproque. A la différence du parasitisme, le commensalisme est une association non-destructrice pour l’hôte, ce dernier peut tout à fait continuer à vivre et évoluer en présence du commensal et, le plus souvent, « ignore » tout de la relation. Les survies des deux organismes sont interdépendantes [4].
HISTORIQUE
1880 : Louis Pasteur a isolé et identifié dans du pus la souche de S. aureus.
1883 : Ogoston a baptisé sous le nom de Staphylocoque. « Staphylle », « Staphylê » qui signifie grappe de raisin du faite de leur disposition en grappe de raisin et « coccus », « kokkos » ou grain
1884 : Rosembach a classé en fonction de la pigmentation de leurs colonies (blanches ou dorés) .
HABITAT
S. aureus est retrouvé chez les individus sains (15%-30%), particulièrement dans les fosses nasales antérieures, dans la gorge et est de faible quantité dans le tube digestif et dans le périnée.
S. epidermidis est commensal de la peau à 80-100%, des creux axillaires et du périnée.
S. capitis se localise dans le cuir chevelu.
S. auricularis se trouve autour et dans le conduit auditif externe.
Et les autres comme S. hylcus, Staphylococcus pseudintermedius…se trouvant chez les animaux ne sont pas fréquemment retrouvés chez l’homme .
CLASSIFICATION DES STAPHYLOCOQUES
Les staphylocoques sont des cocci à Gram positif, sphériques, immobiles, de 0,5-1,5 µm de diamètre, pouvant être isolés, ou organisés en diplocoques, en chainettes ou en grappes. Ce sont des aéro-anaérobies facultatifs. La production d’une coagulase, d’un pigment caroténoïde jaune doré, et la présence d’une protéine A de paroi caractérise Staphylococcus aureus.
Les autres espèces sont regroupées sous le terme de staphylocoques à coagulase négative (SCN). Une quinzaine d’espèces ont été décrites en pathologie humaine : S. epidermidis, S.saprophyticus, S. haemolyticus, S. hominis, S. capitis, S. lugdunensis, S. cohnii, S. warneri, S .saccharolyticus, S. pasteurii, S. pasteuri, S. schleferi, S. auricularis, S. simulans, S. xylosus .
EPIDEMIOLOGIE
L’épidémiologie des infections à staphylocoque est surtout connue à l’hôpital. Les études françaises récentes basées sur les hémocultures réalisées à l’hôpital indiquent que S. aureus et les SCN sont la cause respectivement de 15 à 23 % et de 8 à 29 % des bactériémies [5-9]. S. aureus et les SCN se partagent avec Escherichia coli les trois premières places dans la plupart de ces études. L’incidence des infections staphylococciques doit être surveillée. En effet, des données Finlandaises suggèrent l’augmentation de l’incidence des bactériémies à S. aureus entre 1995 et 2001 [10]. De même, S. aureus semble devenir, au moins dans certaines parties du monde, la principale cause d’endocardite [11]. La transmission est avant tout directe, à partir d’un sujet colonisé ou d’une lésion Staphylococcique ouverte (cutanée ou muqueuse) ; elle est plus rarement indirecte (objets divers, vêtements, literie). La transmission croisée est le principal mécanisme d’acquisition de S. aureus résistant à la meticilline (SARM). La diffusion des souches dans les services est liée à une transmission indirecte par le personnel ou par du matériel contaminé. Le réservoir des souches est constitué par le portage nasal, cutané et périnéal des malades. Selon les données de l’enquête de prévalence des infections nosocomiales menées en 2006 en milieu hospitalier, le Staphylocoque doré et les Staphylocoques à coagulase négative représentaient respectivement 18,9% et 6% des micro organismes isolés des infections acquises à l’hôpital, soit une prévalence de 0,8 et 0,2 pour cents journées d’hospitalisation. Par contre, 52,4% des souches de S. aureus présentaient une résistance à la méticilline (SARM) en 2006. En consultation de médecine de ville, dans leur expression dermatologique, et surtout chez les enfants, les infections à Staphylocoques sont également un fréquent motif de consultation. Staphyloccoccus aureus est présent chez l’individu sain (15%-30%); particulièrement dans les fosses nasales antérieures et la gorge (30-40%) mais de faible quantité dans le tube digestif et du périnée. S. aureus est une bactérie ubiquitaire que l’on retrouve fréquemment sur la peau et dans les narines des personnes. C’est l’un des principaux agents étiologiques des infections suppuratives superficielles et profondes ainsi que des syndromes liés à l’action des toxines. Il est doué d’une grande capacité d’acquérir et d’exprimer un large éventuel facteurs de virulence et de résistance aux antibiotiques .
PHYSIOPATHOLOGIE : DU PORTAGE A L’INFECTION
L’étude des facteurs de pathogénicité des staphylocoques, et de S. aureus en particulier, a fait l’objet de très nombreuses publications ces dernières années. Le développement de drogues antipathogéniques, en complément des antibiotiques actuellement disponibles qui visent la bactéricidie ou la bactériostase, pourrait offrir de nouvelles possibilités thérapeutiques [13].
Portage cutanéo-muqueux
Les staphylocoques sont, dès les premières heures de la vie, des commensaux naturels de l’homme. S. epidermidis et S. hominis sont les principaux germes de la flore cutanée. Le site préférentiel de portage de S. aureus est la narine antérieure. Les principaux autres sites de portage sont les mains, le périnée, le pharynx. Les staphylocoques peuvent parfois se trouver de manière dominante dans la flore digestive, en particulier après que celle-ci a été modifiée par une antibiothérapie. Les études longitudinales montrent qu’il existe à peu près autant de porteurs intermittents que de porteurs persistants de S. aureus [14]. La prévalence du portage diminue avec l’âge dans la population générale. Schématiquement, elle passe de 60 % dans la première année, à 40 % entre 10 et 20 ans, a 20-30 % après 40 ans. Les facteurs de risque de portage de S. aureus sont le sexe masculin, le diabète, la dialyse, les hépatopathies chroniques, l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), les infections cutanées par S. aureus, certaines dermatoses chroniques (psoriasis, eczéma), l’obésité et les antécédents neuro-vasculaires [14]. Le portage nasal de S. aureus ne pourrait être un facteur de risque d’infection communautaire par S. aureus que dans des communautés fermées telles les casernes [14]. C’est surtout un facteur de risque d’infection chez les patients hospitalisés d’une façon générale, et en particulier chez les patients des services de chirurgie et de réanimation, infectés par le VIH, cirrhotiques ou dialysés. La présence de staphylocoques à l’état commensal sur la peau et les muqueuses induit un risque de contamination des prélèvements bactériologiques superficiels, mais aussi profonds si les conditions d’asepsie ne sont pas rigoureusement respectées.
L’isolement d’un staphylocoque lors d’un écouvillonnage de plaie ne témoigne pas ainsi d’un processus infectieux, mais plutôt d’une colonisation de la plaie par des bactéries vis-à-vis desquelles une antibiothérapie ne présente donc pas d’intérêt. Par ailleurs, l’isolement d’un SCN dans une hémoculture peut témoigner soit d’une contamination, soit d’une réelle bactériémie. Si toutes les hémocultures prélevées où la plupart d’entre elles permettent d’isoler un SCN, il est licite de retenir l’existence d’une réelle bactériémie. Cependant, une seule hémoculture positive à SCN peut également témoigner d’une bactériémie, en particulier chez les patients immunodéprimés [15]. Divers critères bactériologiques et cliniques ont été proposés pour distinguer contamination et bactériémie [15,16].
La peau et les muqueuses forment la première barrière de défense contre les staphylocoques. Le processus infectieux survient généralement à l’ occasion d’une rupture de cette barrière, par des plaies traumatiques, trophiques ou iatrogènes, ou par l’invasion de structures cutanées tels les follicules pilosébacés ou les glandes sudoripares. Le franchissement de la barrière cutanéo-muqueuse n’est cependant pas toujours constaté cliniquement, par exemple en cas de pathogénie toxinique tel le choc toxique staphylococcique.
Adhésion et formation de biofilm
Les capacités d’adhésion des staphylocoques aux cellules humaines, aux matrices extracellulaires et aux corps étrangers sont des facteurs essentiels des processus de colonisation et d’infection, aboutissant à la formation de ces communautés structurées de cellules bactériennes entourées d’une matrice polymerique autoproduite et adhérant à une surface inerte ou vivante, que sont les biofilms [17]. Les corps étrangers (cathéters intraveineux ou vésicaux, matériel ostéo-articulaire par exemple) forment de bons supports pour la formation de biofilms staphylococciques, mais ne sont pas indispensables à leur formation [17]. La croissance en biofilm confère en particulier aux bactéries une résistance aux antibiotiques et au système immunitaire.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I- DEFINITION
II- HISTORIQUE
III- HABITAT
IV- CLASSIFICATION DES STAPHYLOCOQUES
V- EPIDEMIOLOGIE
VI- PHYSIOPATHOLOGIE : DU PORTAGE A L’INFECTION
VI.1- Portage cutanéo-muqueux
VI.2- Adhésion et formation de biofilm
VI.3- Relations avec le système immunitaire
VI.4- Régulation des gènes de virulence
VI.5- Particularités de « Staphylococcus aureus »
VI.6- Enzymes et toxines
VI.7- Thrombose
VI.8- Localisation intracellulaire
VI.9- Particularités des staphylocoques à coagulase négative
VII- ASPECTS CLINIQUES DES INFECTIONS STAPHYLOCOCCIQUES
VII.1- Infections par « Staphylococcus aureus »
VII.1.1- Bactériémies
VII.1.2- Endocardites
VII.1.3- Infections cutanées, muqueuses et sous-cutanées
VII.1.4- Pyomyosites
VII.1.5- Pneumonies
VII.1.6- Manifestations neurologiques
VII.1.7- Infections ostéo-articulaires
VII.1.8- Syndromes toxiniques
VII.2- Infections par staphylocoque à coagulase négative
VIII- NOTION SUR LES ANTIBIOTIQUES
VIII.1- Histoire des antibiotiques
VIII.2- Classification des antibiotiques
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
I- CADRE DE TRAVAIL
II- OBJECTIFS
III- TYPE D’ETUDE
IV- PERIODE D’ETUDE
V- POPULATION D’ETUDE
V.1- Critères d’inclusion
V.2- Critères d’exclusion
VI- ECHANTILLONAGE ET TAILLE DE L’ECHANTILLON
VII- METHODE ET RECEUIL DES DOSSIERS
VIII- VARIABLES
IX- ANALYSE STATISTIQUE
X- CONSIDERATION ETHIQUE
XI- RESULTATS
XI.1- Données selon la répartition des résultats des examens bactériologiques
XI.2- Données selon la provenance des prescriptions
XI.2.1- Répartition de tous les prélèvements selon la provenance des prescriptions
XI.2.2- Répartition des prélèvements à S. aureus et SCN selon la provenance des prescriptions
XI.3- Répartition des données selon le genre
XI.3.1- Répartition des prélèvements selon le genre
XI.3.2- Répartition des prélèvements à S. aureus et SCN selon le genre
XI.4- Données selon l’âge
XI.4.1- Répartition des prélèvements selon l’âge
XI.4.2- Répartition des cas de S. aureus et SCN selon l’âge
XI.5- Données selon les renseignements cliniques et le terrain
XI.5.1- Répartition des prélèvements à S. aureus et SCN selon les renseignements cliniques
XI.5.2- Répartition des patients diabétiques infectés
XI.6- Données selon la sensibilité des germes aux antibiotiques
XI.6.1- Sensibilité à l’oxacilline
XI.6.2- Sensibilité à l’amoxicilline
XI.6.3- Sensibilité à l’association amoxicilline-Acide clavulanique
XI.6.4- Sensibilité aux Triméthroprime-Sulfametoxazole
XI.6.5- Sensibilité à la tétracycline
XI.6.6- Sensibilité aux Céphalosporines de première génération C1G
XI.6.7- Sensibilité des germes aux C2G
XI.6.8- Sensibilité aux C3G
XI.6.9- Sensibilité à la lincomycine
XI.6.10- Sensibilité à la pristinamycine
XI.6.11- Sensibilité à la gentamicine
XI.6.12- Sensibilité à l’érythromycine
XI.6.13- Sensibilité à l’acide fucidique
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I- REPARTITION DES DONNEES SELON LES RESULTATS DES EXAMENS BACTERIOLOGIQUES
II- REPARTITION DES DONNEES SELON LA PROVENANCE DES PRESCRIPTIONS
III- REPARTITION DES DONNEES SELON LE GENRE
IV- REPARTITION DES DONNEES SELON L’AGE
V- REPARTITION DES DONNEES SELON LE TERRAIN
VI- REPARTITION DES DONNEES SELON LA SENSIBILITE AUX ANTIBIOTIQUES
VI.1- Sensibilité du S. aureus
VI.2- Sensibilité du SCN
VI.3- S. aureus versus SCN
VII- RECOMMANDATIONS ET PERSPECTIVES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES