Formes allotropiques du carbone

Après la découverte des nanotubes de carbone (NTC) par Iijima en 1991, ce nouveau matériau a suscité beaucoup d’attention en raison de ses propriétés physiques remarquables. Ce sont des propriétés mécaniques extrêmes, des propriétés électriques, d’émission sous champs couplées à une grande stabilité chimique. Ces propriétés justifient à elles seules la place qu’occupent les nanotubes depuis plus d’une vingtaine d’années comme briques élémentaires dans la recherche mondiale en nanoscience et en nanotechnologie plus particulièrement. De façon parallèle, la technologie des aimants permanents a réalisé des progrès considérables en passant des composés de type AlNiCo dans les années 40, aux composés de type SmCo dans les années 60-70, puis aux aimants à base de NdFeB dans les années 80. Depuis, de nouvelles solutions de rupture technologique sont attendues comme la préparation des particules ferromagnétiques présentant des rapports d’aspect élevés, conduisant à des énergies d’anisotropie de forme, également élevées. Des méthodes de confinement d’éléments ferromagnétiques, comme le fer dans de l’alumine poreuse, furent alors proposées dans les années 2000 pour architecturer un réseau aligné de nanofils magnétiques en vue de préparer des dispositifs de spintronique et plus spécifiquement de la mémoire magnétique à accès aléatoire (MRAM) et des dispositifs logiques magnétiques. Les alumines poreuses utilisées comme moules sont obtenues par oxydation anodique d’un film d’aluminium et conduisent à la formation spontanée d’un réseau quasi régulier de nano pores. La densité des pores est imposée par la physique du procédé alors que leur diamètre est ajusté dans le domaine entre 20 et 100 nm, par les conditions d’oxydation. Les nanotubes de carbone avec une cavité centrale de quelques (1 à 10 ) nanomètres de diamètre offrent une alternative intéressante et un confinement ultime pour les matériaux magnétiques à conditions que certains verrous à ce type de confinement soient levées. Deux procédés ont été développés au LSPM pour produire les nanotubes de carbone et ferons l’objet de cette étude. C’est d’abord le procédé par décharge de plasma d’arc qui utilise des électrodes composites à base de graphite spectroscopiquement pur, mélangé à des métaux de transition, utilisés soit comme catalyseurs, soit comme agent de remplissage. Ce procédé conduit à des nanotubes mono ou multi feuillets et peut être également utilisé pour remplir les nanotubes par du cobalt par exemple par la voie in situ. Le choix judicieux des paramètres de l’arc peuvent ainsi conduire à la synthèse et au remplissage simultané des nanotubes. Parmi ces paramètres nous pouvons citer la concentration en cobalt ou l’ajout d’un co catalyseur comme des terres rares à l’exemple de l’yttrium ou enfin l’utilisation de promoteurs de remplissage comme le soufre. La voie ex situ est également possible, après la synthèse des nanotubes par arc électrique, on procède à leur ouverture et à leur remplissage. Si l’arc électrique permet de produire des nanotubes d’excellente qualité structurale, la sélectivité de ce procédé reste faible et beaucoup de sous produits sont présents avec les nanotubes. De même, l’arc ne permet pas une auto organisation des nanotubes mais conduit plutôt à des structures en fagots enchevêtrées. C’est en cela que le dépôt physique en phase vapeur (PVD), couplé au dépôt chimique en phase vapeur (CVD) offrent une alternative intéressante pour produire des nanotubes et/ou des nanofils alignés perpendiculairement à un substrat. Dans le contexte du magnétisme, le catalyseur de croissance sera un métal ferromagnétique qui sera nanostructuré à l’intérieur des nanotubes en forme d’un réseau de nanofils.

Formes allotropiques du carbone

De tous les éléments constituant l’univers, le carbone revêt une importance particulière car il constitue l’élément primordial dans la composition des organismes vivants et en particulier de l’ADN qui permet de reproduire des cellules. L’importance du carbone réside aussi dans la richesse de sa chimie due à sa capacité de former des liaisons simple, double ou triple conduisant à différentes formes allotropiques de propriétés physiques fondamentalement différentes. A l’état fondamental, le carbone adopte une configuration électronique 1s2 2s2 2p2 (Z=6). A l’état excité, le carbone voit sa couche externe composée de 2s1 2p3 ce qui aboutit a trois hybridations possibles pour le carbone : sp (linéaire), sp2 (plane) et sp3 (tri dimensionnelle). C’est cette richesse qui permet au carbone d’exister sous différentes formes allotropiques avec une structure cristallographique et électronique chaque fois différente. La Figure I.1, donne une classification synoptique de ces différentes formes allotropiques à la fois naturelles et synthétiques. A l’état naturel, le carbone est présent sous deux formes cristallines : le diamant et le graphite. Dans le diamant, les atomes sont hybridés sp3 et se répartissent au sein de deux réseaux cubiques à faces centrées, de sorte qu’un atome soit lié à quatre voisins. En revanche, dans le graphène, les atomes sont hybridés sp2 et sont disposés en deux dimensions (2D) de l’espace. Le graphite est un empilement de feuillets de graphène liées par des liaisons de type Van der Waals. Le graphite est la forme de carbone la plus abondante sur terre et la plus stable thermodynamiquement, dans les conditions normales de température et de pression. En plus des formes cristallisées du carbone comme le graphite et le diamant, le carbone existe également sous la forme aciniforme à l’exemple des suies ou du noir de carbone issu de la combusion des hydrocarbures. Ces formes ne sont pas cristallines car le carbone y est le plus souvent sous une forme amorphe ou mal cristallisée.

En 1985, une nouvelle forme à zéro dimension de l’espace (0D) était découverte par Kroto et al. [KRO1985] et fût baptisée fullerene. Les fullerènes dont la molécule C60 aussi appelée « buckminsterfullerene », est la représentante sont des molécules en forme de cage constituée d’une monocouche d’atomes comme montré sur la Figure I.2. Cette découverte sera récompensée par le prix Nobel de chimie en 1996. Le fullerène le plus abondant est le C60 avec 12 pentagones et 20 hexagones en forme d’un ballon de football. D’autres molécules de la même famille ont été découvertes par la suite, parmi lesquelles le C70 (25 hexagones, 12 pentagones), le C80 (30 hexagones, 12 pentagones) et toute autre molécule de formule chimique C2n avec (2n20)/2 hexagones et toujours 12 pentagones, en parfait accord avec le théorème d’Euler qui stipule qu’on peut fermer toute structure avec 12 pentagones et un nombre pair d’hexagones. Quand le nombre entier n devient très grand (C1 000 000), la forme du fullerène tend alors vers celle d’un nanotube de carbone comme illustré sur la figure I.2. Bien que des micrographies de nanotubes de carbone sont disponibles déjà avant les années 90, notamment à travers les travaux de Oberlin & Endo [OBE1976] et de Radushkevich [RAD1952], ce n’est que depuis l’analyse détaillée des produits de l’arc électrique, que Sumio Iijima, spécialiste en microscopie chez NEC, identifie de façon irrévocable en 1991 les nanotubes de carbone multiparois MWNT, ( Multi Wall Nano Tube) [IIJ1991]. En 1993, Iijima et Ichihashi chez NEC [IIJ1993], et Bethune et al chez IBM [BET1993] rapportent parallèlement la première fabrication de nanotubes mono-parois (SWNT, pour Single Wall Nano Tube). Ces deux synthèses étaient réalisées dans un réacteur à arc électrique en mélangeant du graphite avec un catalyseur en forme de métal de transition (Ni, Co et Fe). Lorsque le carbone gazeux se condensait dans la zone la plus froide du réacteur, les nanoparticules de métal servaient de « germes » à partir desquelles les nanotubes pouvaient croître.

Depuis ces travaux, les nanotubes font l’objet d’un immense intérêt scientifique car ils constituent désormais les briques élémentaires que ce que l’on appelle la « nanotechnologie ». En effets, les nanotubes offrent un impressionant rapport longueur/diamètre et sont de ce fait quasi unidimensionnels. Une autre forme allotropique du carbone découverte plus récemment est le graphène. Le graphène est un matériau bidimensionnel composé uniquement de carbone disposé en plan idéalement monoatomique. Théoriquement, un cristal idéal purement bidimensionnel (2D) ne peut pas exister. En effet, il y a plus de 70 ans, les travaux de Peierls et Landau ont démontré que tout système strictement 2D est thermodynamiquement instable. Or le graphène est bien un cristal 2D mais plongé dans un espace 3D, l’espace ordinaire: les fluctuations thermiques peuvent se développer non seulement dans le plan, mais également hors du plan. En réalité, l’apparition de vaguelettes statiques (en anglais “ripples”) à la surface du graphène stabilisent ce dernier comme sur montré schématiquement sur la Figure I.3.a. Matériellement, le graphène a été isolé pour la première fois par l’équipe d’Andre Geim à l’université de Manchester en 2004 et fût récompensé par le prix Nobel de physique en 2010. L’expérience fondatrice utilisée par l’équipe de Geim utilise la méthode d’exfoliation mécanique (dite méthode du scotch) où le graphène est retiré du graphite par micro-clivage en appliquant simplement un ruban adhésif sur ce dernier. Le grand intérêt que porte la communauté scientifique pour ce matériau est du à sa structure cristalline et électronique qui lui confèrent des propriétés physicochimiques extraordinaires. Du point de vue théorique, le graphène est un système électronique bidimensionnel parfait qui se définit comme un cristal ou un réseau en nid d’abeille de forme triangulaire (2D) dans la classification de Bravais. Aux nœuds se trouvent des motifs en forme d’atomes de carbone. Les liaisons entre les atomes de carbone sont covalentes, la distance interatomique entre les atomes les plus proches voisins (A et B) est a = 1.42 Å.

D’autres structures du carbone sont possibles. Certaines ont été synthétisés telles que les nanocornets ou nanohorn [GEN2002], des feuillets roulés en spirale (nanoscrolls) ou encore des combinaisons de ces différentes structures (des bourgeons de fullerènes à la surface de NTC dits nanobuds, des fullerènes encapsulés dans le cœur central des NTC dits nanopeapods [SMI1998], [SUE2003], des cages de carbone formées de plusieurs feuillets de carbone empilés à la manière d’un oignon [SER2001], [SCH2003]. D’autres formes du carbone, composées de structures tripériodiques infinies en forme de cycles (5, 6, 7) sont des phases métastables non observés encore expérimentalement.

Structure des nanotubes de carbone 

Différentes familles de nanotubes 

Un nanotube de carbone est simplement un cylindre creux constitué d’un plan unique de graphène enroulé sur lui même autour d’un axe . Dans cette structure, les atomes de carbone présentent une hybridation sp2 avec une courbure locale due à l’enroulement, si bien qu’il est généralement admis d’attribuer une hybridation sp2+ε au carbone composant un nanotube de façon à tenir compte de la courbure locale. Chaque atome de carbone est ainsi lié de façon covalente avec trois atomes voisins laissant ainsi un électron dans chaque orbitale pz perpendiculaire au plan des atomes. Structurellement, les nanotubes sont à la fois des molécules unidimensionnels (1D) et des cristaux.

Ces molécules géantes ont un diamètre de l’ordre du nanomètre et une longueur, pouvant atteindre plusieurs micromètres. Idéalement, un nanotube est fermé à ses deux extrémités par deux demi fullerènes qui apportent chacun six pentagones et une courbure positive nécessaire à la fermeture en accord avec le théorème d’Euler. Une autre manière de concevoir un nanotube est de le considérer comme un fullerène que l’on allonge en y insérant toujours des couches successives d’hexagones, on parle alors de fullerène géant.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I Etude bibliographique
I.1 Formes allotropiques du carbone
I.2 Structure des nanotubes de carbone
I.2.1 Différentes familles de nanotubes
I.2.2 Organisation des nanotubes de carbone
I.2.3 Propriétés des nanotubes
I.3 Méthodes de synthèse de nanotubes de carbone
I.3.1 Synthèse par décharge d’arc
I.3.2 Synthèse par dépôt chimique en phase vapeur (CVD)
I.3.3 Synthèse par PECVD
I.4 Remplissage des nanotubes de carbone
I.4.1 Remplissage in situ
I.4.2 Remplissage ex situ
I.5 Propriétés magnétiques des nanotubes hybrides
I.6 Conclusions
I.7 Bibliographie
Chapitre II Synthèse et caractérisation de nanotubes hybrides
II.1 Synthèse des nanotubes de carbone par plasma d’arc
II.1.1 Dispositif expérimental
II.1.2 Électrodes et plasma
II.1.3 Conditions expérimentales
II.1.4 Produits obtenus après la synthèse
II.2 Synthèse de nanotubes de carbone par dépôt chimique en phase vapeur assisté par plasma (PECVD)
II.2.1 Dispositif expérimental
II.2.2 Protocole de synthèse et conditions expérimentales
II.3. Techniques de caractérisation des nanostructures élaborées
II.3.1 Microscopie électronique à balayage avec canon à émission de champ (MEB-FEG)
II.3.2 Microscopie électronique en transmission (MET)
II.3.3 Microscopie à force atomique (AFM)
II.3.4 Diffraction des rayons X
II.3.4 Spectroscopie Raman
II.3.5 Magnétomètre à échantillon Vibrant (VSM)
II.3 Conclusions
II.4 Bibliographie
Chapitre III Synthèse de Matériaux hybrides (Cobalt-CNT) par arc électrique
III.1 Synthèse ex-situ de nanotubes hybrides
III.1.1 Synthèse des nanotubes de carbone
III.1.2 Ouverture des nanotubes de carbone
III.1.2.1 Méthodes d’ouverture
III.1.2.2 Application aux nanotubes
III.1.2.3 Caractérisation des nanotubes ouverts
III.1.3 Incorporation du cobalt par capillarité en phase fondue
III.2. Synthèse in-situ de Matériaux hybrides CNT-Co
III.2.1 Conditions expérimentales
III.2.2 Influence de la nature du catalyseur
III.2.3 Etude du remplissage des nanotubes par le cobalt
III.2.4 Caractérisations magnétiques
III.3 Conclusions
III.4 Bibliographie
Chapitre IV Synthèse de Matériaux Hybrides (Cobalt-CNT) par PECVD
Introduction
IV.1 Etude du catalyseur
IV.1.1 Préparation du catalyseur
IV.I.2 Etude du prétraitement thermique
IV.2 Croissance de NTC hybrides avec le cobalt comme catalyseur
IV.2.1 Effet de l’épaisseur sur la croissance des nanotubes
IV.2.2 Propriétés magnétiques statiques
IV.3 Croissance de NTC hybrides avec le palladium/cobalt comme catalyseur
IV.3.1 Propriétés magnétiques statiques
IV.4 Conclusions
IV.5 Bibliographie
Conclusion Générale

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