FONDAMENTAUX DE LA DYNAMIQUE DES GAZ
Mise en équation
L’existence du phénomène d’onde dans les circuits d’admission et d’échappement d’un moteur est liée au caractère naturellement non stationnaire du fonctionnement des moteurs à combustion interne. L’ouverture et la fermeture cyclique des soupapes d’admission et d’échappement, les variations périodiques du volume des différentes chambres de combustion dues aux déplacements des pistons dans les cylindres, tous sont des sources d’ondes de pression résultantes des perturbations de l’écoulement gazeux par ces évènements non stationnaires. Ces ondes se propagent dans tous les systèmes de la boucle d’air du moteur, elles peuvent favoriser le remplissage d’air du moteur mais aussi le dégrader, cela dépend de l’instant auquel elles entrent ou sortent du cylindre. L’enjeu est donc de tirer le meilleur parti de ce phénomène inéluctable. Par ailleurs, l’ajout d’un dispositif comme un turbocompresseur dans la boucle d’air ne change en rien le phénomène, le mécanisme ne fait qu’accroitre le niveau de pression totale.
Le début de l’étude des fluides compressibles date du XVIIIème siècle, avec les travaux d’Euler (1707- 1783) et de d’Alembert (1717-1783), qui développèrent en particulier la théorie de la propagation du son. Les équations d’évolution modélisant la dynamique des gaz sont d’ailleurs appelées équations d’Euler. Bien que les écoulements dans les multiples systèmes de la boucle d’air d’un moteur puissent être fortement multidimensionnels, ils sont souvent simplifiés en considérant l’écoulement comme étant quasiunidimensionnel [58]. Le système de lois de conservation hyperboliques non linéaires décrivant l’écoulement unidimensionnel d’un fluide compressible en régime non-stationnaire, les équations d’Euler, ne peuvent pas être résolues analytiquement, sans simplification. Pour le cas général et la plupart des situations concrètes, une solution numérique doit être recherchée. Il est induit que dans la suite de ce mémoire les variables indiquées seront ces valeurs moyennes, bien que l’écriture exacte ne soit pas utilisée dans le but d’alléger l’écriture. Le fluide utilisé sera considéré comme visqueux, signifiant que l’écoulement est soumis à des tensions de cisaillement et à un frottement avec les parois du tube où se produit l’écoulement. Les transferts de chaleurs sont également pris en compte ; ceux-ci peuvent avoir pour nature les échanges avec le milieu extérieur par l’intermédiaire des transferts aux parois ou via une réaction chimique à l’intérieur même de l’écoulement. Prenant acte de la nature non stationnaire de l’écoulement dans la boucle d’air d’un moteur à combustion interne, la problématique consiste à définir quatre expressions fonction de deux variables indépendantes que sont le temps et l’espace. Ces quatre fonctions définissent l’état du fluide permettent de déterminer les quatre grandeurs physiques que sont la pression, la masse volumique, la vitesse et la température du fluide.
Un système de trois équations aux dérivées partielles du premier ordre, fonction des variables de temps et d’espace, sont constitutives des équations fondamentales de la dynamique des gaz. L’adjonction d’une équation d’état du fluide permet de boucler le système à condition de connaître l’état initial de l’écoulement en tous points de l’espace ainsi que les conditions aux limites à chaque instant.
L’équation de continuité correspond au bilan masse [60], elle indique non seulement qu’au cours de tout processus de transformation, y compris si il implique une transformation chimique, la masse se conserve, mais aussi que le nombre d’éléments de chaque espèce chimique se conserve.
METHODES DE RESOLUTION
La résolution du système d’équation régissant la dynamique des gaz ne peut pas, sauf cas exceptionnel, être réalisée de manière analytique. C’est pourquoi, des techniques de résolutions itératives ont été développées pour diverses applications et différents desseins. Dans le domaine de la mécanique des fluides, il est possible de distinguer trois grandes classes d’outils de résolution aux dérivées partielles ; les méthodes acoustiques (impédance, inertie, …), les méthodes « graphiques » (méthode des caractéristiques) et les méthodes numériques (Godunov, Roe, HLL, Osher,…).
La méthode acoustique
Les équations de la mécanique des fluides, desquelles les équations de la méthode acoustique et leurs résultats peuvent être dérivées, sont assez complexes. Cependant, l’étude se simplifie lorsque le milieu est un fluide parfait dans lequel n’intervient aucune viscosité, conduction thermique, … Car dans ce cas les grandeurs évoluent adiabatiquement et l’entropie se conserve. Par ailleurs, du fait que la plupart des phénomènes acoustiques impliquent de très petites perturbations, il est possible de faire des simplifications significatives des équations de la dynamique des fluides, puis de les linéariser [87, 88]. Mais dans un moteur, la présence d’amplitude de variations de pression importantes annihilant de facto les hypothèses de linéarisation [89] et la présence d’ondes de chocs dans le fluide [90], font que cette technique devient inappropriée à la résolution des équations de la dynamique des gaz. Il est néanmoins possible d’utiliser les équations non-linéarisées de la méthode acoustique. Cette méthode aussi complexe que puissante permet d’étudier nombre de phénomènes acoustiques non linéaire, comme par exemple, la distorsion de la forme des ondes, la génération d’ondes de chocs, les interactions non-linéaires d’ondes différentes, la cavitation, la sonoluminescence, … [87]. Ayant d’autres moyens à disposition au laboratoire, lesquels ayant été éprouvé par une multitude de sujet de recherche au cours des années précédentes, cette méthode n’a pas été utilisée dans ces travaux de recherche.
La méthode des caractéristiques
Cette méthode est apparue grâce au travail de Poisson [91, 92] qui a démontré que les ondes d’amplitude finie se propagent à une vitesse égale à la somme de la vitesse locale du son et de la vitesse du fluide, ce qui amena Stokes [93] à conclure que l’onde doit modifier sa forme lorsqu’elle se propage. Par la suite, Earnshaw [94] a été en mesure de former une relation entre l’amplitude des ondes de pression et leur vitesse de propagation, en supposant que le processus de transformation (détente et compression) de l’onde est toujours isentropique. Enfin, en transformant l’ensemble des équations fondamentales aux dérivées partielles en des équations ordinaires évoluant autour de lignes particulières, Riemann [95] a fait un pas significatif dans l’analyse des systèmes d’ondes non-linéaires en développant une théorie qui servira de base à la méthode des caractéristiques.
Avant l’avènement des méthodes de calculs numériques, les calculs étaient réalisés manuellement grâce à la méthode des caractéristiques [96]. La simplicité de cette méthode fait qu’elle est encore utilisée, sous une forme numérique, pour un certain nombre de calculs de la dynamique des fluides en écoulement non-visqueux et irrotationnel [97]. La méthode des caractéristiques consiste à transformer le système d’équations aux dérivées partielles en un ensemble de lignes caractéristiques, le long desquelles, le système précédent se réduit en un système d’équations différentielles ordinaires permettant d’obtenir les valeurs des variables caractéristiques de l’écoulement et de l’état thermodynamique du fluide, à partir de conditions initiales fixées [98]. Par ailleurs, lorsque l’écoulement est supposé isentropique et que le fluide est considéré comme parfait, l’équation de compatibilité de la caractéristique C0 est dégénérée.
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Table des matières
Introduction
Chapitre I – Analyse Bibliographique
I.1. – Introduction à la suralimentation des moteurs
I.1.1. – Objectifs et moyens technologiques
I.1.2. – Les turbocompresseurs
I.1.3. – Principes généraux
I.1.4. – Les transferts thermiques
I.2. – Fondamentaux de la dynamique des gaz
I.2.1. – Mise en équation
I.2.2. – Caractéristique des gaz
I.2.3. – Calcul du frottement pariétal
I.2.4. – Modélisation des transferts thermiques
I.3. – Méthodes de résolution
I.3.1. – La méthode acoustique
I.3.2. – La méthode des caractéristiques
I.3.3. – Les méthodes de résolutions numériques
I.4. – Caractérisation et modélisation des turbines de suralimentation fonctionnant en régime pulsé
I.4.1. – L’approche quasi-statique
I.4.2. – Les méthodes d’extrapolation des champs de turbomachines
I.4.3. – Les différentes architectures des modèles numériques
I.4.4. – Les modèles multi-dimensionnels
I.5. – Essais expérimentaux des turbines de suralimentation fonctionnant en régime pulsé
I.6. – Méthodes et moyens d’essais
I.6.1. – Caractérisation de l’instationnarité
I.6.2. – L’analyse des performances de la turbine en écoulement pulsé
I.6.3. – La structure des bancs d’essais instationnaires
Chapitre II – Description et analyse des modèles bibliographiques
II.1. – Description du modèle de Payri
II.1.1. – Modélisation de l’écoulement au sein dans la turbine
II.1.2. – Modélisation de la puissance récupérée par la turbine
II.2. – Description du modèle de Serrano
II.2.1. – Calcul du degré de réaction
II.2.2. – Le modèle d’écoulement
II.2.3. – Modélisation du travail de la turbine
II.3. – Le codage des modèles
II.3.1. – L’architecture générale du processus de modélisation
II.3.2. – Codage du tube d’admission à la turbine
II.3.3. – Le codage du tube d’échappement de la turbine
II.3.4. – Méthode d’excitation en pression
II.4. – Comparaison numérique des modèles
II.4.1. – Simulations en régime d’écoulement permanent
II.4.2. – Simulations en régime d’écoulement instationnaire
Chapitre III – Description et analyse des modèles développés
III.1. – Méthode d’extrapolation des champs caractéristiques de la turbine
III.1.1. – L’extrapolation du champ des débits de la turbine
III.1.2. – L’extrapolation du champ des rendements de la turbine
III.2. – Description et codage des modèles
III.2.1. – Expression des conditions aux limites avec l’extérieur
III.2.2. – Le modèle à simple singularité
III.2.3. – Le modèle de turbine avec un volume 0D en amont d’une simple singularité
III.2.4. – Le modèle de turbine avec un volume 1D en amont d’une simple singularité
III.3. – Comparaison numérique des modèles
III.3.1. – Simulations en régime d’écoulement stationnaire
III.3.2. – Simulations en régime d’écoulement instationnaire
Chapitre IV – Etude expérimentale
IV.1. – Les moyens de mesures
IV.1.1. – Description du banc de turbocompresseurs
IV.1.2. – Instrumentation et traitement des données
IV.1.3. – Incertitudes de mesures et répétabilité
IV.2. – Détermination expérimentale du rendement isentropique d’une turbine en écoulement pulsé
IV.2.1. – Objectif
IV.2.2. – Campagnes expérimentales
IV.2.3. – Eléments sur les capteurs et moyens de mesure
IV.2.4. – Démarche pour tenter de mesurer les rendements instantanés
IV.2.5. – Application de la démarche
IV.2.6. – Analyse de la sensibilité de la démarche aux différents paramètres
IV.3. – Le comportement acoustique d’une turbine
IV.3.1. – Détermination de la fréquence du circuit tubulaire seul
IV.3.2. – Détermination de la fréquence du circuit tubulaire accouplé au turbocompresseur
Conclusion et perspectives
Annexes