Fonctions de la protéine
Tau dendritique et nucléaire La protéine Tau est majoritairement axonale, mais une infime quantité se retrouve physiologiquement dans les dendrites, et pourrait aussi être retrouvée dans les épines dendritiques (Ittner et al., 2010). La fonction de Tau dans les dendrites n’est pas bien caractérisée, mais elle pourrait être impliquée dans la régulation de la plasticité synaptique.
Effectivement, dans les neurones de souris en culture et dans des coupes d’hippocampe, une activation pharmacologique des synapses provoque un changement de localisation de la protéine Tau endogène, de l’arborisation dendritique vers les compartiments postsynaptiques. Tau a aussi été observée dans le noyau de cellules neuronales, comme les cellules de neuroblastome humain, et non neuronales, comme les fibroblastes humains (Loomis et al., 1990; Sjoberg et al., 2006). Des agrégats de Tau en forme de bâtonnets ont d’ailleurs été observés dans le noyau de neurones dans les maladies d’Alzheimer et de Huntington (Fernandez-Nogales et al., 2014).
Cette protéine nucléaire semble être impliquée dans le maintien de l’intégrité de l’ADN génomique, de l’ARN nucléaire et de l’ARN cytoplasmique dans des conditions physiologiques et des conditions de stress hyperthermique in vivo ainsi que dans les neurones en culture (Sultan et al., 2011; Violet et al., 2014).
La phosphorylation
La phosphorylation de Tau est régulée au cours du développement. La protéine Tau foetale contient environ 7 phosphates par molécule tandis que la protéine Tau chez l’adulte contient environ 2 phosphates par molécule, la protéine foetale subissant donc beaucoup plus de modifications que chez l’adulte (Kanemaru et al., 1992). L’hyperphosphorylation de Tau est provoquée par une augmentation de la phosphorylation sur des sites qui sont normalement phosphorylés physiologiquement. Cette situation est produite par une augmentation du nombre de protéines Tau phosphorylées ou du nombre de groupements phosphates par molécules, qui est de 3 à 8 fois plus élevé en conditions pathologiques (Ksiezak-Reding et al., 1992).
Dans la MA, Tau devient hyperphosphorylée et peut contenir 8 phosphates par molécule (Kopke et al., 1993). Cependant, lors de ces études, les cerveaux obtenus ont été étudiés lors de l’autopsie. L’intervalle post-mortem (IPM) entraîne une déphosphorylation de la protéine Tau soluble par les phosphatases, ce qui signifie que ce chiffre peut être encore plus élevé (Matsuo et al., 1994).
La protéine Tau humaine dans le cerveau adulte est phosphorylée à la plupart des mêmes sites que les filaments hélicoïdaux appariés (paired helical filaments, PHFs), signifiant qu’une phosphorylation excessive au niveau de ces sites est pathologique (Morris et al., 2015).
Étiologie
Les altérations dans la quantité ou la structure de la protéine Tau peuvent affecter son rôle comme stabilisateur des microtubules. Des changements dans l’organisation de ces microtubules peuvent quant à eux affecter la localisation ou l’organisation d’autres structures cellulaires comme les lysosomes ou les mitochondries et ainsi provoquer des effets pathologiques (Collot et al., 1984; Nangaku et al., 1994; Tanaka et al., 1998).
Les modifications entraînées par la phosphorylation de Tau altèrent son interaction avec les microtubules, et donc son hyperphosphorylation est un élément essentiel des différents agrégats aberrants retrouvés dans les neurones ou parfois dans la glie de patients atteints de maladies neurologiques considérées comme des Tauopathies (Hong et al., 1998; Kadavath et al., 2015). Les maladies neurodégénératives sont caractérisées par la perte de neurones et une possible présence de matériaux fibrillaires. Il existe plusieurs types d’inclusions intracellulaires comme les corps de Lewy, les corps de Hirano, les corps de Pick et les NFTs.
Les protéines Tau hyperphosphorylées sont la principale composante de ces NFTs dans la maladie d’Alzheimer (Brion et al., 1985). La protéine Tau a peu tendance à s’agréger dans sa conformation native. Par contre, son agrégation en PHFs et en NFTs est connue dans plusieurs maladies neurodégénératives appelées Tauopathies. Parmi ce type de pathologies ayant en commun la présence de dépôts intracérébraux d’une forme pathologique de la protéine Tau, on retrouve plus de 20 pathologies (tableau 1), notamment la maladie d’Alzheimer (MA, ou Alzheimer disease, AD), la maladie de Pick, la paralysie supranucléaire progressive, la maladie d’Huntington (MH, ou Huntington’s disease, HD), la dégénérescence corticobasale et la démence fronto-temporale avec syndrome Parkinsonien (frontotemporal dementia with parkinsonism-17, FTDP-17) (Lee et al., 2001).
Diagnostic
Le diagnostic de la maladie de Huntington repose sur la présence de symptômes comme un handicap progressif moteur de type chorée, un déclin cognitif, un changement au niveau de la personnalité et un historique familial en lien avec une maladie autosomique dominante (Warby et al., 1993). Le diagnostic se confirme par un test génétique moléculaire pour déterminer le nombre de répétitions de glutamine (CAG) situés dans l’exon 1 du gène codant pour la protéine Htt (Craufurd et al., 2015). L’âge du début de la maladie et le diagnostic de sévérité est déterminé cliniquement par l’apparition des symptômes moteurs. Puisque la MH est une maladie autosomique dominante, la présence d’un seul allèle muté peut engendrer la maladie.
Les allèles normaux possèdent un nombre inférieur à 26 répétitions CAG, tandis les allèles définis comme intermédiaires ont entre 26 et 35 répétitions CAG. Les allèles de cette dernière catégorie ont aussi été décrits comme des allèles normaux mutables. Un individu possédant un allèle intermédiaire ne risque pas de développer les symptômes de la maladie, mais il est à risque d’avoir un enfant ayant un allèle causant la MH à cause de l’instabilité de la séquence CAG (Semaka et al., 2006). Les allèles causant la MH possèdent 36 répétitions CAG ou plus et les individus porteurs de ces allèles sont à risque de développer la maladie.
Un patient ayant de 36 à 39 répétitions CAG sur un allèle est à risque de développer la MH, mais pourrait ne jamais développer de symptômes. Ces allèles sont donc à pénétrance réduite. Les allèles à pénétrance complète, quant à eux, possèdent au moins 40 répétitions et sont associés avec le développement de la maladie (Warby et al., 1993).
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Table des matières
Chapitre 1 : Introduction
1.La protéine Tau
1.1 Historique
1.2 Structure et expression
1.3 Localisation
1.4 Fonctions
1.4.1 Fonctions de la protéine Tau axonale
1.4.2 Fonctions de la protéine Tau dendritique et nucléaire
1.4.3 Autres fonctions de Tau
1.5 Modifications post-traductionnelles
1.5.1 La phosphorylation
1.5.2 Autres modifications post-traductionnelles
1.6 Tauopathies 5
1.6.1 Étiologie
1.6.2 Agrégation de la protéine Tau
1.7 La maladie d’Alzheimer
1.7.1 Historique
1.7.2 Description
1.7.3 Symptômes
1.7.4 Diagnostic
1.7.5 L’amyloïde
1.7.6 La protéine Tau dans la maladie d’Alzheimer
1.8 La maladie de Huntington 5
1.8.1 Description
1.8.2 Symptômes
1.8.3 Diagnostic
1.8.4 La protéine huntingtine
1.8.5 La protéine Tau dans la maladie de Huntington
2.Les méthodes de fixation
2.1 Fonctions
2.2 Types de fixation
2.2.1 Fixation physique
2.2.2 Fixation chimique
2.3 Mécanismes moléculaires
2.3.1 Cross-linking
2.3.2 Dénaturation
2.4 Fixateurs utilisés en laboratoire
2.2.1 Les aldéhydes
2.2.2 Les solvants organiques
2.3.3 Autres fixateurs
3.Hypothèses et objectifs
1.Hypothèses
2.Objectif général
2.1 Premier objectif
2.2 Deuxième objectif
Chapitre 2 : Comparaison de différentes méthodes de préparation pour l’étude de la protéine Tau par immunohistochimie Comparison of various preparation methods for the study of tau protein phosphorylation by immunohistochemistry in paraffin-embedded sections
1.Résumé
2.Abstract
3.Introduction
4.Material and Methods
4.1 Animals
4.2 Fixation
4.3 Immunohistochemistry
4.4 Immunofluorescence
5.Results
5.1 Fixation with Bouin at 4°C is more effective to visualize tau in WT mice
5.2 Bouin at 4°C allows better preservation of tau phosphorylation
5.3 Perfusion affects tau phosphorylation
6.Discussion
7.Acknowledgment
8.Competing interests
9.Author Contributions
Chapitre 3 : Étude de la phosphorylation et de l’épissage alternatif de la protéine Tau humaine dans la maladie de Huntington
1.Résumé
2.Introduction
3.Matériel et méthodes
3.1 Échantillons humains
3.2 Extraction protéique (fractions soluble et acide formique)
3.3 Extraction protéique (fraction Sarkosyl)
3.4 Immunobuvardage
3.5 Dot blot
3.6 Détermination de la variation d’épissage de l’exon 10 de la protéine Tau
3.7 Statistiques
4.Résultats
4.1 L’hyperphosphorylation de Tau survient dans les stades avancés de la MH
4.2 Épissage alternatif aberrant de l’exon 10 de la protéine Tau dans la MH
5.Discussion
6.Matériel supplémentaire
Chapitre 4 : Discussion et perspectives
1.Retour sur les résultats et limites des études
1.1 Comparaison de différentes méthodes de préparation pour l’étude de la protéine Tau par immunohistochimie
1.2 Étude de la phosphorylation et de l’épissage alternatif de la protéine Tau dans la maladie de Huntington
2.Perspectives
Conclusion
Bibliographie
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