L’accroissement démographique a incité les sociétés à diversifier et à augmenter leurs ressources énergétiques. La croissance économique des pays émergents d’Asie du Sud-Est a fortement accéléré ce processus. Cependant, cette évolution ne pourra pas s’accomplir par une simple augmentation de la consommation des produits fossiles (pétrole, gaz ou charbon). En effet, cette augmentation de la demande énergétique associée à une raréfaction des ressources disponibles conduit actuellement à une inflation des prix du pétrole (fig. 1). Ce problème économique s’accompagne d’un défi écologique majeur : l’utilisation des hydrocarbures génère des émissions massives de CO2 qui participent au réchauffement climatique de la planète (fig. 2). Par conséquent, il devient primordial de trouver des solutions technologiques alternatives pour simultanément :
(i) limiter la consommation d’énergie,
(ii) augmenter l’efficacité des convertisseurs de produits fossiles en énergie utilisable (électricité ou transport),
(iii) développer des sources et des vecteurs énergétiques moins polluants.
Pour atteindre ces objectifs, il sera notamment nécessaire de développer de nouvelles technologies pour l’énergie. Les piles à combustibles à oxydes solides (SOFCs pour Solid Oxide Fuel Cells) s’inscrivent dans ce contexte. Cette technologie constitue en effet le moyen le plus efficace pour convertir l’énergie chimique d’un hydrocarbure en électricité . Cette transformation s’effectue à haute température (600°C-1000°C) sur la base d’un processus électrochimique d’oxydation du combustible et de réduction de l’oxygène de l’air. La cellule élémentaire de ces piles se présente sous la forme d’un tri-couche en céramique, capable de supporter les hautes températures, et possédant les propriétés physico-chimiques requises pour l’application visée.
Dans les années 1890, W. Nernst étudia la conductivité électrique des oxydes de zirconium stabilisés et établit les bases fondamentales pour le développement des SOFCs. Sur la base de ces travaux, E. Baur et H. Preis assemblèrent en 1937 la première pile à combustible à oxydes solides. Ces auteurs utilisèrent un empilement constitué de carbone (ou fer), zircone yttriée et oxyde de fer comme cellule élémentaire de la pile. Malgré une dégradation rapide du système, la puissance électrique obtenue permit de prouver la pertinence du concept.
Les progrès réalisés jusqu’à nos jours permettent désormais d’atteindre des rendements électriques réels supérieurs à 40%. Les SOFCs se distinguent ainsi des autres technologies, turbines à gaz et groupes électrogènes, par des rendements électriques plus élevés. Par ailleurs, en cogénération de chaleur et d’électricité, les rendements globaux peuvent atteindre 80%. Au regard de ces avantages, la principale application envisagée pour les SOFCs sera d’assurer une production décentralisée d’électricité et de chaleur. Cependant, l’essor industriel de cette technologie se heurte actuellement à des problèmes de dégradation des performances du système. Ces dégradations proviennent notamment d’un endommagement mécanique des cellules de la pile, lié au comportement fragile de ses composants céramiques.
Présentation des piles SOFCs
Les piles à combustibles à oxydes solides, appelés SOFCs (pour Solid Oxide Fuel Cells), sont des systèmes électrochimiques assurant la conversion de l’énergie chimique contenue dans un gaz combustible en électricité et en chaleur. Ce type de pile se caractérise par un fonctionnement à hautes températures (600-1000°C), permettant l’oxydation directe de l’hydrogène et/ou du monoxyde de carbone. Aux températures de fonctionnement envisagées des SOFCs, les réactions électrochimiques sont thermiquement activées et ne nécessitent pas l’utilisation de catalyseurs spécifiques (métaux nobles). Par ailleurs, les rendements électriques réels atteints par ces piles (>40% pour des empilements classiques ) valident l’utilisation de ces systèmes comme générateurs de puissance.
Le principe de fonctionnement
Une pile est constituée par un empilement de cellules élémentaires reliées entre elles par un matériau d’interconnexion. Chaque cellule se compose elle-même d’un assemblage de deux électrodes poreuses, l’anode et la cathode, séparées par un électrolyte dense présentant une forte conduction ionique (fig. I.1). La cathode est le siège de la réduction électrochimique de l’oxygène (1.1) tandis que l’oxydation de l’hydrogène (1.2a) et/ou du monoxyde de carbone (1.2b) .
Ces irréversibilités conduisent à une diminution de la tension de pile en fonction du courant débité. Les caractéristiques du générateur étudié sont fournies par la courbe de polarisation reliant la tension de pile U au courant délivré I (fig. I.3). Les performances sont définies par la puissance atteinte, soit le produit U×I, pour une intensité donnée. Le vieillissement du générateur est habituellement exprimé par un taux de dégradation, qui se définit par la baisse progressive en tension de la pile en mode galvano-statique (i.e. pour un courant délivré maintenu constant).
De la cellule à l’empilement
Les matériaux classiques de cellules
Le matériau d’électrolyte le plus répandu est actuellement la zircone stabilisée à l’yttrium notée YSZ (pour Yttria Stabilised Zirconia). Les niveaux de dopage à l’yttrium peuvent varier entre 3% et 12% molaire. Les deux compositions les plus fréquemment rencontrées correspondent à un dopage à 3 mol% d’Y2O3 conférant une haute résistance mécanique à l’électrolyte (∼1200 MPa en flexion ), et 8 mol% d’Y2O3 lui conférant une forte conductivité ionique en température (∼0,035 Ω -1 cm -1 à 800°C ). L’anode couramment associée à cet électrolyte est un cermet de nickel et de zircone yttriée noté Ni-YSZ. Le nickel présente en effet l’avantage d’être un très bon catalyseur de l’oxydation électrochimique de l’hydrogène. La porosité de l’anode est généralement d’environ 40%, permettant ainsi d’assurer une bonne diffusion des gaz au travers d’un réseau percolant. Le taux de nickel est classiquement d’environ 40% en volume (pour 60% de zircone yrttriée). Cette composition permet d’obtenir une bonne conductivité électronique en température (∼650-1200 Ω -1 cm -1 à 800°C) et un coefficient de dilatation thermique proche de celui de l’électrolyte. La cathode est une manganite de lanthane dopée au strontium (LSM) de structure perovskite, présentant de bonnes propriétés électrocatalytiques de réduction de l’oxygène . Sa porosité est fixée tout comme celle de l’anode à environ 40%. Le mécanisme de conduction électronique basé sur le saut du petit polaron10,11 est thermiquement activé, permettant ainsi d’obtenir des conductivités acceptables aux températures d’utilisation des SOFCs (∼70-140 Ω -1 cm -1 à 800°C8,12) .
Les architectures de pile
Il existe principalement deux technologies de conception et d’assemblage des SOFCs : les géométries tubulaire et planaire. La configuration tubulaire a été initialement développée par la société Westinghouse dans les années 1960. Elle est constituée par un assemblage de tubes bouchés à une des extrémités. La longueur de chaque élément est de ∼150 cm avec un diamètre extérieur de ∼2,2 cm. La cathode présente une épaisseur de ∼2 mm et sert de support mécanique aux couches minces d’électrolyte et d’anode. Le courant est collecté d’une cellule à l’autre par un interconnecteur axial placé le long du tube généralement en chromite de lanthane dopée au strontium (fig. I. 4). Le principal avantage de cette géométrie réside en une simplification du système d’étanchéité conduisant à une grande robustesse du système. Ainsi ce type de configuration a pu être cyclé 100 fois de la température ambiante jusqu’à 1000°C sans perte de performances électrochimiques. Des tests de vieillissement en stationnaire sur plusieurs milliers d’heures ont été également menés avec des taux de dégradation sur les performances de moins de 0,1% par 1000h. Malheureusement, un volume disponible important est nécessaire pour assurer l’empilement des tubes. En outre, les performances électrochimiques atteintes par ce type de système sont faibles du fait des fortes chutes ohmiques induites par le collectage du courant (de l’ordre de 0,15-0,2 W/cm² à U=0,7V et T=950-1000°C ).
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Contexte et objectifs de l’étude
1 Présentation des piles SOFCs
2 Présentation du cadre de l’étude : intégration d’une pile SOFC au sein d’une chaudière
individuelle fonctionnant au gaz naturel
Références bibliographiques
Chapitre II : Les outils développés pour l’étude
1 Adaptation des outils expérimentaux utilisés pour la validation des modèles
2 Le modèle « thermo-électrochimique » du SRU alimenté directement sous méthane
3 Le modèle mécanique : calcul des contraintes internes et estimation de la dégradation des cellules
4 Méthodologie de mesure de l’adhérence pour une cellule SOFC planaire − Application à l’interface cathode/électrolyte
5 Conclusion
Références bibliographiques
Chapitre III : Recherche des conditions de fonctionnement optimales de la pile alimentée directement sous méthane
1 Analyse des mécanismes impliqués dans le RID : répartition des fractions molaires et températures dans la cellule
2 Analyse des points de fonctionnement de la pile selon la performance intrinsèque du SRU
3 Conclusion
Références bibliographiques
Chapitre IV : Recherche de la géométrie et des conditions de robustesse optimales
1 Contraintes résiduelles à température ambiante induites par la mise en forme des cellules (champ régulier)
2 Contraintes à température de fonctionnement des SOFCs (champ régulier)
3 Champ de contrainte induit par la ré-oxydation de l’anode
4 Effet des singularités sur la dégradation des cellules
5 Optimisation géométrique des cellules au regard de leur intégrité mécanique
6 Conclusion
Références bibliographiques
Table des matières
Chapitre V : Synthèse et discussion des résultats − Perspectives
1 Les apports de la modélisation
2 Solutions potentielles pour lever les verrous technologiques liés à l’utilisation d’une
SOFC au sein d’une chaudière
3 Perspectives : les développements du modèle à envisager pour étudier les solutions aux verrous technologiques du couplage chaudière/pile
4 Conclusion
Références bibliographiques
Conclusion générale
Annexe 1 : Développement d’une approche statistique pour l’estimation de la rupture aux singularités d’une structure céramique
1 Rappels sur l’expression des probabilités de survie pour un champ régulier quelconque
2 Expression de la probabilité de survie dans un champ singulier
3 Analyse numérique (MEF) des probabilités de survie calculées dans un champ singulier
4 Discussion
5 Conclusion
Références bibliographiques
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