Fonctionnement d’un Réacteur à Eau Pressurisée

Fonctionnement d’un Réacteur à Eau Pressurisée

L’énergie nucléaire est la principale source d’énergie électrique produite et consommée en France. Cette énergie est produite par des REP (réacteur à eau sous pression). Le parc français de production d’électricité nucléaire est composé de 58 réacteurs répartis sur 19 sites. Chaque réacteur comporte trois circuits : un circuit primaire, un circuit secondaire et un circuit de refroidissement. Dans le circuit primaire, le combustible (oxyde d’uranium) est utilisé sous forme de pastilles qui sont empilées dans des gaines métalliques appelées crayons combustibles, constituant la première barrière de confinement, et placées dans la cuve du réacteur. Le combustible est consommé par la réaction de fission. La chaleur dégagée par le combustible permet de chauffer l’eau à l’intérieur de la cuve. La température de l’eau monte à 300°C et est maintenue sous pression (155 bars). L’eau du circuit primaire comprend du bore sous la forme d’acide borique, du lithium sous la forme de lithine et de l’hydrogène dissous. L’acide borique a la fonction d’absorber des neutrons venant de la réaction nucléaire. Pour sa part, la lithine permet d’augmenter le pH jusqu’à une valeur d’environ 7,2 à 325°C (pH légèrement alcalin, ce qui diminue les phénomènes de corrosion généralisée). Une surpression d’hydrogène dont la teneur est comprise entre 25 et 35 mLH2/kgH2O, est ajoutée au milieu afin d’éviter la radiolyse de l’eau. En conséquence, le potentiel électrochimique du métal au contact de l’eau diminue.

L’eau du circuit primaire transmet sa chaleur à l’eau circulant dans le circuit secondaire. Cet échange de chaleur se fait au niveau du générateur de vapeur où l’eau chaude du circuit primaire circule à l’intérieur de tubes en alliage 600 pendant que l’eau du circuit secondaire circule le long de la surface externe des tubes. Le générateur de vapeur est donc un échangeur thermique constitué d’un faisceau de tubes et qui forme, avec la cuve, la seconde barrière de confinement entre le réacteur et l’extérieur. Après son passage dans le générateur de vapeur, l’eau du circuit secondaire se transforme alors en vapeur. Cette vapeur fait tourner la turbine qui entraine un alternateur générant l’énergie électrique. Ensuite, la vapeur est refroidie dans le circuit de refroidissement.

Retour d’expérience sur la CSC de l’alliage 600 

Sur le parc REP français l’Alliage 600 a été utilisé pour la fabrication de :
– tubes et bouchons de tubes de générateurs de vapeur ;
– adaptateurs de couvercle de cuve (produits forgés) ;
– pénétrations de fond de cuve (produits laminés) ;
– supports M de cœur (produits forgés) ;
– cloisons de bol de générateur de vapeur (produits laminés).

Les premiers cas de fissuration par CSC de l’alliage 600 en service sont apparus en 1970 aux EtatsUnis et en Allemagne (Obrigheim), surtout localisés dans les tubes de générateur de vapeur. La fissuration a eu lieu dans les zones les plus sollicitées des tubes et a requis le bouchage de ces derniers lors des contrôles de maintenance. Si un grand nombre de tubes sont bouchés, le rendement des REP peut se voir suffisamment diminué pour que le changement du générateur de vapeur soit nécessaire. En 1980, à Fessenheim (France), sont apparus les premiers cas de fissuration en surface interne du côté primaire des tubes de générateur de vapeur en alliage 600. En 1991, une fuite d’acide borique (1 l/h) a été détectée sur l’adaptateur T54 du couvercle de cuve de Bugey3 (France) lors des essais préalables au redémarrage de la tranche. Des examens ont mis en cause un phénomène de CSC. Les fissures observées étaient toutes longitudinales, amorcées en paroi interne et au voisinage de la zone de soudure qui appartient à un dôme chaud à 310°C (Figure 2). Les contraintes résiduelles très élevées qui les ont provoquées sont principalement dues au soudage et à la contrainte d’asymétrie de la soudure. La centrale totalisait environ 80000 heures de fonctionnement [NORMAND04].

Les adaptateurs de couvercle des réacteurs d’EDF sont réalisés à partir d’une barre en alliage 600, forgée à chaud puis forée. Ils sont frettés à froid dans toute l’épaisseur du couvercle et soudés à l’intérieur du couvercle. Les diamètres extérieur et intérieur d’un adaptateur sont respectivement de 102,6 mm et 70 mm. La température moyenne en peau interne des couvercles est de 310°C pour un «dôme chaud » et de 290°C pour un « dôme froid ». Les contraintes en service ont été estimées à environ 500 MPa. Environ 5% des adaptateurs de couvercle de cuve ont été considérés comme fissurés à l’issue des examens effectués sur tous les adaptateurs. Les manchettes des adaptateurs de couvercle de cuve en alliage 600 ont alors été changées progressivement par des manchettes en alliage 690, alliage base Ni avec 30% Cr.

En 1996, des fissures de CSC ont été observées dans la plaque de partition martelée de la cloison du GV52 de Saint-Laurent B2. L’expertise destructive a révélé des fissures d’une longueur supérieure à 5 mm et d’une profondeur inférieure à 1,9 mm.

Des prélèvements ont été effectués sur les parties centrales des cloisons des GV1 et GV2 de Chinon B1 [MILOUDI09, DEFORGE10]. Les prélèvements comprennent la soudure en alliage 182 entre la plaque à tubes et l’attente de plaque, l’attente de plaque en alliage 600, la soudure en alliage 182 entre l’attente et la plaque de partition (notées AP et PP, respectivement) et la plaque de partition en alliage 600 (Figure 4). Les observations ont montré la présence de fissures intergranulaires de CSC parallèles à la soudure AP/PP et l’AP d’une profondeur maximale de 1,2mm pour GV2 (Figure 5). La CSC a été provoquée par la déformation plastique de l’attente de plaque lors de son alignement avec la plaque de partition dont la limite d’élasticité était plus élevée.

Pour éviter les problèmes de CSC, l’alliage 600 (Ni-15%Cr-10%Fe) utilisé à partir de 1970 à l’état MA « Mill Annealed » (traitement thermique à 980°C) a ensuite été utilisé à l’état TT « Thermally Treated ». Pour cela, un traitement thermique supplémentaire a été réalisé aux alentours de 700°C en vue de contrôler la précipitation de carbures de chrome. Puis, il a été remplacé à partir de 1990, dans réacteurs neufs en France par l’alliage 690 (Ni-30%Cr-10%Fe) considéré insensible à la CSC en milieu primaire.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. CONTEXTE INDUSTRIEL
2. FONCTIONNEMENT D’UN REACTEUR A EAU PRESSURISEE
3. RETOUR D’EXPERIENCE SUR LA CSC DE L’ALLIAGE 600
4. OBJECTIFS ET DEMARCHE DE LA THESE
CHAPITRE 1 : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
1. PRESENTATION DE L’ALLIAGE 600
1.1. COMPOSITION DE L’ALLIAGE 600
1.2. TRAITEMENTS THERMIQUES
1.2.1. L’état mill-annealed
1.2.2. L’état traité thermiquement (TT)
2. ETAPES DE LA CSC
2.1. ETAPE D’INCUBATION
2.2. ETAPE D’AMORÇAGE
2.3. ETAPE DE PROPAGATION
3. OXYDATION
3.1. NATURE DES OXYDES FORMES EN SURFACE DE L’ALLIAGE 600 EN MILIEU PRIMAIRE
3.2. CINETIQUE ET MECANISME DE CROISSANCE DE LA COUCHE D’OXYDE EN SURFACE
3.3. OXYDATION INTERGRANULAIRE
3.3.1. Effet du taux de couverture des joints des grains par des carbures de chrome
3.3.2. Effet de l’hydrogène dissous
3.3.3. Effet de la déformation
3.4. MORPHOLOGIE ET NATURE DES OXYDES FORMES DANS DES FISSURES DE CSC
3.5. MODELE PHENOMENOLOGIQUE DE PROPAGATION DES FISSURES
4. PARAMETRES INFLUENÇANT LA CSC
4.1. EFFETS MATERIAUX
4.1.1. Influence des carbures de chrome
4.1.2. Effet de la teneur en chrome
4.1.3. Influence du type de joints de grains
4.1.4. Effet de l’écrouissage
4.2. EFFET DE LA SOLLICITATION MECANIQUE
4.3. EFFET DE L’ENVIRONNEMENT
4.3.1. Effet de la température
4.3.2. Effet de la teneur en bore et en lithium
4.3.3. Effet de la teneur en hydrogène
5. MODELES EMPIRIQUES DE CSC
5.1. MODELE DES INDICES POUR L’AMORÇAGE
5.2. APPROCHE STOCHASTIQUE DU MODELE DES INDICES
5.3. MODELE DE PROPAGATION
5.3.1. Effet du facteur d’intensité des contraintes et de la température sur la vitesse de propagation des fissures
5.3.2. Effet du pré-écrouissage sur la vitesse de propagation des fissures
5.3.3. Prise en compte de l’effet de l’hydrogène sur la vitesse de propagation
6. MECANISMES SUPPOSES DE CSC
6.1. MECANISME DE L’OXYDATION INTERNE
6.2. INTERACTION HYDROGENE-DEFORMATION (HYDROGEN ASSISTED CREEP FRACTURE)
6.3. CORROSION ENHANCED PLASTICITY MODEL (CEPM)
7. SYNTHESE GENERALE DE L’ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE 2 : ETUDE DE L’OXYDATION EN MILIEU PRIMAIRE
1. PRESENTATION GENERALE DES MATERIAUX ETUDIES LORS DES ESSAIS D’OXYDATION
1.1. COMPOSITION CHIMIQUE ET PROPRIETES MECANIQUES DES MATERIAUX
1.2. CARACTERISATION MICROSTRUCTURALE DES MATERIAUX
1.3. ECHANTILLONS UTILISES POUR LES ESSAIS D’OXYDATION
2. OXYDATION EN MILIEU REPRESENTATIF DU MILIEU PRIMAIRE DES REP : DEMARCHE EXPERIMENTALE
2.1. ESSAIS D’OXYDATION DE COURTE DUREE
2.2. ESSAIS D’OXYDATION DE LONGUE DUREE
2.3. CARACTERISATION DE LA COUCHE D’OXYDE DE SURFACE ET DES PENETRATIONS D’OXYDE AUX JOINTS DE GRAINS
3. EFFET DES PARAMETRES ENVIRONNEMENTAUX SUR L’OXYDATION INTERGRANULAIRE
3.1. EFFET DE LA TENEUR EN HYDROGENE DISSOUS
3.1.1. Observations au MEB de la surface oxydée
3.1.2. Observations au MEB de coupes transverses
3.1.3. Observations MET en coupe transverse
3.1.4. Discussion
3.2. EFFET DE LA TEMPERATURE
3.2.1. Observations au MEB de la surface oxydée
3.2.2. Observations MEB en coupe transverse
3.2.3. Observations MET en coupe transverse
3.2.4. Discussion
4. EFFET DE LA MICROSTRUCTURE SUR L’OXYDATION INTERGRANULAIRE
4.1. EFFET DE LA NATURE DES JOINTS DE GRAINS
4.1.1. Observations MEB en coupe transverse
4.1.2. Discussion
4.2. EFFET DES CARBURES DE CHROME SUR L’OXYDATION INTERGRANULAIRE
4.2.1. Observations MEB en coupe transverse
4.2.2. Discussion
CHAPITRE 3 : MODELISATION DE LA CINETIQUE D’OXYDATION INTERGRANULAIRE
1. CHOIX DE LA LOI CINETIQUE D’OXYDATION INTERGRANULAIRE
2. DESCRIPTION DU MODELE
3. STRATEGIE D’IDENTIFICATION DES PARAMETRES DU MODELE D’OXYDATION INTERGRANULAIRE DE L’ALLIAGE 600
4. IDENTIFICATION DES PARAMETRES DU MODELE
4.1. CINETIQUE D’OXYDATION DES JOINTS DE GRAINS AVEC TENEUR NOMINALE EN CHROME
4.2. CINETIQUE D’OXYDATION DES CARBURES DE CHROME
4.3. EFFET DE LA TENEUR EN HYDROGENE DISSOUS VIA LE ΔECP
4.4. INTEGRATION DE L’EFFET DE LA TEMPERATURE VIA L’ENERGIE D’ACTIVATION
5. OPTIMISATION DES PARAMETRES DU MODELE
6. VALIDATION DES PARAMETRES DU MODELE
7. ANALYSE DE SENSIBILITE AUX PARAMETRES ET VOIE D’AMELIORATION
8. PREVISIONS ET PERSPECTIVES POUR LE MODELE DE CINETIQUE D’OXYDATION INTERGRANULAIRE
CHAPITRE 4 : CRITERE DE RUPTURE DES JOINTS DE GRAINS AFFAIBLIS PAR L’OXYDATION
CONCLUSION

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