FONCTION ET RÉGULATION DU « CENTRALSPINDLIN COMPLEX »

Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études

Les kinésines

Les kinésines ont initialement été identifiées en 1985 comme des moteurs moléculaires transportant des organelles membranaires le long d’axones géants de calamar (Lasek et Brady, 1985 ; Vale et al., 1985). Les kinésines ou KLP (Kinesin Like Protein) sont présentes dans tous les organismes eucaryotes, et une quarantaine sont actuellement identifiées chez l’homme. Ces enzymes chimiomécaniques utilisent le principe de transfert de l’énergie chimique de l’hydrolyse d’ATP en énergie mécanique pour créer un déplacement directionnel de la kinésine le long des microtubules. Ces protéines interviennent dans les transports intracellulaires et la division cellulaire, où elles sont requises pour la motilité de nombreux cargos au sein de la cellule (organelles, mitochondries, vésicules membranaires, protéines et complexes protéiques, chromosomes, virus pathogènes, microtubules…). Elles interviennent dans de nombreuses fonctions cellulaires fondamentales, parmi lesquelles la division cellulaire.

Organisation structurale des kinésines

La fonction de transport des cargos via les kinésines s’explique par l’organisation structurale de ces protéines. De façon générale, on remarquera que les kinésines sont des protéines multimériques (souvent homodimériques), organisées en quatre domaines distincts (domaine moteur, « cou », « tige » et « queue ») dont l’architecture reste très conservée au sein de cette famille protéique (figure 3).
Le domaine moteur : cette région de forme globulaire constitue le noyau catalytique de la kinésine. Il possède un site de fixation et d’hydrolyse de l’ATP ainsi qu’un site de liaison au microtubule. Ce domaine sert d’interface entre la kinésine et le microtubule, et constitue la région la plus conservée en séquence entre les kinésines (20 à 90% d’identité de séquence protéique). Le repliement des têtes motrices est conservé et se structure avec un feuillet β central cerné par 6 hélices α (3 de chaque coté du feuillet β) ; cette organisation est proche de celle observée chez les myosines ou chez certaines petites protéines G (Kull et al., 1999).
Le domaine de connexion ou « cou » : Cette région-charnière est généralement courte (une dizaine de résidus). Elle se situe entre le domaine moteur et le domaine de dimérisation qui le succède. Le « cou » interagit avec le domaine catalytique pour amplifier le déplacement de la tête motrice lors du processus de marche.
Le domaine de dimérisation ou « tige » : cette région se replie en une longue hélice α s’organisant en un enroulement super-hélice via la dimérisation de deux chaînes de kinésines associées par ce même domaine.
Le domaine d’interaction au cargo ou « queue » : ce domaine se situe à l’extrémité opposée du domaine moteur et sert à recruter la cible à transporter. Le repliement de la queue reste ambigu, et il est très peu probable qu’il soit conservé parmi les kinésines ; cela en raison d’une très forte divergence de séquence entre les domaines « queue » référencés, mais aussi en raison des différents types de cargos transportés spécifiquement selon les kinésines.

Diversité structurale

Les KLP sont classifiés en sous-familles rendant compte de leur diversité structurale (figure 4). Si les kinésines sont essentiellement homodimériques, certains de ces moteurs moléculaires, dont la kinésine conventionnelle (Kif5B), s’associent avec des chaînes légères additionnelles sous la forme d’hétérotétramères (Kamal et al., 2001). De même, il a été observé des kinésines dites bipolaires s’assemblant en homotétramère ; c’est par exemple le cas de la protéine Eg5, capable de faire coulisser deux microtubules sur lesquels elle marche simultanément (Sharp et al., 2000). Par ailleurs, les cas les plus surprenants viennent de kinésines monomériques comme Kif1A (Bloom, 2001) ; ou de MCAK, une kinésine qui dépolymérise les extrémités des microtubules (Helenius et al., 2006).
Riches d’un large panel oligomérique, les kinésines se différentient également par un sens de marche spécifique, dirigé vers l’extrémité + ou – des microtubules. Il a été identifié des kinésines possédant leurs domaines moteurs sur l’extrémité N-terminale (70% des kinésines) tandis que d’autres présentent leurs domaines moteurs à l’extrémité C-terminales (20%) ou encore dans un domaine moteur central (10%) (Aizawa et al., 1992 ; Yang et al., 1989). Reflétant ses différences, les kinésines sont classifiées en 14 sous-familles rendant compte de leurs particularités structurales sur la base de l’homologie de séquences des domaines moteurs (figure 4) (Kim et Endow, 2000).

Cycle catalytique

Le domaine moteur constitue le noyau catalytique qui fournit l’énergie nécessaire au déplacement sur le microtubule via l’hydrolyse de l’ATP. L’utilisation de nucléotides fluorescents ou marqués radioactivement a permis d’établir les principales étapes du cycle d’hydrolyse de l’ATP au sein de la kinésine (Hackney, 1988 ; Hackney et al., 1989) (figure 5). En l’absence de microtubules, l’étape limitante de ce cycle correspond au relargage de l’ADP. Néanmoins, la vitesse du relargage de l’ADP peut être modulée pour stimuler l’activité ATPasique. En effet, il a été constaté que la fixation de la kinésine sur les microtubules stimule la libération de l’ADP, ce qui se répercute alors par un emballement de l’activité ATPasique ; on parle alors d’activité stimulée. Cette stimulation permet selon les kinésines, d’augmenter la vitesse de catalyse d’un facteur cent à plusieurs milliers.
Il a été remarqué que le cycle catalytique des deux domaines moteurs adjacents s’influencent l’un l’autre en fonction de leurs états nucléotidiques. On observe alors une coordination de leurs activités ATPasiques, où la fixation de l’ATP sur l’une des deux têtes motrices est corrélée au relargage de l’ADP de l’autre tête motrice (Gilbert et al., 1998).

Mécanisme du déplacement

Des expériences réalisées sur des molécules uniques ont permis de montrer que les kinésines se déplacent sur le microtubule par pas discrets de 8 nm, en interagissant avec la sous-unité β du dimère de tubuline. Chaque pas correspond à l’hydrolyse d’une molécule d’ATP et la distance parcourue coïncide avec l’espace d’un dimère de tubuline (Coy et al., 1999b). Bien que les mécanismes de déplacement soient encore ambigus, il apparaît que le mouvement de la kinésine implique des changements structuraux au sein du domaine moteur et du « cou » pour engendrer le mécanisme de marche (Schief et Howard, 2001).
Directionalité :
Les kinésines présentent un sens de marche spécifique, orienté vers l’une des extrémités du microtubule. On dénombre ainsi des sous-familles de kinésine se déplaçant en direction de l’extrémité (+) des microtubules tandis que d’autres s’orientent caractéristiquement vers l’extrémité (-) opposée. Le domaine « cou » joue vraisemblablement un rôle prépondérant dans le sens de ce mouvement (Wade et Kozielski, 2000). Ainsi, lorsque les domaines moteurs de deux kinésines qui vont dans des sens opposés sont échangés, les chimères résultantes acquièrent alors la directionalité du « cou » conservé (Case et al., 1997 ; Endow, 1999). De façon similaire, l’échange des domaines « cou » entre différentes kinésines, impose aux mutants ainsi crées le sens de déplacement originaire du nouveau « cou » (Endow et Higuchi, 2000). Ces expériences révèlent donc l’importance de cette région intermédiaire entre le domaine moteur et l’enroulement super-hélice dans l’acquisition de la directionalité (Vale et al., 2000).
Processivité et modèle de déplacement :
Certaines kinésines se déplacent sur les microtubules sur de longues distances, effectuant ainsi de nombreux pas successifs avant de se détacher de son support. On parle dans ce cas de kinésines processives. C’est par exemple le cas de la kinésine conventionnelle (Kif5B), capable de parcourir des distances de l’ordre du micromètre (une centaine de pas) avant de se détacher du microtubule (Block et al., 1990 ; Howard et al., 1989).
L’un des modèles suggérés pour le mode de déplacement des kinésines processives est appelé « hand-over-hand » (Asbury et al., 2003). Il consiste en un mécanisme dans lequel les deux domaines moteurs interagissent alternativement le long du protofilament (figure 6) ; la tête arrière se détacherait pour venir se fixer sur le prochain dimère de tubuline du même protofilament, et créerait ainsi un déplacement de 8 nm du centre de masse (Hancock et Howard, 1998). Les pas alternatifs des deux têtes motrices seraient alors reliés au déphasage de leur cycle ATPasique, de sorte qu’au moins un domaine moteur soit en contact avec le microtubule. Ce modèle s’appuie notamment sur le changement d’affinité du domaine moteur envers la tubuline en fonction de son état nucléotidique. Les états ATP et sans nucléotide correspondent aux formes affines pour le microtubule, tandis que l’état ADP tend vers une forte diminution de l’affinité moteur / microtubule (Crevel et al., 1996).
Cependant ce modèle est controversé, et les couplages entre l’hydrolyse de l’ATP et les changements de conformation restent encore ambigus. De plus, ce modèle n’explique pas le fonctionnement de Kif1A, une kinésine monomérique et pourtant processive (Okada et Hirokawa, 1999). Le modèle « hand-over-hand » ne pouvant pas se transposer dans le cas des kinésines monomériques ou non processives, d’autres mécanismes de déplacement doivent donc exister au sein de cette famille de moteurs moléculaires.
Une autre approche du mouvement considère un système de déplacement et de production de forces, modélisé par des transitions d’états sur une barrière de potentiel unidimensionnel (figure 7) (Astumian et Derenyi, 1999). Ce modèle de mouvement connu sous le nom de « Brownian ratchet motion » fait jouer un rôle essentiel à l’énergie thermique et se distingue du modèle « hand-over-hand » car il ne nécessite pas le détachement des têtes motrices, ni ne fait intervenir les changements conformationnels comme forces créatrices du mouvement (Peskin et Oster, 1995). Contrairement aux moteurs moléculaires processifs, certaines kinésines se révèlent incapables d’effectuer un grand nombre de pas successifs car elles se détachent fréquemment du microtubule (Crevel et al., 1997 ; Stewart et al., 1998). Les deux modes de déplacement processif et non-processif résultent certainement d’une adaptation physiologique pour différentes fonctions cellulaires. La processivité s’applique visiblement à un fonctionnement individuel impliqué dans des déplacements endurants et persistants, alors qu’à l’inverse, les kinésines non-processives fonctionnent collectivement et semblent adaptées pour des interventions brèves et rapides (Schliwa et Woehlke, 2003).

Kinésines et santé

Les rôles à la fois variés et importants des kinésines dans des fonctions cellulaires essentielles peuvent être à l’origine de dysfonctionnements physiologiques graves en cas de défaillance de l’une d’entre elles. Des études récentes ont ainsi fait le lien entre certaines pathologies humaines et le défaut de kinésines (tableau 1)

Le cycle cellulaire

Le cycle cellulaire est un processus par lequel une cellule duplique son contenu puis se divise pour aboutir à deux cellules filles identiques. Orchestré par des processus de régulation complexes, ce cycle est constitué d’un ensemble d’événements moléculaires et cellulaires gérés spatialement et temporellement. Chez les eucaryotes, l’évolution de ce phénomène répond à l’activation périodique et séquentielle de kinases (Cdk) par des protéines appelées cyclines, synthétisées puis détruites elles aussi périodiquement et séquentiellement. On peut schématiser le cycle cellulaire par une succession de phases participant au maintien de l’information génétique, génération après génération (figure 8). C’est au cours de la phase M, étape clef de la division cellulaire, qu’auront lieu deux divisions successives : la mitose (séparation des chromosomes) et la cytokinèse (scission du cytoplasme).
– La phase G1 (Gap1) est une période de croissance pourvue d’une forte activité de synthèse et de transcription. La cellule à la possibilité d’entrer en phase de quiescence (G0) ou de se différencier au cours de cette étape.
– La phase S (Synthèse) a pour vocation la réplication du matériel chromosomique.
– La phase G2 (Gap2) prépare la mitose, notamment par la synthèse des protéines nécessaires à la division.
– La phase M permet la répartition des chromosomes dupliqués, et le partage du cytoplasme dans les deux cellules filles.

La mitose

La mitose à pour objectif la ségrégation équitable de l’information génétique dédoublée en phase S afin d’aboutir à la genèse de deux cellules filles viables. Cette étape clef est composée de cinq subdivisions successives : la prophase, la prométaphase, la métaphase, l’anaphase et la télophase (figure 9). Cette cascade d’événements mitotiques est alors régie par un ensemble complexe de protéines permettant la régulation et l’organisation de la division cellulaire. Parmi elles, les kinésines mitotiques jouent un rôle majeur dans ces différentes étapes.
Au cours de la prophase – prométaphase, les chromosomes se condensent en structures organisées sous l’impulsion de la phosphorylation des histones (Oki et al., 2007). Les deux centrosomes s’éloignent et se positionnent de chaque coté de la cellule. Leur position dictera l’emplacement de la plaque équatoriale et du sillon de clivage qui se situeront dès lors, entre ces deux pôles organisateurs des microtubules. Au cours de la prométaphase, l’enveloppe nucléaire se fragmente et libère les chromosomes bientôt captés par les microtubules via le kinétochore. Pendant la métaphase, les chromosomes sont dirigés au centre de la cellule, puis alignés sur la plaque équatoriale. L’entrée en anaphase obéie à un point de contrôle gérant la transition métaphase – anaphase. La cellule anaphasique sera le foyer de la séparation des chromatides sœurs sous l’effet de traction exercée par le fuseau mitotique qui se collapsera ensuite en fin d’anaphase. Enfin, la télophase parachève la dichotomie génomique des deux futures cellules filles par la reconstitution des membranes nucléaires. Au fur et à mesure de l’éloignement des deux lots chromosomiques sur deux pôles opposés, la cellule se divise en deux par invagination de sa membrane plasmique au niveau de la plaque équatoriale (sillon de clivage). Ce processus de constriction puise sa source dans le resserrement d’un anneau d’actine qui se poursuivra jusqu’à la séparation complète des deux cellules filles. Ce processus de cloisonnement est appelé la cytokinèse.

La cytokinèse

La division cellulaire implique la croissance de la cellule et une séquence d’événements ordonnés : la réplication du génome, la ségrégation des chromosomes puis la division de la cellule. Bien que de nombreux aspects de ces processus cellulaires soient aujourd’hui bien étayés à l’échelle moléculaire, la scission de la cellule (cytokinèse) est une étape complexe moins connue. Cependant, un ensemble de protéines conservées forme le cœur de cette machinerie chez de nombreuses espèces animales divergentes (vertébrés, nématodes et insectes). Les acteurs de la régulation de la cytokinèse sont répartis en cinq catégories :
– Les composants du fuseau central,
– RhoA et ses effecteurs
– La myosine non musculaire de type II
– L’actine et les régulateurs de son assemblage
– Les facteurs du transport et de fusion membranaire.
Le déroulement de la cytokinèse nécessitera l’organisation d’un réseau de myosines et de filaments d’actines. La force de constrictions de cet anneau d’actomyosine permettra l’apparition du sillon de clivage délimitant les deux futurs lobes cellulaires naissants (figure 10). La position de l’anneau contractile sera dictée par la localisation du fuseau mitotique anaphasique, tandis que son assemblage sera sous la régulation du fuseau central et de la voie de signalisation RhoA. Après la constriction maximale permise par l’anneau d’actomyosine, la séparation des deux cellules est finalisée par l’apport de phospholipides via l’adressage de vésicules membranaires au niveau du pont cytoplasmique.

Le fuseau central

La cytokinèse débute dès l’anaphase avec la formation d’un premier élément au sein du fuseau central : le « corps intermédiaire ». Cette structure aura pour fonction la régulation de l’anneau contractile et l’adressage des membranes nécessaires à la finalisation de la séparation des cellules filles. Le « corps intermédiaire » est formé d’un échafaudage complexe de régulateurs de la cytokinèse, concentrés sur un chevauchement robuste et dense de microtubules antiparallèles au centre du fuseau central. Sa mise en place résultera de l’inactivation de kinases mitotiques suite à la dégradation protéolytique des cyclines en début d’anaphase.
Parmi les protéines qui s’accumulent au cœur du « corps intermédiaire », certaines se révèlent indispensables pour la cytokinèse (tableau 2). C’est par exemple le cas du « centralspindlin complex » qui participe à l’agrégation des microtubules. Ce complexe, composé des deux protéines MKLP-1 et MgcRacGAP, tend à se concentrer au cours de l’anaphase sur le fuseau central, là où les extrémités (+) des microtubules polaires se chevauchent (Delcros et al., 2006). Les deux protéines constitutives du « centralspindlin complex » (MKLP-1 et MgcRacGAP) sont essentielles à l’assemblage et à la maturation du « corps intermédiaire » (Mishima et al., 2002). La localisation du « centralspindlin complex » est dépendante du complexe AuroraB kinase (AuroraB, Incenp, Survivin, et CSC-1) qui se concentre lui aussi dans le fuseau central (Schumacher et al., 1998 ; Severson et al., 2000). L’inhibition de l’activité d’AuroraB provoque d’ailleurs un défaut de cytokinèse similaire à une déplétion de MKLP-1 chez C. elegans. En plus de réguler la localisation du « centralspindlin complex », AuroraB phosphorégule in vitro la fonction de la protéine MgcRacGAP (Ban et al., 2004 ; Minoshima et al., 2003).
Parmi les autres protéines essentielles, PRC1 est une protéine MAP (Microtubule Associated Protein) possédant une activité d’agrégation des polymères de tubuline (Verni et al., 2004 ; Verbrugghe et White, 2004). PRC1 localise au niveau du « corps intermédiaire », et est requise pour l’organisation de cette structure. La kinésine Kif4 interagit avec PRC1 (Kurasawa et al., 2004) et restreint sa localisation sur cette étroite bande au centre du fuseau mitotique. L’affinité de PRC1 pour les microtubules est sous la régulation de Cdk1, qui inhibe sa capacité d’agrégation durant la métaphase (Mollinari et al., 2002).
Suivant les espèces, de nombreuses autres protéines s’enrichissent au niveau du fuseau central de l’anaphase à la télophase. Il a ainsi été mis en évidence l’accumulation de protéines telles que NuSAP (Nuclear Spindle-Associated Protein), Orbit, ou l’anti-oncogène BRCA2, qui affectent elles aussi le fuseau central et la progression de la cytokinèse de façon encore méconnue (Daniels et al., 2004 ; Inoue et al., 2000 ; Raemaekers et al., 2003).
De plus, si de nombreuses protéines sont conservées dans le processus de cytokinèse, des différences subsistent selon les espèces. Ainsi chez la drosophile, le manque de la sous-unité MKLP-1 induit l’absence de l’anneau d’actomyosine (Adams et al., 1998), tandis que le phénotype drosophila semble suggérer une voie de régulation redondante qui comble la déplétion de MKLP-1 lors de l’assemblage de l’anneau contractile (Dechant et Glotzer, 2003).

La voie de signalisation RhoA

L’assemblage de l’anneau contractile d’actine est sous contrôle du fuseau central qui active la charpente d’actomyosine via une cascade de signalisation initiée par RhoA (petite protéine G) (figure 11). RhoA est un acteur indissociable de l’assemblage et de la régulation de cet anneau. De façon générale, les petites protéines G fonctionnent comme des interrupteurs moléculaires de voie de signalisation intracellulaire. Elles existent sous deux conformations : la forme active liée au GTP et la forme au repos liée au GDP. Comme les autres protéines englobées sous le terme de « petites protéines G », RhoA est régulée par des facteurs induisant l’hydrolyse du GTP (GTPase Activating Protein [GAP]) ou l’échange nucléotidique (Guanine Exchange Factors [GEF]). Au cours de la cytokinèse, la GEF responsable de l’activation de RhoA est identifiée comme ECT2, alors qu’une de ses GAP supposées serait MgcRacGAP. La protéine MgcRacGAP est néanmoins un régulateur non spécifique à RhoA, aussi capable d’induire l’hydrolyse nucléotidique de Rac et de Cdc42 de façon plus efficace ((Tatsumoto et al., 1999 ; Toure et al., 1998).

La myosine, force motrice de la cytokinèse

En amont de la voie de signalisation RhoA, la forme RhoA•GTP induit la polymérisation et l’activation des myosines-2 (figure 11). La myosine est un des partenaires essentiels du mécanisme de séparation des deux cellules filles. Elle intervient dans la formation du sillon de clivage en fournissant le travail mécanique de la constriction de l’anneau d’actomyosine (Guo et Kemphues, 1996 ; Straight et al., 2003). La myosine s’organise en deux chaînes lourdes parallèles liées chacune à une chaîne légère dite essentielle (Elc) ainsi qu’à une autre chaîne légère dite régulatrice (rMlc). Cette hexamère s’assemble en filaments et permet la constriction de l’anneau contractile en transloquant les filaments d’actines. La phosphorylation de rMlc par la kinase ROCK (Rho kinase) soulève l’état d’auto-inhibition de la myosine (Jordan et Karess, 1997). Sous sa forme active, la myosine est dés lors capable de s’assembler en filament et possède une activité ATPasique actine dépendante. La protéine RhoA est l’instigatrice de la régulation des myosines-2 ; elle active la Rho Kinase ROCK qui à son tour inhibe par phosphorylation MYPT (myosin phosphatase-targeting), un répresseur de la myosine (figure 11) (Kimura et al., 1996).

Assemblage de l’anneau contractile

La myosine-2 et l’actine sont les deux constituants majeurs de l’anneau contractile. Néanmoins, ces deux protéines ne se suffisent pas à elles-mêmes ; elles nécessitent un jeu de protéines partenaires pour leur assemblage sous forme de ceinture. Ainsi, trois protéines ont été mises en évidence en raison de leur active participation à l’établissement des filaments d’actine. Ces trois protéines que sont la formine, la profiline et l’aniline, sont essentielles au bon déroulement de la cytokinèse.
La formine coiffe l’extrémité du filament et permet par un mécanisme encore ambigu d’assembler les polymères d’actines de façon rapide et processive (Pruyne et al., 2002). Cette élongation se fait en partenariat avec la profiline, qui stimule le processus de polymérisation (Romero et al., 2004). In vivo, la formine s’auto-inhibe en liant ses deux extrémités N et C terminales. La forme RhoA•GTP permettra alors l’élongation des filaments d’actine en levant l’auto-inhibition de la formine (Alberts, 2001).

Fusion membranaire

Le système d’actomyosine n’est pas suffisant à lui seul pour parachever la séparation fine des deux cellules en division cytoplasmique. L’ultime étape de la cytokinèse va requérir la délivrance de vésicules d’apport membranaire. La fusion de ces vésicules avec la surface plasmique, après l’aboutissement constrictif de l’anneau d’actomyosine, permettra la disparition du pont cytoplasmique (Low et al., 2003). La machinerie d’insertion de membranes fera intervenir les syntaxines et leurs protéines associées, la famille des rab GTPases, le coatomère et le complexe exocyste. L’adressage des phospholipides à ce qui ne sera plus qu’un pont cytoplasmique étroit, sera finalement pourvu par des kinésines impliquées dans le transport de membranes (Fan et Beck, 2004).

Fonction et régulation du « centralspindlin complex »

Le « centralspindlin complex » est un élément impliqué dans la formation du « corps intermédiaire ». Ce complexe est constitué d’un homodimère de MKLP-1 lié à MgcRacGAP lui aussi homodimérique. Il a été montré que les acides aminés 445 à 550 de MKLP-1 forment le point d’ancrage de ces deux protéines avec les résidus 1 à 120 de MgcRacGAP (Pavicic-Kaltenbrunner et al., 2007). Nous verrons dans ce chapitre l’organisation structurale de chacune de ces deux partenaires ainsi que leurs régulations et fonctions cellulaires.

Données structurales

Organisation structurale de la kinésine MKLP-1

MKLP-1 est une kinésine homodimérique de la famille 6, longue de 857 acides aminés et structurées en quatre domaines caractéristiques des kinésines (figure 12). Elle replie son domaine moteur globulaire sur son extrémité N terminale (Nislow et al., 1992) et est capable de mobilité vers les pôles (+) des microtubules.
La structure atomique de MKLP-1 n’a pas encore été élucidée, mais à la connaissance des motifs conservés chez les kinésines, on peut estimer la disposition des différents domaines de MKLP-1 : Le domaine moteur (25-436) de 411 acides aminés constitue le noyau catalytique qui contient le site d’hydrolyse de l’ATP ainsi qu’un site de liaison aux microtubules. La principale différence de MKLP-1 face autres kinésines consiste en une importante insertion de quatre-vingts acides aminés (8 kDa) au sein de la boucle L6 alors qu’elle est généralement constituée de 4 à 8 résidus dans les autres sous-familles. Cette boucle L6 exceptionnellement longue est une caractéristique des kinésines de la famille 6 (MKLP-2, MPP1…). Aucune structure à haute résolution de kinésine de la sous-famille 6 n’a pu être obtenu à ce jour, et la fonction de cette boucle reste encore énigmatique (Hizlan et al., 2006).
Le domaine « cou » : le domaine moteur est en contact avec le domaine de dimérisation via une séquence de 104 acides aminés formant ce qu’on appelle le « cou » (436-540). C’est une région-charnière déterminante pour le sens de déplacement. Cette région participe à l’interaction avec MgcRacGAP.
Le domaine de dimérisation de MKLP-1 ou domaine « tige » (540-618) est organisé en enroulement super hélice. Cette région intervient également dans l’interaction de MKLP-1 avec MgcRacGAP (Mishima et al., 2002).
Le domaine C-terminal de MKLP-1 ou « queue » (622-857). La fonction et le type de cargos reconnus par cette région sont inconnus chez MKLP-1. La queue intervient parfois chez d’autres kinésines dans la régulation du domaine moteur (Coy et al., 1999a).

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1. Introdution
1.1. KINÉSINE ET MICROTUBULE
1.1.1. Les microtubules : support des kinésines
a. Caractéristiques structurales du microtubule
b. Assemblage du microtubule
1.1.2. Les kinésines
a. Organisation structurale des kinésines
b. Diversité structurale
c. Cycle catalytique
d. Mécanisme du déplacement
e. Kinésines et santé
1.2. LE CYCLE CELLULAIRE
1.2.1. La mitose
1.2.2. La cytokinèse
a. Le fuseau central
b. La voie de signalisation RhoA
c. La myosine, force motrice de la cytokinèse
d. Assemblage de l’anneau contractile
e. Fusion membranaire
1.3. FONCTION ET RÉGULATION DU « CENTRALSPINDLIN COMPLEX »
1.3.1. Données structurales
a. Organisation structurale de la kinésine MKLP-1
b. Organisation structurale de MgcRacGAP
1.3.2. Rôles cellulaires du « centralspindlin complex »
a. Régulation et localisation de MKLP-1
b. Régulation et localisation de MgcRacGAP : le complexe MgcRacGAP / ECT2
c. Régulation et localisation de MgcRacGAP : Activation de la voie RhoA
1.3.3. Le « centralspindlin complex » et la cytokinèse
OBJECTIF DES TRAVAUX DE LA THÈSE
2. MATERIEL ET MÉTHODE
2.1. CLONAGE DE MKLP-1 ET DE MGCRACGAP
2.1.1. Élimination du site NcoI endogène de MKLP-1
2.1.2. Synthèse des fragments par PCR
2.1.3. Insertion dans un plasmide
a. Purification des produits PCR
b. Insertion des fragments d’intérêt
c. La transformation bactérienne
2.1.4. Mutation de la boucle L6 de MKLP-1
2.2. SUREXPRESSION ET PURIFICATION DES PROTÉINES
2.2.1. Vecteurs d’expression de type pET
2.2.2. Test de surexpression
2.2.3. Purification des protéines recombinantes
a. Cultures cellulaires et purifications
b. Expériences de dénaturation/renaturation
2.3. ENZYMOLOGIE
2.3.1. Dosage de l’activité ATPasique par test couplé
2.3.2. Détermination des constantes cinétiques
2.3.3. Criblage des chimiothéques
2.4. EXPÉRIENCE DE LIAISON AUX MICROTUBULES
2.5. ESSAIS DE CRISTALLISATION
2.5.1. Principe de la cristallographie
2.5.2. Essais de cristallogenèse
3. RESULTATS
3.1. CARACTÉRISATION DE MKLP-1 ET MGCRACGAP
3.1.1. Les constructions clonées
3.1.2. Expressions des fragments de MKLP-1
3.1.3. Expression des fragments de MgcRacGAP
3.1.4. Historique des essais de cristallogenèse
3.1.5. Résultat des expériences de cristallogenèse
3.2. CARACTÉRISATION DE LA BOUCLE L6 DE MKLP-1
3.2.1. Activité Basale
3.2.2. Activité stimulée
3.3. CRIBLAGE
3.3.1. Intérêt
3.3.2. Identification d’inhibiteurs potentiels
3.3.3. Détermination des IC50
3.3.4. Spécificité
3.3.5. Caractérisation de l’inhibiteur 2C2
3.4. INTERACTION « CENTRALSPINDLIN COMPLEX » / TUBULINE
3.4.1. Historique
3.4.2. Interaction du domaine queue avec les microtubules
a. Dépendance nucléotidique du complexe « queue »/tubuline
b. Effets du sel sur la formation du complexe « queue »/tubuline
3.4.3. Interaction MgcRacGAP / microtubule
4. DISCUSSION
4.1. EXPRESSION ET CRISTALLOGENÈSE DE MKLP-1 ET MGCRACGAP
4.2. LA BOUCLE L6 DE MKLP-1
4.3. L’INHIBITEUR 2C2
4.4. MODÈLE DE L’INTERACTION « CENTRALSPINDLIN COMPLEX » / MICROTUBULES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *