Fonction de charge générale en géomécanique

Le plus ancien ingénieur était certainement mécanicien des roches: en effet, le premier souci de l’être humain fut certainement de s’assurer que la caverne qu’il habitait présentait un minimum de garanties de stabilité. La première véritable industrie humaine fut celle des outils de silex, qui a requis des capacités d’organisation dans les domaines de l’extraction et de la production manufacturée. Même après qu’ils aient adopté des outils de métal, et quitté, pour la plupart, leurs habitations troglodytes, les hommes n’ont pas renoncé, bien au contraire, à l’exploitation du monde souterrain en général et rocheux en particulier : l’attribution, à l’instigation de Thémistocle, des revenus des mines du Laurion au financement d’une flotte de combat assura la prospérité et la prééminence de la thalassocratie athénienne. De même, entre les deux guerres puniques, l’épopée barcide en Espagne visa à redonner à Carthage les moyens de ses ambitions par la mainmise sur des ressources minières parmi les plus riches de l’Antiquité, et la perte de ses possessions ibériques scella le destin de la métropole phénicienne, un demi-siècle avant sa chute.

Les conquistadors espagnols établirent, par la possession de l’or des Amériques, la puissance de leur patrie d’origine. La révolution industrielle est indissociable de la machine à vapeur et donc de l’industrie du charbon : outre sa puissance industrielle et navale, la possibilité de l’Angleterre victorienne de garantir, par un charbon abondant et de qualité, un fret de retour pour ses importations a contribué à l’établir comme la puissance maritime par excellence de son époque. Le chemin de fer, par les contraintes de tracé qu’il impose, contribue à l’essor d’un nouveau type d’ouvrage souterrain : les tunnels. Les infrastructures modernes repousseront sans cesse les limites de ce type d’ouvrage. Le XXe siècle entraîne également de nouveaux champs d’application pour la mécanique des roches au travers de l’exploitation pétrolière et des recherches entreprises dans le domaine du stockage des déchets nucléaires.

Formes de critères

Critères anguleux et critères réguliers

Même en considérant le cas le plus simple, celui d’un critère basé sur la seule cission, nous pouvons voir naître deux familles de critères différents, selon leur représentation dans le plan déviatorique.

Critères anguleux

La première catégorie de critère est celle des critères présentant des arêtes dans le plan déviatorique. Ils s’écrivent pour la plupart en fonction des contraintes principales extrêmes. Le plus simple de ces critères est celui de Tresca (I.10). Plus utilisés en géotechnique nous trouvons des critères comme celui de Mohr-Coulomb (I.11) ou de Hœk-Brown (I.12)[45].

Hoek propose une méthode approchée pour déterminer les coefficients A et B. Une détermination de la solution exacte de la courbe intrinsèque du critère de Hœk-Brown étant plus complexe à obtenir [77]. Des solutions analytiques existent pour ce genre de critères, faisant la distinction entre régime de face et régime d’arête. Numériquement, l’existence du régime d’arête les rend plus pénibles à implémenter.

Comportement du matériau réel

Il est bon de revenir aux notions liées au matériau et aux essais pour déterminer quel est le critère le plus approprié. Pour les métaux, il semblerait que le comportement s’apparente plutôt à du Von Mises que du Tresca[17]. Pour les géomatériaux, Pan et Hudson [68] rapportent une tendance [73, 2, 35, 49] à estimer que même si la forme du critère serait plutôt lisse qu’hexagonale, la forme globale montrerait une différence de comportement en extension et en compression, plus proche d’un critère de Mohr-Coulomb que de Von Mises (cf. I-1.3).

Forme de la courbe intrinsèque

Si l’on considère le critère de Mohr-Coulomb, la courbe intrinsèque est une droite dont la pente caractérise l’angle de frottement, ce qui ne traduit pas toujours la réalité du comportement, les courbes intrinsèques des roches présentant une forme parabolique. Depuis les années soixante des critères non linéaires ont été développés pour simuler cet état de fait [68]. L’un des plus connus est celui de Hœk Brown qui a été constamment développé [44] pour pouvoir englober le plus grand nombre de types de matériaux rocheux.

Différence de comportement en compression et en extension

Les géomatériaux présentent une forme déviatorique globale particulière, plutôt arrondie mais surtout présentant une différence du comportement entre l’extension et la compression. En effet, pour une même pression moyenne, on peut mesurer une différence significative sur la valeur de J2 entre une configuration en compression (σI = σII > σIII ) (configuration de l’essai triaxial classique) et en extension (σI > σII = σIII ) (essai d’extension, pour lequel on effectue une montée en pression hydrostatique, avant de relâcher une contrainte principale).

Quelques considérations plus approfondies

Décomposition polaire des critères usuels

Il est courant de représenter la trace de la plupart des critères dans le plan déviatorique, ou plan Π, c’est à dire un plan pour lequel σm est constant. Une surface correspondant à un critère isotrope pouvant s’écrire en fonction des invariants du déviateur des contraintes(J2, J3) et de la contrainte moyenne, on peut donc exprimer les critères en substituant au troisième invariant l’angle de Lode (équation (I.21)), qui permet d’obtenir dans le plan Π l’équation en coordonnées polaires du critère (les variations de l’angle de Lode sur un sixième de l’espace suffisent du fait des symétries).

Quel critère choisir ?

Il est bon de revenir aux notions liées au matériau et aux essais pour déterminer quel est le critère le plus approprié. Pour les géomatériaux, même si le critère serait plutôt régulier qu’anguleux, il existerait une différence de seuil entre compression et extension comparable à un Mohr-Coulomb, ce que confirmerait des essais en triaxial « vrai » [61]. Ainsi, on peut penser, que des critères de type Matsuoka-Nakai, William-Warnke ou Lade permettent de mieux rendre compte du comportement des géomatériaux. A la différence du critère de Drucker-Prager, ils permettent de rendre compte de l’existence du ratio extension-compression LS tout en ne présentant pas les singularités du critère de Mohr-Coulomb. Cependant, deux questions peuvent se poser :

Quelle est la pertinence de la valeur de LS déduite des critères ?

On connaît la valeur de LS définie pour certains critères (Tab. I.2). Pour le critère de Mohr-Coulomb, elle est directement liée à la valeur de φ . Si l’on suit la formulation du critère de Hœk-Brown, elle dépend de la contrainte moyenne équivalente, c’est à dire, des constantes matériaux et du premier invariant. Cependant, même si l’on peut constater de bonnes concordances pour certains matériaux particuliers, cela n’est pas le cas pour tous. On peut donc penser[82] qu’il serait intéressant de pouvoir déduire la valeur de LS des essais – à condition d’en disposer suffisamment. Pour les argilites de l’Est, les essais en extension présentent des seuils de rupture en extension faibles par rapport aux essais triaxiaux en compression, ce qui fait que certains modèles proposés introduisent une différence de comportement entre extension et compression plutôt que l’écriture classique du critère choisi [22, 36]. La réponse à cette interrogation est liée à la dépendance de la roche à la contrainte principale intermédiaire. On pourra se reporter pour cette dernière question à l’important travail statistique effectué par Colmenares et Zoback [24] sur 5 types de roches. Étant donné également la relative rareté des essais en extension et la dispersion, il est opportun d’étudier ce paramètre comme une variable à part entière.

Comment tenir compte du caractère parabolique ?

Étant donné que le comportement des matériaux rocheux présente un caractère parabolique correspondant à un critère de type Hœk-Brown (section I-1.2 page 5),il semble pertinent de modéliser cet effet également. Or, bien que l’on détermine les caractéristiques d’un matériau à partir du critère de Hœk-Brown, il n’est pas rare que de nombreux logiciels commerciaux n’implémentent qu’un critère de type Mohr Coulomb ou Drucker-Prager, ce qui force à rechercher des caractéristiques équivalentes[43]. Le premier défaut de ces conversions est principalement de perdre cette caractéristique parabolique du critère. Une perte, moins soulignée, est le changement de la fonction de forme, qui est constante pour Mohr-Coulomb, alors qu’elle varie pour Hœk-Brown, encore que la pertinence de la forme déviatorique du critère de Hœk-Brown ne soit pas un sujet évoqué fréquemment. Pour tenir compte des différentes caractéristiques des matériaux rocheux, un critère général sera utilisé.

Proposition d’une fonction de charge générale

Le but est de proposer un critère général et convexe permettant de modéliser le comportement particulier des géomatériaux, particulièrement les roches : une enveloppe de Mohr linéaire ou parabolique et une forme particulière dans le plan déviatorique. Il s’avère que l’on peut définir ces caractéristiques à l’aide de deux fonctions : l’équation du critère dans le plan méridien principal- ou rayon déviatorique: σ+ (I.26)- et le ratio d’extension LS. Ces deux fonctions sont intégrées dans une équation garantissant le caractère régulier et convexe de la fonction de charge indépendamment des fonctions caractéristiques. Cette expression est intéressante car elle permet ainsi la constitution directe d’un modèle à partir de tests triaxiaux, en extension et compression.

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Table des matières

Introduction
I Les critères
I-1 Formes de critères
I-1.1 Critères anguleux et critères réguliers
I-1.2 Forme de la courbe intrinsèque
I-1.3 Différence de comportement en compression et en extension
I-2 Quelques considérations plus approfondies
I-2.1 Décomposition polaire des critères usuels
I-2.2 Remarques sur les correspondances entre les critères
I-2.3 Quel critère choisir ?
I-3 Proposition d’une fonction de charge générale
I-3.1 Caractéristiques dans le plan déviatorique
I-3.2 Critères de Mohr-Coulomb et Matsuoka-Nakai
I-3.3 Critère de Hœk-Brown
I-3.4 Comparaison avec les fonctions explicites
II Modélisation du comportement des argilites de l’Est
II-1 Présentation du problème
II-1.1 Contexte général de l’étude
II-1.2 Contexte géologique et mécanique
II-2 Modèle comportemental choisi
II-2.1 L’écoulement plastique
II-2.2 La dilatance
II-2.3 Écrouissage et endommagement
II-3 Interprétation des résultats pour la zone MODEX-REP
II-3.1 Résistance à la compression
II-3.2 Essais triaxiaux
II-4 Utilisation du paramètre γ pour un autre type de roche
III Les méthodes de calcul.
III-1 Quelques hypothèses préliminaires
III-1.1 Discret ou continu ?
III-1.2 La notion de tunnel profond
III-2 Méthodes basées sur les classifications
III-3 Calculs analytiques
III-4 La méthode convergence-confinement
III-4.1 Principes généraux
III-4.2 Détermination du taux de déconfinement
III-5 Calculs numériques aux éléments finis
III-5.1 Configuration sans prise en compte du front de taille
III-5.2 Prise en compte du passage du front de taille
III-6 La méthode de calcul stationnaire
III-6.1 Principe du calcul stationnaire
III-6.2 Calcul stationnaire dans le cadre élastoplastique
III-6.3 Domaine de validité et limite d’emploi de la méthode
III-6.4 Prise en compte de la convergence au moment de la pose
III-7 Calcul de l’écoulement plastique
III-7.1 Critères circulaires
III-7.2 Critères non-circulaires
IV Simulation de l’excavation
IV-1 Configuration générale de la simulation
IV-2 Modèle à faible seuil d’inélasticité
IV-2.1 Rappel du modèle comportemental
IV-2.2 Résultats des calculs (modèle contractant-dilatant)
IV-3 Modèle isochore
IV-3.1 Rappel du modèle comportemental
IV-3.2 Résultat des calculs
IV-4 Modèle dilatant associé
IV-4.1 Rappel du modèle comportemental
IV-4.2 Résultat des calculs
Conclusion

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