Définition
La fibromyalgie se présente sous la forme d’une polyalgie chronique, accompagnée de la trilogie « asthénie, sommeil non réparateur, troubles cognitifs » et d’un cortège de symptômes dysautonomiques touchant divers organes (digestif, urinaire, dermatologique, ophtalmologique, ORL…), d’étiologie inconnue (1)(2). La douleur dysfonctionnelle n’est pas soulagée par les antalgiques habituels (3). Elle peut être spontanée, déclenchée ou exacerbée par des facteurs extérieurs tel que le stress, le climat ou les efforts mal calibrés (4). Elle peut se compliquer de comorbidités, telle qu’un syndrome dépressif (5). Pourvoyeuse de déconditionnement physique et de stress, elle est associée à une augmentation du risque d’atteinte cardiovasculaire, de surpoids (6). Concomitante à une maladie migraineuse, elle est un facteur de risque de suicide .
Les examens complémentaires biologiques et radiologiques couramment réalisés ne retrouvent pas d’anomalie typique à cette affection.
Le diagnostic est essentiellement clinique, il repose sur les critères suivants, définis par l’ACR (American College of Rheumatology) en 1990 (au moins 11 des 18 points douloureux de Yunus) puis modifié en 2010 (8) : douleurs chroniques diffuses depuis plus de 3 mois, un score d’étendue des douleurs diffuses Widespread Pain Index (WPI) : 0-19 et un score de sévérité des symptômes (SSS) : 0-12.
Le diagnostic est posé par, depuis plus de 3 mois :
-WPI ≥ 7 et SSS ≥ 5
-WPI 4-6 et SSS ≥ 9
-WPI + SSS > 12 = PSD (Poly Symptomatic Distress)
Initialement il fallait avoir éliminé toute autre pathologie susceptible d’expliquer le tableau pour poser le diagnostic de fibromyalgie. Cela devient caduque, depuis la reconnaissance du type de fibromyalgie secondaire à une affection (type SEP, PR, Cancer, etc.) (9).
Histoire et contexte actuel
La fibromyalgie est reconnue par de grandes instances, telles que l’OMS depuis 1992, et l’American College of Rheumatology (ACR), qui en a validé des critères diagnostics en 1990. (8) En 2006 l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) attribue au syndrome fibromyalgique un code spécifique (M 79.7) dans la CIM10, parmi les maladies musculo-squelettiques et du tissu conjonctif. La Haute Autorité de Santé (HAS) a publié une rapport d’orientation en 2010 (11). L’EULAR (EUropean League Against Rheumatism) a publié des recommandation en 2016, actualisées en 2017 pour la prise en charge de cette pathologie (12). Un rapport de l’INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale) sur la fibromyalgie sera diffusé en 2018.
La loi santé du 26 janvier 2016, entrée en vigueur au 1er mars 2017, complétée par la circulaire ministérielle de 2017, prévoit une possibilité de prescription par le médecin traitant, d’activités physiques adaptées pour les patients atteints d’ALD. (Annexe 3) Notons que la fibromyalgie n’est pas une pathologie prise en charge à 100%. Les patients à limitation sévère (douleur ou fatigue) ne peuvent être encadrés selon cette loi que par des kinésithérapeutes, ergothérapeutes ou psychomotriciens.
Epidémiologie et impact socio-économique
Elle toucherait plus de 4% de la population (13), avec un ratio de presque 9 femmes pour 1 homme (14). Il s’agit d’une pathologie donc fréquente, et invalidante avec un impact majeur sur la vie professionnelle (15), un risque de précarité voire d’exclusion sociale. C’est une pathologie coûteuse pour la société (16). Jusqu’à 30% des patients déclarent ne pas pouvoir poursuive leur activité professionnelle (17). Cependant les arrêts de travail ne sont souvent pas dus directement aux symptômes mais au contexte ; plutôt que d’allonger le nombre ou la durée des arrêts, ce sont les conditions de travail qu’il apparait nécessaire d’aménager (18). La fibromyalgie est habituellement mal reconnue par les médecins généralistes qui ne portent que 0,2% de diagnostics par an (soit 3 patients par an) contre 2,1 à 2,8% pour les rhumatologues (11) , suivis par les neurologues, les internistes. Les patients errent 8 ans en moyenne entre plusieurs spécialités médicales avant d’être diagnostiqués (19).
Physiopathologie
Sur le plan moléculaire, la fibromyalgie est encore mal connue.
Dans le modèle murin on retrouve 80% de femelles atteintes contre 20% de mâles (4). Au niveau cérébral, il existe à la fois une sensibilisation périphérique et centrale.
-Périphérique : augmentation de facteurs nociceptifs (acides aminés, cytokines) et une inflammation chronique de bas grade (Taux CRP, VS normaux) avec existence de cytokines pro-inflammatoires (IL8…).
-Centrale : influx nerveux passant par la corne dorsale de la moelle, augmentation des récepteurs nociceptifs NMDA via le glutamate, amplification des réponses et phénomène d’emballement.
Au final, on observe une hyperexcitabilité des voies ascendantes, et une diminution des mécanismes anti-nociceptifs du système inhibiteur descendant, qui mènent à une chronicisation de la douleur (4).
Les neuro-hormones seraient impliquées dans l’amplification de la perception de la douleur, avec un métabolisme anormal des endorphines (20).
Chez les patients fibromyalgiques hyperalgiques, des zones d’hyperperfusion ont été retrouvées dans des régions du cerveau impliquées dans la dimension sensorielle du traitement de la douleur, et des zones d’hypoperfusion dans les zones liées à la dimension affective et de l’attention. Ces données laissent penser que la tomographie par émission mono-photonique pourraient être un bon outil pour guider les stratégies thérapeutiques individuelles, et permettre un suivi objectif de l’amélioration de la douleur sous traitement. (21). On observe également une diminution du volume de matière grise totale (22).
Diagnostics différentiels
Avant d’annoncer un diagnostic de fibromyalgie, et en dehors du cadre de fibromyalgie secondaire, il reste licite de rechercher des maladies rhumatologique, auto-immune, infectieuse, endocrinienne, oncologique ou génétique.
Prise en charge non médicamenteuse
La pratique d’activité physique adaptée est le traitement de première intention (12). Elle est décrite comme contraction musculaire faisant augmenter le métabolisme par rapport au métabolisme de base. Elle est réalisable à domicile, pendant les déplacements, dans le cadre de la profession, des activités de loisir, du sport… La libération d’hormone corticotrope, de béta-endorphine et de sérotonine qu’elle engendre est susceptible d’exercer un effet antalgique chez les patients fibromyalgiques (28)(29). L’adaptation suit des règles d’intensité, de type, de fréquence et de durée selon les goûts, les besoins physiologiques et la condition physique de chacun (Annexe 5). Les activités aquatiques et les programmes d’activités combinées semblent avoir plus d’impact sur la diminution de la symptomatologie dépressive ainsi que sur les points douloureux (30).
Les autres thérapeutiques non médicamenteuses utilisées sont :
-La stimulation trans-crânienne magnétique (rTMS), qui peut améliorer la qualité de vie
-L’ETP (éducation thérapeutique du patient) pour la gestion de la douleur chronique
-Les TCC (thérapies cognitivo-comportementales) pour apprendre la gestion des émotions et du stress
-L’apprentissage de techniques psychocorporelles (hypnose, sophrologie, méditation pleine conscience)
-Les contre-stimulations (physiothérapie chaud-froid, TENS).
Il est également indispensable de dépister et de traiter toute comorbidité qui peut agir sur la douleur chronique : apnée du sommeil, SADAM, syndrome anxio-dépressif, PTSD (syndrome de stress post traumatique). Un soutien social est à déployer si besoin.
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Table des matières
1. INTRODUCTION
1.1 Définition
1.2 Histoire et contexte actuel
1.3 Epidémiologie et impact socio-économique
1.4 Physiopathologie
1.5 Diagnostics différentiels
1.6 Prise en charge non médicamenteuse
1.7 Prise en charge médicamenteuse
1.8 Justification de cette étude
2. MATERIEL ET METHODE
2.1 Etude et objectif
2.2 Type d’étude
2.3 Echantillon
2.4 Procédure
2.5 Description de l’échantillon
2.6 Recueil de données
2.7 Critères de jugement
2.8 Analyse statistique
3. RESULTATS
3.1 Caractéristiques de l’échantillon
3.2 Analyse du pourcentage de participation aux séances d’activité physique adaptée
3.3 Analyse des symptômes avant et après l’activité physique
3.4 Analyse du QIF
3.5 Analyse de la qualité du sommeil, de l’intensité des douleurs et de la fatigue
3.6 Analyse des paramètres physiques et mesures anthropométriques
3.7 Analyse de l’endurance
3.8 Analyse des scores des auto-questionnaires
4. DISCUSSION
4.1 Interprétation des résultats
4.2 Forces
4.3 Limites
4.4 Perspectives
5. CONCLUSION