Les composés organo-soufrés
Les plantes appartenant au genre Allium sont caractérisées par leur capacité à produire des composés secondaires soufrés. Allium fistulosum L. synthétise des composés secondaires soufrés qui sont à l’origine de son odeur particulière qui s’en dégage lorsqu’il est coupé (81). En plus des acides aminés habituels tels que la cystéine, la cystine ou le glutathion, on trouve aussi les dérivés dipeptidiques de l’acide glutamique présents en grande quantité (50). Dans Allium fistulosum L., on trouve également des alkylcystèines sulfoxides. Ces derniers sont formés à partir de la cystéine ou de l’acide glutamique et sont au nombre de quatre : la S-méthyl-L-cystéine sulfoxide (MeCSO) présente en faible proportion dans Allium fistulosum L., la S-propylL-cystéine sulfoxide (PrCSO), la S-L-propenyl-L-cystéine sulfoxide (PeCSO) prépondérante dans Allium fistulosum L. et la S-allyl-L-cystéine sulfoxide (AlCSO) ou alliine (32). Leur proportion varie à l’intérieur de l’espèce selon l’organe, le stade de développement et les conditions environnementales (9).
Nature cellulaire des ERO
Parmi les espèces radicalaires susceptibles de se former dans les cellules, il convient de distinguer celles dites « primaires », qui jouent un rôle particulier en physiologie, et celles dites « secondaires », qui dérivent des premières par réaction avec des composés biochimiques de la cellule. Les radicaux primaires dérivent de l’oxygène par des réductions à un électron tel que l’anion superoxyde (O2..) et le radical hydroxyle (.OH) (85).D’autres espèces dérivées de l’oxygène comme l’oxygène singulet 1O2, le peroxyde d’hydrogène (H2O2) ou le nitroperoxyde (ONOOH) ne sont pas des radicaux libres, mais sont aussi réactives et peuvent être des précurseurs de RL (27). En effet, le peroxyde d’hydrogène, qui n’est pas un radical libre mais une molécule avec tous ses électrons appariés, présente une toxicité par l’intermédiaire des réactions de type Fenton auxquelles il peut participer sous l’influence de cations métalliques comme le Fe2+ ou Cu2+ (82) : Fe2++ H2O2 → complexes intermédiaires → Fe3++ .OH + OH- (réaction de Fenton) Certains radicaux formés chez les êtres vivants tels que l’anion superoxyde (O2.-) ou le monoxyde d’azote (NO) ne sont pas très réactifs. C’est ce qui explique d’ailleurs leur utilisation par l’organisme en tant que médiateurs régulant des fonctions biologiques comme la vasodilatation, la prolifération de neurones (39). Par contre, des espèces comme les radicaux peroxyles (ROO.) et surtout le radical hydroxyle (HO.) sont particulièrement réactifs avec la plupart des molécules biologiques. Leur réactivité n’a pas que des conséquences toxiques pour l’organisme ; au contraire ils peuvent être utilisés dans divers mécanismes aboutissant à la destruction de bactéries au sein des cellules phagocytaires ou dans la régulation de fonctions cellulaires létales comme l’apoptose (27).
Les pathologies associées au stress oxydant
Le stress oxydant est potentiellement impliqué dans de nombreuses pathologies comme facteur déclenchant ou associé à des complications lors de leur évolution. Ces pathologies peuvent découler d’intoxications chimiques et médicamenteuses, d’exposition à des rayonnements, d’un syndrome d’hyperoxydation, de phénomènes inflammatoires, de situation d’ischémiereperfusion et de désordres dégénératifs. La multiplicité des conséquences médicales liées au stress oxydant vient du fait que de nombreux organes ou tissus peuvent devenir des cibles. De même, à l’origine de molécules biologiques anormales et en surexprimant certains gènes, le stress oxydant a été décrit comme impliqué dans le développement de maladies comme le cancer, les maladies neurodégénératives (sclérose latérale amyotrophique), les maladies cardiovasculaires, le diabète, la maladie d’Alzheimer et le vieillissement accéléré (7, 55). Parmi les maladies nous avons décrit :
Cancer : Les dégâts créés sur l’ADN, (comme par exemple la mutation de la guanine en 8-hydroxy-2’-déoxyguanine (8-OH-dG) qui empêche l’appariement de la guanine avec la cytosine), peuvent être à l’origine du développement de certains cancers, en amplifiant les signaux de prolifération et en inhibant les antioncogènes (62 ; 69).
Diabète : L’augmentation des RL dans l’organisme provoque la peroxydation des lipides et l’accumulation du malondialdéhyde. Ce qui va favoriser une augmentation de la glycosylation des protéines, qui est une complication majeure de l’hyperglycémie présente dans le diabète. Les RL interviennent comme un facteur non négligeable en causant une augmentation de la résistance à l’insuline chez les individus (15 ; 73).
Maladies cardiovasculaires : Le rôle essentiel du stress oxydatif dans la pathogénie des maladies cardiovasculaires est confirmé. L’oxydation des LDL initie le processus de la formation de plaque d’athérome (66).
Maladies inflammatoires : Il a été montré que la protéine C réactive, marqueur majeur de l’inflammation, est corrélée avec l’augmentation de la production de RL (70).
Maladies neurodégénératives : En cas de troubles neurodégénératifs, les RL sont en plus grande quantité et sont susceptibles de provoquer la mort des neurones. Ils sont fortement étudiés dans le mécanisme de la maladie d’Alzheimer et de Parkinson chez l’homme (1 ; 60).
La céruloplasmine (CP)
L’activité antioxydante de la CP a été démontrée à plusieurs reprises, in vitro comme ex vivo. Elle serait même, selon certains auteurs, l’antioxydant le plus important contenu dans le sérum sanguin (33). Plusieurs mécanismes ont été proposés pour expliquer son rôle actif dans la prévention des dommages causés par le stress oxydant. L’un de ces mécanismes implique une compétition entre l’activité oxydasique de la CP et la réaction de Fenton pour l’utilisation d’ions ferreux et leur conversion en ions ferriques (34). La réaction de Fenton consiste en la génération de radicaux hydroxyles ·OH à partir de H2O2 en présence de Fe2+. En transformant le Fe2+ en Fe3+, la CP diminue le pool de Fe2+ et empêche ainsi la formation du radical hydroxyle par la réaction de Fenton. Il est également proposé que l’activité oxydasique de laCP sur l’ion cuivreux puisse contribuer à l’action antioxydante de la CP. Un autre mécanisme de l’action antioxydante de la CP dépend de la capacité de piéger certaines ERO. Dans des conditions physiologiques, la CP réagit seulement de manière stœchiométrique avec ce radical, c’est à dire qu’elle le lie sans transformation catalytique (52).
CONCLUSION
Dans beaucoup de régions d’Afrique et dans le Sahel occidental, les plantes contribuent significativement à l’alimentation et au traitement des êtres humains. Aujourd’hui, une majorité de la population mondiale, plus particulièrement dans les pays en développement, utilise des remèdes traditionnels à base de plantes pour traiter diverses pathologies surtout chroniques pouvant être liées au stress oxydatif. En effet, le stress oxydatif résultant d’un déséquilibre au sein de l’organisme entre la production d’éléments oxydants et les mécanismes de défense antioxydante est responsable du vieillissement cellulaire. Ainsi, avec ses conséquences multiples pouvant toucher les acides nucléiques, les protéines oules lipides, il peut contribuer à l’apparition de pathologies surtout chroniques(cancer, diabète, maladies cardiovasculaires, neurodégénératives, Parkinson, etc.). Par ailleurs, pour enrayer le stress oxydatif, il faut donc aider l’organisme par l’apport d’antioxydants naturels (polyphénols, caroténoïdes, vitamine C, E,…) ou synthétiques. D’où l’intérêt grandissant porté aux antioxydants qui ne cessent de croître ces dernières années du fait de leur implication dans la prévention de ces pathologies. Ainsi, de nombreux organismes de santé tels que l’OMS et le Haut Comité de la Santé Publique (HCSP) proposent une politique nutritionnelle où interviennent les fruits et légumes riches en antioxydants. Notre étude a porté sur l’évaluation de l’activité antioxydante des FAE, FM et de l’EM des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L. qui est une plante très connue appartenant à la famille des Alliacées. Concernant l’extraction, l’EM a été obtenu à partir de 20 g de poudre des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L. et a donné un rendement de 12,25%. La FAE et la FM ont étéobtenus à partir de 35 g de poudre des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L. donnant les rendements respectifs de 1,57% et 10,73%. L’activité antioxydante des différents produits a été déterminée par la méthode du DPPH. Nous avons utilisé les concentrations de :
– 15,625 mg/ml, 31,25 mg/ml, 62,5 mg/ml, 125 mg/ml et 250 mg/ml pour l’EM.
– 62,5 mg/ml et 125 mg/ml pour les FM et FAE.
– 0,156 mg/ml, 0,312 mg/ml, 0,625 mg/ml, 1,25 mg/ml et 2,5 mg/ml pour l’acide L-ascorbique testé comme produit de référence.
Les résultats de notre étude montrent que l’EM et les FM et FAE des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L. possèdent une activité antioxydante significative de manière dose dépendante à toutes les concentrations testées (p<0,05). Pour tous les extraits testés, il ressort de nos résultats que l’activité antioxydante la plus importante est obtenue avec l’EM. Avec les concentrations de 62,5 mg/ml et de 125 mg/ml, les PI obtenus sont respectivement de :
– 35,2 ±0,62M% et 50,24 ±0,35% pour l’EM.
– 22,93 ±0,02% et 33,61 ±0,08% pour la FM.
– 22,51 ±0,10% et 30,78 ±0,07% pour la FAE.
L’acide L-ascorbique utilisé comme produit de référence, présente une activité antioxydante supérieure à celle de l’EM des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L. avec des CI50 respectives de 0,16 ±0,08 mg/ml et 124,4±0,17 mg/ml. Les résultats de notre étude suggèrent que les feuilles et bulbes de Allium fistulosum L. contiendraient des substances à propriétés antioxydantes qui pourraient être liées à la présence de flavonoïdes révélés par l’étude phytochimique réalisée. Par ailleurs, les analyses nutritionnelles réalisées sur les feuilles et bulbes ont montré que Allium fistulosum L. renferme de la quercétine, du kaempférol, de la vitamine C et des caroténoïdes qui pourraient contribuer à son activité antioxydante et certainement prévenir les pathologies surtout chroniques liées au stress oxydatif. Ainsi, des études en perspective devraient s’orienter vers des tests complémentaires in vivo (par exemple : la mesure du pouvoir antioxydant du plasma, l’utilisation de marqueurs systémiques de la peroxydation lipidique, etc.), sur le plan pharmacologique mais aussi sur le plan analytique et toxicologique des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES
Chapitre I : Revue Bibliographique sur Allium fistulosum L
I. ETUDE BOTANIQUE
I.1. Généralités sur la famille des Alliacées
I.2. Place dans la systématique
I.3. Noms vernaculaires
I.4. Etude descriptive
I.4.1. Le port
I.4.2. Les feuilles
I.4.3. Les fleurs
I.4.4. Le bulbe
I.5. Répartition géographique
II. CHIMIE
II.1. Valeurs nutritionnelles des feuilles et des bulbes
II.2. Les composés organo-soufrés
II.3. Les flavonoïdes
III. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES
IV. UTILISATIONS TRADITIONNELLES
Chapitre II : Généralités sur les radicaux libres et les antioxydants
I. GENERALITES SUR LES RADICAUX LIBRES (RL)
I.1. Définition
I.2. Nature cellulaire, sources endogènes et exogènes des ERO
I.2.1. Nature cellulaire des ERO
I.2.2. Sources endogènes des ERO
I.2.3. Sources exogènes des ERO
I.3. Les cibles biologiques des ERO
II. STRESS OXYDANT
II.1. Définition
II.2. Les pathologies associées au stress oxydant
III. LES MOYENS DE DEFENSE ANTIOXYDANTE
III.1. Systèmes de défense enzymatique
III.2. Systèmes de défense non enzymatique
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
Chapitre I : Matériel et Méthode
I. OBJECTIF
II. MATERIEL ET REACTIFS
II.1. Matériel
II.1.1. Matériel végétal
II.1.2. Matériel de laboratoire
II.2. Réactifs
III. METHODES D’ETUDE
III.1. Extraction
III.1.1. Obtention de l’extrait méthanolique (EM) des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L.
III.1.2. Obtention de l’extrait hexanique (EH) et des fractions d’acétate d’éthyle (FAE) et méthanolique (FM) des feuilles et bulbes de Allium fistulosum L.
III.2. Etude phytochimique
III.3. Etude de l’activité antioxydante
III.3.1. Principe
III.3.2. Protocole expérimental du test au DPPH
III.3.3. Expressions des résultats
Chapitre II : Résultats
I. Extractions
II. Étude phytochimique
III. Activité antioxydante
IV. Concentration inhibitrice 50% (CI50)
Chapitre III : Discussion
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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