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Réactions aux interfaces au sein d’une brasure
Les composants électroniques sont assemblés sur les plages d’accueil en cuivre électrodéposé du circuit imprimé. Plusieurs couches de cuivre sont déposées lors de la fabrication du circuit par des procédés électrochimiques et électrolytiques. Une protection est déposée sur ces plages pour limiter l’oxydation et la corrosion lors du brasage et du stockage des circuits imprimés. Celle ci permet le bon mouillage de l’alliage lors de l’assemblage. La fusion de l’alliage fait croître divers composés intermétalliques aux interfaces par diffusion. Certains de ces composés consolident la liaison métallique (Cu6Sn5). La formation de ces composés est un signe d’une bonne liaison métallique. D’autres composés (Cu3Sn) peuvent fragiliser l’interface lors de sollicitations mécaniques. Les composés Cu3Sn ne croissent pas lors du procédé d’assemblage mais après vieillissement. Le Tableau 2 donne les principaux composés intermétalliques rencontrés aux interfaces en fonction du type de finition des plages d’accueil (circuit imprimé).
Dans la plupart des cas, les composés intermétalliques Cu6Sn5 forment une couche d’environ 3 μm d’épaisseur. Dans le cas des composés Ni3Sn4, la couche mesure de 1 à 2 μm. La Figure 5 présente deux interfaces de joints brasés de types Sn/Cu et Sn/Ni.
Ces composés Cu6Sn5 et Ni3Sn4 ont la particularité d’avoir une structure cristallographique fortement anisotrope et une dureté supérieure au reste de la matrice. Ils sont très influents sur les modes de défaillance des composants car ils sont situés aux interfaces, zones de concentration de contrainte. De plus, lors de la formation des composés à base d’étain (CuSn), la brasure est localement appauvrie en étain, ce qui influence la propagation des fissures en fatigue. En fatigue thermomécanique ou vibratoire, les fissures ont tendance à se propager le long des composés intermétalliques aux interfaces, même si elles s’amorcent dans la brasure, en surface.
Phénomènes microstructuraux activés en température
La fatigue thermomécanique des joints brasés induit divers comportements microstructuraux liés aux efforts mécaniques et aux phénomènes activés en température comme le fluage. Au sein de la microstructure, les différentes phases possèdent des coefficients de dilatation différents. De nombreux modes de fissuration/décohésion microscopiques sont observés. Ces effets sont une combinaison de différents phénomènes : fissures intra et intergranulaire, glissement aux joints de grains et aux interfaces entre phases [MATI07]. La Figure 6 présente la microstructure observée après la fatigue thermomécanique d’un joint d’alliage SAC387 après 1000 cycles thermiques entre 0°C et 60°C. L’endommagement ne résulte pas du cisaillement du joint, mais de la fatigue thermomécanique pure du matériau lié aux interactions entre phases, car l’éprouvette est symétrique (Cu/Sn-Ag-Cu/Cu). La dilatation différentielle entre le cuivre et la brasure est assez faible.
La Figure 7 montre une fissure qui s’est propagée à l’interface entre une plaquette de précipité Ag3Sn et des dendrites de phase -Sn.
Figure 7 : Photo MEB d’une fissure qui s’est propagée le long d’une aiguille (ou plaque mince) de précipité Ag3Sn [MATI07]
Ces photos illustrent divers phénomènes observés. En réalité, il faut ajouter l’influence des efforts induits par la dilatation des matériaux de l’assemblage (cisaillement des joints) qui favorise fortement l’apparition de microfissures et leur propagation. La fatigue des assemblages est principalement liée au cisaillement des joints et au comportement fortement viscoplastique des alliages.
Synthèse sur la métallurgie des joints brasés Sn-Ag-Cu
La microstructure des joints SAC dépend de nombreux paramètres. Ces paramètres variables incluent le profil de température du procédé de brasage, la composition de l’alliage et le volume des brasures liés aux types d’interconnexions.
La microstructure affecte de façon évidente la propagation des fissures et le comportement microscopique des alliages en fatigue. La répartition des différentes phases et composés intermétalliques est variable d’une technologie d’interconnexion à l’autre et peut expliquer la dispersion expérimentale observée lors des essais de fatigue. Les alliages SAC sont plus complexes que les alliages Sn-Pb de part leur composition et leurs comportements en fatigue. Comme cela sera présenté ultérieurement, certains modèles de comportement publiés [WEI01] [BUSS92] utilisent des paramètres propres à cette microstructure : taille des cellules par exemple. L’influence de la microstructure sur le comportement macroscopique en fatigue est-elle centrale, dès lors que la composition de l’alliage reste proche de l’eutectique ? Un modèle constitutif à l’échelle macroscopique pourra difficilement tenir compte de l’évolution des paramètres microstructuraux, mais devrait pourtant être adapté à une large gamme de joints brasés de type Sn-Ag-Cu, et donc, applicable à de nombreuses technologies d’interconnexion et procédés d’assemblages.
Des travaux sont toujours en cours sur des évolutions d’alliages pour satisfaire des contraintes spécifiques telle que la robustesse aux chocs mécaniques. L’ajout de certains éléments quaternaires comme le bismuth, le gallium ou encore l’indium est une des évolutions possibles des alliages Sn-Ag-Cu.
Sollicitations appliquées aux cartes électroniques
Contraintes thermomécaniques
Tous les équipements électroniques embarqués subissent des sollicitations thermomécaniques dues à l’environnement opérationnel et à l’échauffement propre des composants par effet Joule. Ces sollicitations conduisent à l’un des principaux modes de défaillance des assemblages : la rupture des joints brasés par fatigue-fluage. Les modèles de fatigues permettant de prédire le comportement des assemblages sont généralement issus de résultats d’essais de vieillissement accélérés sur carte de test. Les modèles de fatigue mécanique sont identifiés par des essais sur éprouvettes de test qui permettent de réaliser des mesures précises de déformation et contraintes. Cette deuxième méthode est plus précise pour établir des modèles mais nécessite l’utilisation d’éprouvettes dont la microstructure est représentative de celles des assemblages électroniques.
Comportement des assemblages en thermomécanique
Sous sollicitations thermiques, le différentiel de dilatation entre les constituants des assemblages, composant et circuit imprimé, fait naître des contraintes et déformations mécaniques. Ces contraintes thermomécaniques se traduisent par le gauchissement des cartes électroniques (cf. Figure 8). Le mode de sollicitations des joints est alors majoritairement du cisaillement même si la traction/compression intervient également.
Figure 8 : Schématisation des efforts sur les joints brasés due au gauchissement des cartes à chaud
Par exemple, un composant à boîtier céramique possède un coefficient de dilatation de l’ordre de 5 ppm/K. Le circuit imprimé à base de résine époxyde, de fibres de verre et de cuivre a un coefficient équivalent de l’ordre de 13 ppm/K. Dans le cas des boîtiers plastiques, il faut ajouter l’influence de la puce silicium enrobée dans le boîtier qui se dilate beaucoup moins (2,5 ppm/K).
Essais de vieillissement accélérés thermomécaniques
Essais sur carte de test
Pour évaluer la fiabilité des assemblages ou qualifier des cartes, des essais de vieillissement accéléré en étuve sont couramment réalisés sur des cartes de test. Les sollicitations sont assimilées à des cycles de température (cf. Figure 9). Ces cycles sont appliqués pour accélérer les variations de température vues par les cartes dans leur environnement opérationnel. Le temps à défaillance des composants est ainsi déterminé de façon expérimentale par un suivi électrique des joints brasés. Les données sont ensuite exploitées pour mettre en évidence l’influence des différents paramètres des assemblages comme les types de boîtier de composant, les technologies, les matériaux de circuit imprimé et les caractéristiques des cycles thermiques. La distribution statistique des défaillances est ensuite couramment tracée pour exploiter les résultats. Les facteurs d’accélération sont ainsi calculés à partir des distributions de type Weibull établies pour différentes gammes de cycles thermiques. Ces résultats alimentent les modèles de fiabilité tel que le modèle de Norris-Landzberg et permettent d’adapter les calculs selon les différents types d’alliages et technologies.
Ce type d’essai est facilement applicable aux cartes électroniques, mais difficilement applicable aux éprouvettes de test standard, qui ne sont pas des assemblages de matériaux à coefficient de dilatation thermique différents. Cela est possible avec des éprouvettes de type sandwich munies de matériaux à dilatation différents, de l’ordre de 5 à 10 ppm/ °C de différence dans le cas des assemblages réels [LIU03]. Les essais mécaniques cycliques de fatigue-fluage à température constante sont donc couramment effectués sur des éprouvettes d’alliage brut ou des éprouvettes représentatives de l’empilement cuivre-brasure-cuivre [ANDE04], possédant une microstructure proche des joints de composants électroniques. Des essais de fatigue mécanique avec une température qui varie selon un profil type peuvent également être envisagés au moyen de banc de tests élaborés.
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Table des matières
I Introduction générale
II Chapitre 1 : Microstructures des alliages sans plomb de l’électronique – Etat de l’art des modèles de fatigue appliqués aux alliages de brasage de composants électroniques
1 Introduction
2 Métallurgie des joints brasés Sn-Ag-Cu
2.1 Microstructure des alliages Sn-Ag-Cu
2.2 Influence de la vitesse de refroidissement
2.3 Influence de la composition de l’alliage
2.4 Réactions aux interfaces au sein d’une brasure
2.5 Phénomènes microstructuraux activés en température
2.6 Synthèse sur la métallurgie des joints brasés Sn-Ag-Cu
3 Sollicitations appliquées aux cartes électroniques
3.1 Contraintes thermomécaniques
3.1.1 Comportement des assemblages en thermomécanique
3.1.2 Essais de vieillissement accélérés thermomécaniques
3.2 Contraintes vibratoires
3.2.1 Comportement des assemblages électroniques en vibration
3.2.2 Essais de fatigue accélérés en vibration
3.3 Sollicitations combinées
4 Lois de comportement des alliages de type Sn-Ag-Cu
4.1 Comportement élasto-visco-plastique monotone
4.2 Comportement en fluage
4.3 Comportement viscoplastique avec modélisation de l’écrouissage
4.3.1 Modèle d’Anand
4.3.2 Modèle de Busso
4.3.3 Modèle de Lemaitre et Chaboche
4.4 Synthèse sur les lois de comportement
5 Les modèles de fatigue appliqués aux brasures en électronique
5.1 Modèles empiriques en loi puissance
5.1.1 Principe de modélisation de la fatigue
5.1.2 Les principaux types de modèles de fatigue
5.2 Identification des paramètres des modèles
5.2.1 Impact des procédures expérimentales
5.2.2 Pertinence des modèles empiriques de fatigue
5.2.3 Utilisation des modèles empiriques en chargement non-périodique
5.2.4 Modèles identifiés pour des alliages sans plomb
5.2.5 Comparaison des paramètres de Coffin-Manson proposés
5.2.6 Synthèse sur les modèles en loi puissance
5.3 Les modèles de dommage continu appliqués aux brasures
5.3.1 Principe de la contrainte effective et du paramètre d’endommagement
5.3.2 Modèles de dommage continu appliqués aux joints brasés
5.3.3 Synthèse sur les modèles d’endommagement continu
5.4 Modèle de zone cohésive
6 Les modèles de fatigue en vibration
6.1 Modèles de type Basquin/Coffin-Manson
6.1.1 Paramètres identifiés par Zhou sur des cartes de test
6.1.2 Paramètres identifiés par Kim pour une loi de Basquin
6.2 Synthèse sur les modèles de type Basquin/Coffin-Manson
6.2.1 Modélisation par endommagement continu proposée par Basaran
7 Sollicitations combinées et successives
7.1 Observations expérimentales
7.2 Modélisation de l’endommagement cumulé
7.2.1 Utilisation de lois empiriques
7.2.2 Utilisation de la modélisation continue de l’endommagement
7.2.3 Cumul de l’endommagement
8 Conclusion sur l’étude bibliographique
III Chapitre 2 : Fatigue oligocyclique de l’alliage Sn-3,0Ag-0,5Cu et modélisation du comportement et de l’endommagement des joints brasés par un modèle viscoplastique à écrouissage cinématique non linéaire
9 Introduction
10 Présentation des essais de cisaillement en torsion sur éprouvettes
10.1 Présentation des éprouvettes de torsion
10.1.1 Principe de brasage
10.1.2 Microstructure des joints brasés
10.2 Présentation du dispositif de test en torsion
10.2.1 Principe du banc de mesure
10.2.2 Principe de mesure des déformations
10.2.3 Plan de test
11 Résultats des essais de torsion
11.1 Comportement non endommagé
11.1.1 Essais préliminaires
11.1.2 Influence de la gamme de déformation
11.1.3 Influence de la vitesse de déformation
11.1.4 Influence de la température
11.1.5 Synthèse sur le comportement non endommagé
11.2 Comportement en fatigue
11.2.1 Mise en évidence de l’endommagement
11.2.2 Influence de la déformation imposée en fatigue
11.2.3 Influence de la vitesse de déformation en fatigue
11.2.4 Influence de la température en fatigue
11.2.5 Synthèse des résultats de fatigue oligocyclique
11.3 Analyses des faciès de rupture à 25 °C
12 Modélisation des essais de cisaillement
12.1 Rappel sur la torsion des tubes minces
12.2 Loi de comportement élasto-viscoplastique à écrouissage cinématique non linéaire
12.2.1 Formulation
12.2.2 Identification numérique des paramètres
12.3 Modèle d’endommagement continu à 25 °C
12.3.1 Formulation
13 Conclusion
IV Chapitre 3 : Etude expérimentale du comportement des cartes électroniques et des modes de rupture des assemblages électroniques en vibration
14 Introduction
15 Comportement des assemblages électroniques en vibrations
15.1 Les circuits imprimés
15.1.1 Essais de traction
15.1.2 Essais de flexion dynamique
15.2 Impact des composants assemblés sur le comportement des cartes
16 Essai de vibration sur carte de test
16.1 Présentations des cartes de test étudiées
16.1.1 Carte de test A
16.1.2 Carte de test B
16.2 Essais d’évaluation des assemblages en robustesse et en fatigue
16.2.1 Analyse modale des cartes de test
16.2.2 Principe des mesures de temps à défaillance
16.2.3 Essais de robustesse
16.2.4 Résultats des essais sur les cartes de test B2
16.2.5 Essais de fatigue à température ambiante
16.2.6 Essais de fatigue en température
16.3 Synthèse des résultats des mesures en vibration
17 Analyse des modes de ruptures des joints en vibration
17.1 Etude du composant FBGA1152
17.1.1 Présentation du boîtier
17.1.2 Analyse de la microstructure des joints après assemblage
17.1.3 Analyse des modes de rupture des joints en vibration
17.1.4 Comparaison avec les modes de rupture des assemblages Sn-Pb
17.2 Etude du composant HITCE360
17.2.1 Présentation du boîtier
17.2.2 Analyse de la microstructure des joints après assemblage
17.2.3 Analyse des modes de rupture des joints en vibration
17.2.4 Mode de rupture des assemblages de type Sn-Pb
17.3 Etude du composant PLCC
17.3.1 Présentation du boîtier
17.3.2 Analyse de la microstructure des joints après assemblage
17.3.3 Analyse des modes de rupture en vibration (Sn-Ag-Cu et Sn-Pb)
17.4 Etude de composant TQFP100
17.4.1 Présentation du boîtier
17.4.2 Analyse de la microstructure des joints après assemblage
17.4.3 Analyse des modes de rupture en vibration
17.4.4 Mode de rupture des assemblages Sn-Pb
17.5 Synthèse des analyses de défaillance après vibration
18 Conclusion
V Chapitre 4 : Modélisation des cartes et assemblages électroniques en vibration – Evaluation du dommage cumulé dans les joints brasés
19 Introduction
20 Présentation générale de la méthode
20.1 Calcul des réponses fréquentielles
20.2 Estimation du dommage cumulé
21 Hypothèses de la modélisation
21.1 Comportement mécanique
21.2 Simplification des géométries
21.3 Calcul des efforts dans les joints
21.4 Cumul du dommage et prise en compte de la multiaxialité
22 Modélisation des cartes électroniques
22.1 Modélisation du circuit imprimé
22.2 Modélisation des composants
22.2.1 Modélisation simplifiée
22.2.2 Modélisation des assemblages
23 Etude d’un cas de carte de test
23.1 Analyse modale numérique
23.1.1 Calcul des fréquences propres
23.1.2 Calcul des réponses en accélération par une analyse harmonique.
23.2 Calcul des réponses fréquentielles
23.2.1 Intégration des modèles tridimensionnels
23.2.2 Identification des joints critiques et calcul des réponses fréquentielles
23.3 Evaluation du dommage cumulé dans les joints critiques
23.3.1 Génération des signaux historiques des contraintes
23.3.2 Comptage rainflow des amplitudes des cycles de contraintes
23.3.3 Calcul du dommage cumulé et ajustement des coefficients de Basquin
24 Conclusion
VI Conclusion générale et perspectives
VII Références bibliographiques
VIII Annexes
Annexe 1 : Dimensions des éprouvettes de torsion
Annexe 2 : Photos d’une éprouvette de torsion après usinage (tournage)
Annexe 3 : Radiographie X d’un joint brasé d’une éprouvette de torsion (mise en évidence des cavités internes au joint)
Annexe 4 : Photos du dispositif de test en torsion du Centre des Matériaux de l’Ecole des Mines
Annexe 5 : Principe de mesure des déformations en torsion sur les éprouvettes tubulaires brasées
Annexe 6 : Plan d’essais de fatigue oligocyclique en torsion sur les éprouvettes tubulaires brasées
Annexe 7 : Photos du dispositif de torsion avec le four permettant de réaliser des essais en température (75°C)
Annexe 8 : Localisations des composants par des numéros d’IC pour les cartes de test étudiées en vibration expérimentalement (Cf. Chapitre 3)
Annexes 9 : Photos des différents outillages utilisés pour fixer les cartes lors des essais de vibration
Annexe 10 : Photos du dispositif de suivi électrique permettant de mesurer les temps à défaillance des assemblages en vibration
Annexe 11 : Synthèse des modes de rupture observés en vibrations sur les différents types d’assemblages
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