Faire évoluer la loi
Création de la DPEAO
Avant de rentrer au coeur de l’action menée par la DPEAO, il convient d’abord de présenter cette association, en étudiant le contexte dans lequel elle a été créée ainsi que les différents acteurs qui ont permis cette création. Il est également important de préciser les motivations qui ont contribué à la mise en place de la DPEAO, ce qui peut permettre de comprendre, de manière plus globale, l’émergence de ce genre d’associations qui se destinent à la recherche des origines des personnes abandonnées. Cela montre aussi un certain échec de la part des institutions comme l’ASE et le CNAOP dans leurs missions vis à vis des usagers nés anonymement.Après avoir établi le portrait de cette association, il est opportun d’observer son action durant les premières années de son existence, à travers ses archives, afin de voir la manière dont elle se met en place.
Les origines de l’association avec Annette Blain
C’est en janvier 1978 qu’Annette Blain, de son vrai nom Pauline Olivier, se lance dans la création d’une association destinée aux pupilles de l’État. Annette Blain est elle-même pupille de l’État. Sa mère de naissance l’a confiée, à l’âge de trois ans, à l’Assistance publique de Paris, faute d’avoir les moyens de la garder et de l’élever auprès d’elle : « Six jours après mon arrivée à Denfert Rochereau, je fus immatriculée comme pupille de l’Assistance publique (on dit maintenant Pupilles de l’État). Je reçus le numéro 226581. Le numéro, le livret noir, le collier et la vêture, c’est à dire le trousseau que l’on appelait en Morvan le » paquet « , étaient les éléments essentiels de notre » distinction » »93. Elle garde le nom de famille de sa mère, Olivier, mais n’apprendra que plus tard qu’il est son vrai nom de famille et non un patronyme ajouté à son prénom comme c’est le cas pour les pupilles. Annette Blain est ensuite transférée chez sa première nourrice dans le Morvan.Elle y reste cinq ans avant d’être transférée chez une seconde nourrice, toujours dans le même village du Morvan.Annette Blain se rend compte, au fur et à mesure qu’elle grandit, de sa condition particulière d’enfant sans famille et cela la marque profondément : « C’est alors que l’idée de cette mère me tourmenta mais pour autant je n’en parlais pas. Pourtant à peine dans mon lit, je construisais une histoire, jamais la même, qui se terminait toujours par l’arrivée de ma mère […] A ce moment-là, mon coeur battait à une telle allure que j’étais obligée de me secouer en m’asseyant dans mon lit pour me remettre de cette émotion […] Ce dont j’avais essentiellement besoin, c’était d’avoir une réelle parenté, c’était d’avoir une situation juridique d’enfant non abandonné». Pauline Olivier apprend quelques éléments sur son histoire comme lors de sa communion, lorsque le prêtre évoque le diocèse où elle a été baptisée. Ces nouvelles lui font chaque fois l’effet d’une bombe et la rendent heureuse. Cependant, la joie est vite passée lorsqu’elle pense au fait que ces éléments sur sa vie ne devraient pas lui être inconnus. Une fois majeure, elle commence à effectuer quelques recherches, notamment en écrivant à l’Assistance publique. Celle-ci lui répond invariablement que son dossier n’est pas communicable car elle appartient à la « catégorie » interdite » ». Ce n’est que plus tard qu’Annette Blain apprendra que sa mère n’a jamais demandé le secret sur son identité et qu’elle s’est heurtée à un abus de la part de l’Assistance publique, même une fois que les lois relatives à l’accès aux documents administratifs soient entrées en vigueur.Puisque les sollicitations auprès de l’Assistance publique n’aboutissent pas, Annette Blain mène des recherches auprès des paroisses où elle pourrait avoir été baptisée.Un jour, elle entend parler des recherches effectuées par les généalogistes et se décide à contacter un cabinet de généalogistes. Le travail des généalogistes dure plus d’un an puis Annette Blain reçoit la lettre tant attendue, qui lui apprend enfin ses origines, ainsi que son histoire avec un arbre généalogique. Annette Blain considère qu’elle est née à 58 ans, âge auquel elle a enfin su quelles étaient sa famille et ses origines ou, du moins, que le fait de savoir enfin son histoire était comme une renaissance : « J’ai eu l’impression de naître une seconde fois à l’âge de cinquante-huit ans ». On retrouve cette idée de renaissance à plusieurs reprises dans différents documents issus du fonds de l’association et classés dans le dossier de la présidence d’Annette Blain.Cela montre à quel point il est important, pour une personne abandonnée, d’accéder à ses origines personnelles.En connaissant la vie d’Annette Blain, il est plus aisé de comprendre ce qui l’a poussée à créer la DPEAO. Plusieurs dates sont retrouvées, dans différents documents du fonds, pour attester la création de l’association, la plus précise étant le 2 février 1978. Cependant, dans le courrier d’Annette Blain qui se trouve dans les archives de la DPEAO, on trouve la phrase suivante : « Notre mouvement est » parti » au début de janvier 78 et notre association, la DPEO est passée au J.O. le 4 mars 1978 » . On retrouve également, dans le fonds, un exemplaire du Journal Officiel attestant cette date. Annette Blain souhaite venir en aide à ceux qui, comme elle, n’ont pas connaissance de leurs origines du fait d’avoir été abandonnés. Elle a, en quelque sorte, un déclic lorsqu’elle visite le village de sa famille d’origine en France-Comté : « Devant cette pierre qui avait été respectée par le temps et les hommes, je pris clairement conscience qu’il me serait impossible de vivre ce bonheur égoïstement et qu’il était de mon devoir d’aider mes compagnons d’abandon à accéder à ces moments intenses que je venais d’avoir le privilège de vivre »99. Elle ajoute : « Étant déjà réceptive à l’exigence d’aider mes compagnons d’infortune, je le fus immédiatement à la sollicitation que l’on me fit de créer une association pour le droit aux origines et à laquelle en parallèle je me permettrais de répondre aux appels des abandonnés dans la détresse »100.
C’est ainsi que voit le jour l’association Droit des Pupilles de l’État à leur Origine (DPEO) en 1978. Au départ, elle ne prend pas en compte les personnes adoptées mais seulement les pupilles de l’État. Cependant, les adoptés sont nombreux à adresser, dès les débuts de l’association, des requêtes à la DPEO, ce qui entraîne une modification du nom de l’association. Elle devient alors la DPEAO : Droit des Pupilles de l’État et des Adoptés à leur Origine101. Pour Annette Blain, la souffrance ressentie par les adoptés et les pupilles est la même : « Ne pas être comme les autres, qu’il s’agisse des adoptés ou des assistés, c’est évidemment être dépourvu de famille par le sang connue, ou plus simplement dit, ne pas avoir de vraie ascendance. C’est aussi avoir à supporter des autres, une sorte de gêne pudique lorsque le sujet se trouve abordé, comme si le mystère autour des procréateurs était tabou et impur. A ce point, c’est se percevoir comme amputé, avec sa mutilation implacablement présente à l’esprit et obligé de vivre parmi les non amputés. Comme toute mutilation est une atteinte dévalorisante à l’intégrité de l’individu, rien de surprenant que ce dernier souffre ». Dans le fonds de l’association, il est difficile de savoir la date exacte du changement de sigle et d’ajout de la mention « et des adoptés » dans le nom de l’association. Parmi le dossier qui regroupe les documents relatifs à la création de l’association et à ses premières années, il n’est pas fait de mention de ce changement. Cette date n’est pas non plus précisée dans les ouvrages d’Annette Blain et de son fils Michel Cahen.
Guide du mémoire de fin d’études avec la catégorie Histoire et Document |
Étudiant en université, dans une école supérieur ou d’ingénieur, et que vous cherchez des ressources pédagogiques entièrement gratuites, il est jamais trop tard pour commencer à apprendre et consulter une liste des projets proposées cette année, vous trouverez ici des centaines de rapports pfe spécialement conçu pour vous aider à rédiger votre rapport de stage, vous prouvez les télécharger librement en divers formats (DOC, RAR, PDF).. Tout ce que vous devez faire est de télécharger le pfe et ouvrir le fichier PDF ou DOC. Ce rapport complet, pour aider les autres étudiants dans leurs propres travaux, est classé dans la catégorie Métiers des Archives et des Bibliothèques où vous pouvez trouver aussi quelques autres mémoires de fin d’études similaires.
|
Table des matières
REMERCIEMENTS
SOMMAIRE
INTRODUCTION
Partie I: Le droit aux origines : la consultation des dossiers personnels
1.1. L’évolution de la législation dans la revendication du droit aux origines
1.1.1. La cadrage juridique de l’accès aux dossiers personnels des années 1970 à 2002
1.1.2. Le cas spécifique des accouchés sous X
1.1.3. Quelles avancées après la création du CNAOP ?
1.2. La consultation des dossiers auprès des institutions spécialisées ?
1.2.1. Comment procéder pour consulter un dossier personnel ?
1.2.2. Les réponses des institutions spécialisées (ASE, CNAOP, hôpitaux)
1.3. Du point de vue des consultants : le ressenti post consultation
1.3.1. Un sentiment majeur, la déception
1.3.2. Une certaine animosité contre les institutions
BIBLIOGRAPHIE
ETAT DES SOURCES
Partie II : Le cas de l’association Droit des Pupilles de l’État et des Adoptés à leur Origine (DPEAO)
2.1. Création de la DPEAO
2.1.1. Les origines de l’association avec Annette Blain
2.1.2. Les premières années de la DPEAO
2.2. Faire évoluer la loi : comment ?
2.2.1. Les revendications de la DPEAO
2.2.2. Les propositions de loi formulées ou soutenues par la DPEAO
2.3. L’accompagnement des pupilles de l’État et adoptés dans leur quête des origines
2.3.1. La manière d’aider les personnes abandonnées dans leurs recherches
2.3.2. Le ressenti des adhérents
CONCLUSION
ANNEXES
TABLE DES ANNEXES
TABLE DES MATIERES
Télécharger le rapport complet