Facteurs de risque et conduite therapeutique devant une grossesseextra uterine

La grossesse extra-utรฉrine (GEU) correspond ร  la nidation et au dรฉveloppement de lโ€™ล“uf en dehors de la cavitรฉ utรฉrine (1) (2). Son incidence varie entre 1% ร  2% des grossesses (3). Cette incidence a doublรฉ voire triplรฉ au cours des deux derniรจres dรฉcennies dans les pays industrialisรฉs (4). Ceci est essentiellement liรฉ ร  la recrudescence des infections sexuellement transmissibles et du tabagisme. La GEU est une pathologie gynรฉcologique grave nรฉcessitant une prise en charge rapide et prรฉcoce. En effet, elle reste encore la premiรจre cause de mortalitรฉ du premier trimestre de la grossesse et elle grรจve et compromet significativement la fertilitรฉ ultรฉrieure (4). Ces derniรจres annรฉes, beaucoup de progrรจs ont รฉtรฉ rรฉalisรฉs en vue dโ€™amรฉliorer la prise en charge et le pronostic de la GEU, principalement dans les pays dรฉveloppรฉs : apport de lโ€™รฉchographie pelvienne endovaginale et des dosages biologiques sanguins (Beta Hormone chorionique gonadotrophine ou ฮฒHCG plasmatique, progestรฉrone). Le traitement mรฉdical et la chirurgie cล“lioscopique conservatrice permettent, dans les formes prรฉcoces, dโ€™amรฉliorer la conduite ร  tenir globale et la fertilitรฉ ultรฉrieure. Devant ce fait, nous avons rรฉalisรฉ cette รฉtude. Nos objectifs sont dโ€™identifier les facteurs de risque de la GEU et dโ€™รฉvaluer la conduite thรฉrapeutique dans un centre hospitalier de rรฉfรฉrence de la capitale en vue de proposer des actions qui pourraient conduire ร  lโ€™amรฉlioration de la prise en charge et du pronostic de cette pathologie dans les pays en dรฉveloppement.

GENERALITES

Dรฉfinition

La grossesse extra-utรฉrine (GEU) dรฉsigne toute grossesse qui sโ€™implante et se dรฉveloppe en dehors du milieu normal de la nidation, c’est-ร -dire en dehors de l’endomรจtre tapissant la cavitรฉ corporรฉale de lโ€™utรฉrus (5). Cโ€™est une pathologie qui met en jeu le pronostic vital et son traitement surtout tardif diminue la fertilitรฉ ultรฉrieure, surtout dans les pays en dรฉveloppement (6) (7). Elle est responsable de 80% des dรฉcรจs maternels survenant au premier trimestre de la grossesse .

Physiopathologie

L’ล“uf fรฉcondรฉ sรฉjourne soixante-douze heures ร  la jonction ampullo-isthmique puis franchit lโ€™isthme ร  la fin du troisiรจme jour post ovulatoire. Le trophoblaste sโ€™implante au sixiรจme jour post ovulatoire et ne peut sโ€™implanter que lorsque le blastocyste est sorti de la zone pellucide, soit quatre ร  cinq jours aprรจs lโ€™ovulation. A cette date, lโ€™embryon se trouve normalement dans la cavitรฉ utรฉrine. Pour quโ€™il y ait une implantation tubaire, il est indispensable que lโ€™embryon soit dans la trompe entre le quatriรจme et le septiรจme jour . Trois thรฉories existent dans la physiopathologie de la GEU.

โ€“ Anomalie de captation de lโ€™ovocyte : la trompe nโ€™assure pas son rรดle de captation de lโ€™ovocyte. Ceci entraรฎne une fรฉcondation dans le cul de-sac de Douglas. Ce mรฉcanisme permet dโ€™expliquer lโ€™existence de GEU non tubaires : ovariennes ou abdominales.

โ€“ Retard de migration : la trompe nโ€™assure pas le transport embryonnaire de faรงon correcte et quatre ร  cinq jours aprรจs lโ€™ovulation, lโ€™ล“uf est toujours dans la trompe. La cause peut รชtre hormonale ou mรฉcanique.

La progestรฉrone favoriserait la migration de lโ€™ล“uf dans la trompe, alors que lโ€™ล“stradiol la freinerait. Un excรจs dโ€™ล“stradiol serait donc susceptible dโ€™induire cet asynchronisme. Ceci pourrait expliquer รฉgalement lโ€™augmentation dโ€™incidence des GEU chez les femmes qui ont une insuffisance lutรฉale (9). Les causes mรฉcaniques sont plus รฉvidentes. Il peut sโ€™agir de perturbations des cellules musculaires lisses tubaires ou des cellules ciliรฉes.

Les arguments en faveur de cette thรฉorie sont trรจs nombreux : rรดle de la chirurgie tubaire, frรฉquence des adhรฉrences lors des GEU, frรฉquence des lรฉsions de la trompe proximale chez les patientes ayant prรฉsentรฉ une GEU, rรดles du stรฉrilet et du tabac.

โ€“ Reflux tubaire : le blastocyste arrive normalement dans la cavitรฉ utรฉrine, mais, sous lโ€™effet de perturbations hormonales, il est renvoyรฉ dans la trompe 6 ร  7 jours aprรจs lโ€™ovulation, ร  une date oรน le trophoblaste est un tissu particuliรจrement agressif.

Epidรฉmiologie

Frรฉquence
La frรฉquence de la GEU est variable selon les pays, elle est de 2 pour 100 naissances en 2004 en France, responsable de 14000 cas par an (8) (10). Elle y reste cependant la premiรจre cause de mortalitรฉ maternelle au premier trimestre de la grossesse .

Facteurs de risque
Ils sont multiples et parfois associรฉs.
– L’infection gรฉnitale : cโ€™est lโ€™un des principaux facteurs de risque de GEU ; le germe le plus incriminรฉ est le Chlamydia trachomatis (12) (13). Lโ€™infection endommage la trompe, ce qui empรชche une migration normale de lโ€™embryon.
– Les antรฉcรฉdents de chirurgie tubaire ou pelvienne
– Le tabac : cโ€™est le second grand facteur de risque de GEU (14). Le mรฉcanisme dโ€™action peut รชtre hormonal et/ou une toxicitรฉ directe de la nicotine sur la motilitรฉ tubaire
– Les malformations tubaires
– Le dispositif intra-utรฉrin (DIU) : le risque de GEU chez les porteuses de DIU est multipliรฉ par 3 par rapport aux patientes sous contraception orale
– Toutes les autres causes d’altรฉration de la paroi tubaire : endomรฉtriose, tuberculose, bilharziose, prise de Distilbรจne
– La fรฉcondation in-vitro et le transfert d’embryons
– Certains mรฉdicaments dont la pilule microprogestative, les ล“strogรจnes (comme la pilule du lendemain), les inducteurs de l’ovulation tels les gonadotrophines
– L’รขge : le risque de GEU augmente avec lโ€™รขge
– Antรฉcรฉdents gynรฉco-obstรฉtricaux : antรฉcรฉdent de GEU, antรฉcรฉdents de fausse couche spontanรฉe (16) ou dโ€™interruption volontaire de la grossesse (IVG) .

SIGNES CLINIQUES ET PARACLINIQUES

Type de description : GEU non rompue (hรฉmatosalpinx)

Signes cliniques

Interrogatoire
Il recherche lโ€™ensemble des facteurs de risque prรฉcรฉdemment dรฉcrits.

Circonstances de dรฉcouverte
La symptomatologie clinique de la GEU est hรฉtรฉrogรจne, allant de la forme asymptomatique de dรฉcouverte fortuite ร  lโ€™รฉtat de choc hรฉmorragique. Devant toute femme en pรฉriode dโ€™activitรฉ gรฉnitale qui consulte pour une mรฉtrorragie ou pour des douleurs pelviennes, le premier diagnostic ร  รฉvoquer est la GEU.

Le tableau classique de GEU associe : amรฉnorrhรฉe, douleurs pelviennes et mรฉtrorragies.
– L’amรฉnorrhรฉe (ou un retard des rรจgles) est souvent mal prรฉcisรฉe par la patiente.
– Les douleurs abdominales sont en gรฉnรฉral sus-pubiennes, le plus souvent unilatรฉrales dans une des deux fosses iliaques. Ces douleurs peuvent รชtre permanentes, parfois accompagnรฉes de paroxysmes et de lipothymie. Dans certains cas, il peut s’agir de douleurs scapulaires tรฉmoignant de l’existence d’un hรฉmopรฉritoine.
– Les mรฉtrorragies sont peu abondantes, rรฉpรฉtรฉes, classiquement sรฉpia voire noirรขtres.

D’autres symptรดmes inconstants peuvent รชtre observรฉs : exagรฉration des signes sympathiques de grossesse (nausรฉes, vomissements, vertige, syncope,…), troubles de compression des organes de voisinage (constipation,โ€ฆ).

Examen physique
La tension artรฉrielle et la frรฉquence cardiaque sont souvent normales. La palpation abdominale retrouve habituellement une sensibilitรฉ sus-pubienne ou une douleur provoquรฉe en fosse iliaque. Les signes du syndrome pรฉritonรฉal doivent รชtre recherchรฉs : douleur controlatรฉrale ร  la dรฉcompression (signe de Bloomberg), dรฉfense pรฉritonรฉale. L’examen au spรฉculum confirme lโ€™origine endo-utรฉrine des saignements, retrouve un canal cervical fermรฉ. Il exclut le diagnostic de fausse couche en cours. Le toucher vaginal retrouve un utรฉrus de taille plus petite que ne le suggรฉrerait lโ€™amรฉnorrhรฉe, douloureux ร  la mobilisation, une masse annexielle sensible ou une douleur dโ€™un cul-de-sac. Le syndrome pรฉritonรฉal inconstant entraรฎne une douleur du cul-de-sac postรฉrieur, rรฉalisant le fameux ยซ cri du Douglasยป.

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Table des matiรจres

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. GENERALITES
I. 1. Dรฉfinition
I. 2. Physiopathologie
I. 3. Epidรฉmiologie
I. 3. 1. Frรฉquence
I. 3. 2. Facteurs de risque
I. 3. 3. Localisation de la grossesse extra-utรฉrine (GEU)
I. 3. 3.1. La grossesse tubaire
I. 3. 3. 2. La grossesse ovarienne
I. 3. 3. 3. La grossesse abdominale
I. 3. 3. 4. Les autres formes anatomiques
II. SIGNES CLINIQUES ET PARACLINIQUES
II. 1. Types de description : ยซGEU non rompueยป (hรฉmatosalpinx)
II. 1. 1. Signes cliniques
II. 1. 1. 1. Interrogatoire
II. 1. 1. 2. Circonstances de dรฉcouverte
II. 1. 1. 3. Examen physique
II. 1. 2. Examens paracliniques
II. 1. 2. 1. Examens biologiques
a) Les tests de grossesse
b) Dosage de la progestรฉrone plasmatique
II. 1. 2. 2. Echographie pelvienne
II. 1. 2. 3. La culdocentรจse ou ponction de Douglas
II. 1. 3. Evolution et pronostic
II. 2. Formes cliniques
III. DIAGNOSTIC DE LA GEU
III. 1. Diagnostic positif
III. 2. Diagnostic diffรฉrentiel
III. 3. Diagnostic de gravitรฉ
IV. TRAITEMENT
IV. 1. Buts
IV. 2. Moyens thรฉrapeutiques
IV. 3. Indications
IV. 4. Surveillance
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE PROPREMENT DITE
I. METHODOLOGIE
I. 1. Objectifs
I. 2. Type d’รฉtude
I. 3. Pรฉriode d’รฉtude
I. 4. Cadre de l’รฉtude
I. 5. Population d’รฉtude
I. 5. 1. Population cible
I. 5. 2. Critรจres d’inclusion
I. 5. 3. Critรจres de non inclusion
I. 6. Collecte des donnรฉes
I. 7. Dรฉroulement de l’enquรชte
I. 8. Paramรจtres dโ€™รฉtude
1. 9. Analyse et statistique
II. RESULTATS
II. 1. Aspects รฉpidรฉmiologiques
II. 1. 1. Frรฉquence par rapport au nombre dโ€™accouchements
II. 1. 2. Frรฉquence par rapport au nombre dโ€™intervention chirurgicale
II. 1. 3. Les cas non inclus
II. 1. 4. Age des patientes
II. 1. 5. Gestitรฉ
II. 1. 6. Paritรฉ
II. 1. 7. Mode d’admission
II. 1. 8. Motif d’admission
II. 1. 9. Statut matrimonial
II. 1. 10. Provenance
II. 1. 11. Niveau d’instruction
II. 1. 12. Profession
II. 2. Facteurs de risque
II. 3. Aspects cliniques
II. 3. 1. Signes fonctionnels
II. 3. 2. Signes gรฉnรฉraux et signes physiques
II. 3. 3. Ponction du Douglas
II. 4. Examens paracliniques
II. 5. Dรฉlai entre l’admission et l’intervention
II. 6. Le traitement
II. 6. 1. Le bilan per opรฉratoire
II. 6. 2. L’acte chirurgical
II. 6. 3. La localisation anatomique de la GEU
II. 6. 4. La quantitรฉ de l’hรฉmopรฉritoine
II. 6. 5. Le siรจge de la GEU
II. 7. Complications
II. 8. Durรฉe dโ€™hospitalisation
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES โ€“ SUGGESTIONS
I. COMMENTAIRES
I. 1. Aspects รฉpidรฉmiologiques
I. 1. 1. Frรฉquence de la grossesse extra-utรฉrine
I. 1. 2. Age
I. 1. 3. Gรฉstitรฉ et la paritรฉ
I. 1. 4. Profession et niveau d’instruction
I. 1. 5. Situation matrimoniale
I. 1. 6. Provenance
I. 1. 7. Motif et mode d’admission
I. 2. Facteurs de risque
I. 2. 1. Les infections pelviennes
I. 2. 2. Tabagisme
I. 2. 3. Fausse couche spontanรฉe et interruption volontaire de la grossesse
I. 2. 4. Antรฉcรฉdents de GEU
I. 2. 5. Antรฉcรฉdents de chirurgie abdomino-pelvienne
I. 2. 6. Contraception
I. 2. 7. Infertilitรฉ antรฉrieure
I. 2. 8. Echelle de risque de la GEU
I. 3. Aspects cliniques
I. 2. 1. Signes gรฉnรฉraux
I. 2. 2. Signes fonctionnels
I. 2. 3. Signes physiques
I. 2. 4. Signes paracliniques
I. 4. La localisation anatomique des GEU
I. 5. Formes cliniques des GEU
I. 6. Modalitรฉs thรฉrapeutiques
I. 7. Pronostic et รฉvolution
II. SUGGESTIONS
CONCLUSION

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