FACTEURS DE RISQUE DE LA MAUVAISE OBSERVANCE AU TRAITEMENT ANTIEPILEPTIQUE

Mortalité

         Le ratio standardisé de mortalité (RSM : rapport entre le nombre de décès observé et nombre de décès attendu) chez les patients vivant avec l’épilepsie est 2 à 3 fois supérieur à celui de la population générale. La proportion de décès qui sont liés à l’épilepsie est beaucoup plus élevée en Afrique que dans d’autres régions du monde (Diop, 2005). Le décès peut être en relation directe avec l’étiologie de l’épilepsie (alcoolisme, tumeur, affection dégénérative) ou survenir accidentellement au cours d’une crise : état de mal épileptique, inhalation, asphyxie, traumatisme crânien secondaire, noyade… (Lhatoo, 2005). Les morts soudaines inattendues dans l’épilepsie (acronyme anglais de Sudden unexpected death in epilepsy : SUDEP) représentent une des causes principales de décès en rapport direct avec la survenue d’une crise d’épilepsie (Ryvlin et al. 2009). L’incidence est d’environ 0,35 cas pour 1000 personnes-années dans une cohorte de patients vivant avec l’épilepsie. L’incidence est considérablement élevée chez les patients présentant une épilepsie sévère réfractaire: 3-9/1000 (Tomson, 2005). Les patients présentant des crises convulsives nocturnes, des crises généralisées tonico-cloniques, et de mauvaise observance sont les plus exposés (Thomas, 2000 ; Ryvlin et al. 2009). Les mécanismes physiopathologiques des SUDEP restent incertains. Cependant on évoque des causes préférentiellement cardiogéniques : arrêt sinusal, arythmie cardiaque avec tachycardie aiguë percritique et tachycardie supra ventriculaire paroxystique (Thomas et al. 2000 ; Ryvlin et al. 2009). Un arrêt respiratoire et une asphyxie « mécanique » survenant pendant la période postcritique immédiate ont également été envisagés. Par ailleurs, le taux de suicide est significativement plus élevé chez les personnes vivant avec l’épilepsie que dans la population générale (Ryvlin et al. 2009).

Classification des épilepsies et syndromes épileptiques (Commission, 1989)

       La classification syndromique des épilepsies repose sur le concept de syndrome épileptique, défini par le « groupement d’un certain nombre de symptômes et signes apparaissant ensemble d’une manière constante et non fortuite ». Ces symptômes diversement associés, selon le cas, correspondent:
• aux différents types de crises, caractérisées par leur topographie, leur phénoménologie, leur sévérité, leur récurrence ;
• au contexte clinique dans lequel s’inscrit l’épilepsie : âge de début, antécédents familiaux et personnels, histoire clinique ;
• aux manifestations neurologiques et extra-neurologiques associées à l’épilepsie.
• aux données EEG critiques et intercritiques.
• aux données de l’imagerie.
Les bases de la classification syndromique des épilepsies sont constituées par un axe symptomatologique et un axe étiopathogénique (Tableau).

Prévalence globale de la mauvaise observance

         La prévalence globale de la mauvaise observance dans notre série était de 69.8%. Les travaux récents rapportent les prévalences par la mesure indirecte de l’ordre de 28 à 71%. Cramer et al. (2002) en étudiant l’association entre la mauvaise observance et la survenue des crises chez 661 patients par la méthode d’auto-évaluation par un questionnaire de 10 items retrouvent une prévalence proche de la notre de 71%. Jones et al. (2005) en recherchant le lien entre l’observance aux traitements antiépileptiques et, d’une part le contrôle des crises épileptiques et d’autre part les croyances sur la maladie épileptique chez 54 patients retrouvent une prévalence de la mauvaise observance de 59%. Cette mauvaise adhérence a été mesurée en utilisant le questionnaire de Morisky qui comporte 4 items. Gomes et al. (1998) donnent une prévalence de 40% dans un échantillonnage de 47. Les limites de ces deux études résident sur la faible taille de l’échantillon qui n’est pas représentatif. Ettinger et al. (2009) retrouvent une prévalence de 41% dans une population de personnes âgées de plus de 65 ans avec N=1298. Cette faible prévalence pour un pour un si grand échantillon pourrait s’expliquer par le fait que la tranche de la population choisie adhéraient mieux au traitement antiépileptique comme l’ont noté Eatock et al. (2007) Buck et al ;(1997). Hovinga et al. (2008) en interrogeant 408 sujets épileptiques et 175 médecins prenant en charge ces patients, dans le but de rechercher l’association entre la mauvaise observance au traitement antiépileptique et la survenue des crises, la qualité de vie et la productivité, ont retrouvé une prévalence de 29%. Les limites de cette étude telles que soulevées par les auteurs résident dans le fait que l’enquête était réalisée sur internet et il était difficile de vérifier l’authenticité des réponses. Un questionnaire mené sur une cohorte de 274 patients épileptiques à la clinique ambulatoire de Honduras à l’Hôpital Escula, a permis d’évaluer un taux de mauvaise observance au traitement antiépileptique de 45%. Cette mauvaise observance au traitement antiépileptique chez ces Honduriens pourrait s’expliquer par l’insuffisance des ressources, l’impact des croyances culturelles sur la maladie. Un programme complet d’éducation et de sensibilisation sur la maladie pourrait améliorer l’observance. Les facteurs qui influent sur l’observance au traitement antiépileptique sont multiples et sont d’ordre :
• Psychosocial,
• Educatif,
• Liés à l’aspect pharmacologique du médicament (les effets indésirables),
• La relation entre le patient et le médecin.
La mauvaise observance au traitement antiépileptique conduit à une récurrence et une augmentation de l’absentéisme au travail et éventuellement des blessures sur soi-même (lors des chutes). Une étude menée sur une population au Pérou a permis de déterminer et d’analyser les variables associées à l’observance au traitement pharmacologique. L’échantillon se composait de 114 patients évalués entre Juin 2001 et Décembre 2002 au niveau de l’Institut neurologique Oscar Montes Trelles à Lima. Les résultats de cette étude ont montré un taux de mauvaise observance au traitement antiépileptique de 67.2% et les mauvais-adhérents avaient une moins bonne maitrise de leur maladie. Mais la raison la plus fréquente de cette mauvaise adhérence dans cette étude fut l’incapacité du patient d’assurer les couts des médicaments. L’adhésion des patients au traitement antiépileptique continue d’être une source de préoccupation au sein de la profession médicale. Dans une étude sur 661 patients épileptiques 71% avaient manqué une dose au moins une fois à un moment de leur traitement et prés de la moitié de l’échantillon globale était sous médicaments antiépileptiques pendant plus de 10 ans. Une surveillance électronique de l’adhésion a permis d’examiner le comportement du patient sous antiépileptique sur une base de jour en jour. Cramer et al. (1989) ont défini la mauvaise observance au traitement en termes de doses prévues omises. Il a été constaté qu’il y’avait des patients qui tentaient de compenser les doses manquées en doublant la prise suivante ce qui signifie que 92% des comprimés prescrits ont été pris mais pas au moment ou il fallait. Fisher (2000) a constaté que 20% des patients ajustaient la dose de leur propre chef en modifiant la quantité ou le moment de la prise. Sont aussi considérés comme mauvais adhérents, les patients vivant avec l’épilepsie qui prennent une trop grande quantité de comprimés, accidentellement ou de façon délibérée. Un sondage réalisé sur 122 sujets épileptiques a montré que 91% des patients ont consommé plus que la dose prescrite. Cette surconsommation pourrait s’expliquer par le fait que ces sujets peuvent accidentellement prendre une trop grande quantité de médicament par erreur ou bien en pensant qu’ils avaient omis de prendre une dose (Paes et al. 1997). Les conséquences de la mauvaise observance aux médicaments antiépileptiques peuvent être immédiates avec des retentissements sur la qualité de vie du patient. Dans une enquête menée en 2002 sur 661 patients épileptiques 45% ont déclaré qu’ils avaient une attaque suite à l’omission d’une dose de médicaments. Cependant il s’agit d’une statistique inquiétante qui peut même amener le clinicien à penser à une éventuelle inefficacité du traitement et même tenter de le modifier (Smith 2004). La mauvaise observance au traitement antiépileptique peut entrainer des coûts supplémentaires au niveau de la structure de santé avec une augmentation des ressources pour pouvoir traiter les admissions à l’hôpital suite à un rapprochement des crises ou aux blessures qui en découlent (Buck et al ; 1997). Une étude a été menée en Caroline du Nord par Glaxo Smith Kline (GSK) sur la prévalence et le cout de la mauvaise adhérence aux médicaments antiépileptiques. L’observance a été évaluée en utilisant le ratio de possession de médicaments (RPM). Les patients ayant un RPM <0.8 sont classés comme mauvais observant et la régression multi variée a été utilisée pour évaluer l’effet de cette mauvaise observance sur le cout des soins de santé. L’étude a été menée sur une cohorte de N=10892 adultes épileptiques et les résultats ont montré un taux de non-adhérence du traitement antiépileptique de 39%. Cette prévalence a été encore plus élevée chez une sous cohorte âgée de 65ans au plus. La mauvaise observance peut entrainer :
• Une mortalité accrue ;
• des séjours plus fréquents aux urgences ;
• des fractures ou blessures diverses ;
• une augmentation de la fréquence des crises.
Donc cette mauvaise observance s’est révélée avoir une relation statistiquement positive sur le nombre annuel et les couts d’hospitalisation mais aussi l’utilisation des soins de santé. Les résultats de cette étude ont aussi montré que la relation observée entre la mauvaise observance et les couts sur les soins de santé a été plus importante chez les sujets âgés épileptiques (Epilepsia 49, 2008). Une étude menée sur 35 enfants épileptiques dont 66% de race blanche et 34% de sexe féminin. 60% de ces enfants avaient des crises partielles, 29% avaient des crises généralisées et 11% des crises non classées. L’adhésion a été mesurée sur une période de 1 mois pour le 1er, 3eme, et 5eme jour avant et 3 jours après le rendezvous. Les résultats ont montré que 79.4% respectaient le traitement et cette adhésion au traitement était plus importante chez les enfants des couples mariés, les parents et les personnes ayant un statut socio-économique plus élevé mais elle n’était pas corrélée à l’enfant, le type de crises le sexe, l’âge, les médicaments prescrits encore moins à la fréquence des crises. La Médecine Complémentaire et Alternative (MCA) est reconnue être communément utilisé par les patients mais il y’a peu d’études concernant le recours à cette méthode chez les sujets épileptiques. Néanmoins, une étude a évalué l’utilisation et les perceptions de la MCA dans le Midwest des USA et l’enquête de 25 items a été réalisée sur 228 patients adultes épileptiques. L’enquête s’est appuyée sur des données démographiques, l’utilisation de la MCA, les effets indésirables et les perceptions de l’efficacité des médicaments de la MCA. Les résultats ont montré que 39% ont déclaré avoir recours à la MCA, 25% utilisent la MCA pour traiter leur épilepsie. La prière et la spiritualité sont les formes les plus couramment utilisées de la MCA (46%) suivi des « méga-vitamines » (15%), et les soins chiropratiques (24%). L’étude a aussi montré que le recours à la MCA était plus fréquent chez les sujets épileptiques du Midwest, même si le mode d’utilisation peut être légèrement différent de celui des autres régions des USA et à travers le monde.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
I – EPILEPSIE
I -1 – Epidémiologie
I – 1 – 1 – Définitions
I – 1 – 2 – Prévalence
I – 1 – 3 – Incidence
I – 1 – 4 – Mortalité
I – 1 – 5 – Facteurs de risque
I – 2 – Classifications
I – 2 – 1- Classification des crises épileptiques
I – 2 – 2 – Classification des épilepsies et syndromes épileptiques
I – 3 -1 – Considérations générales
I – 3 – 2 – Principes généraux du traitement médicamenteux
I – 3 – 3 – Médicaments anti-épileptiques selon le type de crises (Broglin, 1996)
I – 3 – Pronostic (Thomas, 2000)
II – OBSERVANCE AU TRAITEMENT DANS L’EPILEPSIE
II -1 – Epidemiologie
II – 1 – 1 – Définitions
A – L ’Observance
B – La persistance
C- L’inobservance
D – Mesures de l’observance (Paschal, 2008)
II – 1 – 2 – Prévalence de la mauvaise observance
II – 1 – 3 – Les conséquences de la mauvaise observance
II – 1 – 4 – Facteurs influençant l’observance (Sabaté, 2003)
II – 2 – Actions pouvant être menées
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I – CONTEXTE DE L’ETUDE
II – BUT ET OBJECTIFS DE L’ETUDE
II – 1 -Buts
II – 2 – Objectif général
II – 3 – Les objectifs spécifiques
III – METHODOLOGIE
III – 1 – Cadre d’étude
III – 1 – 1 – Centre de Santé de Pikine
III – 1 – 2 – Clinique neurologique du CHU de Fann
III – 1 – 3 – Particularités du suivi des patients par la LSCE
III – 3 – 2 – Type et durée de l’étude
III – 3 – 3 – Patients et méthodes
III – 3 – 3 – 1 – Critères d’inclusion
III – 3 – 3 – 2 – Critères de non inclusion
III – 3 -3 – 3 – Taille de l’échantillon
III – 3 – 3 – 4 – Recueil des données
A – Instrument de la collecte de données
B – Déroulement de la collecte
III – 3 – 4 – Définition opérationnelle des variables
III – 3 – 4 – 1- Variables dépendantes
A – L’Observance ou l’Adhésion
B- La mauvaise observance
C – Les facteurs de risque de survenue des crises
III – 3 – 4 – 2 – Variables indépendantes
III – 3 – 5 – Analyse des donnèes
III – 3 – 6 – Considérations éthiques
IV – RESULTATS
IV – 1 – Résultats de l’analyse uni variée
IV – 1 – 1 – Caractéristiques démographiques et socio-économiques
IV – 1 – 2 – Caractéristiques liées a la maladie
IV – 1 – 3 – Caractéristiques liées aux MAE
IV – 1 – 4 – Facteurs lies au système de sante
IV – 1 – 5 – Style de vie pouvant favoriser la survenue des crises
IV – 1 – 6 – Caractéristiques liées au malade
IV – 1 – 7 – Prévalence globale de la mauvaise observance au traitement antiépileptique
IV – 2 – Résultats de l’analyse bi variée
IV – 2 – 1- Prévalences spécifiques selon les caractéristiques démographiques et socioéconomiques
IV – 2 – 2 – Caractéristiques liées à l’épilepsie
IV – 2 – 3 – Facteurs liés au malade
V – FACTEURS DE RISQUE A LA MAUVAISE OBSERVANCE
VI – DISCUSSION
VI – 1- Résumé des principaux résultats
VI – 2 – Prévalence globale de la mauvaise observance
VI – 3 – Facteurs de risque de mauvaise observance au traitement antiépileptique
VI – 3 – 1 – Les troubles de la mémoire
VI – 3 – 2 – Stress
VI – 3 – 3 Stimulation lumineuse intermittente
VI – 3 – 4 – Espoir d’une guérison suite à un suivi correct du traitement
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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