Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture en 2009, l’alimentation de la population mondiale devient une préoccupation importante car il faudra augmenter la production agricole mondiale de 66% d’ici 2050 pour pouvoir nourrir 9,1 milliards d’individus (FAO, 2009). Parallèlement à cela, les ruraux doivent résoudre un ensemble imbriqué de problèmes de gestion des ressources naturelles : la dégradation des écosystèmes et de la biodiversité dont ils sont dépendants, la diminution de l’accès aux terres cultivables de qualité, la détérioration des ressources forestières de plus en plus réduites et enfin la rareté de l’eau et une agriculture paysanne non irriguée prédominante. (FIDA, 2011). Il faut alors augmenter la productivité générale pour répondre aux besoins alimentaires mondiaux de demain, tout en s’appuyant sur des alternatives au système de production intensif établi depuis cinquante ans dans les pays industrialisés et dont les limites sont aujourd’hui reconnues par une majorité d’acteurs (Grandval, 2011). De plus, diverses recherches ont démontré que la gestion durable de l’environnement et des ressources naturelles est devenue essentielle à la réduction de la pauvreté dans les zones rurales (FIDA, 2011). De ce fait, de multiples démarches visent, à travers le monde, à mettre en œuvre une agriculture qui concilie les objectifs de production avec des objectifs écologiques, voire des objectifs sociaux dont la génération d’emplois et l’amélioration du niveau et de la qualité de vie des populations (Levard et Apollin, 2013).
À Madagascar, l’Agriculture contribue à raison de 26% au Produit Intérieur Brut (PIB) et emploie environ 68% de la main d’œuvre active (FIDA, 2013a). Par ailleurs, 80% de la population vivent en milieu rural et 73% dépendent de l’activité agricole (Ralaifenomana, 2009). Par contre, il a été observé que l’insécurité alimentaire existe et s’est même amplifiée durant les dernières années : 35% des ménages ruraux en 2013 contre 25% en 2005. Associée à cela, la pauvreté est chronique avec un taux de 71% (MEP, 2015). Ces faits soulignent la grande importance de l’agriculture dans le développement du pays et démontrent l’incapacité des acteurs et des institutions responsables du développement à valoriser les ressources à leur disposition.
Différents concepts
Permaculture
La permaculture vient de deux mots anglais : « permanent » et « agriculture ». L’agriculture permanente (en français) fut à l’origine inventée par les Australiens Bill Mollison et David Holmgren dans les années 1970. «Elle désigne un système évolutif, intégré, d’auto-perpétuation d’espèces végétales et animales utiles à l’homme. C’est, dans son essence, un écosystème agricole complet, façonné sur des exemples existants, mais plus simple » (Mollison et Holgrem, 1986). Une définition plus actuelle de la permaculture qui reflète l’élargissement de son champ d’action implicite dans Permaculture I , est « la conception consciente de paysages qui miment les modèles et les relations observés dans la nature, visant à obtenir une production abondante de nourriture, de fibres textiles et d‟énergie pour satisfaire les besoins locaux.» (Holgrem, 2010). Dans ce sens, la permaculture est basée sur l’observation de la nature, les savoirs traditionnels des anciens, et les découvertes scientifiques récentes (Broustey, 2015).
L’éthique est au cœur de la permaculture. Les valeurs fondamentales qui demeurent constantes quel que soit le travail réalisé et l’envergure d’application sont souvent résumées ainsi :
♦ prendre soin de la Terre en reconnaissant qu’elle est la maison de l’être humain, sa source de vie et dont il en fait partie (et non en dehors),
♦ prendre soin de l’Homme en créant des sociétés où les êtres humains et la Planète Terre vivent et évoluent ensemble en harmonie, notamment par la coopération et le partage,
♦ partager équitablement (ou placer des limites de consommation) afin de veiller à ce que les ressources limitées de la Terre soient utilisées de manière équitable et sage.
Essentiellement, les principes de conception en permaculture résultent d’une façon de percevoir le monde souvent décrite comme l’approche systémique (Holgrem, 2010). Ces principes sont les suivants :
1. observer et interagir,
2. collecter et stocker l’énergie,
3. créer une production,
4. appliquer l’autorégulation et accepter la rétroaction
5. utiliser et valoriser les services et les ressources renouvelables,
6. ne pas produire de déchets,
7. partir des structures d’ensemble pour arriver aux détails,
8. intégrer plutôt que séparer,
9. utiliser des solutions à de petites échelles et avec patience,
10. utiliser et valoriser la diversité,
11. utiliser les interfaces et valoriser les éléments en bordure,
12. utiliser le changement et y réagir, de manière créative.
Concepts liées aux permacultures
Agriculture durable
Afin d’observer une évolution des attentes de l’agriculture durable, deux définitions entre des périodes différents seront proposées. La première est celle de Gips en 1984 qui la définit comme « Une agriculture écologiquement saine, économiquement viable, socialement juste et humaine » (Gips, 1984). Le second est selon Godart et Hubert en 2002 : « Une agriculture durable se caractérise par deux dimensions. La première vise à maintenir la capacité à produire en préservant les ressources naturelles et les capacités (formation professionnelle, incorporation continue des progrès techniques passés au crible de la durabilité, entretien de la légitimité sociale des activités et des techniques, stockage et assurance pour faire face aux surprises…) dont elle dépend. La seconde dimension, au cœur de la multifonctionnalité de l‟agriculture, est relative à la contribution du système d‟exploitation à la durabilité du territoire auquel il appartient : insertion dans l‟économie locale ; l‟offre des services de proximité ; le maintien et la création de l‟emploi en milieu rural ; la production de services environnementaux, etc » (Godard et Hubert, 2002).
Selon ces définitions, l’agriculture durable doit favoriser des écosystèmes sains et une gestion durable de la terre, de l’eau et des ressources naturelles, tout en garantissant une sécurité alimentaire et le renforcement des marchés agricoles locaux et régionaux (FAO, 2015).
Agriculture biologique
Deux définitions seront rapportées ici, celles provenant des deux principales sources reconnues internationalement dans le domaine de l’Agriculture en général et dans le domaine de l’Agriculture biologique en particulier.
Ainsi, comme défini dans le Codex Alimentarius de la FAO/OMS en 2001 :
« L‟Agriculture biologique est un système de gestion de production holistique qui favorise et met en valeur la santé de l‟agroécosystème, y compris la biodiversité, les cycles biologiques et l‟activité biologique des sols. Elle met en avant l‟utilisation de pratiques de gestion de préférence à l‟utilisation d‟intrants provenant de l‟extérieur de l‟exploitation, prenant en compte le fait que les conditions régionales exigent des systèmes localement adaptés. Ceci s‟accomplit en recourant, lorsque cela est possible, à des méthodes agronomiques, biologiques et mécaniques, par opposition à l‟utilisation de matériaux synthétiques, pour remplir toute fonction spécifique dans le système» (FAO et OMS, 2001).
L’autre définition vient de L’International Federation of Organic Agriculture Mouvements (IFOAM) en 2005. Il en découle que :
«L’agriculture biologique est un système de production qui maintient et améliore la santé des sols, des écosystèmes et des personnes. Elle s’appuie sur des processus écologiques, la biodiversité et des cycles adaptés aux conditions locales, plutôt que sur l’utilisation d’intrants ayant des effets indésirables. L’agriculture biologique allie tradition, innovation et science au bénéfice de l’environnement commun et promeut des relations justes et une bonne qualité de vie pour tous ceux qui y sont impliqués» .
D’après ces deux définitions, l’Agriculture biologique inclut donc tout système agricole qui respecte l’environnement, le bien-être de l’Homme et l’équité sociale pour offrir un produit de qualité.
|
Table des matières
INTRODUCTION
I. CONCEPT ET ÉTAT DE L’ART
I.1 Différents concepts
I.1.1 Permaculture
I.1.2 Concepts liées aux permacultures
I.1.2.1 Agriculture durable
I.1.2.2 Agriculture biologique
I.1.2.3 Agriculture de conservation
I.1.2.4 Agriculture raisonnée
I.1.3 Relation entre permaculture et les autres concepts
I.1.4 Innovation technique
I.2 État de l’art
II. MATÉRIELS ET MÉTHODES
II.1 Matériels
II.1.1 Justification du thème
II.1.2 Présentation de la zone d’étude
II.1.3 Justification du choix de la zone d’étude
II.1.4 Outils d’analyse et de travail
II.2 Méthodes
II.2.1 Démarche de vérification commune aux hypothèses
II.2.1.1 Revue bibliographique
II.2.1.2 Phase de terrain et collecte de données
a) Entretien avec les personnes ressources
b) Enquêtes par questionnaire
c) Observation directe
II.2.1.3 Apurement, codage et traitement de données
II.2.2 Démarche spécifique pour la vérification des hypothèses
II.2.2.1 Démarche pour la vérification de la première hypothèse : « Les niveaux de pratique de la permaculture s’associent aux différentes catégories d’exploitants agricoles dans la zone d’étude»
a) Analyse de la fréquence d’adoption des pratiques permaculturales
b) Typologie des exploitants
c) Analyse des préférences des pratiques permaculturales par classes des exploitants
II.2.2.2 Démarche pour la vérification de la deuxième hypothèse : « La décision d’adoption des pratiques permaculturales dépend de plusieurs déterminants individuels émanant de l’exploitant agricole»
a) Le modèle économétrique
b) Analyse de l’influence du projet sur l’adoption des pratiques permaculturales.
c) Analyse des raisons d’adoption des pratiques permaculturales
d) Analyse des facteurs de blocage à l’adoption des pratiques permaculturales
II.2.3 Limites et difficultés de l’étude
II.2.3.1 Par rapport aux concepts
II.2.3.2 Par rapport aux matériels et méthodes utilisés
II.2.4 Chronogramme des activités
III. RÉSULTATS ET INTERPRÉTATIONS
III.1 Niveaux de pratique de la permaculture suivant les catégories des exploitants
III.1.1 Fréquence d’adoption de la population locale des pratiques permaculturales
III.1.2 Typologies des ménages
III.1.3 Préférences des pratiques permaculturales par classe d’exploitants
III.2 Facteurs de décision de l’exploitant à l’adoption des pratiques permaculturales
III.2.1 Résultats du modèle logit multinomial
III.2.2 Influence du projet à l’adoption des pratiques permaculturales
III.2.2.1 Le fait d’être un membre du projet
III.2.2.2 Besoins en formation de la population locale
III.2.3 Raisons d’adoption des pratiques permaculturales
III.2.4 Blocages à l’adoptions des techniques permaculturales
IV. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
IV.1 Discussions
IV.1.1 Classes des exploitants et adoption des pratiques permaculturales
IV.1.1.1 Préférence d’adoption
a) Classe 1 ou les exploitants moyens
b) Classe 2 ou les petits exploitants agricoles
c) Classe 3 ou les grands exploitants agricoles
IV.1.1.2 Limite de l’analyse typologique
IV.1.2 Facteurs de décision à l’adoption des pratiques permaculturales
IV.1.2.1 Taille du ménage
IV.1.2.2 Niveau d’éducation
IV.1.2.3 Age de l’exploitant
IV.1.2.4 Superficie de production
IV.1.2.5 Les activités extras agricoles
IV.1.2.6 Existence du projet
IV.1.2.7 Attentes des exploitants pour les innovations techniques
IV.2 Recommandations
IV.2.1 Identifier les conditions socio-économiques des exploitants
IV.2.2 Déterminer et tenir compte des dynamiques agricoles locales
IV.2.3 Définir et proposer des activités d’information et de communication efficace des pratiques
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE