Critères diagnostiques selon le DSM-5
La personne qui développe un ÉSPT doit avoir été exposée, directement ou en étant témoin, à la mort ou à une menace de mort, à des violences physiques ou sexuelles, à de graves blessures, ou à une menace pour l’intégrité physique. La présence d’un tel événement est le premier critère nécessaire au diagnostic de ce trouble (critère A; AP A, 2013; Pfefferbaum, 2005). Le fait d’apprendre qu’un tel événement est arrivé à un proche ou encore le fait d’être exposé à répétition à des aspects aversifs de tels événements (p.ex. un policier en contact avec des détails traumatiques relatifs à la maltraitance d’enfants) peut également déclencher un ÉSPT. Le Tableau 1 présente un sommaire des critères diagnostiques du DSM-5 pour l’ÉSPT. Le critère B consiste en la présence de symptômes envahissants (ou d’intrusion) associés à l’événement traumatique.
Ces symptômes intrusifs peuvent prendre la forme de souvenirs ou de rêves répétitifs et envahissants provoquant un sentiment de détresse, et de réactions dissociatives où la personne agit « comme si » l’événement allait se reproduire (illusions, hallucinations, flash-backs). Lorsque la personne est exposée à des indices internes ou externes évoquant le traumatisme, cette dernière peut présenter un sentiment intense de détresse ainsi qu’une réactivité physiologique. Chez les enfants de plus de six ans, les symptômes intrus ifs peuvent se manifester à travers le jeu répétitif, lors duquel l’enfant reproduit des scènes ou des aspects de l’événement traumatique (APA, 2013). Les symptômes d’évitement sont également partie prenante de l’ÉSPT (critère C). Ceux-ci peuvent se manifester à travers des efforts pour éviter les pensées, les sentiments ou les conversations reliées au traumatisme. L’évitement peut se traduire par des efforts pour éviter des endroits, des personnes ou des situations qui peuvent évoquer des aspects de l’événement traumatisant.
Le critère D consiste en l’altération négative des cognitions et de l’humeur. L’incapacité à se rappeler d’aspects du traumatisme, la réduction de l’intérêt ou de la participation à des activités importantes, le sentiment de détachement d’autrui, la restriction des affects et le sentiment d’avoir un « avenir bouché» font entre autres partie de cette catégorie. On y retrouve aussi les croyances négatives, persistantes et exagérées à propos de soi, d’autrui ou du monde. Des distorsions cognitives à propos de la cause ou des conséquences de l’événement traumatique qui mènent la personne à se blâmer ou à blâmer autrui peuvent également survenir. L’altération peut se manifester par un état émotionnel négatif persistant et une incapacité chronique à ressentir des affects positifs. Le critère E consiste en la présence de symptômes d’activation neurovégétative persistants. Les problèmes de sommeil, comprenant les difficultés d’endormissement et le sommeil interrompu, entrent dans cette catégorie. On y retrouve également l’irritabilité, les accès de colère, les difficultés de concentration, l’hypervigilance, les réactions de sursaut exagérées et les comportements autodestructeurs.
La durée des symptômes doit être de plus d’un mois (critère F) et occasionner une souffrance cliniquement significative (critère G). Les symptômes ne doivent pas être attribuables directement aux effets d’une substance ou d’une autre condition médicale (critère H). Des spécifications peuvent être attribuées au diagnostic d’ÉSPT. Ainsi, ce dernier peut être spécifié COmIne étant à survenue différée si le début des symptômes survient six mois et plus après l’événement traumatisant. La spécification avec symptômes dissociatifs peut être attribuée si la personne, en plus de satisfaire les critères de l’ÉSPT, présente des symptômes dissociatifs de dépersonnalisation ou de déréalisation (APA, 2013). La dépersonnalisation consiste en un sentiment de détachement de soi, pouvant se manifester, par exemple, comme une impression d’être dans un rêve. La dé réalisation est quant à elle une impression que l’environnement, le monde qui entoure une personne, sont irréels. Ces symptômes dissociatifs ne doivent pas être attribuables aux effets d’une substance ou d’une autre condition médicale (AP A, 2013).
Facteurs contribuant au développement de l’ÉSPT chez les enfants On associe souvent intuitivement l’ ÉSPT à des vétérans revenus de guerre, ou encore à des gens ayant subi un grave accident. De nombreuses situations se produisant dans le quotidien de certains enfants font également partie du lot d’événements traumatiques pouvant déclencher l’ÉSPT. Plusieurs études documentent comment la victimisation peut contribuer au développement du trouble (Bender et al., 2015; BoneyMcCoy & Finkelhor, 1995, 1996; Cyr et al., 2013; Cyr, Clément, & Chamberland, 2014). La victimisation comprend la maltraitance, mais également de nombreuses autres formes de violence qui ne se produisent pas nécessairement au sein du milieu familial, comme par exemple subir un vol, se faire attaquer ou être victime d’intimidation à l’école. Boney-McCoy et Finke1hor (1996), ont effectué des ANCOVAS pour voir si différents types de victimisation entre deux temps de mesure contribuaient à l’augmentation du score d’ÉSPT au second temps de mesure.
Ils ont effectué leurs analyses en contrôlant pour les symptômes d’ÉSPT au premier temps de mesure (Tl), pour la qualité de la relation parent-enfant au Tl, pour la perception des parents de la violence communautaire, pour l’âge de l’enfant au moment de l’étude et pour de multiples autres données sociodémographiques. lis observaient une différence statistiquement significative sur le plan de l’ÉSPT au deuxième temps de mesure entre les jeunes ayant subi n’importe quelle expérience de victimisation et ceux n’en ayant pas vécu (d = 0,48). Pour les jeunes ayant spécifiquement subi des abus sexuels entre les deux temps de mesure, la différence était encore plus grande (d = 0,66). Les jeunes ayant subi de la violence parentale (d = 0,47) ou un enlèvement (d = 1,03) obtenaient également une moyenne significativement plus élevée que les autres jeunes au score d’ÉSPT du second temps de mesure (Boney-McCoy & Finkelhor, 1996).
Les enfants et les adolescents ayant été victimisés par le passé sont davantage à risque de vivre de nouvelles expériences de victimisation que ceux n’ayant pas de tels antécédents (Boney-McCoy & Finkelhor, 1995). En effet, les jeunes ayant déjà subi des abus sexuels par le passé sont 11,7 fois plus à risque d’être abusés sexuellement à nouveau (Boney-McCoy & Finkelhor, 1995). Le fait d’avoir déjà été violenté physiquement par un membre de la famille augmente de 3,4 fois le risque d’abus sexuel subséquent (Boney-McCoy & Finkelhor, 1995). En outre, Boney-McCoy et Finkelhor (1995) soutiennent que le risque d’abus sexuel durant l’enfance est augmenté de 4,7 fois lorsqu’un jeune a précédemment subi n’importe quelle forme de victimisation. Les difficultés psychologiques antérieures (p. ex. besoin d’approbation, carences affectives, attachement insécure, etc.) font des enfants qui en souffrent des cibles plus faciles et plus vulnérables pour les agresseurs (Finkelhor & Asdigian, 1996). Les actes perpétrés par ces agresseurs, souvent de nature traumatique, ont été associées à l’ÉSPT. En effet, plus un jeune vit d’expériences de victimisation différentes au cours de sa vie, plus les chances qu’il développe des manifestations d’ÉSPT sont grandes (Bender et al., 2015).
Par exemple, les jeunes de la rue sont 2,08 fois plus à risque de présenter un ÉSPT s’ils ont vécu de multiples expériences de victimisation durant l’enfance et 1,38 fois plus à risque s’ils ont vécu de multiples expériences de victimisation une fois dans la rue (Bender et al., 2015). Comme la victimisation est un facteur de risque pour la survenue de nouvelles expériences de nature traumatique, elle augmente d’autant plus le risque d’ ÉSPT puisque les événements susceptibles de le déclencher se multiplient. D’ailleurs, le fait d’avoir vécu des expériences de victimisation antérieures à un événement traumatique est associé à une plus grande sévérité des symptômes d’ÉSPT (Boney-McCoy & Finkelhor, 1995).
Parmi les expériences de victimisation les plus fréquentes qui peuvent mener au développement d’un ÉSPT chez les enfants, on retrouve plus spécifiquement les multiples types de maltraitance (p.ex. Brockie et al., 2015; Collin-Vézina, Coleman, Milne, Sell, & Daigneault, 2011; English et al., 2005; Kaur & Kearney, 2015; Kearney, Wechsler, Kaur, & Lemos-Miller, 2010; Mennen, 2004). Les abus sexuels, les abus physiques et la négligence sont liés, à différents degrés, à l’apparition de symptômes d’ÉSPT (Milot, St-Laurent, Éthier, & Provost, 2010; Tremblay, Hébert, & Piché, 2000; Wechsler-Zimring & Kearney, 2011; Wolfe, Gentile, & Wolfe, 1989).
Les enfants négligés présentent significativement plus de symptômes d’ÉSPT que les enfants n’ayant été victimes d’aucune forme de maltraitance (Milot et al., 2010). Les enfants négligés sont cependant moins nombreux que les enfants victimes de violence physique ou sexuelle, à présenter un ÉSPT (Wechsler-Zimring & Kearney, 2011). L’exposition à la violence inter-parentale est également associée à une telle symptomatologie (Rossman & Ho, 2000). Les enfants y ayant été exposés présentent une significativement plus grande symptomatologie que les enfants n ‘y ayant pas été exposés, même en contrôlant pour les autres types de maltraitance (Rossman & Ho, 2000). En outre, lorsqu ‘un événement traumatique est de nature interpersonnelle et répétitive, comme l’est souvent la maltraitance envers les enfants, le risque de développer un ÉSPT et de présenter des symptômes plus graves est accru (APA, 2013).
Selon une revue systématique de la littérature, parmi les facteurs pouvant influencer l’apparition et la gravité de l’ÉSPT chez les enfants victimes d’abus sexuels, on retrouve le type d’abus, le sexe de l’ enfant, la sévérité, l’âge de l’enfant lors du premier abus, la fréquence et la durée des abus, la nature de la relation entre l’abuseur et l’enfant, le manque de support maternel, l’utilisation de la force, ainsi que des mauvaises stratégies de coping et une attitude négative de la part de l’enfant (Kendall-Tackett, Williams, & Finkelhor, 1993). Lorsque de multiples actes de maltraitance sont vécus par le même enfant, les risques que ce dernier développe le trouble sont plus grands comparativement aux jeunes qui n’ont subi qu ‘un seul acte de maltraitance (English et al., 2005; Fossion et al., 2015; Su liman et al., 2009; Wechsler-Zimring & Kearney, 2011). En effet, le fait d’avoir vécu un traumatisme durant l’enfance, suivi d’un autre trauma, est associé à de plus sévères symptômes d’ÉSPT par rapport à trois autres groupes: 1) ceux ayant subi un trauma durant l’enfance, malS n’ayant pas vécu de trauma plus tard, 2) ceux n’ayant pas vécu de trauma durant l’enfance, mais ayant vécu un trauma plus tard, et 3) ceux n’ayant pas vécu de trauma (Fossion et al., 2015). 11 existe un effet cumulatif entre le nombre d’événements traumatiques auxquels un adolescent est exposé, et la sévérité des symptômes d’ÉSPT (Sul iman et al., 2009).
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Table des matières
Introduction
Contexte théorique
L’état de stress post-traumatique
Critères diagnostiques selon le DSM-5
Facteurs contribuant au développement de l’ÉSPT chez les enfants
Conséquences de l’ ÉSPT chez les enfants
Importance de détecter rapidement l’ ÉSPT
Le Chi Id Behavior Checklist
Pertinence de développer des échelles DSM à partir du CBCL
Description des sept échelles d’ÉSPT dérivées du CBCL
Validation des sept échelles d’ÉSPT
Structure interne de l’échelle 3
Structure interne de l’échelle 5
Structure interne de l’échelle 6
Structure interne de l’échelle 7
Constats et objectif de l’étude
Méthode
Participants
Instruments de mesure
Déroulement
Résultats
Analyse des données
Description des items contenus dans les échelles
Unidimensionnalité des sept échelles
Échelle 1
Échelle 2
Échelle 3
Échelle 4
Échelle 5
Échelle 6
Échelle 7
Récapitulatif des modèles initiaux
Modifications apportées aux modèles initiaux
Modification de l’échelle 5
Modification de l’échelle 6
Modification de l’échelle 7
Récapitulatif des modèles modifiés
Discussion
Structure interne des sept échelles d’ ÉSPT dérivées du CBCL
Élaboration et contenu des échelles d’ ÉSPT dérivées du CBCL
Orientations futures
Forces et faiblesses de l’étude
Conclusion
Références
Appendice A. Items contenus dans les sept échelles d’ÉSPT
Appendice B. Libellé des items contenus dans les sept échelles d’ÉSPT
Appendice C. Indices de modification proposés pour les échelles 5, 6 et 7
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