FACTEURS CONCOURANT A LA SURVENUE DE L’ASTHME AIGU GRAVE

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Seuil du DEP

La valeur seuil de DEP < 150 l/min, souvent utilisée en France pour définir l’AAG peut se révéler inappropriée. Elle est susceptible de surestimer la gravité chez la personne âgée qui a un asthme ancien (DEP théorique autour 400 l/min pour les femmes de 65 ans et 1,45 m), mais surtout de la sous-estimer chez l’homme jeune ( DEP théorique 640 l/min à 35 ans pour 1,80 m), plaidant pour la divulgation des abaques des valeurs de DEP en fonction du sexe, de l’âge et de la taille des personnes.

Dénomination française et termes anglo-saxons

Il est important de savoir que les termes anglo-saxons peuvent prêter à confusion lors de l’analyse de la littérature, en particulier en ce qui concerne les titres des articles. En effet, le terme « sévère acute asthme » désigne habituellement une crise sévère avec un DEP < 50 % de la valeur prédite. L’asthme aigu grave, dans le sens français du terme, est traduit souvent par l’expression « life-threatening asthma », c’est-à-dire crise menaçant le pronostic vital. Le terme « near-fatal asthma » désigne l’asthme aigu très grave avec troubles de la conscience, hypercapnie majeure > 50 mm Hg en présence de pauses, voire d’un arrêt respiratoire (6).

Situation fréquente aux urgences

L’asthme aigu grave représente une large part du nombre élevé d’hospitalisations, de la morbidité et de la mortalité liée à l’asthme, ainsi que les coûts induits par l’asthme (7). Aux États-Unis, la plupart des patients dépendent d’un département d’urgence pour une prise en charge initiale en cas d’exacerbation sévère et consultent rarement un médecin de ville (8). L’enquête réalisée aux urgences de 40 hôpitaux en France, a révélé que l’asthme aigu grave représente un quart des patients vus aux urgences pour asthme aigu, et que les exacerbations sévères représentent un cas sur deux. Par ailleurs, les patients consultent volontiers un médecin de ville pour une exacerbation sévère avant de se présenter aux urgences de l’hôpital (42 % des cas) soulignant l’importance des mesures de prévention (9).

FACTEURS CONCOURANT A LA SURVENUE DE L’ASTHME AIGU GRAVE ET SEVERE

Certains patients nécessitent un suivi particulièrement attentif car ils peuvent être identifiés comme ayant un asthme potentiellement mortel (9). Ces patients doivent connaître les facteurs déclenchant leurs crises ou leurs exacerbations.

Facteurs de risque classique

Plusieurs facteurs peuvent être associés au risque élevé de crises mortelles ou potentiellement mortelles. Ces facteurs peuvent être liés à l’histoire de l’asthme, au traitement habituel, aux conditions socio-économiques ou psychologiques du patient. Le risque de faire un asthme aigu grave est plus élevé chez les hommes que chez les femmes (10). Il faut insister sur le risque provoqué par l’intolérance à l’aspirine et aux anti-inflammatoires non stéroïdiens qui exposent les sujets intolérants à des crises brutales. Il faut savoir que de nombreux produits pharmaceutiques à visée antalgique ou destinés à des troubles dyspeptiques contiennent de l’aspirine.

Émoussement de la sensation de dyspnée

Certains patients ont une sensation de dyspnée émoussée et sont incapables de ressentir une obstruction même marquée des voies aériennes (11). Ces « mauvais percepteurs » n’ont aucun symptôme jusqu’à ce que l’importance de l’obstruction soit majeure, responsable d’une détresse respiratoire. Les patients qui ont eu une crise d’asthme potentiellement mortelle (ayant nécessité une ventilation mécanique) auraient, non seulement une sensation de dyspnée émoussée (mise en évidence par l’épreuve des résistances inspiratoires), mais également une mauvaise adaptation de leur ventilation à l’hypoxémie (11). Des données récentes indiquent que les patients qui ont un émoussement de la sensation de dyspnée consultent plus fréquemment aux urgences et sont plus fréquemment hospitalisés pour asthme aigu grave que les patients dont la perception est normale (12).

Prise en charge insuffisante des patients

Une prise en charge insuffisante par les médecins peut également contribuer à la survenue d’un asthme aigu grave. Une étude menée dans une zone urbaine des États-Unis, a trouvé que seulement 28 % des patients adultes hospitalisés pour un asthme aigu avaient un plan écrit de gestion de la crise en cas d’exacerbation sévère. Dans cette étude, 60 % des patients qui avaient contacté leur médecin pendant l’exacerbation qui avait précédé l’admission à l’hôpital n’avaient eu aucune modification thérapeutique (13). En France, l’enquête ASUR a révélé que moins de la moitié des patients qui avaient consulté un médecin dans les 24 heures précédant leur arrivée à l’hôpital avaient reçu une prescription ou une administration d’une corticothérapie générale (9). Une attention toute particulière est nécessaire lors de la prise en charge au long cours des patients ayant un asthme modéré à sévère qui nécessitent un traitement plus intense. Cependant, il faut insister sur le fait que l’asthme aigu grave peut survenir quel que soit le degré de sévérité de l’asthme, y compris lorsqu’un asthme est contrôlé, notamment en cas d’exposition à un facteur favorisant intense (1). L’asthme aigu grave survient fréquemment après une période d’asthme instable ou une exacerbation.

PHYSIOPATHOLOGIE

La triade

Le mécanisme de la crise d’asthme associe 3 phénomènes physiopathologiques au niveau bronchique, sur lesquels devra agir le traitement :
• Spasme bronchique : secondaire à une contraction des muscles lisses des parois bronchiques
• Œdème de la paroi ;
• Hypersécrétion bronchique : sécrétion d’un mucus épais pouvant entraîner une obstruction bronchiolaire.
L’association de ces 3 phénomènes est à l’origine d’une importante diminution de la lumière bronchique.

Conséquences ventilatoires

La lutte de l’organisme contre la diminution du diamètre bronchique passe par la création de pressions pleurales fortement négatives entraînant les faits suivants :
– Traction sur la paroi bronchique externe ;
– Distension thoracique considérable entraînant une augmentation de la capacité pulmonaire totale;
– Diminution de la capacité vitale paradoxale et augmentation du volume résiduel secondaire à l’obstruction bronchique.

Conséquences hémodynamiques

En ce qui concerne le ventricule droit : Augmentation de la post charge secondaire à la pression négative exercée sur sa paroi externe et à l’augmentation de la résistance interne des capillaires pulmonaires. Augmentation de la pré charge, le retour veineux étant facilité par les pressions pleurales négatives.
Au total : le ventricule droit se remplit sans pouvoir se vider d’où l’apparition de pression élevée du VD, et d’un septum paradoxal (bombement du septum dans le ventricule gauche).
En ce qui concerne le ventricule gauche : Diminution de la pré charge par diminution du retour sanguin des veines pulmonaires et du volume diastolique du ventricule gauche secondaire au septum paradoxal. Augmentation de la post-charge secondaire à l’existence d’un gradient de pression entre la pression négative exercée autour du VG et `a celle de l’aorte extra thoracique.
Ces phénomènes se trouvent majorés au temps inspiratoire, expliquant les variations de pressions artérielles entre le temps inspiratoire et expiratoire : Pouls paradoxal.

CRITERES DIAGNOSTIQUES DE L’ASTHME AIGU GRAVE

Recommandations internationales

Les recommandations nord-américaines du National Institute of Health (NIH) ont défini la sévérité des exacerbations en se basant sur des paramètres cliniques et la valeur du DEP après administration d’un traitement broncho-dilatateur initial (2 à 4 bouffées toutes les 20 minutes jusqu’à 1 heure, ou une nébulisation unique de β2 agonistes) (1). La valeur du DEP est exprimée en pourcentage de la valeur optimale du patient, lorsqu’elle est disponible, de préférence à la valeur prédite. Ceci est particulièrement important chez les patients qui ont une obstruction bronchique permanente sévère (14). Une exacerbation sévère est ainsi définie par un DEP < 50 % de la valeur optimale ou prédite.
L’asthme aigu grave est défini par des critères cliniques d’arrêt respiratoire imminent et une mauvaise réponse au traitement broncho-dilatateur intense (nébulisation de β2 agonistes) avec un DEP < 30 % de la valeur optimale ou prédite.
Les recommandations britanniques (BTS) actuelles (15), définissent une exacerbation sévère par un DEP < 50 % de la valeur prédite ou théorique et l’asthme aigu grave par une crise menaçant le pronostic vital avec un DEP < 33 % de l’optimale ou prédite dès la présentation initiale.

les recommandations françaises

Critères cliniques

L’examen clinique est essentiel dans le diagnostic d’asthme aigu grave. Dans la plupart des cas, l’inspection permet de poser facilement le diagnostic, ce qui peut aider considérablement une infirmière d’orientation dans les services d’urgence. Une agitation est facilement décelable, la polypnée et la position assise penchée en avant sont caractéristiques. La polypnée supérieure à 30 par minute indique que le patient n’a plus la force d’effectuer une contracture active des abdominaux permettant une expiration prolongée pour lutter contre l’obstruction bronchique. En règle générale, une polypnée marquée précède les signes d’épuisement faisant craindre l’arrêt respiratoire. La contraction involontaire des sterno-cléido-mastoïdiens témoigne d’une obstruction bronchique majeure avec un volume expiratoire maximum seconde (VEMS) < 25 % de la valeur prédite (16). Les sueurs, souvent associées à une orthopnée, évoquent la présence d’une hypercapnie. La cyanose est rare et d’apparition très tardive. La mesure du pouls paradoxal, toujours présente dans les recommandations nord-américaines, n’est plus proposée par les recommandations britanniques. En pratique, elle est difficile à réaliser et n’apporte rien en termes de décision (17) ; elle peut être raisonnablement abandonnée. Ce point a été retenu dans la mise à jour des recommandations de la SRLF (4).

Débit expiratoire de pointe

La mesure du DEP doit être systématique, à chaque fois que possible. En cas de discordance avec les signes cliniques, en particulier lorsque les signes respiratoires ne sont pas nets, la documentation d’une obstruction majeure permet de faire le diagnostic d’asthme aigu grave. Cette situation n’est pas rare chez l’adulte jeune, capable de lutter efficacement contre une obstruction bronchique majeure pendant plusieurs heures. Il faut savoir que dans la grande majorité des cas, les patients sont capables d’effectuer une ou plusieurs séries de manoeuvres expiration forcée permettant de mesurer le DEP. Dans certains cas, le patient est réellement incapable d’effectuer une mesure ; il existe alors, en règle générale, les signes cliniques de gravité manifeste ; il est alors inutile d’insister pour obtenir une mesure.

Place de la saturation transcutanée en oxygène et des gaz du sang

La détermination des gaz du sang n’est pas utile lorsque le DEP est supérieur à 200 l/min ou 40 % de la valeur optimale ou prédite (18). La mesure des gaz du sang peut également être différée si l’oxymétrie de pouls est disponible chez des patients qui ont une saturation en oxygène SaO2 supérieure ou égale à 92 % et aucun critère de détresse respiratoire (19). Cependant, les gaz du sang doivent être systématiquement mesurés en cas de crise inhabituelle avec des critères de sévérité marquée à l’arrivée ou d’aggravation sous traitement. Une normocapnie (5 à 6 kPa soit 38 à 45 mmHg), témoignant d’une hypoventilation relative et, a fortiori, une hypercapnie franche, témoignant d’une hypoventilation absolue, indiquent une menace immédiate du pronostic vital (20). En règle générale, une hypercapnie est associée à une obstruction majeure avec un VEMS < 25 % de la valeur prédite. À l’inverse, la relation entre la PaO2 et le degré d’obstruction est assez lâche, ne permettant pas de retenir un seuil critique de PaO2 .

Absence de relation étroite entre signes cliniques et degré d’obstruction

Il n’existe pas de relation étroite entre les symptômes, les signes cliniques et l’importance de l’obstruction bronchique. De plus, une nette majoration des symptômes peut survenir avant qu’une diminution significative du DEP soit constatée, suggérant que la surveillance du DEP n’est pas aussi sensible que les symptômes pour révéler une exacerbation sévère chez de nombreux patients (21).
Dans tous les cas, l’évaluation de la gravité d’une crise d’asthme doit se faire de manière méthodique, après un examen clinique minutieux, la mesure du DEP, chaque fois que possible, voire des gaz du sang. La recherche systématique des critères de gravité dans l’enquête ASUR a révélé qu’un quart des crises d’asthme vues aux urgences des hôpitaux en France correspondaient à un authentique asthme aigu grave sur les critères actuellement en vigueur (9).

Rapidité de survenue de l’asthme aigu grave et facteurs précipitants

L’asthme aigu grave survient souvent après une aggravation progressive des symptômes et de la fonction respiratoire sur plusieurs jours, voire plusieurs semaines (2). Dans une étude récente, plus de 80 % des patients hospitalisés pour un asthme sévère avaient signalé une aggravation des symptômes depuis plus de 48 heures avant l’admission, et plus de 50 % avaient un asthme mal contrôlé depuis plus de 7 jours (22). D’un autre côté, l’asthme aigu grave peut survenir d’une manière explosive chez certains patients conduisant au décès du patient en moins de 1 heure, voire en quelques minutes. Ainsi, l’asthme suraigu est défini par des critères de gravité extrême survenant moins de 3 heures après le début des symptômes (23).
La distinction entre l’asthme aigu grave progressif et l’asthme suraigu est importante: les évolutions cliniques sont différentes et ils sont le plus souvent liés à des facteurs déclenchants différents, nécessitant ainsi des mesures spécifiques de prévention (2).
Classiquement, les patients qui présentent un asthme suraigu sont volontiers plus jeunes que ceux qui présentent un asthme aigu grave de survenue progressive. Leurs crises sont également plus graves et ils récupèrent rapidement même si une intubation est nécessaire (23). Cependant, l’asthme suraigu peut également survenir chez des patients plus âgés. Les épisodes d’asthme suraigu sont fréquemment liés à des facteurs déclenchants spécifiques comme la prise de médicaments de type anti-inflammatoires non stéroïdiens chez les patients intolérants (23), une exposition massive aux allergènes communs, des additifs alimentaires ou un stress psychologique (24) (25). Cependant, dans de nombreux cas, le facteur déclenchant n’est pas identifié.
À l’inverse, l’asthme aigu grave de survenue progressive est caractérisé par une détérioration plus lente conduisant à une augmentation de la consommation de β2 agonistes inhalés (26). Ces épisodes sont volontiers associés à une insuffisance du traitement de fond (notamment par la sous-utilisation des corticoïdes inhalés et des corticoïdes oraux). Ils peuvent également être dus à une absence de surveillance de la fonction respiratoire par les épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR) ou la mesure du DEP chez des patients qui ont une mauvaise perception de leur obstruction bronchique (12).
Chez les patients qui décèdent d’asthme aigu grave, certaines constatations histopathologies sont différentes selon la vitesse d’évolution de la crise. Dans l’asthme suraigu, les voies aériennes sont souvent libres et sèches; une infiltration de la sous muqueuse par les neutrophiles peut être observée. À l’inverse, chez les patients qui décèdent après une aggravation progressive, les bronches présentent des sécrétions bronchiques, et de véritables bouchons muqueux sont fréquemment rencontrés. On observe dans ce cas une infiltration classique de la sous muqueuse par les éosinophiles (27).
Ainsi, la prise en charge adéquate et la prévention adaptée de l’asthme aigu grave requièrent la connaissance des mécanismes impliqués et la connaissance des facteurs déclenchants (2).

TRAITEMENT DE L’ASTHME AIGU GRAVE

Le but du traitement

Le but du traitement de l’asthme aigu grave est d’obtenir une réversibilité rapide de l’obstruction bronchique afin de soulager la détresse respiratoire et éviter le décès (28). La priorité est toujours donnée à l’administration immédiate de fortes doses de β2 agonistes inhalés et l’oxygène, lorsque disponible, tandis que les corticoïdes systémiques doivent être rapidement administrés. Bien que le traitement doive être débuté au domicile du patient, l’asthme aigu grave nécessite toujours une intervention médicale hospitalière.

Traitement initial

Traitement broncho-dilatateur

β2 agonistes

Les β2 agonistes de courte action sont les broncho-dilatateurs les plus puissants et les plus rapides. Ils ont un index thérapeutique élevé permettant l’administration de fortes doses. Les β2 agonistes inhalés constituent toujours le traitement prioritaire de l’asthme aigu grave, dont l’objectif est de lever rapidement le bronchospasme (1) (3). Leur effet est quasi immédiat, 80 % de leur effet maximal se manifestant 5 minutes après le début de l’administration. De plus, ils possèdent une relation dose effet, l’augmentation des doses permettant d’obtenir une bronchodilatation supplémentaire (29)

Voie nébulisée.

Les nébulisations de β2 agonistes à fortes doses (2 à 3 nébulisations de 5 mg de salbutamol ou 10 mg de terbutaline) sont très rapidement efficaces dans le traitement de l’asthme aigu grave, y compris chez les patients hypercapnies (30). Elles sont ainsi largement utilisées dans les services d’urgence et de réanimation. Des doses inférieures (salbutamol 2,5 mg ou terbutaline 5 mg) sont souvent administrées de manière conventionnelle, toutes les 20 à 30 minutes, aux États-Unis ; cependant, les doses plus élevées paraissent plus efficaces chez les patients les plus graves (31). La voie nébulisée est efficace en cas d’obstruction bronchique majeure, probablement en raison d’une pénétration pulmonaire exponentielle des particules au cours de l’administration qui dure environ 15 minutes. Elle s’est avérée supérieure à la voie intraveineuse dans deux études multicentriques, dont une a concerné des patients hypercapnies. Les nébulisations continues ne sont pas supérieures aux nébulisations intermittentes lorsque les mêmes doses sont délivrées au cours des 6 premières heures (32). L’efficacité doit être déterminée de manière objective au cours de la première heure de traitement (33).
L’intérêt de la voie nébulisée est qu’elle permet une pénétration efficace en respiration spontanée, y compris en cas d’obstruction extrême, sans nécessiter la coopération du patient. C’est le cas chez les patients qui, ayant une ventilation compromise, sont agités et incapables de coordonner une prise médicamenteuse inhalée (34). Elle constitue ainsi le traitement de référence de l’asthme le plus grave recommandé par les sociétés savantes (4).
En raison de leur grande efficacité et de leur facilité d’administration, les nébulisations de β2 agonistes véhiculés par l’oxygène (6 à 8 l/min) constituent le traitement de référence de l’asthme aigu grave lors de la prise en charge pré hospitalière (35).

Autres voies d’administration.

Plusieurs études ont cependant démontré qu’un résultat équivalent peut être obtenu avec de fortes doses de β2 agonistes délivrées de manière répétée par des aérosols doseurs (6 à 12 bouffées voire plus, sans dépasser 2 à 3 bouffées à la fois) à l’aide d’une chambre d’inhalation (36). Une administration et une pénétration adéquates sont obtenues par des cycles répétés de 2 à 3 bouffées (200 à 300 μg de salbutamol) environ toutes les 5 à 10 minutes, à l’aide d’inspirations profondes (37). Cette modalité nécessite cependant la coopération du patient et une supervision étroite par un personnel expérimenté. Les inhalations répétées de β2 agonistes sous forme de poudre (terbutaline 500 μg par inhalation, 5 inhalations répétées après 10 minutes) sont également efficaces.
Plus récemment, l’efficacité des β2 agonistes administrés par aérosols doseurs auto déclenchés, a également été démontrée (pirbutérol 100 μg par bouffées, 6 bouffées répétées après 30 minutes) (38). L’utilisation appropriée de ces dispositifs pourrait permettre de réduire le recours aux hospitalisations en cas d’exacerbation sévère de l’asthme. Il est important de souligner que l’efficacité de ces dispositifs a été démontrée chez des patients présentant des exacerbations sévères, dont certains pouvaient présenter un asthme aigu grave, en dehors des conditions de gravité extrême accompagnée d’asphyxie ou de troubles de la conscience.
Seule l’étude de Raimondi et al. (36), comparant les nébulisations de salbutamol à l’administration par aérosol doseur et par poudre, a inclus un faible nombre de patients présentant un authentique asthme aigu grave avec un VEMS < 30 % de la théorique comme critère d’inclusion à l’arrivée.
Les Anglo-Saxons considèrent que les β2 agonistes par voie intraveineuse ont une efficacité inférieure à la voie nébulisée et qu’ils doivent être utilisés en cas de menace du pronostic vital ou dans le cadre d’essais thérapeutiques. L’administration intraveineuse de β2 agonistes est, en revanche, fréquemment utilisée dans la plupart des centres de réanimation en France ; elle a été cependant peu évaluée chez l’adulte. Elle est souvent associée aux nébulisations en cas de non-réponse initiale.
Dans une étude récente chez l’enfant aux urgences, l’administration d’un bolus de salbutamol s’est avérée utile en termes de réponse objective et de réduction des hospitalisations, après échec d’une nébulisation initiale (39).
L’administration sous-cutanée de β2 agonistes (0,5 mg de salbutamol ou terbutaline) est d’une grande efficacité ; son effet est également quasi immédiat, se manifestant dès les premières minutes. Son utilisation reste utile en médecine de ville, cependant, les modalités d’administration de fortes doses de β2 agonistes par voie inhalée (notamment par une chambre d’inhalation) en limitent l’intérêt (4).

Adrénaline

L’adrénaline est une catécholamine possédant un effet sympathomimétique non sélectif. Son effet alpha vasoconstricteur est supposé agir sur la composante oedémateuse de l’obstruction bronchique. Elle a longtemps été utilisée, par voie sous-cutanée comme traitement de première intention de la crise d’asthme aux urgences, en particulier dans les pays anglo-saxons. Sa supériorité par rapport aux β2 agonistes sélectifs utilisés aux doses adéquates n’ayant pas été démontrée, elle est moins utilisée que ces derniers, en raison de ses effets indésirables cardiovasculaires potentiels (4). Elle est néanmoins efficace par voie sous-cutanée, mais également par voie nébulisée. L’effet de 2 mg d’adrénaline nébulisée est similaire à celui de 5 mg de salbutamol nébulisé (40). Il est important de savoir qu’en raison de sa structure catécholamine, la demi-vie et la durée d’action de l’adrénaline est courte, imposant de rapprocher les administrations. De plus, la pénétration systémique n’est pas négligeable par voie inhalée, exposant aux effets indésirables cardiovasculaires, particulièrement à des doses unitaires supérieures à 3 mg (41). L’adrénaline est mentionnée dans les recommandations françaises mais ne figure pas dans les recommandations internationales.

Anticholinergiques

Les anticholinérgiques sont des broncho-dilatateurs moins puissants et moins rapides que les β2 agonistes et leur délai d’action est plus lent (15 à 20 minutes). Malgré certains résultats contradictoires, il existe des arguments pour un bénéfice de l’association des anticholinérgiques nébulisés aux β2 agonistes dans le traitement de l’asthme aigu grave, notamment dans les services d’urgence (42). Cependant, les résultats restent plus conflictuels que chez l’enfant, chez qui les études ont été mieux conçues (43). Chez des patients présentant un asthme aigu grave aux urgences (critère d’inclusion DEP < 200 l/min à l’arrivée) traités par 3 nébulisations de 2,5 mg de salbutamol au cours de la première heure, l’association de 0,5 mg d’ipratropium au cours de la première nébulisation de salbutamol s’est avérée bénéfique sur valeur du DEP et la réduction du taux d’hospitalisation (44). Il faut ajouter que la plupart des études conduites chez l’adulte ont évalué l’effet d’une seule dose d’anticholinergique associée à des nébulisations 2,5 mg de salbutamol, dose régulièrement utilisée aux États-Unis. Il existe peu de données concernant les effets de l’association d’ipratropium à des doses plus élevées (comme 5 mg salbutamol par nébulisation).
Deux méta analyses (45) (46) ont évalué l’intérêt d’associer le bromure d’ipratropium aux β2 agonistes dans les exacerbations sévères. Elles ont conclu à la supériorité de l’association par rapport aux β2 agonistes utilisés seuls, surtout chez les patients les plus graves. La méta analyse de Rodrigo et al. a concerné 483 patients, d’âge moyen 32 ans, admis le plus souvent pour une exacerbation sévère. Dans trois essais retenus, le critère d’inclusion était un DEP< 30 ou 35 % de la valeur théorique, permettant de considérer qu’il s’agissait d’asthme aigu grave.
L’étude de Rodrigo et al. (47) apporte des informations intéressantes, bien qu’elle n’ait pas ciblé spécifiquement l’asthme aigu grave et qu’elle n’ait pas concerner la voie nébulisée. Les 180 patients inclus dans cette étude présentaient une exacerbation sévère (définie par un DEP < 50 % de la théorique à l’arrivée) aux urgences. Le protocole, randomisé en double aveugle, était basé sur l’administration répétée de fortes doses de salbutamol à travers une chambre d’inhalation (4 bouffées de 100 μg, seul ou associé au bromure d’ipratropium à chaque bouffée, toutes les 10 minutes pendant 3 heures). La dose totale de salbutamol était ainsi de 72 bouffées, soit 7,2 mg de salbutamol, sur 3 heures. L’association de bromure d’ipratropium et salbutamol a été supérieure au salbutamol seul sur l’amélioration du DEP, permettant de réduire les hospitalisations sur des critères prédéfinis. Cet effet a surtout été net dans le sous-groupe de 80 patients présentant un asthme aigu grave avec un DEP < 30 % de la valeur théorique à l’arrivée.
Ainsi, l’association des anticholinérgiques aux β2 agonistes nébulisés est recommandée dans le traitement de l’asthme aigu grave ainsi qu’en l’absence de réponse aux β2 agonistes dans le traitement des exacerbations sévères par les dernières recommandations des sociétés savantes (1) (30).

Corticoïdes

Corticoïdes systémiques.

Les corticoïdes systémiques réduisent la durée des exacerbations sévères, diminuent le recours aux hospitalisations et réduisent la morbidité liée à l’asthme (48). Les corticoïdes administrés par voie systémique n’ont pas un effet immédiat : leur délai d’action est d’au moins 3 ou 4 heures (avec un maximum après 6 à 8 heures) similaire après administration intraveineuse ou orale. Les corticoïdes ont un puissant effet anti-inflammatoire au niveau de la muqueuse bronchique ; de plus, ils potentialisent l’effet broncho-dilatateur des β2 agonistes au niveau du muscle lisse bronchique en induisant la synthèse des récepteurs β à la surface des membranes cellulaires musculaires (49).
De nombreuses études ont comparé différentes doses de corticoïdes systémiques allant des faibles doses (20 mg d’équivalent prednisone) aux très fortes doses (500 mg d’équivalent prednisone). Il en ressort que les très fortes doses ne sont pas utiles et il est recommandé d’administrer précocement une dose de 60 à 80 mg, relayée par une dose quotidienne de 120 à 180 mg réparties en deux ou trois prises pendant les 48 premières heures (2) (30). La voie orale est habituellement efficace, cependant, la voie intraveineuse est couramment utilisée en cas de détresse respiratoire majeure empêchant, ou rendant difficile, une prise orale.
Les corticoïdes oraux ont un rôle essentiel dans la prévention des rechutes dans les semaines qui suivent. Administrés à une dose de 0,5 mg/kg (souvent 40 mg d’équivalent prednisone) pendant 10 jours, ils permettent le contrôle de l’asthme et le retour à la fonction pulmonaire optimale en 2 à 3 semaines. Si le contrôle est satisfaisant, il est inutile de décroître progressivement les doses à condition que le patient soit aux corticoïdes inhalés à forte dose (50).

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : R EVUE DE LA LITTERATURE
I GENERALITES SUR L’ASTHME AIGU GRAVE
I .1 Définition
I . 2 Seuil du DEP
I . 3 Dénomination française et termes anglo-saxons
I . 4 Situation fréquente aux urgences
II.- FACTEURS CONCOURANT A LA SURVENUE DE L’ASTHME AIGU GRAVE
I I.1- Facteurs de risque classique
I I.2- Émoussement de la sensation de dyspnée
I I.3- Prise en charge insuffisante des patients
I II PHYSIOPATHOLOGIE
I II.1 La triade
I II.2 Conséquences ventilatoires
I II.3 Conséquences hémodynamiques
I V.- CRITERES DIAGNOSTIQUES DE L’ASTHME AIGU GRAVE
I V.1- Recommandations internationales
I V.2 les recommandations françaises
I V.2.1- Critères cliniques
I V.2.2- Débit expiratoire de pointe
I V.2.3- Place de la saturation transcutanée en oxygène et des gaz du sang
I V.3- Absence de relation étroite entre signes cliniques et degré d’obstruction
I V.4- Rapidité de survenue de l’asthme aigu grave et facteurs précipitants
V .-TRAITEMENT DE L’ASTHME AIGU GRAVE
V .1 Le but du traitement
V .2 Traitement initial
V .2 1 Traitement bronchodilatateur
V .2 1 1 β2 agonistes
V .2 1 1 1 Voie nébulisée.
V . 2 1 1 2 Autres voies d’administration.
V .2 1 2 Adrénaline
V .2 2 Anticholinergiques
V .2 3 Corticoïdes
V .2 3. 1 Corticoïdes systémiques.
V .2 3.2 Corticoïdes inhalés.
V .2 4 Oxygénothérapie
V .3 Évaluation de la réponse au traitement et critères d’hospitalisation
V .3 1 Profils de réponse au traitement
V .3 2 Critères d’hospitalisation des exacerbations sévères
V .3 2 1 Hospitalisation systématique
V .4 Traitement secondaire
V .4.1 Sulfate de magnésium
V .4 2 Aminophylline
V .4 3 Mélange hélium-oxygène (Heliox)
V .5 Prévention
DEUXIEME PARTIE : N OTRE TRAVAIL ET NOS RESULTATS
I CADRE D’ETUDE
I I METHODOLOGIE
I I.1 Objectifs
I I.2 Matériel
I I.3 Méthode
I I 3.1- Critères de sélection
I I.3.1.1- Critère d’inclusion
I I.3.1.2- Critères d’exclusion
I II. RESULTATS
I II.1- Données épidémiologiques
I II.1.1- Répartition des cas selon le sexe
I II.1.2- Répartition des cas selon l’âge
I II. 1.3- Répartition des cas selon la profession
I II. 1.4- Répartition des cas selon la région d’origine
III. 1.5- Répartition des cas selon le mois et l’année d’hospitalisation du patient
I II. 1.6- Selon l’heure d’admission
I II.2- Répartition des cas selon les antécédents des asthmatiques
I II. 2.1- Antécédents familiaux
I II. 2.2- Antécédents personnels
I II.3- Répartition des cas selon les facteurs déclenchants
I II. 3.1- Facteurs immunoallergiques
I II. 3.2- Les facteurs non immunoallergiques
I II.4- Selon les traitements avant l’hospitalisation
I II.5- Manifestations cliniques
I II. 5.1- Signes de début
I II. 5.2- Signes présentés à l’entrée
I II. 5.3- Selon les paramètres enregistrés à l’entrée
I II. 5.3.1- Répartition des cas selon le score de Glasgow
I II. 5.3.2- Selon les paramètres respiratoires
I II. 5.3.2.1- Selon la fréquence respiratoire (FR)
I II. 5.3.2.2- Selon la saturation artérielle en oxygène (Sa02)
I II. 5.3.2.3- Selon la valeur du débit expiratoire de pointe (DEP)
I II. 5.3.3- Selon les paramètres cardiovasculaires
I II. 5.3.3.1- Selon la tension artérielle
I II. 5.3.3.2- Selon la fréquence cardiaque (FC)
I II. 5.3.4- Selon la température du patient
I II.6- Selon les traitements reçus à l’hôpital
I II.7. Evolution
I II. 7.1.- Selon le pronostic du patient
I II. 7.2 – Selon la durée du séjour en la réanimation
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES- DISCUSSIONS- SUGGESTIONS
I COMMENTAIRES
I .1-Données épidémiologiques
I . 1.1- Selon le sexe
I .1.2- Selon l’âge
I .1.3- Selon la profession du patient
I .1.4- Selon la région d’origine des patients
I .1.5- Selon le mois et l’année d’hospitalisation du patient
I .1.6- Selon l’heure d’admission des patients
I .2- Selon les antécédents
I .2.1 Antécédents familiaux
I .2.2- Antécédents personnels
I .3- Selon les traitements en cours avant l’hospitalisation
I .4- Selon les facteurs déclenchants
I .5- Manifestation clinique
I .5.1- Signes de début
I .5.2- Signes cliniques observées à l’entrée
I .6. Selon les paramètres enregistrés à l’entrée
I .6.1- Selon le score de Glasgow du patient
I .6.2- Paramètres respiratoires
I .6.2.1- Selon la FR
I .6.2.2- Selon la saturation artérielle en oxygène (Sa02)
I .6.2.3- Mesure des gaz du sang
I .6.2.4- Selon le DEP du patient
I .6.3- Paramètres cardiovasculaires
I .6.3.1- Selon les tensions artérielles
I .6.3.2- Selon la fréquence cardiaque
I .6.4- Température
I .7- Selon les signes de gravité présentés par les patients
I .8- Selon le traitement reçu à l’hôpital
I .9- Selon la durée du séjour en réanimation
I .10- Evolution
I I. SUGGESTIONS
I I.1- Quels sont les problèmes ?
I I.2 – Quelles sont nos suggestions?
I I.2.1- Pour les patients
I I.2.2- Pour les médecins et les personnels paramédicaux
I I.2.3- Pour les Centres Hospitaliers
I I.2.4- Pour les autoritaires du pays
CONCLUSION
ANNEXES : FICHE D’ ENQUETE
BIBLIOGRAPHIE

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