Exploitation des bus en milieu urbain

Contexte opérationnel

Planification d’un réseau de bus

D’après Nantes Métropole, les cinq critères faisant d’une ligne de bus un Bus à Haut Niveau de Service (BHNS) sont la rapidité, la régularité, le confort, une tarification adaptée et une bonne diffusion spatiale sur le territoire . Heddebaut (2011) fait une présentation générales des BHNS, en passant des raisons politiques qui les font naître jusqu’à des recommandations sur leur mise en œuvre. Satisfaire ces critères et ainsi offrir une bonne qualité de service aux usagers nécessite une planification adaptée du réseau de transports en commun (TC) par l’Autorité Organisatrice des Transports (AOT) et par l’exploitant. Selon Ibarra-Rojas et al. (2015), cette planification se décompose en trois échelles : stratégique, tactique et pratique. Cette planification est antérieure à l’échelle opérationnelle correspondant au temps réel.

A l’échelle stratégique, l‘AOT décide de la politique et de l’organisation globale du réseau de bus afin d’attirer le plus grand nombre de clients (Hensher et al., 2014). Elle a également à l’esprit que ces choix ont un impact direct sur la consommation des bus et a fortiori sur la pertinence de recourir aux TC dans une logique de réduction de l’empreinte énergétique des transports (Chan et al., 2013 ; Alam et al., 2014). Tout d’abord, elle décide de la structure du réseau de TC, à savoir le nombre de lignes et leurs itinéraires, le nombre et la position des arrêts pour chacune d’elles. L’objectif est de toucher un maximum d’usagers potentiels et de leur offrir une grande diversité de trajets possibles avec peu de correspondances. Responsable de la rentabilité des TC, elle fixe également les tarifs en vigueur en se basant sur des critères économiques et sociaux. Il s’agit ici de trouver un compromis entre faire porter le poids des TC sur les usagers uniquement (recettes d’exploitation perçues par l’exploitant), ou sur l’ensemble de la population (impôts perçus par la collectivité). L’AOT représentant la collectivité, elle peut négocier directement avec les services de gestion de la voirie pour mettre en place des sites propres (dedicated bus lane) et des priorités aux feux (transit signal priority – TSP). Ces mesures ont pour but de garantir des vitesses commerciales élevées en protégeant les bus du trafic et de l’effet des feux. Enfin, elle décide du niveau de service pour chaque ligne au cours de la journée, à savoir la fréquence que les bus auront à respecter pendant leurs courses.

A l’échelle tactique, l’AOT, propriétaire du matériel roulant, choisit le design des bus à utiliser (nombre de portes, type de plancher, nombre de places assises, etc.). Le choix de la billettique (comme des cartes à puce sans contact pour les abonnements ou les tickets à composter) vient compléter cet aspect marketing. L’AOT et l’exploitant décident conjointement de la grille horaire (time tabling) à appliquer pour maintenir la vitesse et les fréquences annoncées. La grille évolue au cours de la journée en fonction de la demande en passagers (nombre de passagers voulant monter aux arrêts) et des conditions de trafic partageant la route du bus (Ceder, 1987). En pratique, lorsque les fréquences annoncées sont inférieures à 10 min, la grille horaire n’est plus annoncée aux usagers (Bartholdi et Eisenstein, 2012). Le conducteur doit alors théoriquement se contenter de respecter son écart temporel avec son leader. En pratique, les grilles horaires évoluent compte-tenu des observations sur le terrain. Les temps de parcours découlant des horaires doivent être suffisamment courts pour obtenir une vitesse commerciale élevée, et suffisamment longs pour que les bus puissent effectuer leur service dans les temps.

A l’échelle pratique, l’exploitant gère l’organisation du matériel roulant et du personnel afin de remplir les objectifs fixés par l’AOT en termes de niveau de service. La gestion de la flotte est le premier élément. Il s’agit d’une part d’organiser l’affectation des bus (souvent de différents types) sur l’ensemble des lignes au cours de la journée (Ceder, 2011). L’exploitant doit aussi organiser leur maintenance, en tenant compte aussi bien des vérifications d’usage que des réparations imprévues. L’organisation du personnel est un second élément crucial. L’exploitant doit créer les tableaux de service (crew rostering), c’est-à-dire affecter des conducteurs sur les bus au cours de la journée et de l’année. Pour cela, il doit tenir compte des courses à effectuer pour remplir le service, du temps de travail quotidien des conducteurs et de leurs jours de congé. Le facteur social est déterminant dans la gestion des réseaux de TC. En effet, une énergie très importante est déployée pour faire arriver chaque conducteur à son terminus programmé, et ce à la bonne heure. Ainsi, la règle « si un bus va vite, on ne le ralentit pas » est fréquemment appliquée, ce qui peut poser de gros problèmes en termes de niveau de service.

Irrégularité des lignes de bus au cours de l’exploitation

La régularité est le critère le plus important pour les utilisateurs de TC (Paine et al., 1969 ; Golob et al., 1972 ; Wallin et Wright, 1974). Une fois déterminé le design de la ligne, les bus doivent respecter les fréquences annoncées. Malheureusement, les bus sont confrontés à de nombreux éléments perturbateurs. Aussi leur temps de parcours n’est-il pas toujours celui prévu par l’Autorité Organisatrice des Transports (AOT). Un phénomène observé en de nombreuses occasions est l’apparition de trains de bus, i.e. des groupes de véhicules appartenant à la même ligne et arrivant ensemble à un arrêt. Ce phénomène est en partie responsable de l’image négative associée aux TC. Par exemple, l’existence de trains de bus est la plainte la plus fréquente adressée à l’AOT de Chicago et est très présente dans la presse (Luman, 2007). Très tôt, Newell et Potts (1964) ont donné une explication simple à l’apparition des trains de bus. Cette explication est illustrée par la Figure 1.1. Si un bus prend accidentellement du retard sur son prédécesseur, il prendra plus de passagers qu’il ne l’aurait du car ces derniers auront plus de temps pour arriver aux arrêts (1). A l’inverse, ce retard accidentel se transforme en avance pour le suiveur de ce bus (2). Celui-ci va donc prendre moins de passagers que prévu, rendant ses temps d’arrêts toujours plus courts alors que ceux de son prédécesseur deviendront toujours plus longs. A terme, les deux bus (et parfois plus) peuvent se rejoindre et former un train de bus (Potts et Tamlin, 1964 ; Chapman et Michel, 1978). Ce phénomène se reproduit ensuite sur les autres bus de la ligne (3 et 4).

Ce phénomène a deux conséquences néfastes directes. D’une part, il augmente le temps d’attente moyen des usagers à chaque arrêt. En effet, de nombreux usagers au temps d’attente élevé montent dans le premier bus tandis que peu d’usagers au temps d’attente faible montent dans le second. Or, les temps d’attente aux arrêts sont très mal perçus par les usagers (Lisco, 1967 ; Mohring et al., 1987). D’autre part, le premier bus du train prenant de plus en plus de retard et rencontrant de plus en plus d’usagers, son chargement de passagers augmente. Ainsi, les (nombreux) usagers l’empruntant voyagent dans un bus bondé. Ainsi, l’irrégularité des bus a pour conséquence de renforcer la compétitivité du véhicule particulier par rapport aux transports en commun. Cette thèse vise à développer des modèles pour améliorer la régularité des bus sur une ligne en préservant leur vitesse commerciale.

Observations empiriques

Les perturbations peuvent être de diverses natures, cf. Figure 1.2. Certaines sont intrinsèquement liées à la ligne de bus. C’est le cas de la variabilité de la demande en passagers, des différences de temps mis par chaque passager pour monter dans le bus et valider son titre de transport, le style de conduite du conducteur, un incident mécanique sur le bus, etc. Il est à noter qu’un bus est arrêté pour charger des passagers pendant plus d’un quart de son temps de service (Chapman et al., 1976). D’autres perturbations sont extérieures, comme les feux de circulation et le trafic routier qui impactent la circulation des bus. La congestion urbaine est en effet l’une des principales causes reconnues de l’irrégularité des bus (MacKnight et al., 2004). L’évolution du trafic entre heures creuses et heures de pointe fait fortement varier les temps de parcours des bus au cours de la journée. Cette dépendance temporelle n’est d’ailleurs pas uniforme sur l’ensemble de la ligne (Chapman et al., 1976). En outre, ces perturbations peuvent avoir différentes intensités. La plupart n’induisent que de faibles variations des temps d’arrêt et de parcours des bus par rapport aux horaires prévus. Leurs conséquences ne sont toutefois pas négligeables car ces simples variations suffisent à provoquer de fortes irrégularités. En revanche, d’autres événements sont bien plus problématiques. Par exemple, un incident technique ou une forte congestion peuvent immobiliser un bus et le rendre hors service. La disparition d’un bus dans une ligne a les mêmes conséquences que pour de faibles perturbations, mais avec une intensité bien supérieure. De nombreux moyens de mesure existent et permettent d’appréhender ce système complexe. Avec le déploiement des nouvelles technologies (Intelligent Transportation System – ITS), le nombre et la diversité des capteurs permettent de recueillir toujours plus de données à différents niveaux des lignes, cf. Figure 1.2. Ces données concernent (1) le design de la ligne de bus et du matériel roulant, (2) l’état en temps réel d’une ligne de bus, (3) les phénomènes se déroulant aux arrêts (internes) et (4) les phénomènes se déroulant entre les arrêts (externes).

Méthodologiquement, l’accès à des données réelles est crucial car elles interviennent dans trois phases du travail de recherche. Tout d’abord, elles permettent d’analyser un système réel, comprendre son fonctionnement, formuler des hypothèses et les valider. Ensuite, une fois qu’une modélisation a été établie pour représenter le système, les données permettent de caler les paramètres du modèle pour le rendre bien adapté à représenter un cas. Enfin, l’accès à des données permet d’avoir une connaissance précise de l’état d’une ligne en temps réel et de décider d’une régulation à appliquer le cas échéant.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Exploitation des bus en milieu urbain
1.1 Contexte opérationnel
1.1.1 Planification d’un réseau de bus
1.1.2 Irrégularité des lignes de bus au cours de l’exploitation
1.1.3 Observations empiriques
1.1.4 Stratégies de régulation dynamiques
1.2 Problématique et méthodologie
1.2.1 Constats et problématique
1.2.2 Verrous scientifiques et choix techniques
1.2.3 Méthodologie
Chapitre 2 Modélisation et analyse des lignes de bus
2.1 Formulation probabiliste des modèles mésoscopiques de lignes de bus
2.1.1 Modélisation mésoscopique des bus
2.1.2 Conditions aux bornes du système
2.1.3 Lois de probabilités usuelles pour la description des temps d’arrêt
2.1.4 Lois de probabilités pour la description des temps de parcours (M1)
2.2 Analyse du système
2.2.1 Indicateur d’irrégularité
2.2.2 Une instabilité du système due à la loi de poursuite des bus
2.2.3 Études d’irrégularités engendrées par des perturbations locales
2.3 Premiers raffinements physiques du modèle
2.3.1 Prise en compte des dynamiques lentes du système : le cas du trafic (M2)
2.3.2 Prise en compte des dynamiques rapides du système : le cas des feux (M3)
2.3.3 Intégration conjointe des feux et du trafic dans le modèle (M4)
Bilan du Chapitre 2
Chapitre 3 Temps de parcours sur un boulevard urbain
3.1 Méthodes d’estimation des temps de parcours basées sur le modèle LWR
3.1.1 Concepts de base pour la modélisation du trafic
3.1.2 Méthodes des pelotons (M5)
3.1.3 Application de la théorie variationnelle (M6)
3.1.4 Méthode macroscopique basée sur les coupes (M7)
3.2 Outils agrégés de représentation des temps de parcours
3.2.1 Diagramme fondamental macroscopique (MFD)
3.2.2 Distributions de temps de parcours
3.2.3 Le diagramme débit-peloton (FPD)
3.3 Bilan, comparaison et sélection des méthodes d’estimation de temps de parcours
3.3.1 Bilan des différentes méthodes proposées
3.3.2 Comparaison des méthodes M6 et M7 basées sur la VT
3.3.3 Comparaison des méthodes macroscopiques M2 et M7
3.3.4 Comparaison des méthodes déterministes M5 et M6
3.3.5 Comparaison des méthodes stochastiques M4 et M6
3.3.6 Choix des méthodes d’estimation de temps de parcours pertinentes pour leur intégration dans le modèle de bus
Bilan du Chapitre 3
Chapitre 4 Prévision des bus pour leur régulation
4.1 Calage hors-ligne des paramètres et variables du modèle
4.1.1 Calage de constantes par régression linéaire
4.1.2 Calage de distributions
4.1.3 Calage de variables temporelles
4.2 Prévision de l’évolution des bus sur leur ligne
4.2.1 Méthodes d’assimilation de données pour la prévision
4.2.2 Présentation du filtre à particules (PF)
4.2.3 Cadre d’analyse de la méthode de prévision
4.2.4 Évaluation et comparaison des capacités de prévision des modèles de bus
4.3 Contrôle de la régularité des bus
4.3.1 Spécification de stratégies locales de contrôle des bus
4.3.2 Évaluation et comparaison des stratégies
Bilan du Chapitre 4
Conclusion générale

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