Évolution géodynamique de la plaque Arabe

Frontières actuelles de la plaque Arabe

Le Yémen et le Sultanat d’Oman, où ont été déployées une centaine de stations sismologiques dans le cadre du projet YOCMAL (YOung Conjugate MArgins Laboratory), se situent au sud de la plaque Arabe, sur la Péninsule Arabique (Fig.I.1.1). La plaque Arabe est délimitée à l’ouest par une frontière divergente, le Rift de la Mer Rouge et au nord-ouest par la faille transformante de la Mer Morte (ou Faille du Levant). Au sud, c’est également une frontière divergente qui borde l’Arabie, avec la dorsale océanique du golfe d’Aden. Ces deux bras se connectent au Rift Est Africain au niveau d’un point triple, dans la zone du point chaud des Afars (Fig.I.1.1). Ce dernier est caractérisé par un manteau anormalement chaud et est responsable d’un magmatisme abondant. Son rôle dans la cinématique de la région est débattu mais semble être très important, notamment dans les mécanismes de rupture continentale du golfe d’Aden, de la Mer Rouge et du Rift Est Africain. La frontière nord-est est formée par la zone de subduction du Makran et la chaîne du Zagros (Iran). Le contexte y est convergent depuis le Crétacé, c’est-à-dire depuis le début de la fermeture de l’Océan Téthys. Enfin, au sud-est, la faille transformante d’Owen sépare l’Arabie de la plaque Indienne. Les mesures GPS indiquent que la plaque Arabe se déplace actuellement à une vitesse de 2 à 3 cm par an vers le nord est par rapport à la plaque Eurasie (ArRajehi et al., 2010).

De la Pangée au bloc Afrique–Arabie 

La fragmentation de la Pangée s’est initiée dès la fin du Permien, avec la formation de l’océan Téthys, séparant deux masses continentales : la Laurasia (Amérique du Nord et Eurasie) au nord et le Gondwana (Antarctique, Amérique du Sud, Afrique, Madagascar, Australie, Arabie, Inde) au sud (Fig.I.1.2.a). Il y a environ 150 Ma s’est ouvert le bassin Nord-Somalien (Fig.I.1.2.b), provoquant la séparation du bloc Madagascar-Seychelles-Inde du bloc Afrique-Arabie (Marquer et al., 1998). Une zone transformante (EAFZ) s’est ensuite mise en place autour de 118 Ma entre Madagascar et les Seychelles (Fig.I.1.2.d). Cette structure pourrait s’étendre le long de la marge orientale de l’Oman, accommodant ainsi le mouvement rapide de l’Inde vers le nord (Patriat et Achache, 1984; Birse et al., 1997). L’accrétion océanique entre Madagascar et le bloc Inde-Seychelles a débuté il y a 86 Ma (e.g. Dyment, 1998) (Fig.I.1.2.e). Par la suite, l’accrétion océanique s’est initiée il y a 65.5 Ma entre les Seychelles et l’Inde, et la collision entre l’Inde (Fig.I.1.2.f) et le bloc Karman a pu conduire à l’obduction de l’ophiolite de Masirah (Chaubey et al., 2002). L’Inde est ensuite entrée en collision avec l’Eurasie il y a 53 Ma, impliquant un ralentissement conséquent de la dérive de l’Inde vers le nord. À ce moment, la faille transformante d’Owen, appelée East Arabian Fracture Zone (EAFZ), était située le long de la côte d’Oman (Royer et al., 2002; Robinet, 2013). La mise en place du point chaud de l’Afar a lieu à 45 Ma (George et al., 1998). Il se développe de façon contemporaine avec la dorsale de Carlsberg (Royer et al., 2002), avec une activité paroxysmale à 30 Ma (e.g. Hofmann et al., 1997; George et al., 1998). Le rifting continental oblique a débuté à la fin de l’Éocène (35 Ma, Fig.I.1.2.g) dans l’ensemble du golfe d’Aden avec une direction d’extension d’environ N20◦E (Platel et Roger, 1989; Roger et al., 1989; Watchorn et al., 1998; Razin et al., 2010; Autin et al., 2010; d’Acremont et al., 2010; Leroy et al., 2010a).

Point chaud de l’Afar et rifting 

La jonction triple de la dépression Afar, au nord-est de l’Afrique, est de type riftrift-rift (McKenzie et al., 1970). Elle est le résultat de l’intersection des rifts Est Africain, de la mer Rouge et du golfe d’Aden, sous l’influence de l’activité du point chaud de l’Afar qui a affaibli la croûte par changement des propriétés mécaniques de la lithosphère (e.g. Leroy et al., 2012). L’existence du point triple golfe d’Aden – mer Rouge – Rift Est Africain apparaît intimement liée à la présence d’un point chaud dans la région des Afars (Courtillot et al., 1999; Bellahsen et al., 2003). La présence de volcanisme de type trapps en Éthiopie et Yémen, et celle d’un manteau anormalement lent sous la région (Debayle et al., 2001; Bastow et al., 2005) en sont des indices indirects.

Le panache Afar : existence et origine débattues

L’hypothèse de l’existence du panache Afar ne fait cependant pas l’unanimité au sein de la communauté scientifique internationale, tout comme son origine et sa localisation. Au cours des quelques dernières dizaines d’années, les techniques se sont développées, et avec elles les idées et théories sur le panache Afar. Pour certains auteurs, le panache Afar serait la prolongation du superpanache africain profond, situé à la limite noyau-manteau sous le Sud-Est de l’Océan Atlantique (Nyblade et Robinson, 1994; Ritsema et al., 1999; Benoit et al., 2006; Hansen et Nyblade, 2013). Ce flux pourrait provoquer des remontées localisées de matériel sous les zones affectées par un volcanisme Cénozoïque (Forte et al., 2010). Selon Hansen et Nyblade (2013), il existerait un flux remontant vers le nord-est depuis le superpanache africain, jusqu’à la pointe sud-ouest de l’Arabie. La connexion avec ce dernier pourrait toutefois avoir disparu (Davaille et al., 2005). Selon Ebinger et Sleep (1998) et Debayle et al. (2001), la zone de l’Afar serait alimentée par un panache indépendant du superpanache africain, ayant une origine à plus de 600 km profondeur ; le manque de résolution de leurs modèles dans le manteau inférieur ne leur permettant pas de meilleure hypothèse sur la source. Pour Ebinger et Sleep (1998), ce panache pourrait permettre l’alimentation par flux mantellique sous une lithosphère amincie d’autres points chauds africains. D’autres modèles de tomographie des ondes P et des analyses de fonction récepteur impliquent une origine confinée à moins de 410 km pour le panache Afar, car ils imagent une zone de transition d’une épaisseur similaire à l’épaisseur moyenne globale (Benoit et al., 2003, 2006; Nyblade et al., 2000). Chang et al. (2011), grâce à un modèle de tomographie des ondes S, propose l’existence de plusieurs panaches : le panache Afar, et le panache Kenyan, ce dernier pouvant être relié au superpanache africain au vu de son inclinaison vers l’ouest avec l’augmentation de la profondeur. Afin d’expliquer le volcanisme Néogène au nord de l’Arabie et en Jordanie, Chang et al. (2011) supposent également la présence d’un troisième panache, localisé sous la Jordanie. Certaines études géochimiques (e.g. George et al., 1998; Rogers et al., 2000), soutiennent également que la présence de signatures isotopiques différentes impliquent l’existence de différentes sources mantelliques : un panache sous le Kenya et un second sous l’Éthiopie. Cependant, d’autres études expliquent qu’il faut considérer dans les analyses géochimiques les effets de l’amincissement lithosphérique et de la contamination des magmas (e.g. Furman et al., 2004). Ainsi, il pourrait n’y avoir qu’une source, donc un seul panache, avec des expressions géochimiques qui varient dans l’espace et le temps. Quant à la possibilité d’un lien entre les divers points chauds mineurs de l’Afrique et celui de l’Afar, plusieurs auteurs considèrent que les points chauds Darfour, Tibesti et Hoggar correspondent à des panaches non connectés (Burke, 1996; Wilson et Guiraud, 1992). Plus récemment, Sebai et al. (2006), observent grâce à leur modèle de tomographie des ondes de Love et de Rayleigh, une anomalie jusqu’à une profondeur de 300 km (maximum d’investigation) sous l’Afar, non connectée aux autres points chauds africains. Montagner et al. (2007) puis Sicilia et al. (2008) imagent le panache Afar jusqu’à ∼ 400 km, et le distinguent des points chauds Hoggar, Tibesti, Darfour et Cameroun, dont l’origine serait plus superficielle. Ces points chauds seraient dus à des “baby plumes”, c’est à dire à des upwellings plus superficiels, des instabilités convectives dans l’asthénosphère. Sicilia et al. (2008) n’excluent pourtant pas la possibilité que ces points chauds soient alimentés par le panache Afar à des profondeurs inférieures à 150-200 km par flux horizontal de matériel. Des études récentes de Rychert et al. (2012) et Hammond et al. (2013) suggèrent que l’influence d’un panache mantellique sur la région de l’Afar est aujoud’hui minime. Le volcanisme aux axes serait alors probablement dû à une remontée passive de matériel mantellique sous l’Afar et plus particulièrement sous les axes, dans les 75 à 100 premiers kilomètres de profondeur. De plus, de petites remontées diapiriques sont présentes endessous des principaux édifices volcaniques hors-axe (Hammond et al., 2013).

Le magmatisme associé au panache de l’Afar

Avant 30 Ma

Les premières traces de magmatisme dans la région du point chaud de l’Afar ont été datées à 45 Ma au Sud de l’Éthiopie par la méthode 40Ar/39Ar (George et al., 1998).

Elles correspondent à une première phase de magmatisme s’échelonnant de 45 à 35 Ma. L’extension associée à cette première phase est trop faible pour avoir généré à elle-seule les épanchements volcaniques observés au Yémen et en Éthiopie (Fig. I.1.1) (Baker et al., 1998; Coulié et al., 2003). L’analyse géochimique réalisée sur ces basaltes indique l’interaction d’un point chaud avec la lithosphère (Bertrand et al., 2003). On considère donc ce phénomène comme la première expression de l’activité du panache Afar.

Au moment de la crise, autour de 30 Ma

L’épisode majeur, de type trapps, a lieu sur une période très brève autour de 31 Ma et 28 Ma, engendrant de grands épanchements volcaniques épais de plus de 3 km localement, au Sud-Ouest du Yémen, en Ethiopie et se propageant en Arabie occidentale jusqu’au Nord-Est du Soudan (Baker et al., 1996, 1998; Hofmann et al., 1997; George et al., 1998; Coulié et al., 2003). Les séries pré-rift et volcaniques au Yémen sont intrudées de nombreux dikes de basalte, trachite et rhyolite, orientés parallèlement à la mer Rouge (NNW-SSE à NWSE), datés de 25 à 16 Ma (Zumbo et al., 1995). Les dikes basaltiques et de gabbros lités se retrouvent sur presque toute la longueur de la mer Rouge, depuis l’Afar et le Yémen jusqu’au nord de l’Égypte. Cet épisode volcanique est contemporain de la mise en place de larges batholithes granitiques. Ces derniers sont alignés suivant une direction NS à proximité du « Grand Escarpement » qui sépare les plateaux élevés du Yémen de la plaine subsidente de Tihama. Une étroite relation spatiale existe entre les granites et les grandes failles normales NNE-SSW qui affectent les roches sédimentaires Mézosoïques et les roches volcaniques Oligocènes des hauts plateaux (Geoffroy et al., 1998). Enfin, il y a 14 Ma s’initie une troisième phase de magmatisme en Éthiopie et principalement à l’Ouest de l’Arabie Saoudite (au nord jusqu’à Harrat Ash Shamah et Jebel Druse en Jordanie, Liban et Syrie (Fig. I.1.1)).

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Table des matières

Introduction générale
I Présentation de la zone d’étude
1 Évolution géodynamique de la plaque Arabe
1.1 Frontières actuelles de la plaque Arabe
1.2 De la Pangée au bloc Afrique–Arabie
2 Point chaud de l’Afar et rifting
2.1 Le panache Afar : existence et origine débattues
2.2 Le magmatisme associé au panache de l’Afar
2.2.1 Avant 30 Ma
2.2.2 Au moment de la crise, autour de 30 Ma
2.3 Ouverture océanique et structure des marges
2.3.1 Ouverture de la mer Rouge
2.3.2 Ouverture du golfe d’Aden
2.3.3 Ouverture du rift Est Africain
2.3.3.1 La dépression Afar
2.3.3.2 Le rift nord Éthiopien
3 Activité récente : volcanisme et sismicité
3.1 Magmatisme récent et actuel
3.1.1 Le long du golfe d’Aden
3.1.2 Le long de la mer Rouge
3.2 Activité sismique récente liée au magmatisme
3.3 Influence du panache Afar sur les marges de la mer Rouge et du golfe d’Aden : modèles
4 Études de tomographie réalisées précédemment dans la région
II Présentation des méthodes utilisées
1 Tomographie de bruit de fond sismique
1.1 Principe général
1.2 Origine du bruit de fond microsismique
1.3 Du bruit de fond aux vitesses de phase des ondes de Rayleigh
1.4 Sélection et traitement des données
2 Tomographie télésismique
2.1 Principe général
2.2 Les résidus de temps de trajet
2.3 Problème direct
2.4 Formulation de l’inversion
2.5 Codes utilisés
2.6 Limites de la méthode
2.7 Traitement des données
III La région du point triple Aden – Afar – sud mer Rouge
1 Magmatism on rift flanks : insights from Ambient-Noise Phase-velocity in Afar region
1.1 Abstract
1.2 Introduction
1.3 Data
1.4 Method
1.5 Resolution
1.5.1 Station-to-station paths
1.5.2 Random tests
1.6 Results
1.7 Discussion
1.8 Conclusions
1.9 Acknowledgments
2 Tomographie de bruit 3D appliquée à l’Afar
2.1 Introduction
2.2 Données et méthode
2.3 Résultats
2.4 Discussion
2.5 Conclusions
3 Crustal and upper mantle structure beneath south-western margin of the Arabian Peninsula from teleseismic tomography
Conclusion générale

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