L’IMPORTANCE D’UN RÉGIME DE CHANGE
Par définition, un régime de change est un ensemble de règles déterminant l’intervention des autorités monétaires nationales sur le marché des changes, et partant le comportement du taux de change. Son choix importe énormément puisque les marges de manœuvre d’un pays, son mode d’ajustement macroéconomique et sa politique économique entrent en jeu. Le régime de change conditionne également l’insertion internationale d’une économie.
L’instauration du Marché Interbancaire de Devises en continu
En juillet 2004, les autorités monétaires malgaches ont pris un certain nombre de mesures pour apporter plus de stabilité sur le Marché Interbancaire de Devises et mieux contenir l’inflation. Parmi celles-ci, on a mis en place le système du Marché Interbancaire de Devises en continu suite au Décret n°2004-731 portant création duMarché Interbancaire de Devises en continu du 27 juillet 2004. La mise en place du Marché Interbancaire de Devises en continu constitue une amélioration nette en ce qui concerne l’organisation et le fonctionnement duMarché Interbancaire de Devises, accusé depuis longtemps d’être non transparent, très étriqué et opaque. Elle consiste en l’instauration du système à double cotation, à savoir l’euro et le dollar américain, l’abandon de la devise pivot qu’était l’euro, l’abandon de la cotation à la criée (physique) pour céder la place à un réseauélectronique fonctionnant de manière permanente et étant destiné à l’achat et à la vente de devises dont le canal du Service Reuters Dealing 3000 International assure l’exécution des transactions. Le réseau aide les intervenants sur le Marché Interbancaire de Devises à faire des arbitrages professionnels au lieu des arbitrages d’opportunités suivant les ordres des clients comme c’était le cas lors de l’ancienMarché Interbancaire de Devises. Parallèlement à cela, l’heure d’ouverture duMarché Interbancaire de Devises en continu s’étend de 08h00 à 15h00 du soir au lieude 10h00 à 12h00 ; ce qui en théorie devrait intensifier la concurrence. En effet, une plus grande transparence du Marché Interbancaire de Devises en continu se perçoit grâce à l’affichage en continu et en temps réel de toutes les informations sur les cours achat-vente de la monnaie nationale contre l’euro et l’USD sur les écrans électroniques Reuters de chaque intervenant qui dispose désormais de sa propre page de cotation, sans subir les influences et les pressions des autres intervenants comme c’était le cas lors du Marché Interbancaire de Devises à la criée.
Un Marché Interbancaire de Devises inefficient
Avant de parler de politique de change efficace, il faut considérer la question de savoir si le Marché Interbancaire de Devises en continu est efficient ou non. Découlant des raisons suivantes, à savoir un Marché Interbancaire de Devises toujours faiblement liquide, les coûts de transactions élevés, un marché à terme inexistant, un marché oligopolistique, des institutions rudimentaires, des informations asymétriques, le Marché Interbancaire de Devises en continu demeure inefficient, et a failli à sa mission. La spirale de dépréciation continue et sans fin restreint la viabilité du Marché Interbancaire de Devises en continu, et même traduit son échec sans une compétitivité acquise pour Madagascar. A part cela, il n’y a aucun lieu de parler de demandes ou d’offres de devises sur le Marché Interbancaire de Devises malgache selon certains auteurs étant donné le niveau relativement bas du volume et des montants des transactions quotidiennes. Dire que la loi de l’offre et de la demande provoque la dépréciation de la monnaie nationale résulte de « l’hérésie intellectuelle ». L’étroitesse du Marché Interbancaire de Devises et le volume des transactions courantes font que l’équilibre entre l’offre et la demande des devises ne reflète pas les réalités économiques du pays. Le change flexible n’a aucunement apporté la stabilité dans l’économie malgache et cela n’a nullement atténué l’influence des chocs extérieurs (le taux de change mondial, voir annexes 4, 5, 6, 7). Il en ressort que le taux de change sur le Marché Interbancaire de Devises en continu ne reflète point les réalités économiques malgaches. Si l’on suit la logique microstructurelle du taux de change, l’existence d’asymétrie d’information sur le Marché Interbancaire de Devises en continu et sa structure oligopolistique influencent grandement la détermination du cours de l’Ariary.En août 2004, le professeur Pépé ANDRIANOMANANA24 critiquait violemment la politique du Fonds Monétaire International à Madagascar. Il suggérait plusieurs alternatives telles que l’ « adjustable peg » d’avant 1994, c’est-à-dire untaux fixe mais ajustable suivant un mécanisme amélioré, ou encore un régime transitoire entre le Marché Interbancaire de Devises et le régime d’avant 1994, à l’instar de ce qu’il y a dans certains pays sous-développés d’Afrique, pour supplanter le système du Marché Interbancaire de Devises.
La dépréciation ne profite pas à la compétitivité et à la balance commerciale
On a observée une appréciation réelle globale de l’Ariary depuis le Marché Interbancaire de Devises en continu. L’étude déjà citée plus haut et réalisée par le CREAM a révélé que seuls quelques produits d’exportation (exemple les réexportations des Zones Franches Industrielles) réagissent au gain de compétitivité, et que c’est plutôt la capacité de production et l’avantage comparatif qui demeurent les principaux facteurs dictant la hausse du volume des exportations au détriment de la compétitivité-prix. D’ ailleurs, cette compétitivité est faible vu l’appréciation dutaux de change réel de l’Ariary. Force est de constater que dans la majorité des cas, les produits de base représentent les biens les plus exportés. Et ce sont des produits ayant relativement incorporé peu de chaînes de valeurs. De plus, les exportations de ces produits font face à des demandes extérieures relativement inélastiques. Par exemple, entre 2005 et 2006, l’Ariary a subi une dépréciation moyenne annuelle de 8% par rapport au dollar américain. Pourtant, cette dépréciation semble ne pas avoir d’impacts majeurs sur l’évolution des exportations malgaches vers le monde entier. Les exportations malgaches, qui auraient pu bénéficier de cette dépréciation semblent évoluer indépendamment. D’où la confirmation de l’idée que Madagascar constitue sur le marché extérieur un « petit pays » ou « price taker ». En ce qui concerne les importations, il y a lieu de souligner que certaines importations sont incompressibles, et que Madagascar demeure toujours un petit pays, faible et dépendant des importations vu la faiblesse structurelle de l’appareil productif de l’économie malgache. Cela concerne par exemple les produits pétroliers. Et certains secteurs, notamment, les Zones Franches Industrielles, les industries minières nécessitent d’importants intrants en provenance de l’étranger pour pouvoir exporter. Une dépréciation de l’Ariary rend ces importations plus chères et neutralise en partie son impact positif sur les ventes. Donc la hausse des prix intérieurs et l’inflation importée minent ensemble la compétitivité de l’économie malgache. Autant les importations que les exportations malgaches ne subissent guère les variations du taux de change réel. L’on peut dire que le niveau du taux de change réel à Madagascar n’influe pas de façon conséquente sur les exportations malgaches. En somme, « les exportations malgaches….. semblent évoluer indépendamment » de la dépréciation nominale de l’Ariary, duniveau du Taux de Change Effectif Réel, et ce malgré une diversification plus poussée des exportations malgaches que celle auparavant – abandon de la spécialisation en exportation de produits de faible valeur ajoutée ou de rente. La dépréciation ne provoque pas à court et moyen terme la soi-disant hausse des exportations après un certain temps, tel que décrit en principe la fameuse courbe J (les produits nationaux bénéficiant théoriquement d’une compétitivité plus accrue). Ceci en partie parce que le semblant de bénéfice de compétitivité est vite rogné par la propagation de l’inflation importée, et partant la hausse des prix intérieurs. Il en résulte nécessairement une piètre performance du commerce extérieur malgache.
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Table des matières
INTRODUCTION
Partie I: MATÉRIELS ET MÉTHODES
Matériels
I.1.1. Le Code de changes .
I.1.2. Le statut de la Banque Centrale de Madagascar
I.1.3. Le décret n°2004-731
I.1.4. Les Données utilisées pour la régression
I.1.5. Le logiciel Excel de Microsoft
I.2. La Méthodologie
I.2.1. Méthodologies communes
I.2.2. Méthodologies spécifiques
CONCLUSION DE LA PREMIЀRE PARTIE
Partie II: RÉSULTATS
II.1. Analyse de l’efficience du MID actuel
II.1.1. La politique de change et le régime de change
II.1.2. Approche microstructure du taux de change
II.1.3. Tendance générale du taux de change à Madagascar
II.1.4. Le Marché Interbancaire de Devises ou MID en continu
II.1.4.1. L’instauration du MID en continu
II.1.4.2. Sur la fixation du change
II.1.4.3. Caractéristiques du MID en continu
II.1.5. Faiblesse structurelle de l’offre de devises
II.1.6. Un MID inefficient
II.2. Conséquences de la dépréciation sur la compétitivité et la balance commerciale
II.2.1. Taux de change et courbe J
II.2.2. Au niveau de la competitivité et de la balance commerciale
II.2.3. La depreciation ne profite pas à la competitivité et à la balance commerciale
II.3. Analyse de la cohérence entre politique monétaire et politique de change de la BCM
II.3.1. Le Triangle d’incompatibilité de Mundell
II.3.2. Conséquences de la dépréciation au niveau de l’inflation
II.3.3. Politique de change et politique monétaire
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
Partie III: DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
III.1. L’importance des facteurs déterminants du taux de change de l’Ariary
III.1.1. Suivant le modèle de régression
III.1.2. Autres facteurs
III.2. Les limites de l’analyse
III.3. Les forces et apports de l’analyse
III.3.1. La nature structurelle de l’évolution du taux de change
III.3.2. L’importance du modèle de régression
III.3.3. L’approche microstructure sur le taux de change de l’Ariary
III.3.4. L’inflation par plusieurs canaux
III.3.5. L’imperfection du régime de change
III.4. Recommandations
III.4.1. Adopter un régime de change approprié
III.4.2. Augmenter l’offre de devises
III.4.3. Ne plus échanger des ordres à cours limite
III.4.4. Briser le caractère oligopolistique du MID qui le rend moins efficient
III.4.5. Introduire le marché à termes
III.4.6. Restaurer l’obligation de cession de devises
CONCLUSION DE LATROISIЀME PARTIE
CONCLUSION GÉNÉRALE
Références Bibliographiques
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