Le LDLc
Le cholestérol, composé hydrophobe, n’est pas soluble dans le sang. Son transport est assuré par différentes lipoprotéines dont le LDL cholestérol ou cholestérol des lipoprotéines de basse densité (LDLc). Ce dernier est un facteur majeur de risque cardio vasculaire qui a été retenu pour évaluer le risque cardio-vasculaire en prévention primaire et secondaire des maladies cardio-vasculaires. En effet, il existe une association fortement positive et graduelle entre le taux de LDLc et le risque de SCA. [20] La preuve que la réduction du taux de LDLc plasmatique réduit le risque de mortalité cardiovasculaire (MCV) et donc la survenue de SCA est avérée. Les résultats des études épidémiologiques et des essais avec et sans statines confirment que la réduction du taux de LDLc doit être une préoccupation majeure dans la prévention du SCA. [21] Les méta-analyses de nombreux essais sur les statines ont montré une réduction relative de la survenue de SCA liée proportionnellement à la diminution du taux de LDLc. Chaque réduction de 1,0 mmol/L du LDLc est associée à une réduction correspondante de 20-25% de la mortalité par MCV et de SCA non fatal. [22] Les recommandations actuelles préconisent, pour la mesure du LDL cholestérol, un calcul indirect par la formule de Friedewald (valable à condition que le taux de triglycéride soit inférieur à 4 g/L) : LDLc = CT – HDLc -TG/5 (en g/L).
Contrôle des facteurs de risque cardio-vasculaire
Le diabète se défini par une glycémie à jeun supérieure à 1,26 g/L sur 2 prélèvements distincts. Un taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) inférieur ou égal à 7,0% (<53 mmol / mol) est recommandé pour la majorité des patients atteints de diabète de type 1 ou de type 2. Pour les patients aux antécédents de SCA qui ont évolué vers une cardiopathie ischémique avec insuffisance cardiaque la cible d’HbA1c est ≤ 8%. [40, 63] L’hypertension artérielle (HTA) Pour tous les SCA il est recommandé d’avoir une pression artérielle systolique (PAS) inférieure ou égale à 140 mmHg et une pression artérielle diastolique (PAD) inférieure ou égale à 90 mmHg (85mmHg chez les patients diabétiques). Les recommandations européennes concernant les STEMI précisent que chez les patients à très haut risque CV, une PAS cible inférieure à 120 mmHg peut être envisagée. [2, 3] Le sevrage tabagique est probablement la mesure la plus efficace de toutes les mesures préventives. En effet, une méta-analyse portant sur l’arrêt du tabac après un SCA a montré un bénéfice sur la diminution du taux de mortalité de 0,64 (0,58-0,71, IC 95%). Soit une réduction de 36% comparée aux tabagiques actifs. Le risque cardio-vasculaire diminue rapidement après l’arrêt du tabac avec une diminution significative de la morbidité à partir de 6 mois d’arrêt. De plus, le risque cardio-vasculaire rejoint quasiment le risque des personnes n’ayant jamais fumé après 10-15 ans. [64] 23 Concernant le régime alimentaire (figure 7), il est recommandé de suivre le régime méditerranéen. L’objectif étant de lutter contre le surpoids et l’obésité [indice de masse corporelle (IMC) >25 kg / m2] afin de diminuer la mortalité. [65] L’activité physique régulière diminue le risque de survenue d’événements coronariens. La sédentarité est un facteur de risque cardiovasculaire important. Les recommandations préconisent des activités physiques en condition aérobie (marche, vélo, course à pied…), par sessions d’au moins 30 minutes, à raison de 3 à 4 fois par semaine (idéalement tous les jours).
La CRP ultra-sensible
Concernant le profil des patients avec une CRPus élevée, les patients du groupe B (CRPus ≥ 2,0 mg/L) avaient un IMC plus élevé (27,40 kg.m-2 versus 24,79 kg.m-2 dans le groupe A, p=0,002) et un pic de VO2 plus bas (17,27 ml/kg/mn versus 22,16 ml/kg/mn dans le groupe A, p < 0,0001) que le groupe A (CRPus < 2,0mg/L). Une étude récente a mis en évidence que les patients avec un taux de CRPus supérieur ou égal à 2 mg/L avaient plus de comorbidités que les patients avec un taux de CRPus bas. En effet, le taux de CRPus élevé était associé à un tabagisme actif, à des atteintes vasculaires périphériques, à une insuffisance rénale, à une insuffisance cardiaque, à un taux de LDLc plus élevé, à un diabète, à la sédentaire et enfin à l’obésité (IMC ≥ 30 kg/ m2). [137] Notre hypothèse de départ a été confirmée dans le groupe 2 (LDLc ≥ 0,7 g/L), on a observé une réduction significative de la CRPus de 28% (2,50 mg/L avant RCV versus 1,81 mg/L après RCV soit – 0,69mg/L; IC = [(0,26) – (1,13)], p=0,002) à la suite de la RCV. Des résultats similaires ont également été observé dans le groupe B (CRPus ≥ 2,0mg/L) avec une réduction de 36% (4,62 mg/L avant RCV versus 2,95 mg/L après RCV soit – 1,67mg/L, p < 0,001) et dans le sous-groupe 2B (LDL ≥ 0,7g/L et CRPus ≥ 2,0 mg/L) avec une réduction de 37% (4,52 mg/L avant RCV versus 2,85mg/L après RCV, soit – 1,67mg/L ; p=0,001). Les variations de CRPus dans les autres groupes n’étaient pas significatives. Ces résultats sont cohérents par rapport à la littérature, puisque plusieurs études ont évalué les propriétés anti inflammatoires du réentrainement à l’effort en RCV. Ce dernier permettait de réduire le taux de CRPus. [138-142] La réduction que nous avons trouvé était d’une amplitude similaire voir supérieure à celle observée dans de nombreuses études utilisant un traitement par statine. En effet ces études retrouvaient des réductions médianes du taux de CRPus situées entre 15% et 20%. [7-9] Une méta analyses de 15 études [143] a également montré que la RCV pouvait réduire de manière significative les taux de CRPus [Différence de moyenne (DM) = -1,81 mg / l, intervalle de confiance (IC) à 95% : -2,65, -0,98; p=0,004). De nouvelles molécules ont été évaluées, comme le canakinumab dans l’étude CANTOS. [73] Le canakinumab 150 mg permet de réduire de 37% le taux de CRPus (p < 0,001) et de réduire de 15% les événements cardio-vasculaires indépendamment du risque lié au LDLc. Cependant des effets secondaires (infection grave) ont été observé. De plus, c’est un médicament très onéreux. Ceci réduit considérablement la possibilité de l’utiliser dans la pratique clinique. La RCV apparait donc comme une alternative thérapeutique pour réduire le risque résiduel de récidive des SCA via la réduction du taux de CRPus. Cependant, il faudrait évaluer si la RCV permet de réduire également les événements cardio-vasculaires dont les SCA (comme le canakinumab). D’autre part, notre étude comporte plusieurs biais. En effet, nous n’avions pas de groupe témoin (patients sans RCV) ce qui constitue un biais majeur. Une étude a évalué l’effet de la RCV sur le taux de CRPus chez les patients coronariens. Il y avait un groupe contrôle de patients coronariens qui ne bénéficiaient pas de RCV. Ils ont observé une réduction significative de la CRPus dans le groupe RCV. Il n’y avait pas de réduction significative dans le groupe témoin. Cependant le groupe témoin comportait 42 patients contre 277 patients dans le groupe RCV. Leur résultat peut donc être lié à un manque de puissance. [144] Notre étude comporte également un biais de sélection, puisque nous avons exclus les patients pontés et les patients ayant une cardiopathie ischémique pré existante. Nous supposons que ces patients sont à plus haut risque cardio-vasculaire et auraient eu probablement un taux de CRPus initial plus élevé. [137]
Plusieurs facteurs de confusion sont également présents
Premièrement, le taux de CRPus est d’autant plus bas que l’on se trouve à distance du SCA. En effet à la phase aiguë d’un SCA, le taux de CRPus augmente de façon marquée à partir de la 6ème heure pour atteindre un pic entre le deuxième et le quatrième jour et revenir à la normale en trois à quatre semaines. [145] Cependant ce biais est négligeable car le dosage de CRPus initial a été réalisé en moyenne à 60 jours dans le groupe A et à 101 jours dans le groupe B. Deuxièmement comme nous l’avons vu, les statines ont des effets anti-inflammatoires ce qui constitue un facteur de confusion. [8, 146, 147] Une méta-analyse [148] a observé une réduction du taux de CRPus par des traitements hypolipémiants indépendant du taux LDLc. Nous n’avons pas pu évaluer les effets de la RCV sur le taux de CRPus chez les patients sans statines car ils étaient trop peu nombreux. Cependant le taux de LDLc des patients baisse peu alors que la CRPus diminue significativement et ce malgré la diminution de la posologie des statines. Ceci laisse suggérer que la RCV a un effet anti inflammatoire indépendamment du taux de LDLc. Troisièmement, la perte de poids induit par la RCV peut également être un facteur de confusion. On sait que les adipocytes synthétisent des cytokines impliquées dans la production de CRPus [149, 150]. Des études antérieures ont montré que la perte de poids peut réduire les taux de CRPus. [151] En outre, il a été proposé que l’effet bénéfique de la RCV pourrait être dû à la perte de graisse corporelle favorisée par l’entrainement physique. Lavie et al. ont montré que l’effet bénéfique de la RCV sur les taux de CRPus n’était significatif que chez les patients obèses coronariens qui perdaient du poids. [152] Une autre étude a également montré que les taux de CRPus diminuaient de manière significative uniquement chez les patients obèses qui avaient bénéficié de la RCV (réduction du taux de CRPus de 43% ; p < 0,01) mais pas chez les autres patients (non obèse). [152] D’autre part une étude observationnelle danoise suggère qu’un taux de CRPus élevé serait lié à l’importance de l’adiposité abdominale et non à l’IMC. [153] Un tour de taille plus élevé était associé à un taux de CRPus plus élevée, indépendamment de l’IMC. Ceci pourrait expliquer que nous n’avons pas mis en évidence de corrélation entre les variations de l’IMC et celles de la CRPus. Une étude va à l’encontre de ces résultats. [154] Elle a évalué l’effet de la RCV sur le taux de CRPus indépendamment de la perte de poids et de la prise de statines. Une réduction du taux de CRPus a été observé chez les patients qu’ils aient reçu un traitement par statine ou qu’ils aient perdu du poids. Quatrième facteur de confusion : le tabagisme actif. En effet, une étude a observé que le taux de CRPus était considérablement réduit après un programme de RCV de 2 semaines. Néanmoins cet effet était présent uniquement chez les non-fumeurs. [93] Ceci constitue un biais de confusion car nous n’avons pas la proportion de patient fumeur (information déclarative ce qui constitue un biais de mémorisation). Cinquième facteur de confusion possible : le régime méditerranéen. On sait que les acides gras n-3, importants dans le régime méditerranéen promu chez nos patients, possèdent des effets anti-inflammatoires, notamment l’inhibition de la production de TNF et d’interleukine. [155, 156] Il faudrait une étude randomisée et appariée sur tous ces facteurs de confusion.
CONCLUSION
De nombreuses recherches ont étudié le lien entre l’inflammation et la maladie coronaire. Il s’est avéré que cette dernière est une véritable maladie inflammatoire. Dans cette étude, nous nous sommes intéressés à l’impact de la réadaptation cardiaque sur les taux de CRPus et de LDLc. Nos données nous ont également permis d’évaluer l’évolution du pic de VO2, de la troponine, du BNP, de l’IMC, ainsi que l’évolution des traitements en particulier les statines au cours de la réadaptation cardio-vasculaire. Notre hypothèse de travail consistait en une diminution de la CRPus et du LDLc post réadaptation cardio-vasculaire. Nos résultats ont montré une diminution significative de 28% du taux de CRPus et de 8% du taux de LDLc dans le groupe LDL ≥ 0,7g/L et ce malgré une diminution des fortes doses de statines. On note également une baisse significative de 36% du taux de CRPus dans le groupe CRPus ≥ 2mg/L. Ainsi, la réadaptation cardio-vasculaire semblerait être plus bénéfique aux patients à plus haut risque cardio-vasculaire. De plus, nous avons pu observer dans tous les groupes une augmentation significative du pic de VO2, élément pronostique majeur, confirmant que les patients s’étaient bien entrainés. Une diminution significative du taux de BNP a été observée, ce dernier constitue également un facteur pronostique important. Très peu d’études ont évalué l’effet de la réadaptation cardio-vasculaire sur le taux de LDLc et de CRPus. Notre étude montre l’intérêt et l’impact important de la réadaptation cardiovasculaire sur le taux du LDLc et de la CRPus qui constituent des facteurs de risque cardiovasculaire majeurs. L’effet bénéfique sur les taux de LDLc et de CRPus est essentiellement observé chez les patients à plus haut risque cardio-vasculaire (CRPus ≥ 2mg/L et LDLc ≥ 0,7 g/L) dans le post syndrome coronarien aigu. Par conséquent, notre étude confirme que la réadaptation cardio-vasculaire est une stratégie importante et complémentaire au traitement conventionnel en post SCA. Cependant des recherches supplémentaires avec des essais randomisés comprenant un groupe témoin (sans réadaptation cardio-vasculaire) permettraient d’évaluer si un lien de causalité existe entre la réadaptation cardio-vasculaire et la baisse de l’inflammation.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
II. GENERALITES
1. Le syndrome coronaire aigu (SCA)
1.1. Définition
1.2. Physiopathologie
1.3. Biomarqueurs
1.3.1. Le LDLc
1.3.2. La CRPus
1.3.3. La troponine
1.3.4. Le Brain Natriurétic Peptide (BNP)
2. Stratégie thérapeutique dans le post SCA
2.1. Le traitement médicamenteux
2.1.1. Traitement antiagrégant
2.1.2. Traitement hypolipémiant
2.1.2.1. Mécanismes d’action
2.1.2.2. Indication dans le post SCA
2.1.2.3. Suivi de la tolérance
2.1.3. Autres traitements
2.2. Contrôle des facteurs de risque cardio-vasculaire
2.3. La réadaptation cardio vasculaire
2.4. Traitement anti inflammatoire en cours d’évaluation
3. La réadaptation cardio-vasculaire (RCV)
3.1. Généralités
3.1.1. Définition
3.1.2. Physiopathologie
3.1.3. Indications et contre-indications
3.1.4. Bénéfices
3.1.5. Accessibilité
3.1.6. Aspects médico-économiques
3.2. Déroulement de la phase II de la RCV
3.2.1. Cadre réglementaire
3.2.2. Evaluation initiale
3.2.3. Les modalités
3.3. Le pic de VO2 : un marqueur pronostique
III. MATERIELS ET METHODES
1. Méthodologie de la recherche scientifique
1.1. Type d’étude
1.2. Population
1.3. Critères de jugement
1.4. Déroulement de l’étude
2. Outils statistiques
IV. RESULTATS
1. Analyses en fonction du taux de LDLc
1.1. Caractéristiques initiales
1.1.1. Caractéristiques générales
1.1.2. Caractéristiques biologiques
1.1.3. Traitement avant RCV
1.2. Critères de jugement principal et secondaire
1.2.1. Groupe 1 (LDL<0,7g/L)
1.2.2. Groupe 2 (LDL≥0,7g/L)
1.3. Traitement après RCV
1.3.1. Groupe 1 (LDL<0,7g/L)
1.3.2. Groupe 2 (LDL≥0,7g/L)
2. Analyses en fonction du taux de CRPus
2.1. Caractéristiques initiales
2.1.1. Caractéristiques générales
2.1.2. Caractéristiques biologiques
2.1.3. Traitement avant RCV
2.2. Critères de jugement principal et secondaire
2.2.1. Groupe A (CRPus<2mg/L)
2.2.2. Groupe B (CRP≥2mg/L)
2.3. Traitement après RCV
2.3.1. Groupe A (CRPus<2mg/L)
2.3.2. Groupe B (CRP≥2mg/L)
3. Analyses en sous-groupe
3.1. Groupe 1A (LDL<0,7g/L et CRPus<2,0mg/L)
3.2. Groupe 1B (LDL<0,7g/L et CRPus≥2,0mg/L)
3.3. Groupe 2A (LDL≥0,7g/L et CRPus<2,0mg/L)
3.4. Groupe 2B (LDL≥0,7g/L et CRPus≥2,0mg/L)
4. Corrélations
5. Effets secondaires des statines au cours de la RCV
V. DISCUSSION
VI. CONCLUSION
VII. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
VIII. LE SERMENT D’HIPPOCRATE
ANNEXES
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