Évolution des systèmes d’aménagement forestier dans le temps

Évolution des systèmes d’aménagement forestier dans le temps

Avec la déglaciation et l’arrivée des premiers occupants de la forêt boréale en Amérique du nord, il y a moins de 8 000 ans (Pilou, 1991), l’utilisation de la forêt est passée de la simple survivance à une phase d’exploitation proprement dite. Cette phase s’est étendue du milieu du 18e siècle jusqu’au début du 20e siècle. À cette époque, l’exploitation des forêts servait surtout à fournir du bois d’œuvre à l’Angleterre et aux États-Unis, mais aussi à permettre un développement des terres agricoles et des périmètres urbains (Fernow, 1911). Bien qu’à la fin de cette période des réglementations et des initiatives pour favoriser le reboisement aient été mis en place, de même que des systèmes de protection des forêts contre les feux et des aires de conservation, cette période a entraîné la surexploitation de beaucoup d’espèces arborescentes, tel le pin blanc, et une déforestation au profit de terre agricole (Fernow, 1911). Au milieu du 20e siècle, le développement des sciences forestières a permis l’essor d’une foresterie plus intensive visant un rendement soutenu en fibre (Burton et al. ,2003; Perry, 1998). S’ appuyant sur des règles visant une normalisation de la distribution des classes d’âge de la forêt et une élimination des plus vieux peuplements moins productifs, ce type d’aménagement a, en Europe, favorisé une raréfaction des forêts matures et vieilles (Ostlund, Zackrisson et Axelsson, 1997) et des habitats fauniques associés (Berg et al. , 1994).

Plus récemment, les lois ont favorisé davantage une approche multi-ressources qui visait à intégrer au rendement soutenu d’autres biens et services pouvant être produits par la forêt et la protection de l’eau et des sols (Burton et al., 2003; Gauthier et al. , 2009; Seymour et Hunter, 1999).

L’aménagement écosystémique

L’aménagement écosystémique prend ses racines au début du siècle dernier. Aldo Léopold (1949), un naturaliste américain, décrivait une forme de foresterie qui considérait le territoire comme un système présentant des interdépendances entre toutes ses parties (ou produits) et pour lesquelles un soin particulier devait être pris. Le concept s’est développé au fil de l’acquisition des connaissances sur les écosystèmes et de leurs fonctions ainsi que sur la prise de conscience de divergences importantes entre les paysages non-aménagés et aménagés (Baker, 1999; Cyr et al., 2009; Delong et Tanner, 1996; Franklin et Forman, 1987; Li et al., 1993; Mladenoff et al., 1993; Perron, Bélanger et Vaillancourt, 2009). En 2009, Gauthier et al. proposent la définition suivante d’un aménagement écosystémique : une approche d’aménagement qui vise le maintien de la santé et de la résilience des écosystèmes forestiers en ciblant une diminution des écarts entre les paysages naturels et les paysages aménagés afin d’assurer à long terme le maintien des fonctions de l’écosystème et sa capacité à fournir des biens et services à la société.

Ce type d’approche repose sur les connaissances acquises de la dynamique des écosystèmes et des régimes de perturbation à plusieurs échelles (Attiwill, 1994; Bergeron et al., 2002; Cissel, Swanson et Weisberg, 1999; Kuuluvainen, 2002; Niemelii, 1999; Seymour et Hunter, 1999; Seymour, White et deMaynadier, 2002). Comme il est difficile d’avoir une connaissance pointue de tous les écosystèmes et de leur fonctionnement, une approche par filtre brut et filtre fin (Hunter, 1990; Hunter, Jacobson et Webb III, 1988) a été privilégiée dans le développement d’approches d’aménagement écosystémique. Cette approche repose sur l’hypothèse qu’en maintenant une diversité d’habitats proche de la diversité observée en conditions naturelles, la plupart des espèces associées devraient aussi être conservées.

Dynamique forestière

Au Canada, en absence de perturbation anthropique majeure, la forêt boréale est reconnue pour être principalement perturbée par les feux (Fayette, 1992). Influencée par le climat, la fréquence des feux n’a pas nécessairement été constante dans le temps depuis la déglaciation, mais a présenté de longues périodes de stabilité relative ayant façonné l’ aspect du paysage au cours du temps (Bergeron et al., 2004; Carcaillet et al., 2001; Cyr et al., 2009).

Indépendamment du cycle de perturbations, lorsque l’intervalle entre deux évènements de feux est assez long, il peut y avoir, localement, une succession forestière et des changements de composition dans la canopée (Bergeron et Dubuc, 1989; Foster et King, 1986; Gauthier, De Grandpré et Bergeron, 2000). Lorsque les cycles de feux sont longs, on considère qu’une dynamique par trouée s’installe et assure, à long terme, un remplacement des individus dans la canopée (Kneeshaw et Bergeron, 1998; St-Denis, Kneeshaw et Bergeron, 2010). La longévité des espèces, leur tolérance à l ‘ombre et les conditions de sites sont les principaux facteurs expliquant la succession forestière dans la forêt boréale de l’est du Canada (Gauthier, De Grandpré et Bergeron, 2000; Harper et al., 2002; Lecomte et Bergeron, 2005; Robichaud et Methven, 1993; Taylor et Chen, 2011).

Configuration des paysages

Le régime de perturbation propre à chaque région (type de perturbation, taille, fréquence et sévérité) et les caractéristiques des sites affectés, en lien avec la dynamique d’évolution des peuplements, favorisent la mise en place, dans le paysage, d’une mosaïque de peuplements de compositions et de stades de développement divers (Pickett et White, 1985; Seymour et Hunter, 1999). L’hétérogénéité qu’apportent les perturbations, autant à l’échelle du paysage qu’à l’échelle même de la perturbation, assure un renouvellement des espèces, un apport en nutriment et un apport en lumière. Bien qu’à l’échelle de la perturbation, des extinctions d’espèces et un changement radical d’état sont prévisibles, à l’échelle du paysage, les changements spatio-temporels imposés par le régime de perturbation assurent une résilience à l’écosystème (Johnstone et al., 2010). Cette résilience repose sur l’idée que chaque état, structure ou fonction essentiel au maintien ou au rétablissement de l ‘état désiré de l ‘écosystème seront maintenus en proportion suffisante dans l’ espace et dans le temps considérant le régime de perturbation (Bengtsson et al., 2003; Elmqvist et al., 2003). Un changement majeur au régime de perturbation qui contraindrait certains états, structures ou fonctions de l ‘écosystème pourrait limiter la résilience de l’ écosystème et le retour à un état désiré après perturbation.

À ce titre, une normalisation des classes d’âge des peuplements forestiers par l’exploitation commerciale des bois pourrait entraîner des pertes non-négligeables d’habitats pour les espèces associées aux vieilles forêts et limiter le maintien de ces espèces dans l’écosystème ainsi que des fonctions qui leurs sont liées (Berg et al., 1994; Ostlund, Zackrisson et Axelsson, 1997).

Approche par modélisation et simulation

Également porté par le développement informatique et le développement d’outils d’analyse et de cartographie géoréférencée, les approches de modélisation et de simulation gagnent en popularité dans l’étude des paysages et dans le domaine du développement de nouvelles approches d’aménagement forestier (Messier et al., 2003). Considérant un certain niveau d’abstraction de la réalité, de telles approches permettent d’évaluer rapidement des hypothèses de travail ou de comparer des scénarios de perturbation sans attendre l’évolution dans le temps de systèmes dont les processus se produisent sur plusieurs années, voir sur des décennies (Fall et Fall, 2001; Kurz et al., 2000; Mladenoff et He, 1999). La modélisation et la simulation permet, par le contrôle de certains paramètres, d’évaluer la sensibilité des écosystèmes à différentes variables propres aux régimes de perturbation, à la dynamique des peuplements ou aux changements climatiques (Baker, Egbert et Frazier, 1991; Boychuck et al., 1997; Karau et Keane, 2007; Keane, Parsons et Hessburg, 2002).

À grande échelle, la modélisation permet de mieux définir la dynamique du paysage, son historique de perturbation et l’influence des régimes de perturbation sur son évolution (Gustafson et Crow, 1996; Keane, Cary et Parsons, 2003; Li, 2000, 2002; Perera et Cui, 2010). Ce type d’approche peut également être utilisé pour prédire le comportement de systèmes dans le temps ou dans le passé et la probabilité que ces systèmes acquièrent ou perdent certaines composantes (Nonaka et Spies, 2005; Perera et al., 2003; Wimberly et al., 2000). Enfin, bien que les connaissances actuelles de l’écosystème ne nous permettent pas de créer des modèles qui reproduisent fidèlement toutes les facettes de la dynamique des écosystèmes et du paysage, l’emploi de modèles permet de synthétiser les connaissances et d’évaluer les besoins en recherche pour permettre une meilleure compréhension des processus qui affectent l’écosystème (Baker, 1989; Korzukhin, Ter-Mikaelian et Wagner, 1996). Bien que l’approche de modélisation choisie puisse être de plusieurs natures (empirique ou axée sur les processus), un consensus semble se dessiner sur le fait qu’une approche par modélisation des processus répondrait davantage aux besoins de recherche et de synthèse de connaissances dans le cas des approches d’aménagement écosystémique (Korzukhin, Ter-Mikaelian et Wagner, 1996; Messier et al., 2003).

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Table des matières

Introduction 
0.1 Évolution des systèmes d’aménagement forestier dans le temps
0.2 L’aménagement écosystémique
0.3 Dynamique forestière
0.4 Configuration des paysages
0.5 Approche par modélisation et simulation
0.6 Objectifs de la thèse
Chapitre 1  :Using spatially explicit simulations to explore size distribution and spacing of regeneration are as produced by wildfires: recommendations for designing harvest agglomerations for the Canadian boreal forest 
1.1 Abstract
1.2 Résumé
1.3 Introduction
1.4 Methods
1.4.1 Fire model
1.4.2 Fire regime parameters
1.4.3 Simulations and analyses
1.5 Results and Discussion
1.5.1 Temporal variability in the relative proportion of even-aged stands and regenerating areas
1.5.2 Size class distribution of regenerating areas
1.5.3 Spacing of the regenerating areas
1.5.4Forest management implications
1.5.5 Rare events like those should representa maximal dispersion, as a precautionary measure ensure that the « Any size » statistic is respected
1.6 Conclusion
1.7 Acknowledgement
1.8 References
Chapitre II  :Forest succession rate and pathways on different surface deposit types in the boreal forest north-western Quebec 
2.1 Abstract
2.2 Résumé
2.3 Introduction
2.4 Methods
2.4.1 Study Area
2.4.2 Database and stand selection
2.4.3 Statistical analyses, semi-Markov chains and stand persistence
2.5 Results
2.5.1 Age and influence of surface deposits
2.5.2 Succession pathways
2.5.3 Transition Parameters
2.6 Discussion
2.6.1 Composition and structural changes
2.6.2 Paludification susceptibility
2.6.3 Forest management concems
2.7 Acknowledgements
2.8 References
Chapitre III :Analyse de la variabilité naturelle associée à la configuration d’un paysage forestier boréal à l’aide de simulations spatialement explicites
3.1 Résumé
3.2 Introduction
3.3 Méthode
3.3.1 Aire d’étude et paysage simulé
3.3.2 Description du modèle
3.3.3 Paramètres de simulation et traitement des données
3.3.4 Scénarios et sensibilité du modèle aux hypothèses posées
3.4 Résultats
3.4.1 Structure d’âge et composition en fonction du régime de feux
3.4.2 Configuration des paysages en fonction du régime de feu
3.4.3 Tests de sensibilité
3.5 Discussion
3.5.1 Influence des paramètres du régime de feux sur la variabilité et la configuration
3.5.2 L’ utilisation de modèles et de simulations : un incontournable
3.6 Conclusions
3.7 Remerciements
3.8 Références
Chapitre IV  :Influence de différents régimes d’aménagement sur la configuration d’un paysage forestier boréal 
4.1 Résumé
4.2 Introduction
4.3 Méthode
4.3.1 Aire d’étude et paysage simulé
4.3.2 Description du modèle et des sous-modèles
4.3.3 Scénarios
4.3.4 Paramètres de simulation et traitements des données
4.3.5 Sensibilité du modèle à certains paramètres
4.4 Résultats
4.4.1 Composantes du paysage : composition et configuration
4.4.2. Autres aspects écologiques et économiques
4.5 Discussion
4.5.1 Respect des limites de la variabilité historique
4.5.2 Un compromis écologique et économique
4.5.3 Limitations de l’approche
4.6 Conclusion
4.7 Remerciements
4.8 Références
Conclusion générale 

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