Evolution des ressentis face au thème de la mort

Le concept de la mort : âge par âge

Introduction

  La mort fait partie des questions existentielles de la vie, elle nous touche tous. Elle nous est devenue moins familière, moins communautaire qu’à l’époque où les personnes mouraient à la maison et étaient veillées par la famille proche et le village. La société a tendance à la laisser devenir « une affaire privée, où les repères de sens font défaut, où l’éclatement des familles rend difficile l’organisation des obsèques, où l’émotion tient souvent lieu de réflexion » (Noble Burnand, 2015,p. 15). Actuellement, elle tend à la cacher tout comme d’autres aspects déplaisants de la vie tels la vieillesse, la maladie. Les progrès de la médecine qui retardent toujours plus dans le temps ce moment ainsi que le déclin de la pratique religieuse ont fait en sorte que notre société a tendance à l’occulter (Hofer 2004). La mort revient toutefois au premier plan aux travers des questions sociétales portant sur les soins palliatifs, l’euthanasie, l’accompagnement des mourants et des endeuillés (Fawer Caputo, 2008). Elle fait aussi partie de la vie des enfants par les contacts qu’ils ont avec la nature, les animaux, la littérature, la télévision, les ruptures et les pertes en tout genre (Abras, 2003 ; Deunff, 2001).Nous-mêmes, dans nos parcours de vie et nos pratiques d’enseignantes, nous avons été en contact avec des deuils et des décès :
Marie-Noëlle Lötscher enseigne depuis 1979. Elle change de niveau en 2013 pour s’occuper d’une classe enfantine (1-2P) après avoir enseigné de longues années en 3 4P.Dans sa carrière, elle a été confrontée plusieurs fois au deuil: deux suicides de papa d’élèves et le décès par maladie (cancer) d’un camarade de la classe parallèle qu’une partie de ses élèves avait côtoyé. Ce dernier évènement a été plus difficile à gérer au niveau émotionnel que les deux premiers. L’enfant décédé avait 7 ans ce qui a généré beaucoup d’angoisse auprès des élèves de sa classe. Dans sa vie privée, elle a accompagné son père dans ses derniers jours quand celui-ci avait émis le désir de mourir à la maison.
Sabrina Meylan enseigne en 5-6P depuis 2000. Elle observe que ses élèves parlent volontiers des deuils qu’ils vivent (la mort d’un papa, d’un grand-parent, d’un animal, d’un proche,…). En 2009, elle a été confrontée au décès d’une ancienne élève avec qui elle avait gardé contact et qui a perdu la vie dans un accident de la route. En 2010, elle a suivi une formation CARITAS « Accompagnement à la vie ». Elle est bénévole dans cette association. Elle effectue régulièrement des accompagnements de personnes âgées ou de jeunes en fin de vie. Elle a aussi participé à un stage auprès d’enfants malades en février 2014 à l’école du CHUV. Du point de vue personnel, elle a perdu un ami proche lors d’un accident de voiture et entretient, à présent, des relations d’amitié avec ses parents.

Définition du concept « représentation »

  Les dictionnaires le Petit Robert (1991) et le Larousse1 donnent une définition large de ce terme : « action de mettre devant les yeux ou devant l’esprit » ou « perception, image mentale, etc., dont le contenu se rapporte à un objet, à une situation, à une scène, etc., du monde dans lequel vit le sujet ».Jodelet (1989) définit de manière plus précise ce qu’est la représentation sociale. Il s’agit d’une forme de connaissance spécifique, d’un savoir de sens commun généré par des processus mentaux socialement marqués. Elle parle de pensées sociales car ces dernières sont orientées vers la communication, la compréhension et la maîtrise de l’environnement social, matériel et idéal. Cette construction de pensée est dépendante du contexte dans lequel le sujet se trouve et de ses  interactions avec le monde et les autres. Abric (2011) s’interroge sur la structure des représentations sociales. Selon lui, elles reposent sur l’existence d’un noyau central, élément stable et partagé, et celle d’éléments périphériques susceptibles de variations. Ces représentations sociales peuvent être étudiées globalement comme des contenus dont les dimensions (informations, valeurs, opinions…) sont coordonnées par un principe organisateur (attitude, normes…). Elles peuvent aussi être analysées de manière focalisée comme des structures de savoir organisant l’ensemble des significations relatives à l’objet concerné. Les représentations se construisent s’il y a interactions sociales ou lorsque le sujet est face à un stimulus social. Elles contiennent les idées, les valeurs et les modèles du sujet et de son groupe d’appartenance. Elles sont le reflet des idéologies, des codes sociaux et des valeurs véhiculées par la société. Surtout, elles sont représentatives du sens que le sujet donne à son expérience mais aussi de schèmes de pensée socialement établis (Jodelet, 1989).Ainsi, l’expérience de vie quotidienne offre à l’enfant une palette de souvenirs sensoriels, affectifs et cognitifs qui seront stockés dans sa mémoire. Cela constitue une base de données dans laquelle les réalités subjectives et objectives se confondent encore mais sur laquelle l’enfant pourra édifier ses premières représentations de la mort (Hofer, 2004).

Composantes des représentations de la mort chez l’enfant

  Parce qu’il vit et qu’il a conscience d’être mortel, l’être humain est confronté à la mort. Avant même d’être en contact direct avec celle-ci, l’enfant se forge déjà une représentation de ce concept. C’est au travers des expériences de la vie de tous les jours que le jeune enfant fait ses premières découvertes de la mort et qu’il commence à construire un savoir sur celle-ci (Lonetto, 1988). En effet, la curiosité d’un enfant est vite attisée et devient source de questionnement ou d’expérience lorsqu’il rencontre au détour d’un chemin un animal mort ; lorsqu’il écrase intentionnellement une fourmi pour voir ce qui se produit ; lorsqu’un camarade parle de la perte de son animal domestique ou relate l’enterrement de son grand-père ; lorsqu’il expérimente lui-même un deuil (Encrevé- Lambert, 2003).
La composante cognitivo-développementale
De manière générale, les représentations de la mort chez les enfants se développent en fonction de leur âge et ne peuvent être entièrement dissociées des divers stades de développement décrits par Piaget.Anthony (1940, cité par Fawer Caputo, 2008) a observé qu’il existe une étroite corrélation entre le développement du concept et l’âge mental. Son étude porte sur des enfants âgés de cinq à treize ans. Pour dégager un lien entre l’âge des enfants et leurs visions de la mort, elle a recueilli, entre autre, leurs conceptions des enfants au niveau de la définition du mot «mort » et classé leurs réponses en cinq catégories. Chaque catégorie représente un niveau de développement cognitif ou un âge mental distinct.
A: ignorance apparente de la signification du mot mort, selon les critères des adultes
B: intérêt pour le mot ou le fait, associé à un concept erroné ou limité
C: aucune preuve d’une incompréhension de la signification du terme « mort » mais définition donnée par référence à des phénomènes associés et non essentiels sur le plan de la biologie ou de la logique, ou par référence au seul genre humain
D: référence correcte, comportant les points essentiels, mais limitée
E: description ou définition générale, logique ou biologique.
Puis, elle a comparé ces catégories aux âges effectifs des enfants. Il en ressort que les enfants âgés de moins de cinq ans manifestent peu ou pas de connaissance de la mort, que ceux entre sept et neuf ans donnent des réponses qui indiquent qu’ils comprennent la signification du mot « mort » mais que leurs définitions ne sont pas toujours correctes du point de vue logique. Les enfants à partir de 10 ans, quant à eux, ont une interprétation logique et réaliste de la mort. Ces résultats lui ont permis de conclure qu’il y a bien une corrélation entre l’âge et l’évolution des concepts mais
que cette dernière est plus dépendante du développement cognitif ou de l’âge mental que de l’âge biologique. Kane (1979, cité par Hofer, 1995) a démontré que les représentations mentales de la mort se développent au cours de trois phases qui correspondent au stade préopératoire, au stade des opérations concrètes et à celui des opérations formelles de la théorie piagétienne. Il a mis en évidence 10 composantes qui correspondent aux idées des sujets sur la mort : la compréhension claire, la séparation, l’immobilité, l’irrévocabilité, la causalité, la dysfonctionnalité, l’universalité, l’insensibilité, l’apparence et la personnification. Puis, il a recherché si ces composantes étaient identiques à celles des adultes ou si elles étaient présentes de manière incomplète, ce afin de définir les phases de développement du concept.

La composante environnementale
a) Influences sociales et familiales
La représentation de la mort chez l’enfant est fortement influencée par le milieu environnemental dans lequel il vit. Ses conceptions se rapprochent bien souvent de celles des adultes proches et de la société où il est né et a grandi, de ce que la société lui enseigne sur le mort et le deuil et des rites qui y sont liés (Lonetto, 1988 ; Castro, 2000).L’environnement socio-culturel et le niveau économique des parents joueraient également un rôle important dans la construction de ce concept. Les enfants sont tous soumis à l’apprentissage de la perte. Il peut s’agir d’un déménagement, d’une amitié, de la perte d’un idéal ou d’un être aimé. Mais les émotions des enfants de milieux défavorisés sont souvent moins bien accompagnées (Abras, 2003).L’enfant vit dans un milieu riche en représentations de la mort souvent véhiculées au travers de connotations sociales (expression du langage, comptine, monuments, croyances religieuses) et des médias (Castro, 2000 ; Hofer, 2004). Abras (2003) constate que les premières allusions à la mort sont surtout virtuelles et qu’elles peuvent être quotidiennes. Dans les programmes de télévision (informations, séries, dessins animés, films), les enfants découvrent une mort omniprésente, banalisée. Cette mort rime souvent avec violence, avec opposition entre le bien et le mal et pour les enfants, la distinction entre mort réelle et imaginaire reste floue. Toujours selon Abras, les enfants, souvent simples spectateurs, sont confrontés à de multiples émotions et ne bénéficient d’aucun accompagnement pour pouvoir les comprendre. Ils côtoient des images de mort sans avoir la possibilité d’exprimer leurs émotions, de symboliser ce qu’ils ressentent, ce qui peut provoquer de la frustration, de l’associabilité ou engendrer de la peur et de la violence.

b) Influences religieuses
Les rituels funéraires au travers des différentes croyances sont des moments importants de socialisation qui favorisent chez l’enfant, en fonction de son âge, une foule de questions sur la mort, sur ce qu’il y a après, sur ce que devient le corps, etc. (Encrevé-Lambert, 2003). Par ces rituels, les sociétés montrent la séparation existant entre le monde des vivants et des morts. Ces cérémonies démontrent que la personne décédée est bien morte, que son corps disparaît (enterrement, crémation) et qu’en fonction des croyances dans l’au-delà, le disparu a une place: paradis où l’on retrouve ceux qu’on aime, réincarnation, passage vers une nouvelle vie, etc. (Encrevé-Lambert, 2003). Les rituels autour de la mort et les croyances du milieu dans l’au-delà en fonction ou non d’une religion contribuent ainsi à l’élaboration du concept de la mort. Ils
donnent des réponses qui permettent aux enfants de se représenter la mort et l’au-delà au travers de mots ou d’images, ce qu’a bien constaté Lonetto (1988) en analysant des dessins d’enfants.

La composante affective
On constate que la construction du concept de mort est fortement influencée par les réponses ou non réponses données ainsi que par les croyances propres à l’enfant ou à son milieu. Face à la prise de conscience progressive des implications que la mort engendre, l’enfant doit faire face à des émotions, des angoisses ou des peurs renforcés par le dialogue instauré ou refusé (Fawer Caputo, 2009). n« Isolés, les enfants parlent de la mort entre eux, car ils ne la considèrent pas comme un tabou, mais comme un sujet riche de sens » (Abras, 2003, p. 667). Un des moyens que les enfants utilisent pour l’exprimer, l’expérimenter, l’assimiler est le recours aux jeux symboliques, jeux du faire semblant où ils peuvent mettre en scène leurs questions et leurs angoisses. Faire le mort, c’est dans un sens copier la forme de l’objet ou le déroulement d’un phénomène tandis que jouer à faire le mort, c’est attribuer au réel ou à une situation des significations qui se plient au bon vouloir du sujet. Ainsi, par ces processus d’accommodation et d’assimilation, l’enfant peut s’approprier entre pairs le monde extérieur, s’approprier le thème de la mort et canaliser ses angoisses. Selon Ferrari (1994, p 28), le besoin de représenter la mort au travers de l’utilisation du fantôme, du squelette, etc. est un moyen que les enfants ont pour maîtriser l’horreur qu’inspirent la décomposition du corps et son devenir, et pour faire en sorte que quelque chose subsiste. Cependant, l’utilisation de ces symboles peut également représenter, comme pour les jeux symboliques, le questionnement de l’enfant sur la mort, la vie et le devenir du corps. C’est aussi avoir l’illusion qu’on peut maîtriser la mort, lui échapper ou l’enfermer, du moment qu’on la matérialise.

Le concept de la mort : âge par âge

  Au travers de son milieu, de ses expériences, des personnes qu’ils côtoient, l’enfant donne une signification à la mort qui évoluera en fonction de son âge et de sa maturité. Voici ci-dessous une description des conceptions que peuvent avoir les enfants par tranches d’âge.
0-3 ans
Pour entrer en contact avec le monde, un enfant de cet âge est dépendant des mouvements qu’il fait et des sensations qu’il éprouve. C’est ainsi qu’il découvrira peu à peu les caractéristiques des objets, saisira la notion de permanence de l’objet et comprendra que ce dernier continue d’exister lorsqu’il sort de son champ de vision (Olds & Papalia, 2005). Jusqu’à 2 ans environ, l’enfant n’a pas de compréhension de l’idée de mort. N’ayant pas encore structuré la notion de temporalité, ce dernier peut difficilement déterminer le temps. Cependant l’alternance du rythme entre les états de veille et de sommeil lui permettra de concevoir divers états d’existence d’être et de non-être (Lonetto,1988). C’est seulement vers 2-3 ans que la séparation ou l’absence peut être liée à l’idée de la mort (Encrevé-Lambert, 2003).
3-6 ans
L’évolution de la pensée des enfants de cette tranche d’âge se caractérise par l’utilisation croissante de la pensée symbolique et la progression de ses capacités de représentation. L’enfant devient apte à penser à un objet, à se le représenter mentalement, à le nommer et à communiquer à son sujet. Il met en place des notions de quantité, d’espace et fait la distinction entre le passé et l’avenir.Toutefois, il reste orienté vers le présent et les situations physiques concrètes ayant des difficultés à manipuler des concepts abstraits. Sa pensée est égocentrique car l’enfant perçoit le monde et l’explique à partir de son propre point de vue, ce qui rend impossible la prise en compte de points de vue d’autres personnes (Olds et Papalia, 2005).L’enfant connaît déjà le mot mort mais celle-ci n’est pas imaginée comme un phénomène définitif.En effet, le fait de vivre quotidiennement une suite d’événements répétitifs fait, qu’à ce momentlà du développement de l’enfant, le temps est perçu comme cyclique et répétitif. Il en résulte qu’au niveau de la conception de la mort, l’enfant croit qu’on vit, qu’on meurt et que cela peut recommencer (Lonetto, 1988). La mort est toujours conçue comme une séparation mais provisoire. C’est pourquoi l’enfant peut nous sembler peu affecté émotionnellement. Au niveau des sentiments, ce sera surtout l’anxiété face à une séparation ou la peur de l’abandon qui va dominer (Fawer Caputo, 2013). Des sentiments de culpabilité peuvent aussi surgir car en fonction de son égocentrisme et de l’effet de la pensée magique qui l’anime, l’enfant croit avoir un pouvoir sur les événements (Encrevé-Lambert, 2003).La pensée magique provoque chez l’enfant la croyance qu’il suffit de vouloir très fort quelque chose pour que cela arrive. Il ne s’agit pas là d’une confusion entre imaginaire et réalité mais d’une pensée des enfants âgés de 3 à 5 ans qui leur permet d’interpréter des événements pour  lesquels ils n’ont pas d’explications objectives (Olds et Papalia, 2005). Ainsi, l’enfant  peut réellement s’imaginer être capable de tuer quelqu’un par son simple désir ou le seul fait de sa pensée (Encrevé-Lambert, 2003).L’animisme est une croyance qui teinte également la pensée des jeunes enfants. C’est ce qui explique pourquoi ces derniers confèrent aux objets inanimés des caractéristiques humaines. Cette croyance explique les difficultés que les enfants de cet âge ont parfois à identifier l’animé, l’inanimé et le fait de vivre et qu’ils attribuent également vie et volonté aux objets inanimés (Olds et Papalia, 2005). C’est seulement vers 7 ans que l’enfant attribuera une volonté aux objets mobiles. Après 8 ans, seuls les objets qui se meuvent par eux-mêmes se voient encore attribuer une volonté. Ainsi, une voiture peut mourir lors d’un accident. La causalité est aussi un concept capital dans la phase de maturation intellectuelle. Elle débute quand l’enfant passe du stade des « c’est quoi » à celui des « pourquoi ». L’enfant est alors mû par le vif intérêt qu’il porte sur le monde. Ce faisant, il tente d’établir des liens entre « son moi » subjectif et le monde objectif. Pour le jeune enfant, la mort est souvent inexplicable. Vers 5 ans, l’enfant comprend toutefois que les autres vont mourir, comme par exemple, les personnes âgées. La mort n’a pas encore une réalité universelle car l’enfant n’a pas conscience que tous les êtres vivants vont mourir et que lui aussi est mortel (Lonetto, 1998 ; Hofer, 2004).Avec sa manière de penser très concrète, il peut s’inquiéter du bien-être de la personne décédée et prendre les explications des adultes comme « Grand-maman est partie au ciel » pour une réalité, attendre sa visite ou demander à lui rendre visite car pour lui, le ciel peut être un lieu concret (Encrevé-Lambert, 2003, p. 59). Souvent, pour les jeunes enfants de cet âge, l’être mort peut continuer à posséder des qualités physiques comme les vivants et peut entendre, voir ou même revenir. Cette notion d’irréversibilité ou d’irrévocabilité de la mort sera acquise plus tard quand l’enfant comprendra que lorsqu’on meurt, le corps ne peut revivre à nouveau (Hofer, 2004).
6-9 ans
Du point de vue cognitif, c’est entre 6-7 ans que l’enfant accède à une pensée logique. Il devient capable d’envisager des évènements qui surviennent en dehors de sa propre vie, de conceptualiser, de créer des raisonnements logiques inductifs ou déductifs qui nécessitent cependant un rapport direct avec le concret. Beaucoup moins égocentrique, l’enfant peut maintenant se décentrer et tenir compte de plusieurs aspects d’une situation (Olds et Papalia, 2005).Vers 8 ans, il sait que les êtres humains sont mortels et qu’il va donc lui aussi mourir. Cette notion d’universalité ou d’inévitabilité de la mort dépend du fait que l’enfant a acquis une certaine conscience de soi. Il ressent qu’il ne peut échapper à toutes les causes de la mort, qu’il va vieillir et que dans l’avenir, il va mourir (Lonetto, 1988). Sa représentation de la mort est aussi renforcée par une meilleure maîtrise de la notion de causalité et de temporalité. Un enfant de 7 ans arrive à discerner les causes extérieures de la mort comme la vieillesse, l’accident, la maladie, les incendies, les guerres, le meurtre, etc. (Lonetto, 1988 ; Hofer, 2004). Avec les années, une conception linéaire comme celle des adultes apparaît avec comme point de départ la naissance et celui d’arrivée la mort (Lonetto, 1988).Il prend conscience de l’irréversibilité de la mort. Ces notions sont acquises quand l’enfant comprend que lorsqu’on meurt, le corps ne peut revivre à nouveau. Il est important ici de faire la distinction entre les croyances en une vie spirituelle et la non-fonctionnalité du corps (Hofer, 2004).Il comprend mieux les effets que la mort occasionne sur celui-ci. Son intérêt dans ce domaine ira en grandissant. Le devenir du corps après la mort peut générer des peurs. A ce stade, l’enfant comprend mieux les implications qu’a le décès au niveau de la séparation. La tendance à personnifier la mort au travers de fantômes, de squelettes ou de monstres est d’ailleurs une manière d’enfermer celle-ci afin de se donner l’impression de pouvoir y échapper (Lonetto, 1988).Il peut exprimer son ressenti et avoir de l’empathie. Des sentiments de culpabilité ou deresponsabilité peuvent toutefois subsister. Son attitude se calque de plus en plus sur le modèle de l’adulte (Fawer Caputo, 2013).
9-12 ans
C’est durant le stade des opérations formelles que l’enfant, par sa capacité à faire des raisonnements hypothético-déductifs et d’établir des relations abstraites, acquiert une pensée proche des adultes. L’enfant est dans une phase concrète et réaliste de l’intellectualisation de la mort. Il va s’intéresser de près aux causes de cette dernière, au fonctionnement du corps, à son devenir et développer un intérêt macabre pour l’après-mort. La mort devient effrayante mais aussi fascinante (Fawer Caputo, 2013). Vers l’âge de 10 ans, il comprend que celle-ci peut être liée à des processus internes comme le cancer, le Sida, etc. et qu’elle est associée à la cessation des fonctions corporelles (Lonetto, 1998 ; Hofer, 2004).L’enfant s’approche des critères des adultes. Il a atteint sa maturité émotionnelle et l’expression de celle-ci peut différer selon les sexes (Fawer Caputo, 2013).

Classe de 2P

Pré-test
Lorsque les enfants ont répondu aux questions concernant l’irréversibilité, tous sont unanimes pour dire qu’on ne peut plus revoir les personnes mortes. Toutefois, quand il s’agit de savoir si on peut les faire revenir, les avis deviennent plus nuancés.E3, E5 savent qu’ils ne peuvent plus revenir. E2 sait qu’ils ne peuvent plus revenir mais qu’on peut s’en souvenir: «
Non, mais à l’église, on peut les voir juste parce qu’il y a un carré et savoir ce qu’ils faisaient parce que c’est marqué dessus. » E7, E8 pensent que les morts ne peuvent plus revenir mais n’en sont pas sûrs. E4 admet qu’une personne peut revenir à la vie « si on fait retourner les heures en arrière. » E1 est très catégorique en disant « une fois qu’on est mort, on est toujours mort », mais exprime dans un dessin qu’on peut soigner les morts quand arrive l’ambulance. Lonetto (1998) relève que les enfants de cet âge sont assez confus quant au rôle de l’hôpital. Vers 5 et 6 ans, ils croient encore en la nature cyclique de la vie et de la mort, aidée ou non par une intervention médicale où par la naissance de bébés (Lonetto, 1998). E6 énonce d’ailleurs cette idée de manière très confuse en parlant de « bébés du ventre … s’ils grandissent, c’est une maman ou un garçon … A la fin de la vie, ils meurent. »Tous les enfants disent que les morts vont au ciel mais ils ne savent ce qu’ils y font ou ne peuvent pas donner de réponses. E6 dit qu’« ils restent couchés ». E4 précise que « c’est pour surveiller les petits enfants ». Comme le relève Deunff (2001), les enfants sont les témoins des concepts religieux ou sociaux du milieu dans lequel ils vivent. Ils relaient, par leur interprétation ou au travers de leur expérience, les dires des adultes sur leur croyance. Ainsi, il est normal de constater que des élèves d’un milieu catholique conçoivent que les morts montent au ciel, sans pour autant se poser de questions, puisque c’est une croyance dans l’au-delà transmise par l’entourage. Toutes les cultures socialisent la mort au travers de rites. Cependant, certains adultes rechignent à y intégrer les enfants. Ils repoussent dans le temps les informations ou opposent le silence contre un thème par nature opposé à l’enfance, porteuse d’espoir et de vie (Deunff, 2001). Ainsi, sur le devenir du corps, seuls E2, E4, E6 parlent du fait que l’on enterre les gens morts avant qu’ils montent au ciel. Selon E1, E2, E3, E5, il est clair que les morts ne peuvent plus entendre, voir, penser, se déplacer ou bouger. Pour quatre enfants, les morts gardent cependant quelques fonctionnalités. Ainsi, E4 pense que les morts peuvent entendre et voir. E6, E7, E8 croient qu’ils sont encore capables de penser. Tous, sauf E9 qui ne sait pas si les morts gardent ou non des capacités physiques, savent cependant que ces derniers ne peuvent ni bouger, ni se déplacer. Cela s’explique car chez les enfants de cet âge, le mouvement est associé à la vie (Lonetto, 1998). Il est parfois difficile de situer les connaissances et les croyances des élèves. E2, par exemple, affirme dans un premier temps que les morts ne gardent aucune fonctionnalité mais dans son dessin, le mort appelle sa maman. Comme le relèvent diverses recherches sur les représentations de la mort (Hoffer, 2004), jusqu’à huit ans, les enfants ne possèdent pas, selon les normes des adultes, de concepts logiques ou biologiques corrects pour expliquer la mort.

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Table des matières

1. Introduction
2. Cadre théorique

2.1. Les représentations de la mort chez l’enfant
2.1.1. Définition du concept « représentation »
2.1.2. Composantes des représentations de la mort chez l’enfant
2.1.2.1. La composante cognitivo-développementale
2.1.2.2. La composante environnementale
a) Influences sociales et familiales
b) Influences religieuses
2.1.2.3. La composante affective
2.2. Le concept de la mort : âge par âge
2.3. Lien avec les âges des enfants de notre étude
2.4. La philosophie enfantine

3. Méthode
3.1. Question de recherche
3.2. Contexte scolaire

3.2.1. Questions sensibles
3.2.2. Enjeux d’une éducation à la mort
3.3. Hypothèses
3.4. Description des éléments de la recherche sur les représentations

3.4.1. Description de l’échantillonnage de la population
3.4.2. Méthode de récolte des données
3.4.3. Description de la séquence
3.4.3.1. Déroulement de la séquence dans la classe de 2P
3.4.3.2. Déroulement de la séquence dans la classe de 5P
4. Résultats et discussions
4.1. Analyse et discussion autour des éléments récoltés lors des entretiens
4.1.1. Universalité
4.1.1.1. Classe de 2P
4.1.1.2. Classe de 5P.
4.1.2. Inévitabilité

4.1.2.1. Classe de 2P
4.1.2.2. Classe de 5P
4.1.3. Irréversibilité
4.1.3.1. Classe de 2P
4.1.3.2. Classe de 5P
4.2. Synthèse finale
4.2.1. Evolution des représentations et conceptions des enfants
4.2.2. Evolution des ressentis face au thème de la mort
4.2.3. Limites de notre recherche
4.2.4. Analyse et discussion autour de la séquence
5. Conclusion
6. Bibliographie
7. Plan des annexes

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