La bronchiolite oblitérante post-infectieuse (BOPI) est une complication peu fréquente mais très probablement sous-diagnostiquée des infections respiratoires basses surtout chez le jeune enfant. Sa symptomatologie est très proche de celle de l’asthme sévère, surtout dans la petite enfance, et la proportion de patients sous-diagnostiqués pourrait se retrouver en grande partie dans cette population. La morbidité associée est importante avec une atteinte fonctionnelle évolutive allant de la simple dyspnée d’effort à l’insuffisance respiratoire chronique et la transplantation pulmonaire. La première description d’un cas de bronchiolite oblitérante a été faite en 1901 par Lange [1] mais il reste beaucoup d’aspect de cette maladie incomplètement élucidés. Le traitement n’est pas consensuel mais certains auteurs ont montré une efficacité des corticoïdes per-os à la phase initiale du traitement pour contrer la réponse inflammatoire fibroblastique [2,3,4]. Le même raisonnement a été repris par d’autres auteurs pour justifier d’un traitement par boli de méthylprednisolone IV à forte dose (ou pulsothérapie) en cures mensuelles de 3 jours, avec une tendance à l’amélioration clinique lorsque celle-ci était débutée précocement [2]. Aucun essai clinique n’a, à ce jour, été réalisé pour évaluer le bénéfice de ce traitement.
Généralités sur la bronchiolite oblitérante post-infectieuse de l’enfant (BOPI)
Epidémiologie et facteur de risque
On retrouve peu de données épidémiologiques précises concernant la BOPI de l’enfant, dans la mesure où celle-ci est souvent sous-diagnostiquée. En effet, elle fait suite à une infection respiratoire basse du jeune enfant qui survient dans 10% des cas dans la première année de vie. On estime que 1% de cette population est susceptible de développer une BOPI [5]. Néanmoins, elle a été principalement décrite dans l’hémisphère Sud (Argentine, Brésil, Chili et Nouvelle-Zélande) [6,7,8], et de manière plus exceptionnelle en Europe, aux Etats-Unis, et en Asie [2,4, 9, 10,11, 12]. On observe une augmentation du nombre de cas rapportés dans ces régions depuis quelques années.
L’apparition de cette bronchopathie chronique obstructive est le plus fréquemment associée à une infection par adénovirus, notamment les sérotypes 3, 7 et 21 [9,13]. Certaines études évoquent une évolution vers la BOPI dans 30 à 60% des infections à adénovirus. Des études épidémiologiques menées en Amérique du Sud au début des années 90 ont montré une augmentation de la prévalence du sérotype 7 en Argentine, au Chili et en Uruguay, ce qui aboutit probablement à l’augmentation de prévalence de la BOPI dans cette région [1,14]. Par la suite il a été noté une diminution des épidémies de BOPI post-adénovirus et des phénomènes d’adaptation du virus et de la réponse immunitaire de l’hôte ont été incriminés .
D’autres agents infectieux sont impliqués tels que le virus de la grippe, de la rougeole, le parainfluenzae, le metapneumovirus ou encore le mycoplasma pneumoniae, notamment lorsqu’il se complique d’un syndrome de Stevens Johnson [2,15]. Le virus respiratoire syncitial (VRS) a été identifié jusqu’à 30% des cas [4]. La co-infection virale, notamment avec l’adénovirus, pourrait favoriser le développement de la BOPI lors d’une infection à VRS .
D’autres facteurs de risque d’évolution vers une BOPI ont été récemment suggérés:
◈ La prédisposition génétique : l’étude de Teper et al [1] a mis en évidence une surreprésentation de l’haplotype HLA DQB1*0302 chez les patients atteints de BOPI en Argentine.
◈ La sévérité de l’épisode initial : une hospitalisation prolongée [13], une atteinte pulmonaire multifocale [13], un recours à la ventilation mécanique (risque multiplié par 11 selon Colon et al [17]) bien que cet acte pourrait aussi contribuer à l’aggravation des lésions.
◈ Une augmentation du taux sanguin d’IgE a été retrouvée chez ces patients [18]. Ces molécules ne sont pourtant pas actuellement connues comme étant impliquées dans le phénomène d’obstruction bronchique de cette pathologie.
Aucun autre facteur de risque classique des pathologies respiratoires de l’enfant tels que l’âge, le sexe ou encore l’environnement (tabagisme passif, humidité, garde en collectivité…) n’a été identifié comme favorisant l’évolution vers la BOPI.
Définition histologique
La lésion initiale correspond à une nécrose de l’épithélium bronchiolaire associée à une infiltration inflammatoire des muqueuses et sous-muqueuses des petites bronches. Ces phénomènes inflammatoires et fibrosants aboutissent à une cicatrisation oblitérante des petites voies aériennes .
On distingue deux types histologiques de BOPI dont les processus sont résumés
❖ La bronchiolite proliférative est caractérisée par l’obstruction bronchiolaire par du tissu cicatriciel granuleux, formant des masses polypoïdes. La bronchiolite oblitérante avec pneumonie organisée (BOOP) se distingue par la présence de tissu de granulation intraalvéolaire, aussi appelée Pneumonie en organisation cryptogénique [19] . Cette forme est peu fréquente chez l’enfant.
❖ La bronchiolite constrictive est la forme la plus fréquente [19]. Le processus inflammatoire aboutit à une cicatrisation sous forme de fibrose concentrique, conduisant à l’obstruction partielle ou totale des petites voies aériennes. Le parenchyme pulmonaire est relativement épargné dans cette forme. Les lésions ont une distribution hétérogène, pouvant rendre le diagnostic anatomopathologique difficile [20]. D’autres lésions, indirectes, sont retrouvées comme les mucocèles, les déformations voire dilatations des bronches ainsi que des altérations des voies aériennes de moyen et gros calibre simultanées ou secondaires aux infections à répétition.
Pathogénèse
Le rôle spécifique de chaque cellule dans la génèse de la BOPI n’est pas encore totalement connu. On sait néanmoins qu’il persiste au sein de l’épithélium bronchique des phénomènes inflammatoires impliquant probablement les lymphocytes T CD8+ [20]. Ceux-ci peuvent produire des cytokines (perforines) et activer d’autres cellules inflammatoires (lymphocytes B via les granzymes) altérant l’épithélium bronchique [22]. En 2007, Koh et al. [23] ont réalisé une étude du LBA chez les patients atteints de BOPI qui retrouvait une inflammation neutrophilique non spécifique, une discrète augmentation de l’IL-8 (chémokine qui permet l’attraction des polynucléaires neutrophiles) à distance de l’infection initiale.
Comme pour la plupart des pathologies peu fréquentes et mal connues, le modèle animal apparait comme une piste d’exploration des mécanismes anatomopathologiques en cause. Plusieurs modèles murins ont été crées [24] reproduisant les lésions de bronchiolite oblitérante, mais aucun n’a permis d’explorer les lésions post infectieuses.
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Table des matières
I- INTRODUCTION
II- GENERALITES
i. Epidémiologie et facteurs de risques
ii. Définition histologique
iii. Pathogénèse
iv. Présentation clinique et diagnostic
v. Diagnostic différentiel
vi. Imagerie et BOPI
vii. Investigations fibroscopiques
viii. Explorations fonctionnelles respiratoires
ix. Biopsie pulmonaire
x. Autres examens complémentaires
xi. Traitements
xii. Evolution et pronostic
III- ETUDE CAS-TEMOINS SUR L’EVOLUTION DE 36 PATIENTS ATTEINTS DE BOPI ET TRAITES PAR BOLI DE METHYLPREDNISOLONE
i. Patients et méthode
ii. Résultats
iii. Discussion
iv. Conclusion
v. Bibliographie
ANNEXES