Evolution des concepts de restauration de la dent delabree

La dentisterie moderne s’inscrit désormais dans une volonté de conservation et d’économie tissulaire ayant pour objectif de préserver le complexe pulpodentinaire lorsque cela est encore possible et, dans tous les cas, de prolonger l’espérance de vie sur arcade de la dent délabrée. Auparavant, la restauration des dents délabrées reposait sur des critères macro et micromécaniques et la majorité des publications qui abordaient le cas de la dent dépulpée faisait référence aux reconstitutions corono-radiculaires à tenon et aux couronnes périphériques. La dent dépulpée était alors considérée comme plus fragile que la dent pulpée.

Dans la dentisterie contemporaine actuelle, il n’y a pas de réel changement de paradigme car la dentisterie adhésive est présente depuis déjà longtemps, mais nous verrons que celle-ci a évolué et qu’il est maintenant envisageable de restaurer la dent délabrée (en particulier dépulpée) autrement grâce à des restaurations plus conservatrices des tissus dentaires et qui répondent aux objectifs biologiques, mécaniques et esthétiques modernes. Ainsi, il appartient à chaque praticien, face au délabrement d’une dent, qu’elle soit pulpée ou dépulpée, de se poser la question suivante : « Comment dois-je la restaurer ? », l’objectif étant de maintenir la dent le plus longtemps possible sur l’arcade. Un ancrage radiculaire est-il nécessaire ? Le collage d’une pièce prothétique est-il possible dans des conditions optimales ? Ou au contraire un cerclage périphérique et une prothèse scellée sont-ils indispensables ? Ces différents types de restaurations s’inscrivent au sein d’un gradient thérapeutique, du moins délabrant ou au plus délabrant. Le praticien se doit d’évaluer les différents éléments lui permettant de choisir quelle restauration mettre en œuvre. Les critères de choix sont multiples et ce n’est plus la présence d’un traitement endodontique qui guide le praticien mais la perte de substance dentaire. En effet, nous verrons dans ce travail de revue de la littérature que, face à une dent ayant subi un traitement endodontique, l’ancrage n’est plus forcément indispensable pour la survie de la dent, et le praticien pourra choisir parmi différentes alternatives de reconstitution notamment les restaurations adhésives.

EVOLUTION DES CONCEPTS DE RESTAURATION DE LA DENT DELABREE

Une dentisterie à minima grâce à l’évolution des techniques et des approches

La deuxième moitié du XXe siècle correspond à une époque où les matériaux prothétiques disponibles étaient seulement assemblés par scellement. La forme des préparations devait assurer la rétention de la restauration obtenue grâce à des phénomènes micromécaniques de friction entre surfaces rugueuses. Les ciments utilisés assuraient seulement une fonction de joint d’étanchéité. L’ensemble des principes de rétention entraînaient un délabrement tissulaire conséquent. La découverte du collage à l’émail grâce au mordançage à l’acide par Michael Buonocore en 1995 entraine une révolution dans le monde de la dentisterie, on parle alors de dentisterie adhésive. Cette révolution se poursuit depuis 50 ans avec notamment la mise au point de matériaux pouvant être collés tels que les résines composites et la céramique. La dentisterie adhésive existe donc depuis longtemps et permet de diminuer grandement le coût tissulaire inhérent à la préparation des dents. Si les préparations coronopériphériques rétentives gardent certaines indications, le collage s’impose désormais comme un moyen moderne et incontournable de restaurer les dents. Pour autant, certaines règles d’usage doivent être respectées.

Adhésion et collage
L’adhésion est l’union d’une surface à une autre avec laquelle elle est en contact intime. Elle peut donc être définie comme la force qui lie deux matériaux de natures différentes mis en contact intime. Celle-ci diffère de la cohésion qui est l’attraction entre atomes ou molécules d’une même substance. Le succès par collage adhésif va tenir fondamentalement sur l’utilisation d’un système adhésif fiable.

D’après le Dictionnaire francophone des termes d’odontologie conservatrice, un système adhésif est l’ensemble des produits permettant, selon un protocole d’utilisation précis, de développer avec un substrat un phénomène d’adhésion. L’adhésif constitue donc l’interface entre le matériau de restauration et les tissus dentaires, il doit permettre un assemblage résistant des deux surfaces.

• Au niveau de l’émail : la surface de l’émail est lisse, non rugueuse et donc non rétentive, ce qui empêche le contact intime entre la dent et le matériau de restauration. C’est grâce au mordançage qu’un collage optimal est possible, entraînant la déminéralisation de l’émail. En effet, la surface de collage et la rétention micromécanique sont augmentées. C’est sur l’émail que le collage est le plus fort.
• Au niveau de la dentine : le fluide dentinaire contenu dans les tubuli confère à la dentine une humidité intrinsèque ce qui explique la complexité d’un collage durable sur ce substrat. De plus, la dentine est sécrétée tout au long de la vie et elle évolue continuellement en raison de modifications physiologiques et pathologiques. A chaque passage d’instrument, une boue dentinaire est laissée en surface. Le mordançage de la dentine va entraîner l’exposition de la trame collagénique, et éliminer les boues dentinaires défavorables à un collage efficace.

Le collage présente des avantages sur le plan biologique, mécanique et esthétique :
– Sur le plan biologique, l’adhésion permet une étanchéité qui s’oppose à l’infiltration interfaciale des fluides buccaux et de leur contenu bactérien ce qui permet une préservation de l’intégrité pulpaire.
– Sur le plan mécanique, il n’est plus nécessaire de créer des zones de contredépouille auparavant nécessaires à la rétention du matériau, ceci permet donc une économie tissulaire non négligeable. De plus, le joint collé présente la capacité de mieux répartir les contraintes occlusales sur les surfaces d’assemblage, la dent restaurée est renforcée.
– Sur le plan esthétique, les restaurations coronaires partielles sont intégrées de par leurs propriétés optiques et leur apparence, notamment grâce aux bio polymères employés qui ont un indice de réfraction et une couleur avoisinant ceux des tissus dentaires calcifiés.

Les techniques adhésives ont permis l’abandon des principes de rétention et de forme de résistance, et l’application du principe de préservation absolue des tissus sains en indiquant des restaurations partielles dans de nombreuses situations, que la dent soit pulpée ou dépulpée. Avec l’amélioration des matériaux de restauration et des protocoles de collage, c’est l’ensemble du complexe émail-dentine qui va pouvoir être imité, pour obtenir un biomimétisme.

Le concept « biomimétique »

Lorsque nous regardons une dent nous retrouvons toujours la même structure :
– L’émail convexe, qui procure à la dent la résistance nécessaire en servant de coquille protectrice à la dentine,
– La dentine marquée par des reliefs concaves et aiguisés procurant un support stable à la couche amélaire,
– Et enfin la jonction amélo-dentinaire qui associe et unie ces deux éléments.

C’est de cette étude histo-anatomique des tissus de la dent que découle le concept de la « biomimétique » ou « bioémulation » de Magne P. et Belser U. en 2003. Le but est d’utiliser des matériaux qui vont se rapprocher le plus de ce que nous avons avec la dent tant sur le plan physiologique que biomécanique et ainsi constituer une unité fonctionnelle. Plus précisément, le concept de biomimétique consiste à imiter et reproduire la nature, le modèle de référence étant ici la dent naturelle.

Pour résumer nous retrouvons 3 attitudes primordiales et liées, décrivant la notion de biomimétique de Magne :
– Observer la dent naturelle dans son ensemble c’est-à-dire sa fonction, sa biologie, sa biomécanique ou encore ses propriétés optiques,
– Respecter la dent naturelle par des préparations à minima des tissus,
– Copier la dent naturelle par l’utilisation des nouveaux matériaux et du principe d’adhésion.

Par la compréhension des principes de la biomimétique, la dentisterie actuelle doit éviter au maximum les dommages pulpaires et les dépulpations excessives, et doit envisager la couronne unitaire plutôt dans le cadre d’une réintervention, en dehors de ses indications . Ceci devient possible grâce à l’évolution des techniques adhésives que nous avons décrites précédemment, et au développement des matériaux composites et céramiques. Ainsi l’utilisation de ce principe sera indispensable au moment de l’analyse des tissus dentaires, lors de l’élimination d’une lésion carieuse, lors d’un traumatisme ou encore à la suite de la dépose d’une ancienne restauration afin de guider le praticien dans le choix de la thérapeutique.

Néanmoins, la dentisterie adhésive reste compliquée à appliquer et les matériaux actuels même s’ils se rapprochent de la dent naturelle, sont encore éloignés en certains points. Nous ne pouvons pas restaurer complètement la dent dans son état biomécanique originel, il faut donc connaître les différentes thérapeutiques qui s’offrent à nous ainsi que les critères à prendre en compte dans notre choix afin d’en connaître aussi les limites.

Le gradient thérapeutique

Définition et description 

C’est dans une optique de « préservation tissulaire » et de dentisterie adhésive que s’inscrit un nouveau concept : le gradient thérapeutique. Dans un premier temps proposé sous le nom de « puzzle physiologique » par Pascal Magne et Urs Belser et ensuite décrit par Gil Tirlet et Jean-Pierre Attal, ce concept a pour but de guider la réflexion du praticien en proposant un arsenal de thérapeutiques allant de la moins à la plus mutilante . Dans un contexte où la demande esthétique est grandissante, le praticien cherchera alors à y répondre tout en proposant le traitement le moins mutilant. L’objectif principal est de conserver le plus possible les tissus dentaires sains, ainsi que l’anatomie naturelle des dents. Un classement a pu alors être mis en place sur un axe horizontal, de la moins à la plus mutilante des thérapeutiques. Est alors proposé au patient la solution la plus préservatrice de tissus sains, les ré interventions seront possibles tout au long de la vie. En effet en cas d’échec, il sera possible d’appliquer la thérapie suivante du gradient thérapeutique. Dans le schéma ci-dessous, nous retrouverons les différentes possibilités thérapeutiques dans la restauration des dents délabrées que celles-ci soient pulpées ou dépulpées, dans un but de conservation tissulaire.

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Table des matières

INTRODUCTION
1.EVOLUTION DES CONCEPTS DE RESTAURATION DE LA DENT DELABREE
1.1. Une dentisterie à minima grâce à l’évolution des techniques et des approches
1.1.1. Adhésion et collage
1.1.2. Le concept « biomimétique »
1.2. Le gradient thérapeutique
1.2.1. Définition et description
1.2.2. Options thérapeutiques
1.3. Le concept « No post – No crown » : définition et description
2.ASPECT BIOLOGIQUE ET BIOMECANIQUE DE LA DENT SAINE ET DE LA DENT DELABREE
2.1. Aspect biomécanique de la dent saine
2.2. Aspect biomécanique de la dent délabrée
2.2.1. Perte de substance
2.2.2. La cavité d’accès endodontique
2.2.3. Le logement canalaire
2.2.4. Les effets des produits endodontiques sur la résistance mécanique
2.2.5. A la recherche de l’effet de ferrule
2.3. Aspect biologique et histologique de la dent délabrée
2.3.1. Au niveau de la dent pulpée
2.3.2. Au niveau de la dent dépulpée
3.AVANTAGES, INCONVENIENTS ET INDICATIONS DES DIFFERENTS TYPES DE RESTAURATION
3.1. Restaurations directes en résine composite
3.2. Restaurations partielles collées indirectes (inlays/onlays/overlays)
3.3. Le cas des restaurations périphériques totales : l’endocouronne
3.4. Restaurations corono-radiculaires foulées
3.5. Restaurations corono-radiculaires coulées (inlay-core)
4.CRITERES DECISIONNELS ET ARBRE DECISIONNEL
4.1. Critères décisionnels principaux
4.1.1. Etendue et topographie de la perte de substance
4.1.2. L’aptitude au collage
4.1.3. Critères fonctionnels
4.2. Critères décisionnels secondaires
4.2.1. L’esthétique
4.2.2. La motivation et l’hygiène du patient
4.2.3. Age du patient et ancienneté de la dépulpation
4.2.4. Consentement éclairé et aspect financier
4.3. Arbre décisionnel
CONCLUSION
LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX
BIBLIOGRAPHIE

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