EVOLUTION DE L’ELEVAGE BOVIN DE 1970 A 2000

EVOLUTION DE L’ELEVAGE BOVIN DE 1970 A 2000

LES ANNEES 1990 : LES GRANDES REFORMES

Un nouveau contexte gรฉnรฉral

Les annรฉes 1990 marquent un tournant dans la conception de l’agriculture en France et en Europe. L’agriculture franรงaise et europรฉenne se trouve en effet dans une situation รฉconomique, รฉcologique, sociale et culturelle plutรด difficile.
Economiquement, la PAC reste un poste budgรฉtaire trรจs lourd, malgrรฉ les efforts de rationalisation consentis. L’agriculture voit s’accroรฎtre l’importance de nouvelles rรจgles, comme celles relatives au respect et au bien-รชtre nimal. La remise en cause du modรจle dit productiviste des annรฉes 1960-1970 est de plus en plus forte. La mรฉfiance des consommateurs dans l’agriculture, amorcรฉe dรจs les annรฉes 1980 avec la crise du veau aux hormones, s’est poursuivie dans les annรฉes 1990 avec les crises de l’encรฉphalopathie spongiforme bovine (ESB). Enfin, socialement et culturellement, la baisse de la part relative des agriculteurs en France se fait de plus en plus ressentir : ils ne reprรฉsentent que 6 % des actifs et 13 % des ruraux en 1990, et sont de plus en plus isolรฉs (Jussiau, 1999).La PAC a besoin d’รชtre rรฉformรฉe : les garanties deprix directement liรฉes ร  la production soutiennent une augmentation continue de celle-ci, alors que les marchรฉs sont dรฉjร  saturรฉs. Par ailleurs, les mรฉcanismes en place onttendance ร  accroรฎtre l’intensification des productions et le soutien global en hausse ne permet pas pour autant d’amรฉliorer les revenus des agriculteurs de faรงon stable (Chatellier, 2003) .

Deux grandes rรฉformes trรจs rapprochรฉes

La rรฉforme de la PAC de 1992 : l’avรจnement des aides directes

Adoptรฉe le 21 mai 1992, la seconde PAC (PAC 2) constitue un tournant dans lโ€™รฉvolution du monde de lโ€™รฉlevage en France et en Europe. Pour assainir les marchรฉs et ajuster lโ€™offre ร  la demande, la PAC 2 veut ยซย appliquer une politique restrictive pour donner des signes clairs aux producteurs et transfรฉrer partielement le soutien au revenu par lโ€™OCM vers celui des aides directes aux revenusย ยป. L’objectif est de baisser le coรปt de l’intervention (MAAPAR, 2003).Pour l’OCM bovine, la baisse de 15 % des prix d’intervention sur trois campagnes est compensรฉe par des aides directes. Laprime spรฉciale au bovin mรขle (PSBM) et la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA), bien qu’existant dรฉjร  avant 1992, constituent les principaux รฉlรฉments de cette rรฉforme avec une forte revalorisation progressive de leurs montants (tableau 7). Leur attribution dรฉpend du chargement de l’exploitation ; des seuils sont dรฉfinis. Le complรฉment extensifications’ajoute ร  la PMTVA et PSBM pour les exploitations dont le chargement est le plus faible (tableau 7).La maรฎtrise de la production et des dรฉpenses repose sur un quota national de jeunes bovins primรฉs, plafonnรฉ ร  90 tรชtes par exploitation, et un quota individuel par exploitation de vaches allaitantes . Les rรฉfรฉrences pour ces deux rimesp sont basรฉes sur l’annรฉe 1992.Des mesures parallรจles prรฉvoient des facilitรฉs pourla cessation dโ€™activitรฉ ร  partir de 55 ans.En 1996, face ร  la crise de l’ESB, des mesures complรฉmentaires ont รฉtรฉ prises. Elles concernent le retrait de viande, une augmentation de la limite de l’intervention, une prime d’abattage des veaux de moins de 20 jours et la revalorisation des primes PMTVA et PSBM (MAAPAR, 2003).Le retour ร  un marchรฉ รฉquilibrรฉ a permis la diminution des stocks et une augmentation des revenus des รฉleveurs dans les annรฉes suivant larรฉforme. Cependant, la PAC 2 n’a que partiellement atteint ses objectifs. En effet, au dรฉbut des annรฉes 1990, le systรจme de garantie des prix aboutit ร  un accroissement de productivitรฉ et de production. La rรฉpartition des aides est inรฉgale et favorise encore globalement les productions les plus intensives. En effet, le secteur des cรฉrรฉales perรงoit une forte part des aides, ce qui favorise indirectement des productions animales les plus intensives (filiรจres avicole et porcine) au dรฉtriment par exemple des filiรจres bovines. Par ailleurs, les montants des primes d’extensification sont jugรฉs trop faibles par certains รฉleveurs bovins qui prรฉfรจrentdรฉpasser les seuils de chargement (Chatellier, 2003). Ces constats ont conduit ร  une nouvelle rรฉforme de la PAC : l’Agenda 2000.

L’Agenda 2000 : favoriser l’extensification

Adoptรฉe lors du sommet de Berlin du 25 mars 1999, l’Agenda 2000 a pour objectif de crรฉer une agriculture compรฉtitive, respectueuse delโ€™environnement et permettant de maintenir une diversitรฉ des paysages. L’Agenda 2000 se veut implifiรฉ,s comprรฉhensible par tous et justifiant ses dรฉpenses (Commission Europรฉenne, 199a).Pour la viande bovine, la baisse des prix institutionnels de 20 % est รฉtalonnรฉe sur 3 ans et le systรจme dโ€™intervention public est remplacรฉ progressivement par un stockage privรฉ. En compensation, la PMTVA, la PSBM et les complรฉments extensification liรฉs sont revalorisรฉs (tableau 47). Certaines conditions sont assouplies : possibilitรฉ de primer les gรฉnisses dans le cadre de la PMTVA, application de la PSBM entre 7 et 9 mois (contre 8 ร  10 auparavant) (Commission europรฉenne, 1999a, 1999b).La nouveautรฉ est lโ€™instauration dโ€™une prime ร  lโ€™aba ttage (PAB) pour tous les bovins mรขles et femelles, dโ€™origine laitiรจre et allaitante . Elle concerne les veaux de 1 ร  7 mois et de moins de 160 kg de carcasse et les gros bovins de plus de huit mois. Le montant de cette prime varie selon les catรฉgories : par exemple, en 2002, elle est respectivement de 50 et 80 โ‚ฌ pour un veau et un gros bovin (Commission Europรฉenne, 1999b).Pour le lait, les mesures prรฉvoient des modifications pour 2005, mais le compromis de Luxembourg les modifiera avant leur application (voir partie 3). Pour les cรฉrรฉales, la baisse des prix dโ€™intervention de 15 % en 2 campagnes est compensรฉe par une prime de 63 โ‚ฌ par tonne et par le maintien de la prime au maรฏs ensilage (Commission Europรฉenne, 1999a).Par ailleurs, la PAC 2000 marque le dรฉbut des mesures horizontales concernant lโ€™รฉco conditionnalitรฉ des aides.Alors que la campagne 1998 / 1999 annonรงait le reto ur du marchรฉ bovin ร  une conjoncture normale, le dรฉclenchement ร  lโ€™automne 2000 de la seconde crise de lโ€™ESB a plongรฉ la filiรจre bovine dans un dรฉsarroi total, obligeant les pouvoirs publics ร  de nouvelles mesures en juin 2001 (Institut de lโ€™รฉlevage, 2002b) : diminution des seuils de chargements pour le secteur bovin en 2002 et 2003, diminution du plafond de la PSBM ( – 1,14 % pour la France, alors que les autres pays ont eu des rรฉductions de 4 ร  20 %) et obligation de 15 ร  40 % de gรฉnisses dans le quota de la PMTVA.Dans le secteur bovin, les rรฉformes de la PAC de 1992 et 2000 ont permis une forte augmentation des primes directes (PMTVA, PSBM et complรฉment extensification), associรฉe ร  des critรจres de chargement plus contraignants. Les montants et les seuils ont รฉvoluรฉ comme le montre le tableau

Quelle agriculture demain ?

Les rรฉformes de la PAC de 1992 et 2000 ont influencรฉ l’รฉvolution de l’agriculture franรงaise. Elles ont permis de stabiliser les volum es de production dans l’ensemble de l’Union Europรฉenne (EU) sans changer les tendances d’รฉvolution des structures des exploitations.

Vers une stabilisation des volumes produits

Les annรฉes 1980 et 1990 marquent la fin des fortes progressions des volumes de production. Les effectifs des principales espรจces de rente sont stables ou en baisse entre 1988 et 2000 (tableau 8).
Par exemple, la production et la consommation indigรจne de viande de bovin en Europe diminue entre 1991 et 2002 ; le taux d’auto-approvisionnement รฉvolue ainsi de 115 ร  104 % sur cette pรฉriode. En outre, la France conserve untaux d’auto-approvisionnement plus fort que la moyenne de l’UE, ce qui est directement liรฉ ร  la taille de son cheptel allaitant.
Pour stabiliser ou faire baisser le taux d’auto-approvisionnement, la baisse de production doit รชtre d’autant plus forte que la consommation de viande bovine baisse aussi. En effet, depuis 20 ans, la consommation annuelle individuelle de viande augmente de 4 % par ans. Cependant, le remplacement de la viande bovine par celle de porcs et de volailles tient ร  l’effet prix dรฉfavorable ร  la viande rouge et ร  la moindre diversitรฉ de sa prรฉsentation (figure 2). De plus, la diminution des prix de la viande rouge suite ร  la rรฉforme de 1992 a รฉtรฉ effacรฉe par celle de la viande de monogastrique, dรฉpendant directement du prix des cรฉrรฉales (Chatellier, 2003).
Ainsi, en 2002, la quantitรฉ moyenne de viande de bovin consommรฉe par habitant est du mรชme ordre de grandeur que celle de viande de volailles et largement infรฉrieure ร  celle de viande de porcs (tableau 10). La viande de bovin reprรฉsente alors autour d’un quart de la viande totale consommรฉe. Dans ce contexte, les franรงais restent de forts consommateurs de viande de bovins par rapport ร  leurs voisins europรฉens.

La restructuration des exploitations se poursuit

Entre 1979 et 1988, la taille moyenne des exploitations progresse lentement, alors que l’agrandissement des structures s’accรฉlรจre rapidement par la suite. Parallรจlement, le nombre d’exploitations diminue (tableau 11).Sur la mรชme pรฉriode, le statut juridique des exploitations a รฉvoluรฉ : entre 1988 et 2000 le nombre de formes sociรฉtaires progresse, et particuliรจrement le nombre d’exploitations agricoles ร  responsabilitรฉ limitรฉe (EARL) ; la souplesse de l’EARL explique son succรจs. En 2000, les formes sociรฉtaires reprรฉsentent presque 02 % du total (figure 3).En 2000, la SAU des formes sociรฉtaires est en moyenne trois fois supรฉrieure ร  celles des exploitations individuelles (98 ha contre 30). Au sein des formes sociรฉtaires, les EARL possรจdent en moyenne 85 ha et les GAEC 120 ha. Parallรจlement, le nombre de salariรฉs permanents augmente entre 1988 et 2000, toutes exploitations confondues (Agreste, 2001a, 2001b).Ces tendances gรฉnรฉrales cachent de fortes variations selon les orientations technico-รฉconomiques des exploitations. Le contexte politique et les contraintes de travail ont ainsi largement favorisรฉ l’orientation vers les cultures vรฉgรฉtales, au dรฉtriment, entre autre, de l’รฉlevage. Ainsi, en 2000, une exploitation sur cinq est orientรฉe vers les grandes cultures (Agreste, 2001a, 2001b).

EVOLUTION DE L’ELEVAGE BOVIN DE 1970 A 2000รจme

L’รฉvolution gรฉnรฉrale de l’agriculture ร  la fin du X siรจcle cache une forte restructuration du secteur de l’รฉlevage bovin, quece soit au niveau des cheptels, des structures ou de la nature des productions.

Evolution numรฉrique des cheptels bovins et des structures de production

Plus de vaches allaitantes et moins de laitiรจres

La forte progression des effectifs bovins franรงais sur la pรฉriode 1945-1970 (voir I) a laissรฉ la place ร  une รฉvolution plus stable ร  partir des annรฉes 1970 (tableau 12) ; le nombre de bovins et de vaches a mรชme tendance ร  baisser ร  la fin de cette pรฉriode.
Depuis les annรฉes 1970 le nombre de vaches laitiรจres diminue alors que celui des vaches allaitantes -ou nourrices- augmente (tableau 12 et figure 3).
Cette รฉvolution est le rรฉsultat concomitant de la mise en place des quotas laitiers et de l’amรฉlioration de la productivitรฉ des vaches : le ombren de vaches laitiรจres diminue fortement aprรจs 1984, puis la baisse se poursuit plus lentement. La progression parallรจle du cheptel allaitant dรฉcoule de la libรฉration de foncier par esl laitiรจres et de la politique europรฉenne de cessation laitiรจre et de soutien au cheptel allaitant. Ainsi celui-ci augmente fortement dans les annรฉes 1980, puis la progression est plus faible ;ces derniรจres annรฉes, il est plutรดt stable mais avec de fortes variations annuelles (figure 4).

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Table des matiรจres

Introduction
PREMIERE PARTIE : EVOLUTION GENERALE DE L’ELEVAGE BOVIN DE 1945 A AUJOURD’HUI
I. L’APRES GUERRE ET LES TRENTE GLORIEUSES
1. Agriculture et รฉlevage au sortir de la guerre
2. Des annรฉes 1950 au dรฉbut des annรฉes 1980 : le bond en avant
3. Les annรฉes 1980 : vers une remise en cause du modรจle productiviste
II. LES ANNEES 1990 : LES GRANDES REFORMES
1. Un nouveau contexte gรฉnรฉral
2. Deux grandes rรฉformes ร  la suite
3. Quelle agriculture demain ?
III. EVOLUTION DE L’ELEVAGE BOVIN DE 1970 A 2000
1. Evolution numรฉrique des cheptels bovins et des structures de production
2. Cheptels et produits : รฉvolution de 1970 ร  2000
CONCLUSION PREMIERE PARTIE
DEUXIEME PARTIE : EVOLUTION NUMERIQUE ET GEOGRAPHIQUE DES RACES BOVINES AU COURS DES 25 DERNIERES ANNEES
I.MATERIEL ET METHODES
1. Donnรฉes
2. Tracรฉ des cartes
3. Rรฉsultats
II. EVOLUTION DES RACES LAITIERES
1. Evolution globale du cheptel laitier entre 1979 et 2000
2. Evolution par race du cheptel laitier entre 1979 et 2000
Race Prim’ holstein
Race Montbรฉliarde
Race Normande
Race Abondance
Race Simmental Franรงaise
Race Brune
Race Pie Rouge des Plaines
Race Tarentaise
Race Flamande
3. Bilan de l’รฉvolution du cheptel laitier entre 1979 et 2000
III. EVOLUTION DES RACES ALLAITANTES
1. Evolution globale du cheptel allaitant entre 1979 et 2000
2. Evolution par race du cheptel allaitant entre 1979 et 2000
Race Charolaise
Race Limousine
Race Parthenaise
3. Bilan de l’รฉvolution du cheptel allaitant entre 1979 et 2000
TROISIEME PARTIE : PRINCIPAUX SYSTEMES D’ELEVAGE ET RACES ASSOCIEES : SITUATION ACTUELLE ET POSSIBILITES D’EVOLUTION
I. PRINCIPAUX SYSTEMES D’ELEVAGE ACTUELS
1. Les systรจmes laitiers intensifs de plaines et piรฉmonts
2. Les systรจmes laitiers montagnards
3. Les systรจmes allaitants
4. Les systรจmes des races rustiques : l’exemple du Massif Central
II. QUELLES EVOLUTIONS POUR LES SYSTEMES D’ELEVAGE BOVINS?
1. Le compromis de Luxembourg, un puissant moteur des รฉvolutions futures.. 140
2. Quels marchรฉs pour quelles productions demain ?
3. Possibilitรฉs d’รฉvolution dans le secteur laitier
4. Possibilitรฉs d’รฉvolution dans le secteur allaitant
Conclusion
Bibliographie

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