Evolution de la production d’énergies renouvelables
Modèle de RCP
Principes de base
Le regroupement à la consommation propre est avant tout un outil de production et de consommation d’énergie. En principe le RCP s’applique à toutes les technologies de production d’énergie mais en pratique le moyen le plus fréquent est réalisé par des installations de panneaux solaires, et plus précisément avec du photovoltaïque (PV), c’est-à-dire la production d’électricité par la force du soleil (SuisseEnergie, 2018, p.6) (voir annexe 6).
Grâce aux progrès technologiques croissants des dernières années et même décennies dans le domaine de l’énergie solaire, il existe un réel potentiel énergétique mais également sociétal et environnemental. La technologie des panneaux PV s’est rapidement développée et améliorée, ce qui a eu comme conséquence que l’aspect technologique s’est mis plus rapidement à jour que l’aspect juridique. L’accident nucléaire de Fukushima comme élément déclencheur notable au niveau politique et ensuite l’élaboration de la Stratégie énergétique 2050 avec l’acceptation de la nouvelle loi sur l’énergie ont cependant remis la problématique des énergies renouvelables à l’ordre du jour. Le RCP bénéficie aujourd’hui de cadres légaux qui règlent les rapports entre les différents acteurs qui le composent, ce qui était indispensable.
« Le nouveau droit de l’énergie fixe les conditions-cadres nécessaires aux rapports internes et externes du regroupement, entre le propriétaire foncier, l’exploitant de l’installation, les éventuels locataires et fermiers et la relation avec le gestionnaire de réseau. » (OFEN, 2017, p.6).
Concrètement depuis le 1er janvier 2018 (LEne, 2016, art. 17 al. 1), un seul propriétaire avec ses locataires ou deux ou plusieurs propriétaires fonciers entre eux (ou également avec leurs locataires) peuvent (en concluant une convention) se regrouper afin de créer un RCP, même si de prime abord leur unité économique et géographique n’était pas homogène. Ils se partageront le même site de production. Il peut par exemple s’agir de particuliers dans le cadre d’une PPE, d’une habitation de logements ou même de regroupements de différents magasins dans le cadre de centres commerciaux.(SwissElectricity, 2018). Si les différents sites de consommation se situent sur des unités foncières distinctes celles-ci doivent être contiguës entre elles (voir annexe 8). La condition exige d’avoir une puissance de production suffisante par rapport à la puissance de raccordement au point de mesure qui devient unique, tout comme les consommateurs finaux qui deviennent un seul consommateur final auprès du gestionnaire de réseau après s’être regroupés (LEne, 2016, art. 18 al. 1).
Les propriétaires peuvent étendre la consommation propre aux utilisateurs finaux avec lesquels a été conclu un bail à loyer ou à ferme 3 . Ils deviennent ainsi responsables de l’approvisionnement des locataires et fermiers (LEne, 2016, art. 17 al. 2). Cependant les participants au RCP peuvent demander lors de la mise en place du RCP que l’approvisionnement de base soit toujours opéré par le gestionnaire de réseau ou peuvent le faire valoir ultérieurement si le bailleur ne respecte pas son engagement d’approvisionnement (LEne, 2016, art. 17 al. 3). Les coûts directs liés à la mise en place de l’autoconsommation commune sont pris en charge par le propriétaire (LEne, 2016, art. 17 al. 4) mais peuvent être mis à la charge des différents preneurs de bail au travers de la tarification de leur consommation (OEne, 2017, art. 16 al. 1) (voir annexe 8).
Les RCP sont des moyens d’optimisation énergétique de la production et de la consommation d’électricité dans le cadre de l’habitat qui est souvent dépeint comme étant un domaine énergivore en Suisse. Les mesures de consommation d’énergie dans les bâtiments sont du ressort des cantons (CF, 1999, art. 89 al. 4 4 ) Les cantons doivent donc légiférer sur cet aspect-là. Il existe un haut degré d’harmonisation entre cantons quant aux prescriptions émises sur la consommation des bâtiments (MoPEC, 2014, p.9). La Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie (EnDK) établit des prescriptions énergétiques cantonales (MoPEC) afin de permettre par la suite aux cantons de les intégrer dans leurs législations respectives.
Par ailleurs suite aux prescriptions émises par la Stratégie énergétique 2050 ce modèle a récemment été révisé en 2014. Dans les bâtiments en construction une partie des besoins en électricité doit être couverte par une production propre de courant (MoPEC, art. 1.26 al. 1), l’endroit physique exact et le moyen de production sont laissés au choix ; cependant il s’agit souvent d’installations photovoltaïques (MoPEC, 2014, p.34). En cas de non-respect de la prescription une taxe de compensation est due, fixée par la législation cantonale (MoPEC, art. 1.28) mais il est recommandé un ordre de grandeur de 1000 CHF par kW (puissance) non réalisé (MoPEC, 2014, p.34).
Contexte énergétique
D’un point de vue technologique le photovoltaïque a un grand potentiel d’avenir en Suisse, mais également d’un point de vue politique et légal : dans un avenir proche, bien avant l’horizon de 2050 la Suisse ne pourra plus compter sur ses centrales nucléaires ni sur les droits de prélèvements actuels sur les centrales nucléaires françaises pour produire une partie de son électricité. Les cinq centrales nucléaires suisses réunies produisent environ 35% à 40% des besoins électriques suisses (Swissolar, 2017, p.1). Si la Suisse ne veut pas à l’avenir dépendre massivement d’importations d’électricité et mettre en péril sa sécurité d’approvisionnement, elle doit fortement miser sur les énergies renouvelables dont spécialement le PV qui est censé remplacer l’énergie nucléaire. Une autonomie électrique totale n’est malgré tout pas réaliste car la Suisse est déjà fortement intégrée au système électrique européen (Swissolar, 2017, p.3) parce que l’électricité est difficilement stockable et sa production d’origine renouvelable est variable et peu prévisible.
Cependant comme la Suisse produit également beaucoup d’hydroélectricité ces deux moyens de production peuvent et doivent être combinés en raison de leurs complémentarités afin de constituer les deux piliers de l’approvisionnement d’énergie suisse à l’avenir : l’énergie solaire génère une quantité d’électricité considérable qui peut être stockée dans le réseau électrique, tandis que l’électricité hydraulique est produite et fournie quand on le désire grâce au pompage-turbinage et aux lacs de rétention (Swissolar, 2017, p.2).
La production d’hydroélectricité par pompage-turbinage est limitée en hiver, saison durant laquelle les besoins de consommation en électricité sont supérieurs. La Suisse importe déjà de l’électricité en hiver. Cependant cela pourrait se réajuster positivement à l’avenir : le PV produit plus d’énergie en été vu l’ensoleillement. Cela a pour conséquence que les lacs de rétention sont moins vidés (par turbinage) durant l’été et pourront produire le manque d’électricité en hiver. Au printemps les installations PV produisent déjà considérablement avant l’arrivée de l’été, ce qui compense les lacs vidés durant l’hiver avant leur remplissage par la fonte des neiges durant l’été (Swissolar, 2017, p.3 et p.6).
L’énergie solaire garantit donc une sécurité d’approvisionnement électrique durant l’hiver jusqu’ici manquante. De manière générale le pompage-turbinage des barrages compense les fluctuations de production de l’électricité photovoltaïque durant l’année (Swissolar, 2017, p.6).
« L’hydraulique et le photovoltaïque, les deux piliers de l’avenir de l’approvisionnement en électricité, s’accordent parfaitement. Au cours d’une journée, c’est aux alentours de midi que le photovoltaïque fournit le plus d’électricité, à savoir là où la consommation est la plus élevée. Une éventuelle surproduction peut être utilisée par les centrales de pompage-turbinage pour remonter l’eau dans les bassins de rétention. Lorsque le soleil ne brille pas, l’eau est de nouveau turbinée. »
Le prix du kilowattheure (kWh) du photovoltaïque a constamment baissé depuis des décennies en Suisse, de quelques francs à quelques dizaines de centimes aujourd’hui (Swissolar, 2017, p.3). L’énergie photovoltaïque est même moins chère que des centrales de production d’énergie neuves, indépendamment de la technologie. D’un autre côté les prix extrêmement bas ne favorisent pas une sécurité d’investissement suffisante pour espérer une réelle transition énergétique. Il faut donc un cadre régulateur ainsi que des mesures d’encouragement, du type de garanties de prix ou de rétributions uniques (Swissolar, 2017, p.3). En effet la vente de l’électricité ne permet pas de couvrir les frais d’investissement mais uniquement les coûts d’exploitation (Swissolar, 2017, p.6). Le développement des énergies renouvelables en Europe, particulièrement en Allemagne, ont rendu l’énergie hydraulique moins rentable. Cependant par les explications données sur la combinaison optimale à l’avenir entre le solaire et l’hydraulique cela s’avèrerait moins problématique qu’actuellement.
« En quelques décennies seulement, le photovoltaïque deviendra en Suisse la deuxième source d’énergie principale, après l’hydraulique. » (Swissolar, 2017, p.6).La sécurité d’approvisionnement énergétique future de la Suisse implique un développement et une exploitation des énergies renouvelables qui relèvent de l’intérêt national comme le préconise la Stratégie énergétique 2050 et indiqué comme tel dans la nouvelle loi sur l’énergie (Lene, 2016, art. 12 al. 1).
« Dans le nouveau droit, lorsque les autorités ou les tribunaux doivent trancher dans le cadre d’une pesée des intérêts entre protection de la nature et du paysage et production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, toutes deux doivent à l’avenir pouvoir bénéficier du statut d’intérêt national. Elles disposent ainsi d’un poids équivalent dans la pesée des intérêts. » (OFEN, 2017, p.4)
Bases légales
La législation actuelle en vigueur qui concerne uniquement et directement les RCP est présente dans différentes lois et ordonnances fédérales :
Dans la loi sur l’énergie (LEne), le chapitre 3 traite des questions relatives à « l’injection d’énergie de réseau » et de « consommation propre » :
• L’article 15 parle de « l’obligation de reprise » et de la « rétribution de l’électricité par les gestionnaires de réseau de distribution » (GRD) ;
• L’article 16 parle de la « consommation propre » du point de vue de l’exploitant de l’installation ;
• L’article 17 parle du « regroupement dans le cadre de la consommation propre » (RCP) du point de vue du propriétaire foncier ;
• L’article 18 parle de la « relation avec le gestionnaire de réseau de distribution » (GRD) et « d’autres précisions ».
Le chapitre 4 traite des questions relatives à la « rétribution de l’injection d’électricité issue d’énergies renouvelables (système de rétribution de l’injection) » :
• L’article 19 parle de la « participation au système de rétribution de l’injection » (SRI) ;
• L’article 20 parle de la « participation partielle » ;
• L’article 21 parle de la « commercialisation directe » ;
• L’article 22 parle du « taux de rétribution » ;
• L’article 23 parle du « prix de marché de référence ».
Le chapitre 5 traite des questions relatives à la « contribution d’investissement pour les installations photovoltaïques, les installations hydroélectriques et les installations de biomasse » :
• L’article 24 parle des « conditions générales et des modalités de paiement » ;
• L’article 25 parle de la « rétribution unique allouée pour les installations photovoltaïques ».
Dans l’ordonnance sur l’énergie (OEne), le chapitre 4 traite des questions relatives à « l’injection d’énergie de réseau » et de « consommation propre » :
• La section 1 parle de « l’obligation de reprise et de rétribution pour les énergies visées à l’art. 15 LEne » (articles 10 à 13) ;
• La section 2 parle de la « consommation propre » (articles 14 à 18).
Dans l’ordonnance sur l’encouragement de la production d’électricité issue d’énergies renouvelables (OEneR) :
• Le chapitre 2 traite des questions générales relatives au « système de rétribution de l’injection » ;
• Le chapitre 3 traite des questions générales relatives aux « dispositions générales relatives à la rétribution unique et aux contributions d’investissement » ;
• Le chapitre 4 traite des questions spécifiques relatives à la « rétribution unique allouée pour les installations photovoltaïques » ;
• L’annexe 1.2 sur les « installations photovoltaïques dans le système de rétribution de l’injection » illustre des données chiffrées (voir annexe 4) ;
• L’annexe 2.1 sur la « rétribution unique allouée pour les installations photovoltaïques » illustre des données chiffrées (voir annexe 3).
La loi sur l’approvisionnement en électricité (LApEl) et l’ordonnance sur l’approvisionnement en électricité (OApEl) n’impactent qu’indirectement les RCP, sachant qu’ils traitent de questions générales relatives à la sécurité d’approvisionnement, l’accès, l’utilisation et la rémunération de l’utilisation du réseau. La LApEl sera révisée par le Parlement suisse dès fin 2019 jusqu’au début 2021, selon le calendrier de la politique énergétique de la Confédération (DETEC, 2019) (voir annexe 7). Le projet du Conseil fédéral sur le futur marché de l’électricité était en consultation jusqu’au 31 janvier 2019 dernier.
Parties prenantes du RCP
Les parties prenantes (stakeholders) sont l’ensemble des individus ou des groupements (personnes physiques et personnes morales confondues) qui sont directement ou indirectement concernés par l’existence d’un projet et de l’activité qui en découle.
Une partie prenante (également appelée partie intéressée ou partie impliquée) est ainsi un acteur qui porte un intérêt plus ou moins marqué vis-à-vis de l’activité et des décisions liées au projet. L’influence (le pouvoir) de la partie prenante est également déterminante en vue de ses attentes liées aux objectifs du projet. L’intérêt sur lequel sont portées les parties prenantes et leurs influences respectives sont souvent analysés dans le cadre d’une activité entrepreneuriale mais peuvent également l’être dans le cadre d’un projet plus large comme le modèle de RCP.
Les parties prenantes du RCP sont déjà nombreuses si on ne se limite qu’au cadre légal suisse car il existe également d’autres modèles de RCP dans d’autres pays européens : en France par exemple il est courant de parler de centrales villageoises et de coopératives énergétiques ou de coopératives citoyennes d’énergie.
Certaines parties prenantes du RCP peuvent endosser plusieurs rôles à la fois, par exemple :
• Un producteur de panneaux PV peut également être un installateur technique ;
• Un distributeur d’électricité peut également être un producteur d’énergie primaire ;
• Une entreprise énergétique peut également être un propriétaire d’une installation de production PV ;
• Un canton ou des communes peuvent être actionnaires majoritaires d’un distributeur d’électricité.
Identification des parties prenantes
Par leur nature certaines parties prenantes se regroupement plus facilement que d’autres, c’est pourquoi leur identification se fera par catégories d’activité. Chaque partie prenante fait l’objet d’une brève description et dans la mesure du possible d’exemples concrets.
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Table des matières
Déclaration
Remerciements
Résumé
Liste des tableaux
Liste des figures
1. Introduction générale
1.1 Domaine de recherche du travail
1.1.1 Contexte énergétique général
1.1.2 Contexte politique général
1.1.3 Contexte légal suisse
1.1.4 Contexte énergétique suisse
1.1.4.1 Consommation d’énergie finale
1.1.4.2 Origine de l’électricité produite
1.1.4.3 Evolution de la production d’énergies renouvelables
1.1.4.4 Evolution de la consommation finale d’énergie
1.1.4.5 Valeurs indicatives pour la Stratégie énergétique
1.2 Problématique formulée
1.2.1 Revue scientifique
1.2.2 Outils d’analyse
1.2.3 Abréviations
2. Modèle de RCP
2.1 Principes de base
2.2 Contexte énergétique
2.3 Bases légales
3. Parties prenantes du RCP
3.1 Identification des parties prenantes
3.1.1 Acteurs politiques
3.1.2 Acteurs énergétiques
3.1.3 Divers propriétaires et consommateurs
3.1.4 Acteurs civils
3.1.5 Acteurs immobiliers
3.2 Analyse des parties prenantes
3.2.1 Acteurs politiques
3.2.2 Acteurs énergétiques
3.2.3 Divers propriétaires et consommateurs
3.2.4 Acteurs civils
3.2.5 Acteurs immobiliers
4. Principes de fonctionnement du RCP
4.1 Identification des dimensions
4.1.1 Construction du prix de l’électricité
4.1.2 Contexte de l’ouverture complète du marché de l’électricité
4.1.3 Panneaux photovoltaïques
4.1.4 Production d’électricité renouvelable
4.1.5 Principe d’autoconsommation regroupée
4.1.6 Rétribution unique
4.1.7 Aspects financiers
4.1.7.1 Financement par fonds propres ou par crédit
4.1.7.1.1 Coûts d’investissement et rendement
4.1.7.1.2 Charges d’exploitation
4.1.7.1.3 Produits d’exploitation
4.1.7.1.4 Prix de l’électricité solaire autoconsommée
4.1.7.2 Financement par contracting énergétique
4.1.8 Soutirage de l’électricité du réseau public
4.1.9 Rétribution de l’injection d’électricité solaire
4.1.10 Aspects contractuels et administratifs
4.2 Analyse des acteurs principaux
4.2.1 Propriétaires
4.2.2 Locataires
4.2.3 Gestionnaires de réseau de distribution
5. Risques et opportunités du RCP
6. Recommandations
7. Conclusion
Bibliographie
Annexe 1 : Consommation d’énergie en 2017 par agent énergétique
Annexe 2 : Production d’électricité en 2017 par moyen de production
Annexe 3 : Annexe 2.1 de la rétribution unique
Annexe 4 : Annexe 1.2 de la rétribution de l’injection
Annexe 5 : Grille de calcul des coûts de revient de l’installation PV
Annexe 6 : Fonctionnement schématique du RCP
Annexe 7 : Calendrier de la politique énergétique suisse
Annexe 8 : Principes de base du RCP
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