LA QUALITE DE VIE SEXUELLE DES FEMMES DE MOINS DE 35 ANS
MATERIEL ET METHODE
Il s’agit d’une étude quantitative transversale descriptive réalisée auprès de 84 femmes de moins de 35 ans au moment du diagnostic prises en charge à l’Institut de Cancérologie de l’Ouest Paul Papin (ICO Angers) ou au Centre Jean Bernard (CJB Le Mans) entre 2008 et 2012 pour un cancer du sein. Les critères d’inclusion étaient : femme âgée de 18 à 35 ans au moment du diagnostic, consultation d’annonce entre 2008 et 2012, cancer du sein. Les critères d’exclusion étaient : métastases à distance, patiente décédée, pathologie pelvienne ou périnéale apparente, patiente sous mesure de protection. Les dossiers médicaux informatisés des 2 centres ont été étudiés afin de recueillir ces critères ainsi que le type de cancer, le stade, la parité et la prise en charge médico-chirurgicale. Quatre questionnaires étaient adressés aux patientes par courrier postal avec une lettre d’information expliquant les modalités de l’étude (Annexe 1).
Leurs réponses étaient adressées à chaque centre sous pli anonyme pré-affranchi. En l’absence de réponse, un contact téléphonique était réalisé pour une relance ou pour connaître la raison du refus de participation. Le premier questionnaire (annexe 2), créé pour l’étude, évalue a posteriori, la situation antérieure du couple en trois questions et la satisfaction sexuelle globale avant le diagnostic.
La qualité de vie sexuelle était évaluée via deux auto-questionnaires de qualité de vie validés en langue française : le BISF-W et le FSFI (15–18). Ces questionnaires portent sur l’activité sexuelle des patientes au cours des quatre dernières semaines. Le BISF-W (Brief index of sexual functionning for women) en annexe 3, comporte 22 questions évaluant 7 domaines de la sexualité : le désir (D1), l’excitation (D2), la fréquence de l’activité (D3), la réceptivité (D4), le plaisir et l’orgasme (D5), la satisfaction relationnelle (D6) et les problèmes affectant la sexualité (D7). Un score allant de 0 à 16 est attribué à chaque domaine via une méthode de calcul prédéfinie (Annexe 4). Le score composite final est calculé via la formule : D1 +D2 + D3 + D4 + D5 + D6 – D7 et s’étend de -16 à + 75 (13,19). Il n’existe pas de valeur seuil mais plus le score est bas, plus les troubles de la sexualité sont probables.
Le FSFI (Female sexual function index) en annexe 5, comporte 19 questions évaluant 6 domaines : le désir, l’excitation, la lubrification, l’orgasme, la satisfaction, la douleur. Chaque question rapporte un score allant de 0 ou 1 à 5 et chaque domaine un score de 0 à 6 selon la méthode de calcul en annexe 6. Le score composite correspondant à la somme des résultats dans chaque domaine, et la valeur seuil retenue pour définir une altération de la sexualité est un score inférieur ou égal à 26,55 (13,14,16).
RESULTATS
Sur les 110 patientes diagnostiquées entre 2008 et 2012 dans les 2 centres, 47 provenaient du Centre Jean Bernard (CJB) et 62 de l’ICO Paul papin (CPP). Vingt-six patientes étaient exclues du fait de métastases à distance pour 10 d’entre elles, d’un décès depuis le diagnostic pour 15 d’entre elles et d’une tutelle pour infirmité motrice cérébrale pour l’une d’elles. Quarante trois patientes ont donc répondu à l’étude soit 51.19%. Les caractéristiques de la population totale, de l’échantillon et des patientes n’ayant pas participé à l’étude sont résumées dans le Tableau I. La version simplifié se trouve en annexe 8. La population totale correspond au total des patientes de moins de 35 ans ayant répondu aux critères d’inclusion de l’étude tandis que l’échantillon correspond aux patientes ayant répondu aux questionnaires. La comparaison des caractéristiques de la population non participante et de l’échantillon n’a pas mis en évidence de différence significative.
100% des patientes avaient reçu de la radiothérapie sur le lit tumoral +/- sur les aires ganglionnaires. Parmi les patientes reconstruites, 13 (76%) avaient eu une mastectomie et 4 (24%) une tumorectomie. Les types de chirurgie étaient des reconstructions par lambeau de grand dorsal pour les deux tiers, prothèse sous pectorale, injection de graisse autologue, DIEP (Deep Inferior Epigastric Perforator), et reconstruction mammelonaire pour les patientes ayant 14 eu une mastectomie et pexie ou plastie de symétrisation pour les patientes ayant eu une tumorectomie. Huit patientes n’avaient pas reçu de chimiothérapie et parmi celles-ci, sept avaient un carcinome intracanalaire et une avait refusé les traitements adjuvants.
DISCUSSION
Résultats principaux Les scores composites des 2 questionnaires validés mettent en évidence des troubles de la sexualité avec des scores relativement bas, 28.1 pour le BISF-W et 25.1 pour le FSFI soit inférieur au seuil de dépistage pour ce dernier. Parmi les analyses en sous-groupe, il y a une différence significative chez les patientes recevant de la chimiothérapie dans le domaine des problèmes affectant la sexualité et de l’excitation. Les patientes n’ayant pas reçu de chimiothérapie ont plus de problèmes affectant la sexualité rapportés et les patientes ayant reçu de la chimiothérapie néoadjuvante également. Les patientes n’ayant pas de reçu de chimiothérapie ont plus de troubles de l’excitation que les patientes sous chimiothérapie adjuvante.
La comparaison des autres domaines n’a pas montré de résultat statistiquement significatif. Certains résultats laissent évoquer une association possible entre diminution du score composite, de l’excitation, de la lubrification et reconstruction immédiate ainsi qu’entre diminution du score composite et absence de chimiothérapie pour le BISF-W. Pour le FSFI, l’association possible est une diminution de la lubrification en l’absence de chimiothérapie. La moitié des patientes auraient souhaité un suivi de leur sexualité et seulement 7% en avaient un dans l’étude. Elles ont globalement préféré le questionnaire BISF-W mais les 2 questionnaires n’ont pas montré de différence particulière dans le dépistage des troubles.
La population L’âge inférieur à 35 ans avait été choisi afin de cibler une population caractérisée comme jeune dans la littérature et considérée comme plus à risque de complications d’ordre psychosocial (10,20). En effet, plusieurs facteurs étaient en jeu : l’atteinte éventuelle de la fertilité et donc l’impact sur le désir d’enfant, mais aussi le pronostic moins bon lié à l’agressivité tumorale (21) et une inquiétude quant à la reprise du travail. Les traitements adjuvants et les mastectomies sont plus fréquents, ainsi que la reconstruction mammaire qui en découle du fait d’une maladie souvent plus avancée au diagnostic (21).
L’hormonothérapie est différente, avec une absence de prescription d’anti-aromatase puisque les patientes ne sont pas ménopausées, mais aussi la co-prescription d’analogue chez les patientes de moins de 30 ans. La plupart des études sont actuellement centrées sur une population de plus de 50 ans du fait d’un plus grand nombre de patientes mais aussi de la coexistence de la ménopause (22).De plus, les études montrent que les femmes plus âgées s’adaptent mieux que les femmes plus jeunes sur le plan psychologique, ce qui a un impact sur le choix et la réussite des traitement(20,21). Les patientes métastatiques n’avaient pas été inclues puisque les biais induits par les traitements en cours ou l’état général auraient pu modifier l’interprétation des réponses aux questionnaires. Les conséquences liées à la radiothérapie n’ont pas pu être étudiées puisque 100 % des patientes en avaient reçu une. Les effets secondaires liés à la radiothérapie sont cependant nombreux et les conséquences sur la vie sexuelle ne sont pas négligeables (23).
Les patientes avaient été sélectionnées sur une période de 5 ans comprise entre 2008 et 2012 pour plusieurs raisons. La première était qu’une période assez longue était nécessaire pour obtenir un nombre suffisant de patiente et qu’un délai de 5 ans permettait d’avoir des patientes dont le traitement hormonal était terminé. Il était également souhaité que les patientes soient à plus de 6 mois du diagnostic afin qu’il n’y ait pas un biais lié au traumatisme psychologique de l’annonce. Il a été décidé de fixer la limite d’inclusion à fin 2012 au diagnostic afin de s’assurer que tout traitement de chirurgie ou de chimiothérapie soit terminé depuis au moins 6 mois voir un an. En effet, il a été démontré que les patientes à moins d’un an de leur traitement et de l’annonce ont une qualité de vie sexuelle plus altérée que les autres avec un impact psychologique et physique plus fort (20,24,25). Ce délai permet donc d’avoir une idée de l’évolution de la qualité de vie sexuelle et ce, jusqu’à 5 ou 6 ans du diagnostic. C’est donc en partie pour cela qu’il n’existe pas de différence significative entre les différentes années de diagnostic, car elles ont un délai au diagnostic similaire d’environ 2 à 5 ans.
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Table des matières
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
RESULTATS
– Questionnaire 1 : Evaluation rétrospective de la qualité de vie sexuelle avant le diagnostic de cancer
– BISF-W
– FSFI
– Questionnaire 4 : Evaluation par les patientes des questionnaires et du suivi de leur sexualité
– Analyse exploratoire multifactorielle
DISCUSSION
– Résultats principaux
– La population
– Les questionnaires
– Résultats des questionnaires
– Analyse exploratoire
– Les Biais
– Le suivi
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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