EVALUATION DU STOCK DE CARBONE DANS LES MANGROVES SELON LE REGIME de marée

Généralité sur la marée

                    La marée ou oscillation quotidienne de la mer se traduit par une montée et une descente du niveau marin à des intervalles réguliers (Parent, 1990). Ce mouvement d’oscillation est aussi dû à l’attraction de la lune et du soleil sur les particules liquides. Bien que la lune soit un astre moins imposant que le soleil, sa proximité de la terre (384 400 km au lieu de 150 millions de km) lui confère une influence prépondérante dans les phénomènes de marée (effet environ 2,5 fois supérieur à celui du soleil). La force génératrice de la marée est la résultante de deux forces : la force gravitationnelle exercée par l’astre et la force centrifuge identique en tout point de la terre, due au mouvement de la terre sur son orbite autour du centre de gravité du système terre-astre (Andriamalala, 2007). L’amplitude des marées ou marnage est la différence entre une pleine mer et une basse mer successive. Cette amplitude est fonction de la position relative de la lune par rapport au soleil. Une forte amplitude est observée lorsque la lune et le soleil sont en conjonction (nouvelle lune) ou en opposition (pleine lune), il s’agit alors de grande marée ou marée de vive-eau. A l’inverse, lorsque la lune et le soleil exercent leur force dans des directions perpendiculaires au cours du premier et dernier quartier, le marnage est faible. C’est la marée de morte-eau. Selon les variations moyennes de ce marnage, trois zones de marée peuvent être distinguées : les zones microtidales avec un marnage moyen inférieur ou égal à 2 m, celles mesotidales lorsqu’il est entre 2 à 4 m et celles macrotidales lorsqu’il est supérieur à 4 m. D’autre part, il existe trois types de marée selon leur fréquence d’inondation :
▪ La marée semi-diurne : les eaux marines se soulèvent deux fois par jour, d’où l’apparition de deux marées hautes et deux marées basses,
▪ La marée diurne : les eaux marines ne se soulèvent qu’une fois par jour avec l’apparition d’une seule marée haute et d’une seule marée basse,
▪ La marée mixte c’est-à-dire que la fréquence de marée varie et peut être de type diurne ou semidiurne.

Composition floristique pour chaque type géomorphologique

                 D’après le test de l’ACM, chaque type géomorphologique possède son espèce dominante selon le site. La baie d’Ambaro-Ambanja représente la géomorphologie océanique qui est dominée par l’espèce Rhizophora mucronata (Rm). Dans la baie de Mahajamba, la géomorphologie de « type  intérieur » y est la plus marquée avec la dominance de l’espèce Avicennia marina (Am). Pour la baie des Assassins, les mangroves à géomorphologie ripicole sont observées et associées à la prépondérance des espèces Ceriops tagal (Ct). L’hétérogénéité des espèces que composent chaque type géomorphologique est différente. Dans l’ensemble des sites, les mangroves à géomorphologie « intérieur » sont les plus hétérogènes avec la présence d’en moyenne quatre espèces dont Avicennia marina, Rhizophora mucronata, Ceriops tagal et Bruguiera gymnorrhiza. Les mangroves océaniques sont celles à composition floristique très restreinte avec seulement l’abondance des espèces dominantes comme Rhizophora mucronata pour la Baie d’Ambaro-Ambanja et Ceriops tagal pour la Baie des Assassins. Les mangroves ripicoles sont hétérogènes mais avec une certaine nuance comme pour la Baie des Assassins qui n’est qu’à dominance de Ceriops tagal.

Relation hauteur, développement de la canopée et fréquence des marées

                    Dans l’ensemble des trois sites de l’étude, une croissance en hauteur plus élevée est constatée pour les mangroves des zones fréquemment inondées (µh=5,74m) par rapport aux zones à inondation nonfréquentes (µh=5,46m) et ceux malgré leurs différences non-significatives (alpha=0,05). En effet, Jackson et Drew (1984) et Adams (1994) signalent que l’allongement des tiges se produit généralement dans les plantes des milieux humides en réponse à une inondation prolongée. Les plantes poussent rapidement pour augmenter la biomasse au-dessus de la surface de l’eau. Bien que les mangroves soient adaptées à l’engorgement périodique, différentes espèces réagissent différemment à la durée de l’inondation (Luzhen et al., 2005). Pour la Baie d’Ambaro-Ambanja, la différence de croissance est confirmée entre les deux zones avec µh=5,22m pour les mangroves à inondations fréquentes et µh=3,74m pour les mangroves à inondation non-fréquentes. Les plots fréquemment inondés sont dominés par Rhizophora mucronata, qui est une espèce pionnière se développant au large des côtes (Di Nitto et al., 2008) et dans les zones intermédiaires inondées journalièrement par la marée. C’est une espèce particulièrement adaptée à de longue durée d’inondation et résistante au stress dû à l’augmentation de la salinité du sol, ce qui explique sa croissance plus élevée dans les zones fréquemment inondées par la marée. Dans les zones à inondation non fréquentes, la dominance de deux espèces est constatée pour chaque plot, qui est soit Rhizophora mucronata, soit Ceriops tagal. Etant en zones défavorables pour leur développement, les deux espèces peinent à croitre et ce malgré leur système d’adaptation élevé. Elles se présentent alors sous forment de petits arbustes. Pour la Baie de Mahajamba, aucune différence significative n’est observée entre les hauteurs moyennes des mangroves à fréquence d’inondation différentes. Une croissance en hauteur plus élevée est par ailleurs distinguée pour les zones à inondation fréquentes avec une moyenne de 9,34m. En effet, les bordures à inondations fréquentes de la baie sont dominées par l’espèce Sonnertia alba, une espèce pionnière la plus adaptée à ce milieu et s’y développe de manière optimale. Avicennia marina quant à elle, domine les mangroves à inondations non fréquentes. C’est une espèce qui se développe sur les parties arrière et intermédiaire de la forêt de mangroves et supporte moins une élévation du taux de sel du sol. Ainsi, sa position en zones de marée non-fréquente lui convient pour son développement optimal avec une hauteur moyenne de 7,05m. Naidoo (1987) dans ses recherches confirme que Avicennia marina possède une croissance optimale dans un milieu à 20% d’eau de mer. Pour le cas de la baie des Assassins, la dominance des Ceriops tagal dans l’ensemble du site a montré qu’aucune différence significative n’existe entre les deux zones de marées. Dans cette station, la croissance en hauteur de l’espèce est presque similaire le long du site avec une hauteur moyenne de 5,9 m pour les mangroves à marées fréquentes et 5,43 m pour celles à marées non-fréquentes. Etant une espèce de mangrove tolérante avec la capacité de croitre dans un milieu très salin et très peu inondé (Ball, 1988 ; Gordon, 1993), Cériops tagal présente une croissance optimale à 50% d’eau de mer. Or avec le climat sec et aride de la baie des Assassins, cet apport en eau de mer peut être en excédentaire et limite sa croissance. Par ailleurs, les populations de mangroves de ce site se sont adaptées à ces conditions en développant une tolérance au plus élevée. En comparaison à cela, la culture sous serre de Rhizophora mangle a montré qu’elle est insensible aux changements d’hydropériode. Cardona-Olarte et al. (2006) ont documenté que, sauf pour le ratio de surface foliaire à faible salinité, les semis de celle-ci âgés d’un an présentaient peu de changements dans les traits de la plante avec différents traitements hydropériodiques (inondation permanente et marée). Krauss et al. (2006) ont signalé que les hauteurs des semis de Rhizophora mangle n’étaient pas significativement différentes entre les traitements hydropériodiques (non inondés, inondés de façon intermittente et continue). Concernant le développement de la canopé par rapport à la fréquence d’inondation par la marée, aucune étude préalable n’a été effectuée pour déterminer leur corrélation. En revanche, une saisonnalité a été remarquée sur le développement de celle-ci. Aussi, il dépend des conditions de vie de chaque espèce.

La géomorphologie et le stock de carbone par espèce

                   Etant un des critères définissant le type géomorphologique, l’hydropériode influence les facteurs environnementaux qui déterminent quelles espèces de mangroves sont capables de s’établir, de persister et d’être productives (Crase et al., 2013). Dans cette étude, les mangroves océaniques sont dominées par Rhizophora mucronata remarquées particulièrement dans la baie d’Ambaro-Ambanja, les mangroves intérieures par Avicennia Marina et les espèces mixtes dans la baie de Mahajamba, puis les mangroves ripicoles par Cériops tagal rencontrées dans la baie des Assassins. Par ailleurs, chaque type géomorphologique porte un peuplement hétérogène avec au moins deux de ces espèces. Chacune de ces espèces possède un stock de carbone significativement différent selon leur localisation géomorphologique. Alongi en 2012 démontre que leur productivité et leur biomasse substantielle audessous et au-dessus du sol varient en fonction de la géomorphologie. Pour l’ensemble des sites, ce stock de carbone est le plus élevé dans la géomorphologie de type intérieur sauf pour Cériops tagal dont l’optimum est localisé dans les mangroves océaniques. Ainsi, il peut être déduit que les mangroves de type intérieur possèdent le stock de carbone le plus élevé le long des sites d’intervention, après il y a celui des mangroves océaniques et le plus faibles celui des mangroves ripicole. Confirmant cela, Donato et al. , en 2011 ont estimé de manière significative que les mangroves océaniques possèdent un stock de carbones plus élevé par rapport aux mangroves ripicoles. Cette situation traduit ainsi une différence des conditions de croissance et de développement de chaque espèce selon le type de géomorphologie. En effet, les mangroves reçoivent des apports de matière terrigène des écosystèmes terrestres adjacents ainsi que des apports marins des écosystèmes côtiers et océaniques (Kristensen et al., 2008a) dont les quantités diffèrent selon la géomorphologie. Ces matériaux sont incorporés dans les sédiments sous forme de fraction minérale grossière ou de détritus organique fin, aident à stabiliser le littoral et à augmenter la disponibilité des nutriments dans le sol (Alongi et al., 2016). Puis, il y a aussi l’apport d’eaux à forte salinité à travers les courants de marée qui pour éviter le stress physiologique du peuplement, doit être diluée de manière adéquate par des apports en eaux douces. Par contre, un excès de dilution entrainera le même effet. Pour les mangroves intérieures, sa proximité de la terre rend plus abondant les apports terrigènes qui favorisent la disponibilité en éléments nutritifs. Les problèmes de salinité sont atténués avec les apports périodiques d’eau douce particulièrement pour les baies d’Ambaro-Ambanja et de Mahajamba avec leur climat fraiches et humides d’où la bonne adéquation du milieu avec toutes les espèces en termes de stock de carbones. Pour les mangroves océaniques, la salinité est plus élevée avec l’inondation journalière par l’eau de mer et se fait le plus ressentir dans la baie des Assassins avec son climat sec. Puis les apports marins et terrigènes sont moins conséquents. Malgré cela, Ceriops tagal avec sa résistance performe dans ces conditions. Enfin, les mangroves ripicoles qui non seulement possèdent un faible taux de salinité avec la proximité des eaux douces mais aussi de faible taux d’apport en matière allochtone. Ces conditions défavorables traduisent un faible pouvoir de séquestration de carbone des mangroves qui y vivent

Opérationnalisation de la recherche

                   A Madagascar, la diminution de la couverture forestière des mangroves se fait de plus en plus remarquer. En effet, la pression démographique croissante et la volonté de développement économique dans les zones côtières ont entraîné la perte, la dégradation et la surexploitation des mangroves au cours de ces dernières décennies. Ces écosystèmes sont aussi menacés des changements d’affectations de terres notamment la conversion à l’agriculture, la conversion à l’aquaculture, la transformation du développement urbain. Ainsi, il est nécessaire de les protéger et de les conserver dans leurs  états naturels. Les activités de restauration seront aussi indispensables en cas de perturbation anthropique importante. Le choix d’espèce à séquestration de carbone plus élevé devrait être favorisé et ce en fonction de leur adaptation aux conditions du milieu d’intervention tel que la fréquence d’inondation par la marée. Les espèces Rhizophora mucronata, et Ceriops tagal sont donc à favoriser pour les zones à inondation fréquentes et Avicennia marina pour les zones à marées non-fréquentes. D’autre part, la géomorphologie joue aussi un rôle important dans le choix de ces espèces à planter tel que les géomorphologies de type intérieur soient propices à Rhizophora Mucronata et Avicennia marina et les Ceriops tagal dans les géomorphologies océaniques. Toutefois, la rationalisation de l’exploitation des mangroves serait plus adéquate avec la conscientisation de la population locale de son importance. Ainsi, il est recommandé de mettre en place un système de gestion durable et inclusive de toutes les parties prenantes et particulièrement la communauté locale.
Objectif général (OG) : Assurer une gestion durable des ressources forestière de mangroves en conciliant développement local et conservation de la forêt.
Objectifs spécifiques (OS)
OS1 : Conserver l’écosystème mangrove face aux pressions anthropiques. Actuellement, avec l’augmentation des demandes en bois et en terre des communautés locales vivant sur le littoral, les mangroves sont sujettes à des activités d’exploitations abusives voir de destructions afin de satisfaire leur besoin. Dans ce sens, il est indispensable de conserver l’écosystème à travers des projets de sensibilisations et d’éducations environnementales pour conscientiser la population locale de l’importance du rôle que celle-ci joue dans la préservation du littoral et la séquestration de carbone. D’autre part, la limitation du stock de matières premières à exploiter peut-être envisagée en connaissant le niveau de stock total restant dans la mangrove. Ces actions fournissent ainsi aux forêts de mangroves une large capacité de résilience et de régénération naturelle face aux pressions anthropiques.
OS2 : Organiser des sessions de reboisement cibler selon le site d’intervention et les espèces Compte tenu de taux de dégradation de zones de mangroves ces dernières années, la mise en place d’un programme de restauration et de reboisement de ces zones s’avère nécessaire. Pour cela, des renforcements de capacités sur les techniques de plantation devront être effectués à travers des formations au niveau des populations riveraines concernées. En effet, il sera important d’informer la population sur les espèces adéquates à reboiser selon les zones. Il serait surtout question de la fréquence de marée et des types de géomorphologies Ce projet visera principalement à renouveler les mangroves dégradées tout en augmentant leur stock de carbone de par les espèces choisies et en même temps à augmenter la superficie de la forêt.
OS3 : Mettre en place des mécanismes de financements pérennes des activités des zones de mangroves. Dans le souci de pouvoir effectuer des activités à long terme, les mécanismes de financement appropriés devront être mis à contribution. La valorisation économique des mangroves par l’appui des partenariats avec le secteur publique ou privé favorisera la mise en calendrier des activités de gestion des mangroves ainsi que l’application de ces activités auprès de la population locale. De plus, la population riveraine pourrait être compensée par la mise en place d’autres activités génératrices de revenus comme l’écotourisme afin de valoriser de manière non destructive des mangroves. À cet effet, le renforcement de la capacité de la communauté riveraine non seulement au niveau de l’écotourisme, mais aussi sur les pratiques Agricoles favoriseront à la préservation des mangroves.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
PRESENTATION DU PARTENAIRE
RESUME
ABSTRACT
LISTE DES ILLUSTRATIONS
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES CARTES
LISTE DES ACRONYMES
LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES UNITES ET SYMBOLES CHIMIQUES
GLOSSAIRE
INTRODUCTION
PARTIE 1 : MATERIELS ET METHODES
1. Problématique et hypothèses
1.1. Problématique
1.2. Hypothèses
2. Etat des connaissances
2.1. Mangrove malgache
2.2. Conditions d’installation de l’écosystème mangrove
2.3. Régime de marée au niveau de la forêt de palétuvier
2.4. Adaptations des mangroves
2.5. Mangroves et Stock de carbone
3. Zone d’étude
3.1. Généralités sur la côte ouest malgache
3.2. Choix des sites pour l’étude
3.3. Description des sites
4. Méthodologie de travail
4.1. Collecte de données sur le terrain
4.2. Cartographie
4.3. Description, association et choix des données à traiter
4.4. Estimation de biomasse et du stock de carbone des mangroves
4.5. Analyse et traitements statistiques
5. Cadre opératoire
6. Récapitulation de la démarche méthodologique
PARTIE 2 : RESULTATS ET INTERPRETATIONS
1. Relation entre la hauteur moyenne, le développement de la canopée et la fréquence de marée
1.1. Fréquence de marée et hauteur moyenne des arbres de mangroves
1.2. Fréquence de marée et développement de la couverture
2. Relation entre le stock de carbone et la fréquence d’inondation de la marée
3. Relation entre la géomorphologie et le stock de carbone des espèces de mangroves
3.1. Composition floristique pour chaque type géomorphologique
3.2. Stock de carbone par espèce et la géomorphologie
PARTIE 3 : DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
1. Discussions
1.1. Discussion sur la méthodologie
1.2. Discussion sur les résultats
1.3. Vérification des hypothèses
2. Recommandations
2.1. Recommandations méthodologiques
2.2. Recommandation par rapport aux résultats
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ET WEBOGRAPHIQUES
ANNEXES

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