Évaluation des taux sanguins en vitamine D chez des femmes présentant un diabète gestationnel

La vitamine D est une vitamine liposoluble essentielle au corps humain et a comme rôle principal la régulation de l’absorption du calcium et du métabolisme osseux. Seul un tiers des besoins en vitamine D sont couverts par l’alimentation, les deux tiers restants étant principalement obtenus par photosynthèse cutanée sous l’action des rayons ultraviolets B. Les récepteurs à la vitamine D sont présents dans différents tissus du corps humain et de récentes études rapportent les effets pléïotropes de la vitamine D avec un rôle inverse dans la prolifération et la différenciation cellulaire, la pathogénèse du cancer, les pathologies cardiovasculaires, les maladies auto immunes et notamment le diabète de type 1 avec la présence de récepteurs à la vitamine D dans les cellules béta (1). Sa carence a également un rôle dans le développement de l’intolérance au glucose et de nombreuses études réalisées dans le diabète de type 2 ont retrouvé un bénéfice à l’optimisation du statut en vitamine D par stimulation de l’insulinosécrétion par la 1,25(OH)D (2,3) et amélioration de l’insulinosensibilité (4). La Société Française d’Endocrinologie définit une carence en vitamine D pour une concentration inférieure à 25 nmol/L et une insuffisance entre 25 et 75 nmol/L. Les données actuelles de la littérature montrent une forte prévalence de l’insuffisance en vitamine D en France (5) et dans le monde (6).

Plus spécifiquement durant la grossesse, un apport optimal en vitamine D est primordial pour assurer l’homéostasie calcique fœtale et néonatale, les apports du fœtus étant entièrement dépendants de la mère via un passage transplacentaire de la 25-hydroxyvitamine D (25(OH)D). Des études randomisées contrôlées contre placebo ont en effet montré que la supplémentation en vitamine D pendant la grossesse augmente les concentrations de 25(OH)D plasmatiques néonatales et au sang du cordon (7–9). Une hypovitaminose D maternelle, soit un taux de vitamine D inférieur à 75 nmol/L, est associée à un trouble de la croissance fœtale avec un petit poids de naissance, à un trouble de la minéralisation osseuse ainsi qu’à un risque d’hypocalcémie néonatale lorsque la carence est profonde (inférieure à 25 nmol/L). A l’heure actuelle, le Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF) recommande une supplémentation par une ampoule de 100 000 UI de vitamine D au début du 7ème mois de grossesse pour toutes les femmes enceintes (10). Néanmoins, de nombreuses études ont montré que l’insuffisance en vitamine D durant la grossesse est très fréquente (11).

Une relation inverse a été décrite dans plusieurs études entre le taux de vitamine D et le risque d’avoir un diabète gestationnel (DG) (9,12–15). Le diabète gestationnel est un vrai problème de santé publique en France avec une prévalence de 8% sur le dernier rapport de l’Institut de Veille Sanitaire en 2012. Il est associé chez la mère à un risque accru d’HTA, de prééclampsie et de césarienne. Les risques pour le nouveau-né sont principalement la macrosomie, ainsi qu’un risque accru de prématurité, de détresse respiratoire, d’hypoglycémie néonatale et une augmentation du risque d’obésité et diabète de type 2 à plus long terme. Plusieurs études réalisées chez la femme enceinte ont montré que la vitamine D joue un rôle important dans l’homéostasie du glucose et dans l’insulinorésistance. (16–18) et trois méta-analyses récentes ont montré que le déficit en vitamine D est associé à un risque majoré de diabète gestationnel (19–22). Il a également été montré une diminution des complications obstétricales des patientes avec diabète gestationnel après supplémentation en vitamine D par amélioration de leur profil métabolique (23) et notamment de leur insulinorésistance .

MATERIEL ET METHODES 

Cette étude est une étude rétrospective monocentrique conduite dans la maternité de niveau 3 du CHU de la Conception à Marseille, France.

Du 1er Juin 2017 au 31 Décembre 2017 les femmes enceintes, suivies au sein d’un programme d’éducation thérapeutique pour DG et présentant au moins un facteur de risque de carence en vitamine D, ont bénéficié du dosage de vitamine D sérique, un mois après avoir reçu une ampoule d’UVEDOSE 100 000UI. Les facteurs de risque pris en compte sont classiquement admis, à savoir un 3ème trimestre de grossesse durant l’automne-hiver, un phototype foncé ou le port de vêtements couvrant. Les patientes étaient à un terme entre 28 et 34 semaines d’aménorrhée et avaient un diagnostic de diabète gestationnel basé sur les critères définis par les recommandations de la Société Française du Diabète et du CNGOF soit une glycémie à jeun au premier trimestre supérieure ou égale à 0.92 g/L ou un test d’hyperglycémie provoquée orale (HGPO) 75g entre la 24e et la 28e SA avec une valeur de glycémie au-delà des seuils définis (0,92g/L à jeun ou 1,80g/L 1h après la charge orale en glucose ou 1,53g/L 2h après), ou bien un diabète de type 2 méconnu avant la grossesse (HbA1c ≥ 6.5% et/ou GAJ ≥ 1.26 g/l ). Elles étaient traitées soit par « régime seul », soit par régime associé à une insulinothérapie. Toutes avaient bénéficié d’une consultation avec la diététicienne du service ou une diététicienne du réseau à domicile Marseille Diabète-Santé Croisée, dans le cadre du programme d’éducation thérapeutique autorisé par l’Agence Régionale de Santé (ARS).

Ont été exclues de notre étude les patientes avec des pathologies rénales, calciques, thyroïdiennes ou parathyroïdiennes, une maladie granulomateuse et un syndrome de malabsorption ou un antécédent de chirurgie bariatrique.

Les données recueillies à partir des dossiers source étaient l’ensemble des caractéristiques médicales et sociales de la patiente (âge, présence d’une précarité définie sur le type de couverture sociale : Couverture Médicale Universelle ou Aide Médicale d’Etat, Indice de Masse Corporelle (IMC) en kg/m², antécédents familiaux de diabète, antécédents personnels médicaux et obstétricaux, consommation alcoolotabagique), ainsi que la prise ou non de compléments vitaminiques autres que l’ampoule de vitamine D, le phototype cutané (classé de 1 à 6 tel qu’il est décrit dans la classification de Fitzpatrick, Annexe 1), la durée journalière d’exposition solaire (inférieure à 30 minutes par jour, entre 30 et 60 minutes par jour ou supérieure à 60 minutes par jour) et le type de vêtements portés. Les apports calciques journaliers étaient évalués par les diététiciennes qui conseillaient également les patientes pour tendre vers un apport optimal dans la mesure du possible. Les données en rapport avec l’équilibre glycémique avaient été consignées dans le dossier d’éducation thérapeutique concernant le suivi du diabète gestationnel. Etaient recueillies les moyennes des glycémies à jeun et à 2h postprandiales des patientes calculées manuellement à partir d’une copie du carnet glycémique, les moyennes glycémiques sur le lecteur de glycémie sur les 7 derniers jours (4 contrôles quotidiens si « régime seul » et 6 contrôles quotidiens si insulinothérapie), ainsi que les doses d’insulines lente et rapide pour les patientes qui étaient sous insulinothérapie. Etaient également colligées les biométries fœtales mesurées sur l’échographie fœtale du 3ème trimestre. La vérification de la prise systématique de l’ampoule de vitamine D au 7ème mois était déclarative. Un bilan sanguin était réalisé en ville 4 semaines après la prise de l’ampoule de vitamine D, soit entre 32 et 38 SA selon la date de prise de l’ampoule de vitamine D, avec un dosage de la 25(OH)D. Si une « carence sévère » en vitamine D était avérée, soit un taux strictement inférieur à 25 nmol/L, pour des raisons éthiques, il leur était prescrit une deuxième ampoule de vitamine D afin de pallier cette carence et éviter ainsi le risque d’ostéomalacie et de rachitisme. Si une « insuffisance » en vitamine D était retrouvée, (entre 25 et 75 nmol/L), aucune intervention n’était réalisée étant donné l’absence de recommandations justifiant de prescrire une supplémentation pour ces taux-là. Après l’accouchement, un dosage de la calcémie était réalisé par les pédiatres à J3 chez le nouveau-né sur le test de Guthrie selon leurs pratiques habituelles. En post-partum l’ensemble des données néonatales était recueilli dans les dossiers d’accouchement : terme et modalités d’accouchement, poids et sexe du nouveau-né, score d’Apgar, pH au cordon, type de complications néonatales et doses finales d’insuline pour les patientes sous insulinothérapie.

Le critère de jugement principal de notre étude était d’évaluer dans notre population à risque si les recommandations actuelles de supplémentation en vitamine D des femmes enceintes sont suffisantes ou non. Pour cela, le dosage du taux de vitamine D un mois après la supplémentation était recueilli de façon rétrospective et les patientes étaient classées dans 4 groupes différents : groupe 1 « taux normal de vitamine D » (> 75 nmol/l ou 30 ng/ml), groupe 2 « insuffisance en vitamine D » (50- 75 nmol/l ou 21-29 ng/ml), groupe 3 « carence modérée en vitamine D » (25-49 nmol/l ou 10-20 ng/ml), groupe 4 « carence sévère en vitamine D » (<25 nmol/l ou <10ng/ml). Les analyses statistiques des données recueillies ont été réalisées à l’aide du logiciel SPSS v20. Les variables quantitatives ont été décrites via les moyennes ± écart type et/ou médiane [1er quartile ; 3è quartile] selon la normalité des distributions. Les variables qualitatives ont été décrites à l’aide des effectifs et pourcentages des sujets pour chacune des modalités. Pour étudier le lien entre le taux de vitamine D (variable quantitative) et les différents facteurs (explicatifs, équilibre glycémique, complications fœto-maternelles), nous avons réalisé une estimation du coefficient de corrélation non paramétrique de Spearman quand le facteur à l’étude était quantitatif (et test d’égalité de ce coefficient à 0), ainsi qu’une différence des distributions (médiane) et tests de cette différence non paramétriques de Mann Whitney/ Kruskal Wallis quand le facteur étudié était qualitatif. La significativité des tests a été fixée au seuil alpha=5%.

RESULTATS

Ont été incluses dans notre étude 59 patientes, avec au moins 1 facteur de risque d’avoir une carence en vitamine D, du 1er Juin 2017 au 31 Décembre 2017. Parmi elles, 3 patientes ont été perdues de vue et l’analyse des données a été réalisée en per-protocole.

Caractéristiques de la population

55 de nos patientes présentaient un diabète gestationnel et 4 un diabète de type 2 méconnu. 47% des patientes ont été inclues durant l’été et 53% durant la période à risque automne-hiver. 46 patientes (78%) avaient une exposition journalière inférieure à 30 minutes. 23 ne portaient pas de vêtements couvrant (39%), 32 en portaient (61%). Concernant le phototype, 23 étaient de type 1-2 (39%), 24 de type 3-4 (41%) et 12 de type 5-6 (20%). 25 patientes combinaient deux facteurs de risque de carence en vitamine D (saison automne-hiver associée à un phototype 3 à 6 ou au port de vêtements couvrants, et saison estivale associée à un phototype 3 à 6 et au port de vêtements couvrants), soit 42% de la population. 15 patientes soit 25% de notre effectif cumulaient les 3 facteurs de risque (c’est-à-dire le port de vêtements couvrants avec un phototype 3 à 6 durant la saison automne-hiver).

Statut maternel en vitamine D à 1 mois

Concernant le statut vitaminique des patientes, le taux moyen en vitamine D à 1 mois était en moyenne de 61.5 nmol/L (± 24.25). Les patientes ont été classées dans 4 groupes différents en fonction de leur degré de carence : 17 patientes (30%) avaient un taux de vitamine D strictement normal (taux entre 75 et 250 nmol/L), 20 patientes (35%) présentaient une insuffisance (taux entre 50 et 75 nmol/L), 20 (35%) une carence modérée (taux entre 25 et 49 nmol/l), et aucune ne présentait de carence sévère (taux < 25 nmol/L).

Corrélation entre le taux de vitamine D et les différentes variables

En ce qui concerne l’analyse univariée des différentes variables, nous n’avons pas retrouvé de relation significative entre le taux de vitamine D et l’âge, le niveau de précarité, l’IMC avant la grossesse, la parité, la prise de poids durant la grossesse, la présence d’un antécédent de diabète gestationnel, le temps d’exposition solaire journalier, la saison à l’inclusion et la présence d’une macrosomie à l’échographie au moment de l’inclusion . Il existait néanmoins une tendance à la significativité entre le taux de vitamine D maternel et la présence d’un antécédent de macrosomie fœtale (p=0.08).

Corrélation entre le statut vitaminique et l’équilibre glycémique

Concernant l’équilibre glycémique, 14 patientes étaient traitées par insulinothérapie lors de l’inclusion contre 21 à la fin de l’étude. Il n’a pas été retrouvé de lien significatif entre les doses totales d’insuline en début et en fin d’étude et le statut en vitamine D des patientes. Il avait été réalisé une glycémie à jeun chez 47 des patientes (84%) et une HPO chez 35 patientes (62.5%) mais aucune relation significative n’a été retrouvée entre leurs résultats respectifs et le taux de vitamine D à 1 mois. Nous avons cependant retrouvé une tendance à la significativité entre le taux de vitamine D et la glycémie à 1 heure de l’HGPO (p=0.064). De plus, nous n’avons pas retrouvé de lien significatif entre le taux d’HbA1c et le taux de vitamine D à 1 mois. En termes de moyenne glycémique chez les patientes sous régime seul ou sous insulinothérapie, nous n’avons pas trouvé de relation significative entre le statut en vitamine D des patientes et les moyennes glycémiques à jeun, les moyennes glycémiques postprandiales à 2 heures et les moyennes glycémiques du lecteur sur les 7 derniers jours.

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Table des matières

Introduction
Matériel et Méthode
Résultats
1) Caractéristiques de la population
2) Statut maternel en vitamine D à 1 mois
3) Corrélation ente le taux de vitamine D et les différents variables
4) Corrélation entre le statut vitaminique et l’équilibre glycémique
5) Corrélation entre le statut vitaminique et le risque de complications fœtomaternelles
Discussion
Conclusion
Références bibliographiques
Annexe
Résumé

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