Les sources de contamination terrestre
Il n’y a pas d ‘ industrie lourde sur le territoire du parc marin et l’agriculture y est peu développée, se résumant à un peu d’élevage et de culture extensive (Dionne 2001). Cependant, le PMSSL n’échappe pas aux impacts d ‘ un cocktail de contaminants en provenance des régions agricoles, industrielles et urbaines situées en amont de son territoire: la région des Grands Lacs et du Saguenay-Lac-Saint-Jean ainsi que les grands centres urbains de Montréal et Québec . Ce mélange complexe de polluants (hydrocarbures, métaux, pesticides, produits pharmaceutiques et bien d’autres) diffuse, sans contrôle , via la circulation des eaux et quelques dépôts atmosphériques dans l’écosystème du parc (Desbiens 2004; Gobeil et al. 2005; Lebeuf & Nunes 2005; Gobeil 2006; Viglino et al. 2006) . À ces sources éloignées, viennent s’en ajouter d’autres, plus locales, mais qui préoccupent tout autant les gestionnaires (Dionne 2001). En effet, la plupart des municipalités qui se trouvent sur les rives du PMSSL ne sont pas équipées d’un système de traitement pour leurs eaux usées. Seulement un tiers d’entre elles épurent leurs effluents au moyen de bassins aérés avant leur rejet dans les eaux du parc (MAMROT 2009). La question des effluents urbains est depuis longtemps une préoccupation mondiale (GESAMP 2001) car ils sont une source de polluants variés (Shahidul Islam et al. 2004; Gobeil et al. 2005) tels que des pathogènes, des nutriments, des métaux lourds ainsi qu’une panoplie de substances organiques (pharmaceutiques, retardateurs de flamme , pesticides). C’est pourquoi, la province du Québec s’est munie, dès 1978 , d ‘ un programme provincial : le PAEQ’ (reconduit et renommé PADEM2 en 1995) qui subventionne les municipalités afin qu’elles puissent s’équiper d ‘ un système d’épuration des eaux. Cependant, la liste des demandes est longue, et si pour la plupart d’entre elles, le problème est réglé, celui ci perdure pour les plus petites municipalités, comme c’est le cas dans le parc marin . A cela vient s’ajouter un certain nombre de maisons isolées ou des chalets, non raccordés à un réseau d’égouts. Équipées ou non d’une fosse septique, ces habitations constituent aussi une source potentielle de contamination pour l’écosystème .
Le trafic maritime
Le trafic maritime est une des activités les plus importantes dans le parc marin, particulièrement pendant la période libre de glace (d’avril à novembre). Selon l’étude la plus récente (Chi on et al. 2009), ce sont près de 50 000 embarcations par an (toute catégorie confondue) qui transitent par les eaux du Parc, cumulant autour de 90 000 heures en temps de résidence. Les activités de navigation, qu’elles soient commerciales ou récréatives, sont assez diversifiées, regroupant des embarcations de tailles diverses, motorisées ou non. Le territoire du parc est traversé par une des routes commerciales (marine marchande) les plus importantes au monde, qui relie l’Atlantique Nord aux Grands Lacs, et dont 91 % du trafic se concentre dans la section estuarienne. Néanmoins, ce sont les services de traversier, les excursions aux baleines et les activités de yachting qui représentent la part la plus importante du trafic, aussi bien en terme de trajets (85 %) qu’en terme de temps de résidence (85 %) contre 9 % pour la marine marchande (Chion et al .2009). En effet, le nombre de navires marchands a diminué de 60 % en 20 ans, mais le tonnage , quant a lui , a augmenté (Dionne 2001). Cette activité se concentre principalement dans l’embouchure du Saguenay (> 36 %) ainsi que dans l’ estuaire maritime (14 à 36 %). Quelques zones de densité de trafic plus modérée (5 à 36 %) sont éparpillées sur le territoire (secteurs Rivière Éternité , Anse Saint-Jean et Saint-Siméon). Les installations portuaires, associées à ce trafic , sont de capacité variable et se répartissent le long des berges du parc marin. Bien souvent, leur importance est fonction de la densité de trafic observé dans le secteur.
Les déversements accidentels
Les déversements accidentels de produits chimiques ou pétroliers sont une autre source potentielle de contamination pouvant porter atteinte à l’intégrité des écosystèmes (Pelletier 1988). Les conséquences environnementales de tels incidents sont difficiles à prédire , tant les facteurs qui entrent en jeu sont multiples: caractéristiques physicochimiques des produits déversés, facteurs océanographiques et météorologiques locaux , nature des milieux récepteurs mais aussi la stratégie de nettoyage employée (Dionne 2001). Plusieurs déversements accidentels (‘ » 30) ont déjà été répertoriés par le passé (1974-2005), à proximité du PMSSL (Dionne 2001; PMSSL 2008). De plus, plusieurs incidents de pollution mineure se produisent chaque année dans le secteur du parc marIn (principalement dans les marinas). Malheureusement, la plupart ne sont pas rapportés et les gestionnaires doivent composer avec des données fragmentaires pour gérer ce type de risque. Cependant, des actions sont possibles pour circonscrire les déversements et nettoyer les milieux (voire la faune et la flore) et réduire ainsi les impacts. Plusieurs agences fédérales (Parcs Canada, Environnement Canada et la Garde Côtière) collaborent entre elles mais aussi avec le PMSSL afin d’élaborer des programmes de formation et des plans d’intervention d’ urgence en cas d’incident. De plus, des outils géomatiques (ARES? et des modèles mathématiques (ER)4 peuvent épauler les gestionnaires en cas d’ urgences, afin d’optimiser les interventions.
Les activités de prélèvements de ressources
L’analyse des sources de stress anthropiques dans le parc marin ne peut se résumer aux activités dites « polluantes ». Le stress écologique ne se restreint pas à une liste de contaminants chimiques et biologiques (espèces pathogènes et invasives). Comme nous avons commencé à l’évoquer dans le paragraphe précédent, la pression écologique liée aux activités humaines peut se matérialiser sous la forme d’une perturbation comportementale ou encore de blessures pouvant conduire à la mort de l’individu , et ce, à l’égard de certaines espèces en particulier, tels que les mammifères marins. Le prélèvement de ressources constitue également une autre forme de stress exercé par les acti vités de pêche et de chasse, récréatives ou commerciales (Dionne 2001). La pêche dans le PMSSL est très diversifiée , tant par les espèces recherchées: des poissons, des invertébrés et même des algues (voir Dionne 2001 pour un inventaire exhaustif des espèces), que par les milieux où elle s’exerce (eau libre , quais, rives, zone intertidale et infralittorale), ou les activités qu’elle regroupe (récréative, commerciale et exploratoire). La pêche sportive concerne principalement des espèces de poissons et s’exerce en été comme en hiver (pêche blanche), principalement dans le fjord du Saguenay . Quant à la cueillette de mollusques (Mya arenaria), elle a lieu exclusivement sur les estrans de l’estuaire, les sites du fjord étant fermés pour des raisons d’insalubrité (Dionne 2001; PMSSL 2008). La pêche commerciale se pratique uniquement dans l’estuaire, car elle est interdite dans le fjord. Il est difficile de définir avec précision les aires de pêche dans le PMSSL, car leurs limites peuvent varier d’une année sur l’autre et s’étendre au delà du territoire (Dionne 2001). Toutefois, plusieurs secteurs ont été identifiés pour le parc, principalement dans l’estuaire maritime ainsi que deux petites zones, dans l’estuaire moyen, au niveau de Port-aux-Quilles et de l’Île Blanche. Deux types de chasse sont pratiqués dans le parc: la chasse au phoques (principalement commerciale) et la chasse aux oiseaux migrateurs (récréative). En ce qui concerne la chasse aux phoques, deux espèces sont recherchées: le phoque du Groenland (Phoca groenlandica) et le phoque gris (Halichoerus grypus) (Dionne 2001). La chasse est règlementée et interdite pendant la période récréotouristique (du 1 er mai au 30 septembre). Les impacts sur le prélèvement de ressources sont donc contrôlés selon Morisset (1998) mais il subsiste le risque d’abattage accidentel d’espèces protégées comme le phoque commun (Phoca vitulina) dans le cadre de la chasse sportive (peut répandue dans le parc).La chasse aux oiseaux migrateurs (voir Dionne 2001 pour une revue des espèces recherchées) est très localisée dans certains sites du PMSSL, les marais étant peu nombreux et difficiles d’accès. De plus, il est interdit de chasser sur les littoraux du fjord du Saguenay et plusieurs îles du parc. Comme pour la chasse aux phoques, le risque principal demeure l’ abattage accidentel d’espèces en péril (Dionne 2001).
La contamination biologique
La contamination biologique dans le PMSSL se présente tout d’abord sous la forme d’une contamination microbiologique, surtout d’origine fécale essentiellement, issue de la décharge d’eaux usées en provenance des municipalités mais aussi des navires. Peu de données existent sur la contamination microbiologique des écosystèmes dans le parc marin, l’essentiel de l’information se résumant à un état des bancs de myes sur son territoire. Toutefois, nous pouvons affirmer qu’il existe une contamination des organismes, car la plupart des sites de cueillettes sont fermés pour cause d’insalubrité (contamination biologique) des coquillages (PMSSL 2008). Les espèces invasives entrent également dans la question de la contamination biologique. Dans l’écosystème du parc, les espèces incriminées sont essentiellement des plantes vasculaires. Sur les 253 espèces répertoriées, 43 sont exotiques, comme la salicaire d ‘Europe, qui représente le plus grand risque pour les milieux humides, remplaçant peu à peu les espèces indigènes en place (Gagnon 1998). En dehors du PMSSL, plusieurs espèces non-indigènes ont été identifiées comme le crabe vert ou encore le crabe à mitaines (Dufour & Ouellet 2007) et présentent un risque pour les écosystèmes du parc. Plus récemment, 14 espèces non-indigènes de dinoflagellés ont été identifiées dans les eaux de ballast des naVlfes arrivant dans l’est canadien dont quatre sont potentiellement toxiques et représentent un risque certain pour les populations de poissons, l’aquaculture et la santé humaine (Casas-Monroy et al. 2011). Ce risque est suffisamment élevé pour nécessiter une surveillance, même si les conditions environnementales difficiles du Saint-Laurent peuvent le modérer (Harvey et al. 1999).
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Table des matières
Remerciements
Résumé
Abstract
Liste des tableaux
Liste des figures
INTRODUCTION GÉNÉRALE
1. LA ZONE CÔTIÈRE SOUS PRESSION
2. D E LA PROTECTION DANS L’AIRE
3. UN PARC POUR PROTÉGER LE SAINT -LAURENT
4. UN ÉCOSYSTÈME EXCEPTIONNEL
4.1 . Le milleu physique
4.2. Les habitats et les communautés aquatiques
5. LE PARC MARIN STRESSÉ
5.1. Les sources de contamination terrestre
5.2. Le trafic maritime
5.3. Les déversements accidentels
5.4. Les acti vités de prélèvements de ressources
6. BILAN DE SANTÉ DES ÉCOSYSTÈMES
6.1. La contamination biologique
6.2. La pollution chimique
6.3. L’état de la ressource exploitée
7. PRÉSENTATION DE LA PROBLÉMATIQUE
7.1. La stratégie de gestion du parc et ses limites
7.2. Une nouvelle approche pour une gestion adaptée
7.3 . Le modèle de risque relatif
8. ÉNONCÉ DES OBJECTIFS
8.1 . L’objectif principal
8.2. Les objectifs spécifiques
9. ORIGINALITÉ ET INTÉRÊT DU PROJET
10. STRATÉGIE POUR LE DÉROULEMENT DU PROJET
CHAPITR E 1 IMPORTANCE RELATIVE DES SOURCES TERRESTRES SUR LA CONTAMINATION DU PARC MARIN
RÉSUMÉ
ABSTRACT
1. INTRODUCTION
2 . MATERIALS AND METHODS
2.1. Sampling procedure
2.2 . Analyses
2.3. FIux estimation
2.4. Modelling water circulation pattern
3. RESULTS AND DISCUSSION
3.1 . Water discharge in the park
3.2. Suspended particles load
3.3 . Biogeochemi cal fluxes
3.4. Fecal contamination
3.5. Trace metallic elements
3.6 . Spati al va riability in sources apportionment
4 . CONCLUSION
CHAPITRE 2 PORTRAIT DE LA CONTAMINATION CHIMIQUE ET MICROBIENNE DANS LE PARC MARIN
RÉSUMÉ
ABSTRACT
1. INTRODUCTION
2. MATERIALS AND METHODS
2.1. Study area and justification of choosing sampling sites
2.2. Sampling procedure
2.3. Analyses
2.4. Calculation fo r indices of physiological condition
3. RES ULTS & DISCUSSION
3.1. Nutrient inputs
3.2. Source and fate of organic matter
3.3. Fecal contamination
3.4. Metallic contamination
3.5 . PAH contamination
3.6. Mya arenaria physiological condition
4. CONCLUSION
CHAPITRE 3 UN NOUVEL OUTIL DE GESTION DES RISQUES ENVIRONNEMENTAUX POUR LE PARC MARIN
RÉSUMÉ
ABSTRACT
1. INTRODUCTION
2. METHODOLOGY
2.1. Problem formulation
2 .2. Risk assesslnent method
3. RESULTS AND DISCUSSION
3.1. Risk characterization
3.2. Uncertainty and sensitivity analysis
3.3. Confirmation of risk rankings
3.4. Risk predictions to management options
4. CONCLUS ION
CONCLUSION GÉNÉRALE
1. AMÉLIORER NOTRE COMPRÉHENSION PAR LA MODÉLISATION
1.1. Contribution relati ve des sources locale
1.2. Le cas « baie sainte-marguerite »
2. COMMENT AMÉLIORER LE MODÈLE?
2.1. Optimiser les rangs
2.2. Optimiser les filtres
3. LE RRM DANS LE PROCESSUS DE PRISE DE DÉCISION
3.1 . RRM et princi pe de précaution
3.2. RRM et contexte socio-économique
Références bibliographiques
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