Evaluation des pathologies ostéo-articulaires courantes
Les orthopédistes et les podologues se basent sur l’observation du mouvement pour déceler les anomalies de la marche. Leur diagnostic s’effectue ainsi de manière qualitative. L’invention des systèmes d’analyse du mouvement d’une part, et la modélisation biomécanique du corps d’autre part, permettent dorénavant de mesurer précisément les données cinématiques et dynamiques de l’appareil locomoteur. Ainsi, il devient possible de réaliser l’étude quantitative des dysfonctionnements du membre inférieur. Dès lors, il convient d’identifier les paramètres biomécaniques essentiels pour évaluer les pathologies.
Pour répondre à cet objectif, la littérature nous fournit d’abondantes informations sur la physiologie articulaire et fonctionnelle du membre inférieur, mais aussi sur ses désordres. Ainsi, nous rapprocherons les données de la littérature avec les examens pratiqués en podologie pour identifier et synthétiser les paramètres biomécaniques impliqués dans l’apparition de pathologies de l’appareil locomoteur. Nous nous focaliserons sur les pathologies ostéo-articulaires qui font l’objet de consultations courantes en orthopédie comme il en est pour la lombarthrose, la gonarthrose et la coxarthrose.
La marche humaine
Les informations relatives à la description fonctionnelle du membre inférieur exploitées dans ce paragraphe proviennent des ouvrages de Calais-Germain (1986), Brizon et Castaing (1988), Bouchet et Cuilleret (1995) et Kapandji (1996). Ils constituent une base indispensable pour étudier la physiologie articulaire du membre inférieur et les paramètres anatomiques qui la caractérisent. En effet, dès que ces paramètres s’écartent de la « norme physiologique », ils sont considérés comme anormaux, donc susceptibles d’être impliqués dans une ou plusieurs pathologies.
Rappels sur la structure osseuse du membre inférieur
L’étude biomécanique du mouvement humain s’appuie sur une description anatomique des membres impliqués dans le geste ou la posture analysée. Dans notre étude, cet aspect est d’autant plus important que la connaissance de malformations du système squelettique peut nous apporter des éléments de réponses quant aux causes des pathologies. Le squelette constitue la charpente du corps humain, sur laquelle les muscles se fixent. Il s’articule par le biais de ses différentes structures segmentaires liées par des articulations de façon à permettre la mobilité du corps. En anatomie, on divise le membre inférieur en quatre structures (ou segments), le bassin (ou pelvis), la cuisse, la jambe et le pied, reliées entre elles par trois groupes articulaires, la hanche (ou articulation coxo-fémorale), le genou et la cheville.
Le bassin
Le bassin est classiquement décomposé en trois éléments osseux (Figure I.2) (Kapandji, 1996):
• un élément central et postérieur : la colonne vertébrale fixe, constituée du sacrum et du coccyx,
• deux os paires et symétriques : les os coxaux nommés aussi os iliaques.
Les deux os iliaques sont unis au sacrum par les articulations sacro-iliaques en arrière et par la symphyse pubienne en avant. Ces os présentent une petite mobilité entre eux (de quelques millimètres) destinée à amortir les mouvements.
Le pelvis sert de structure de liaison entre le tronc par l’articulation de la colonne vertébrale (liaison L5/S1 : 5ème vertèbre lombaire/sacrum) et donne attache sur les côtés aux membres inférieurs par les articulations coxo-fémorales (hanches) entre le cotyle et la tête fémorale. Le cotyle, appelé aussi acétabulum, est une cavité hémisphérique située sur la face externe de l’os iliaque, où la tête fémorale s’emboîte.
La cuisse
La cuisse est constituée d’un seul os, le fémur (Figure I.3). C’est un os long, constitué d’un corps (diaphyse) et de deux extrémités, une supérieure (épiphyse proximale : extrémité proche du tronc) et une inférieure (épiphyse distale : loin du tronc). L’épiphyse proximale présente la tête fémorale, formant les deux tiers d’une sphère, dirigée en haut, en dedans et un peu en avant. Le col unit la tête aux trochanters et forme avec la diaphyse un angle physiologique dit d’inclinaison (125°) dans le plan frontal. De la même manière, celui-ci présente avec l’axe des condyles un angle physiologique de déclinaison ou d’antéversion (D 30°) dans le plan horizontal (torsion interne physiologique de l’axe longitudinal du fémur). Le grand trochanter se situe à la partie basse du col. L’épiphyse distale présente une surface articulaire composée de deux éléments en demi-cercles, les condyles. Une surface concave, la trochlée, sépare les condyles.
Ces derniers n’ont pas les mêmes courbures, le condyle interne est plus convexe que l’externe. Ils s’articulent avec les glènes du tibia pour former l’articulation du genou.
La jambe
La jambe est composée de deux os, le tibia et le péroné qui sont à la fois solidaires et mobiles lors des mouvements de la cheville (Figure I.4). Le tibia est un os long, constitué d’une diaphyse et de deux épiphyses. A l’épiphyse proximale se trouve le plateau tibial qui présente deux surfaces articulaires concaves, les glènes. Sur la face antérieure du plateau se situe la tubérosité antérieure du tibia (TTA). La partie distale du tibia et du péroné constitue la mortaise tibio-péronière ou la pince tibiale malléolaire. Celle-ci forme une articulation prismatique constituée de la malléole tibiale (interne), de la face interne concave de l’extrémité inférieure du tibia et de la malléole externe appartenant au péroné.
Il existe une torsion physiologique externe du squelette jambier (T =20°) entre l’axe des compartiments tibiaux et l’axe des malléoles. En effet, la malléole externe est en arrière par rapport à la malléole interne, ceci est dû à la position de retrait du péroné par rapport au tibia. Cette torsion permet d’axer correctement le pied sur le reste du squelette jambier lors de la marche.
La mortaise tibio-péronière s’emboîte sur l’astragale pour former l’articulation de la cheville.
Le pied
Le pied est composé de 26 os organisés en voûte. On distingue trois groupes d’os, l’arrière-pied, le médio-pied et l’avant-pied (Figure I.5). Le squelette de l’arrière-pied est formé de deux os, le calcanéum et l’astragale. L’astragale est situé au-dessus du calcanéum. A l’avant, une surface convexe sur l’astragale correspond à une surface concave sur le calcanéum. A l’arrière, une surface concave sur l’astragale correspond à une surface convexe sur le calcanéum. L’articulation de ces deux os s’appelle l’articulation sous-astragalienne. Le médio-pied ou tarse antérieur est assemblé de cinq os, le scaphoïde, le cuboïde et les trois os cunéiformes. L’avant pied se présente comme un groupement de cinq colonnes de petits os formant des rayons qui sont composés chacun d’un métatarsien et de phalanges formant le squelette de l’orteil. On nomme premier rayon la colonne des os formant le gros orteil et ainsi de suite pour les suivants.
L’arrière-pied est raccordé au médio-pied par l’articulation médio-tarsienne (ou interligne de Chopart). L’articulation tarso-métatarsienne (ou interligne de Lisfranc) unit le médio-pied à l’avant des cunéiformes et du cuboïde avec l’avant-pied à l’arrière des bases métatarsiennes. Les têtes des métatarsiens et les premières phalanges sont reliées par les articulations métatarso-phalangiennes. Les phalanges sont assemblées par les articulations inter-phalangiennes.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : EVALUATION DES PATHOLOGIES OSTEO-ARTICULAIRES COURANTES
I.1 INTRODUCTION
I.2 LA MARCHE HUMAINE
I.2.1 Rappel des axes et plans pour l’observation des mouvements corporels
I.2.2 Rappels sur la structure osseuse du membre inférieur
I.2.2.1 Le bassin
I.2.2.2 La cuisse
I.2.2.3 La jambe
I.2.2.4 Le pied
I.2.3 Les mouvements articulaires
I.2.3.1 L’articulation de la hanche
I.2.3.2 L’articulation du genou et de la rotule
I.2.3.3 L’articulation de la cheville
I.2.3.4 L’articulation sous-astragalienne
I.2.3.5 Les articulations du pied
I.2.4 Synthèse des mouvements articulaires
I.2.5 Définition de la marche
I.3 LES PRINCIPES D’EVALUATION EN PODOLOGIE
I.3.1 Le bilan en décharge
I.3.2 Le bilan statique
I.3.3 Examen de la marche
I.3.4 Synthèse
I.4 PINCEMENTS LOMBAIRES, COXARTHROSE ET GONARTHROSE
I.4.1 Notions sur les principes de l’arthrose
I.4.2 Pincements lombaires
I.4.3 Coxarthrose
I.4.4 Gonarthrose
I.4.4.1 Arthrose fémoro-tibiale interne
I.4.4.2 Arthrose fémoro-tibiale externe
I.4.4.3 Arthrose fémoro-patellaire
I.4.5 Synthèse des paramètres biomécaniques patho-mécaniques
I.5 CONCEPTION DES ORTHESES PLANTAIRES
I.6 CONCLUSION
CHAPITRE II : ANALYSE DU MOUVEMENT : APPLICATION A L’ETUDE DES PATHOLOGIES DE L’APPAREIL LOCOMOTEUR
II.1 INTRODUCTION
II.2 HISTORIQUE
II.3 LES SYSTEMES DE MESURE DU MOUVEMENT
II.3.1 Les outils de mesure cinématique 3D
II.3.1.1 Les techniques à base de capteur
II.3.1.1.a Les goniomètres
II.3.1.1.b Les accéléromètres
II.3.1.1.c Les capteurs de positions magnétiques
II.3.1.2 Les systèmes optoélectroniques
II.3.1.2.a Les systèmes à marqueurs actifs
II.3.1.2.b Les systèmes à marqueurs passifs
II.3.2 Choix du système d’analyse cinématique
II.3.3 Les outils de mesure dynamique
II.3.3.1 Les systèmes à capteurs de pression
II.3.3.2 Les plates-formes de forces
II.3.3.3 Les tapis de marche instrumentés
II.3.4 Choix de l’outil de mesure dynamique
II.4 MATERIEL ET METHODE
II.4.1 Système optoélectronique VICONTM
II.4.1.1 Présentation du matériel
II.4.1.2 Phase de calibrage
II.4.1.3 Erreurs de mesure
II.4.1.3.a Erreurs instrumentales
II.4.1.3.b Erreurs expérimentales
II.4.2 Le tapis de marche ADALTM
II.4.3 Synthèse
II.5 PROTOCOLE
II.5.1 Positionnement des marqueurs
II.5.2 Dispositif expérimental
II.5.3 Déroulement d’une expérience
II.6 TRAITEMENTS DES DONNEES BRUTES
II.6.1 Interpolation
II.6.2 Filtrage
II.6.3 Normalisation
II.6.4 Calcul des trajectoires angulaires articulaires
II.6.4.1 Modélisation anatomique du membre inférieur
II.6.4.1.a Localisation des centres articulaires
II.6.4.1.b Construction des repères anatomiques
II.6.4.2 Méthodes de calcul de la cinématique articulaire
II.6.5 Synthèse
II.7 CONCLUSION
CHAPITRE III : EVALUATION DES PATHOLOGIES OSTEO-ARTICULAIRES COURANTES DU MEMBRE INFERIEUR : ANALYSE CINEMATIQUE
III.1 INTRODUCTION
III.2 CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION ETUDIEE
III.3 OBTENTION DES VARIABLES ETUDIEES
III.4 EVALUATION D’UNE PATHOLOGIE
III.5 RESULTATS
III.5.1 Analyse intra-sujets
III.5.1.1 Sujet 1
III.5.1.2 Sujet 2
III.5.1.3 Sujet 3
III.5.1.4 Sujet 4
III.5.1.5 Sujet 5
III.5.1.6 Sujet 6
III.5.1.7 Sujet 7
III.5.2 Analyse inter-sujets
III.5.2.1 Analyse des paramètres biomécaniques
III.5.2.2 Caractérisation des modèles ostéo-articulaires
III.6 DISCUSSION
III.7 CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE