Evaluation des impacts anthropiques : objectif majeur du XXIème siècle

Evaluation des impacts anthropiques : objectif majeur du XXIème siècle

Les zones côtières sont le lieu d’un grand nombre d’activités humaines : transport maritime, production d’énergie marine renouvelable, extraction de matière première, pêche, aquaculture, tourisme… Ces différentes activités peuvent avoir des conséquences néfastes pour le milieu marin en appauvrissant la biodiversité, en dégradant les habitats ou encore en générant des contaminations par des substances dangereuses… A ces pressions directement liées aux activités maritimes s’ajoutent celles générées par les activités terrestres, qui peuvent avoir des impacts négatifs importants sur le milieu marin en fonction de leur nature, leur échelle et leur localisation. L’agriculture peut par exemple entraîner un apport de substances nutritives dans le milieu et augmenter l’eutrophisation en zone côtière (Jessen et al. 2015), la croissance démographique, une augmentation de l’exploitation des ressources marines… À ces pressions s’ajoutent les effets liés au changement climatique comme l’acidification de l’océan ou l’augmentation de la température de l’eau (Halpern et al. 2008). Jusqu’en 2008, et la mise en place d’une politique européenne globale de protection de l’environnement marin, les mesures visant à contrôler ces différentes pressions étaient élaborés secteur par secteur, avec pour effet un manque de cohérence entre les politiques, les législations, les programmes et les plans d’action au niveau régional, national, européen et international (Fabri and Andral 2011).

La Directive Cadre Stratégie Milieu Marin (DCSMM) : un tournant dans la politique de préservation des habitats ? 

La directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (ou Marine Strategy Framework Directive – MSFD), élaborée en 2008 par l’Union Européenne, définit une politique européenne globale de protection de l’environnement marin des eaux placées sous la direction des états membres (sauf l’outre-mer), axée sur une approche écosystémique. L’objectif de cette directive est de maintenir ou d’atteindre un bon état écologique (BEE, ou GES en anglais) pour un certain nombre de composantes de l’écosystème marin dont les habitats benthiques (EC 2008). Le bon état écologique est défini, dans ce cadre, comme « l’état écologique des eaux marines tel que celles-ci conservent la diversité écologique et le dynamisme d’océans et de mers qui soient propres, en bon état sanitaire et productifs, et que l’utilisation du milieu marin soit durable, sauvegardant ainsi le potentiel de celui-ci aux fins des utilisations et activités des générations actuelles et à venir » (Ministère de la transition écologique et solidaire 2019). Cette directive définit onze descripteurs des utilisations humaines de l’écosystème marin, chacun étant décliné en critères et en normes méthodologiques pour déterminer le bon état écologique .

Sur les onze descripteurs définis dans la directive MSFD, deux d’entre eux concernent l’habitat benthique : le descripteur 1 (biodiversité) et le descripteur 6 (intégrité des fonds marins). Les critères 1 et 2 du descripteur 6 (D6C1, D6C2) sont consacrés à l’évaluation de l’étendue spatiale de la perte physique ou de la perturbation des fonds marins. Le critère D6C3 se concentre sur l’établissement de valeurs seuils de pression pour les effets néfastes des perturbations physiques. Enfin, les critères D6C4 et D6C5 permettent d’évaluer l’étendue de la « perte » ou de « l’altération » de la communauté benthique et doivent fixer la proportion maximale admissible de perte d’habitat et évaluer le statut de chaque habitat à cet égard (EC 2008, 2017a). La perturbation physique des fonds est définie par des changements temporaires de leur nature par rapport à un état de référence (non impacté ou moins impacté). La perte physique d’habitat est quant à elle définit comme tout altération permanente de l’habitat (par exemple au niveau 2 de EUNIS) provoquée par l’homme et dont le rétablissement est impossible sans une nouvelle intervention humaine. Ces définitions proposées par le CIEM (ICES 2019a, 2019b) font cependant encore débat et sont toujours en cours de discussion au niveau européen (Vaz, 2020, comm. pers.).

Un habitat est défini ici comme un environnement particulier qui se distingue par ses caractéristiques physico-chimiques (structure du sol, salinité, température, exposition aux courants…) et les espèces qui lui sont associées, dans un espace géographique observable. Bien que la nature soit continue et non linéaire, il convient de définir des typologies afin de faciliter l’analyse et la classification de réalités complexes comme les habitats. La typologie EUNIS (European Nature Information System qui remplace CORINE Biotope) mise au point par l’Agence Européenne de l’Environnement est un système de description visant l’exhaustivité, qui tend à constituer un standard au niveau européen (Galparsoro et al. 2012). Cette typologie est notamment utilisée dans le cadre de la DCE. Celle-ci a l’avantage de prendre en compte tous les habitats : des habitats naturels aux habitats artificiels, des habitats terrestres aux habitats d’eau douce et marins. Elle a une structure hiérarchique fondée sur 11 grands types de milieux parmi lesquels figurent les habitats marins (A). Chacun de ces grands types de milieux peut être subdivisé jusqu’à 7 niveaux inférieurs, basés sur des critères relatifs aux facteurs environnementaux qui influencent les communautés. Au total, la classification compte ainsi 5 282 unités (Louvel-Glaser et al. 2013). Les principaux critères retenus pour les habitats côtiers correspondent à une succession de critères abiotiques (étage, substrat, exposition, salinité) puis biotiques avec les espèces structurantes et les communautés associées (Bajjouk et al. 2015). Malgré les progrès techniques, dresser une cartographie précise et globale des habitats des fonds marins reste un défi du fait de leur difficulté d’accès et de l’immensité des mers. EUSeaMap est un des huit projets du programme européen EMODnet (European Marine Observation and Data Network), qui vise à améliorer la connaissance de l’environnement marin. Il a pour mission d’établir une carte des habitats benthiques des eaux européennes suivant la typologie EUNIS en assemblant et harmonisant les données géographiques marines existantes dans les Etats membres de l’Union européenne. Il est toutefois impossible de mettre en place de telles techniques pour cartographier les fonds marins européens dans leur ensemble. Pour être exhaustif, EUSeaMap s’appuie donc sur une approche de cartographie dite à « basse résolution » qui repose principalement sur la description des facteurs environnementaux caractérisant les habitats (Populus et al. 2017).

Méthodes d’évaluation

Pour chacun des critères développés dans la directive, chaque Etat membre doit élaborer des indices quantitatifs et des valeurs seuils afin d’observer les progrès réalisés en matière de bon état écologique (Rice et al. 2012). Ces indicateurs, qualitatifs ou quantitatifs sont définis comme des attributs spécifiques à chaque critère et servent à déterminer si un critère répond au bon état écologique ou dans quelle mesure il s’en écarte. L’utilisation d’indicateurs, courante dans le cadre de programmes de gestion ou d’évaluation (telle la DCE en France qui a recours à un certain nombre d’indicateurs), permet de limiter le nombre de paramètres à mesurer en ne retenant que les plus représentatifs des aspects fonctionnels et structurels de l’écosystème étudié. Ainsi, l’évaluation de l’état écologique peut dériver de mesures directes sur un composant particulier de la biodiversité (indicateurs d’état) ou indirectes, en mesurant les pressions anthropiques dominantes (indicateurs de pression). Dans ce dernier cas, les impacts des pressions sur la biodiversité doivent être connus. Pour évaluer l’état d’un écosystème, des indicateurs simples (comme par exemple le nombre d’espèces dans une communauté benthique) ou plus complexes (comme l’indice de Shannon) peuvent être employés (Pedel et al. 2013). Cependant pour certains critères, et notamment ceux concernés dans cette étude, il est nécessaire de développer des indices appropriés capables de détecter les changements par rapport aux perturbations anthropiques (OSPAR 2012; Rice et al. 2012; Leonardsson et al. 2015; van Loon et al. 2018).

Pour les critères ne disposant d’aucune valeur seuil, les Etats membres ont pour obligation de les définir. Ces valeurs seuils représentent le niveau de perturbation au-delà duquel le critère n’est plus considéré comme en bon état écologique (Sub-GEnS, Figure 1). La définition de ces valeurs seuils a donc pour but d’aider les Etats membres à évaluer le niveau de l’état écologique. Elle doit répondre à différentes exigences (EC 2017a):
❖ Refléter, le cas échéant, le niveau de qualité et de facto l’importance d’un effet défavorable pour un critère donné ;
❖ Etre définie en lien avec une condition de référence ;
❖ Etre cohérente avec la législation de l’Union Européenne ;
❖ Etre établie à une échelle géographique appropriée pour rendre compte des diverses caractéristiques biotiques et abiotiques des régions, sous-régions et subdivisions ;
❖ Etre établie sur la base du principe de précaution et prendre en compte les risques potentiels pour l’environnement marin ;
❖ Tenir compte de la nature dynamique des écosystèmes marins et de leurs éléments, qui peuvent évoluer dans le temps et l’espace au gré des variations climatiques et hydrologiques, des relations entre proies et prédateurs et d’autres facteurs environnementaux ;
❖ Traduire le fait que les écosystèmes marins, s’ils se sont détériorés, ne peuvent pas nécessairement revenir à un état antérieur spécifique mais reviennent plutôt à un état correspondant aux conditions physiographiques, géographiques, climatiques et biologiques qui prévalent.

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Table des matières

Introduction générale
1. Evaluation des impacts anthropiques : objectif majeur du XXIème siècle
1.1. La Directive Cadre Stratégie Milieu Marin (DCSMM) : un tournant dans la politique de préservation des habitats ?
1.2. Méthodes d’évaluation
2. Les arts traînants : principale source de perturbation du plateau continental en Europe
2.1. Description des engins
2.1.1. Le chalut
2.1.2. La drague
2.2. L’importance des arts trainants en Europe
2.3. Effets des arts traînants sur les habitats benthiques
2.4. Effets des arts traînants sur la faune
2.4.1. Les communautés ichtyologiques
2.4.2. Les communautés d’invertébrés benthiques
3. Méthodes d’évaluation de l’effet du chalutage sur les communautés benthiques
3.1. Echantillonnage
3.2. Indicateurs
3.2.1. Indicateurs de diversité
3.2.2. Indicateurs fonctionnels
3.2.3. Indicateurs de sensibilité au chalutage
3.2.4. Modélisations
4. Objectifs de la thèse et démarche adoptée
5. Plan de la thèse
Conclusion générale

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