Plusieurs questions demandent à être répondues, affinées, précisées dans la science clinique de la chirurgie cardiaque. La première étape est sans contredit de cibler les problématiques cliniques nécessitant davantage d’investissement scientifique. Cela se fait sur la base de l’importance de la maladie, de doutes quant à la meilleure approche thérapeutique, ou encore, de la lourdeur des complications liées au traitement. La cardiologie et la chirurgie cardiaque représentent des disciplines dans lesquelles les avancées techniques et surtout thérapeutiques ont été parmi les plus importantes durant cette dernière décennie. Ainsi la chirurgie cardio vasculaire permet aujourd’hui de soigner des patients de plus en plus âgés ayant des pathologies de plus en plus graves. Parfois, pourtant, certains patients présentent dans les suites d’une opération de chirurgie cardio-vasculaire des complications qui peuvent être à l’origine du décès. Nous avons donc étudié, dans le cadre d’une étude rétrospective descriptive, l’évolution ainsi que les complications des patients qui ont été opérés en Chirurgie Cardio-Vasculaire. La raison pour laquelle les techniques de réparations valvulaires sont le sujet de beaucoup d’intérêt en chirurgie cardiaque est liée à une diminution des morbidités associées comparées aux remplacements valvulaires [11]. Les remplacements valvulaires demeurent essentiels dans plusieurs situations cliniques : calcification des valves aortiques, maladie mitrale rhumatismale, certaines insuffisances mitrales secondaires. Les prothèses valvulaires mécaniques, après un historique difficile criblé de plusieurs bris mécaniques [12], se sont établies comme une solution de choix pour les patients nécessitant un remplacement valvulaire de longue durée, le but étant de minimiser le risque de ré-opération en échange d’une anticoagulation à vie et d’un risque thromboembolique et hémorragique associé. La valeur des suivis à très long terme devient très importante pour bien sélectionner ce type de produit valvulaire. Outre que la chirurgie valvulaire la chirurgie cardiaque congénitale a elle aussi bénéficié d’avancées énormes ces dernières années en permettant de réparer des anomalies congénitales de plus en plus complexes. Mais avec l’évènement du diagnostic anténatal de ces cardiopathies congénitales l’interruption de la grossesse devient parfois la solution la plus adaptée pour éviter les cas non viables et les cas trop compliqués. Cependant et malheureusement ces pratiques de diagnostic anténatal et d’IVG ne sont pas encore pas trop rependues dans nos régions ce qui expliquent en partie le fort taux de morbi-mortalité de ces cardiopathies congénitales. Malgré les efforts consentis, les moyens restent encore à promouvoir dans ce domaine.
ETUDES DE MORBI-MORTALITE
Définition des concepts
Le terme morbidité signifie fréquence des maladies, aussi l’analyse de la morbidité doit-il d’abord définir ce qu’est la maladie. Or, contrairement à la plupart des autres événements démographiques que sont par exemple lesnaissances et les décès, la maladie est un événement beaucoup moins certain.La détection de la maladie et le nom donné à cette maladie peuvent varier selon les époques et selon les cultures, en fonction de l’état des connaissances médicales et de leur diffusion dans la population générale, mais aussi, pour certaines comme par exemple les maladies mentales, en fonction des normes en vigueur dans la société, qui peut résister plus ou moins à reconnaître un état comme pathologique. Difficile à certifier et à nommer, la maladie est également difficile à dater, ce qui est particulièrement gênant pour les démographes qui s’intéressent beaucoup à l’âge à l’arrivée d’un événement, et à l’intervalle qui sépare l’arrivée de deux événements distincts. La détection du début est bien sûr clairement dépendante de l’évolution des connaissances médicales, aussi bien parmi les médecins que parmi les patients qui peuvent en déceler plus ou moins rapidement les premiers signes. Toutes les maladies n’étant heureusement pas mortelles, la fin de la maladie, c’est à dire la guérison, est, elle aussi, difficile à dater. Dans les faits, il est apparu que l’analyse de la morbidité ne pouvait se limiter à celle des maladies, mais devait s’étendre aussi aux conséquences de ces maladies, ainsi qu’aux limitations, fonctionnelles et sociales, entraînées par un mauvais état de santé. C’est ainsi que l’OMS a adjoint à la classification internationale des handicaps dont Jean-Marie Robine, Pierre Mormiche et Catherine Sermet nous exposent la genèse dans leur communication. C’est également l’OMS qui propose de définir la santé comme « un état complet de bien-être physique, mental et social ». Nous n’irons pas, dans le cadre de cette séance, jusqu’à adopter une définition aussi extensive. Mais il faut bien admettre que la santé ne saurait se réduire à la simple absence de maladie, ou même de maladie et d’incapacité, et que les définitions en sont nombreuses, qui font plus ou moins référence à des aspects comportementaux et sociaux. Avec J. M. Robine et ses collaborateurs, nous conviendrons que c’est « un continuum d’états allant de la santé parfaite à la mort », et que le caractère normatif de cette notion interdit toute définition qui serait définitive. Tous ces problèmes de définition occupent une place assez différente selon les auteurs. Difficile à définir et à dater, la maladie ne donne pas toujours lieu à des déclarations comme les naissances et les décès, loin s’en faut. Depuis longtemps cependant, un certain nombre de maladies sont soumises à déclaration obligatoire et la liste de ces maladies varie en fonction des époques. Ainsi, c’est grâce à ces déclarations que l’on peut suivre aujourd’hui l’évolution des nouveaux cas de SIDA dans bon nombre de pays. Mais il ne s’agit pas d’un fichier qui serait mis à jour au fur et à mesure des décès ou des guérisons éventuelles, et le rapprochement avec la statistique des causes médicales de décès, qui n’indique pas la date à laquelle la maladie a été diagnostiquée et déclarée, ne permet pas d’analyser directement la durée de la maladie et sa létalité. Malgré l’imperfection des données recueillies, les maladies à déclaration obligatoire ont longtemps été les seuls qui se prêtaient à des mesures de morbidité.
Taux de morbidité
En épidémiologie, le taux de morbidité est le rapport qui mesure l’incidence et la prévalence d’une certaine maladie. Dans le cadre d’une période donnée (typiquement, mais pas nécessairement, un an), ce taux indique le nombre de personnes atteintes par cette maladie par unité de population. On l’exprime en général en nombre de personnes atteintes par 1000, 10 000 ou 100 000 personnes. L’étude de la mortalité dans une communauté permet de définir les axes de prévention des maladies et de réajuster les politiques de santé. Dans un service hospitalier une telle étude permet un contrôle et une révision des mesures thérapeutiques ; celles-ci sont susceptibles de dégradation dès leur mise à exécution au fil des ans, ce qui impose une critique périodique. La définition pragmatique de la morbidité grave comprend les situations suivantes:
• limitation de l’activité quotidienne habituelle (degré pragmatique 3) ou échelle de Karnofsky entre 50 et 70%;
• activité très limitée (limitation des activités de base : se nourrir, se laver, se déplacer) (degré pragmatique 4) ou échelle de Karnofsky <=40%;
➤ Fièvre ˃ 38,5
➤ l’hospitalisation
➤ le décès.
Deux sortes de données sur la morbidité doivent pouvoir être recueillies à partir des enquêtes des données de stock, qui répondent à la question : combien y a-t-il de personnes ayant telle maladie ou tel handicap à un moment donné?
– ce que l’on appelle la prévalence de la morbidité.
Malgré toutes les difficultés exposées ci-dessus ; ces données sont les plus faciles à obtenir par voie d’enquête, à condition, nous l’avons vu, que la prévalence de la maladie étudiée ne soit pas trop faible; mais, comme pour tous les autres événements démographiques, l’observation doit aussi fournir des données sur les flux: combien de nouveaux malades ?
– ce que l’on nomme l’incidence; combien de guérisons ? Combien de décès ?-la létalité-; quelle est la durée de la maladie ? Ces données ne peuvent provenir que d’enquêtes plus difficiles à élaborer. En effet, un certain nombre de maladies pouvant conduire au décès, les survivants à une date donnée ne sont pas représentatifs de la population à des dates antérieures .L’enquête rétrospective semble donc peu adaptée à la mesure des flux. Mais on pourrait réfléchir à la possibilité de recueillir l’information sur les personnes décédées auprès de leurs proches, à condition bien sûr de disposer d’une estimation du nombre de personnes susceptibles de répondre pour corriger les données recueillies. Seules les enquêtes longitudinales sont donc théoriquement susceptibles de nous renseigner sur les flux, et l’on conçoit bien que de telles enquêtes, qui supposent un suivi des individus presque au jour le jour, sont particulièrement coûteuses à mettre en œuvre. Pour en abaisser le coût, on peut procéder à des enquêtes à passages répétés où, à chaque fois, on interroge es individus sur les maladies et troubles intervenus depuis le passage précédent. Se pose ici le problème des individus non retrouvés, qu’ils soient décédés ou qu’ils aient émigré. La technique utilisée en France consiste à recueillir les maladies qui se sont déclarées au cours des 12 semaines de l’enquête, à partir de 4 passages des enquêteurs, elle ne permet donc de recueillir des données d’incidence qui ne sont représentatives que de la période de l’année au cours de laquelle a lieu l’enquête. Un autre biais lié aux enquêtes longitudinales dans le domaine de la santé vient du fait que l’enquête risque de changer le comportement du sujet observé vis-àvis de sa santé. En soumettant un échantillon à des observations répétées, on risque donc de modifier ce que l’on veut observer: la morbidité. Il est regrettable qu’aucune communication n’aborde cet aspect.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. ETUDES DE MORBI-MORTALITE
I-1 Définition des concepts
1-2 Taux de morbidité
I-3 Indices et indicateurs
I-4 Evaluation des morbidités post opératoires selon les techniques chirurgicales
I-5 Evaluation du taux infections nosocomiales
I-6 Evaluation globale des morbidités et analyse de dysfonctionnement
I-7 Naissance des registres de morbidité
II EVALUATION DES PRATIQUES PROFESSIONNELLES
II-1 Définition
II-2 Pourquoi réaliser une Evaluation des pratiques professionnelles
II-3 Les moyens de mise en œuvre de I’EPP
II-4 La Validation de I’EPP
III-LES PROCEDURES CHIRURGICALES
III.1. La technique de revascularisation myocardique ou pontage aorto-coronarien
IIl.2 Les techniques de réparations et/ou les remplacements valvulaires
III.2.1 le rétrécissement aortique
III.2.2 L’insuffisance aortique
III.2.3 Le rétrécissement mitral
III.2.4 L’insuffisance mitrale
III.3 La chirurgie des cardiopathies congénitales
III.3.1 Cardiopathies cyanogènes
III.3.1.1Tetralogie de Fallot
III.3.1.1.a Cathétérisme interventionnel
III.3.1.1.b Intervention palliatives ou anastomoses systémico-pulmonaires
III.3.1.2 Atrésie tricuspidienne
III.3.2 Cardiopathies non cyanogènes
III.3.2.1 Communications inter-auriculaires
III.3.2.2 Communications inter ventriculaires
III.3.2.3 Canal atrio-ventriculaire
III.3.2.4 Persistance du canal artériel
III.3.2.5 Sténoses sous valvulaires aortiques
III.3.2.6 Sténoses médio ventriculaires droites
III.3.2.7 Atrésie pulmonaire
III.3.3 Réparation complète
IV. LES COMPLICATIONS POST-OPERATOIRES
IV.1. Les complications d’origine cardiaque
IV.1.1 Les troubles du rythme et de la conduction myocardique
IV.1.2 Hypotension artérielle et hypovolémie
IV.1.3 Choc cardiogénique et bas débit
IV.1.4 Hypertension artérielle
IV.2 Les complications respiratoires
IV.2.1 L’œdème cardiogénique
IV.2.2 Le syndrome de détresse respiratoire aigu de l’adulte
IV.2.3 Pneumopathie infectieuse
IV.2.4 Sevrage ventilatoire
IV.3 Les Complications Neurologiques
IV.3.1 Les atteintes centrales
IV.3.1.1 Le coma
IV.3.1.2 Les déficits localisés
IV.3.1.3 Les troubles du comportement
IV.3.1.4 Les troubles des fonctions supérieures
IV.3.2 Les atteintes nerveuses périphériques
IV.4 Les complications rénales et poly-viscérales
IV.4.1 L’insuffisance rénale aiguë
IV.4.2 L’atteinte et la défaillance poly-viscérale
IV.5 Les complications infectieuses
IV.5.1 Les infections systémiques
IV.5.2 Les médiastinites
V. Évaluation dans le temps des événements
V.1 Evaluation préopératoire de la gravité en chirurgie cardiaque
V.2Courbes de Survies
V.3 Événements non fatals
DEUXIEME PARTIE
II-MATERIEL ET METHODE
II-1 Type d’étude
II-2 Objectifs
II-3 Population d’étude
II-4 Méthodes
II-5 Exploitation des données
III-RESULTATS
III-1 Etude synthétiques descriptive
III-1-1Donnees épidémiologiques
III-1-2 Données préopératoire
III-1-3 Données opératoires
III-1-4 Données postopératoires
III-2 Etude comparative
DISCUSSION
I-Epidémiologie
II-Clinique
III-Para clinique
IV-Intervention
V-Morbidité
VI- Mortalité
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES