Dans les pays en développement, l’aviculture est une activité en plein essor. C’est le cas du Sénégal où, à partir des années 2000, une aviculture semiindustrielle de proximité s’est développée dans les espaces urbains et périurbains. La zone périurbaine de Dakar regroupe l’essentiel de cette activité (CARDINAL et al, 2002). L’arrêt de l’importation de produits avicoles intervenu en 2005, suite à l’avènement de l’Influenza Aviaire Hautement Pathogène (IAHP), a fait augmenter la production de la spéculation chair, qui était en déclin parce que fortement concurrencée par les importations. Celle-ci est passée d’un effectif de 6 935 029 en 2005, à 20 998 220 en 2012 (SENEGAL /CNA-CIMEL/Mbao, 2013). Mais l’aviculture moderne dans son ensemble, est la cible de diverses contraintes qui expliquent que son offre est encore faible par rapport à la demande. Outre les facteurs environnementaux et sanitaires, l’aliment volaille par sa teneur en mycotoxines liée à l’incorporation de tourteaux d’arachide et de maïs, constitue une contrainte majeure à une intensification de la production de protéines d’origine aviaire, dans l’optique d’une meilleure accessibilité de cette denrée pour les populations. En effet, PITTET (1998) a montré que 25 à 40% des céréales utilisées en alimentation de la volaille, sont contaminées par les mycotoxines qui sont des métabolites secondaires très toxiques produits par des champignons. Parmi les mycotoxines les plus courantes et les plus fréquemment rencontrées au Sénégal figurent les aflatoxines de l’arachide et les fumonisines du maïs. Les mycotoxines d’une manière générale, entraînent, en élevage avicole, des pertes économiques directes dues aux mortalités et celles indirectes dues à la diminution des performances de production (AFSSA, 2009). De plus, les mycotoxines retrouvés dans la viande, les œufs et les produits dérivés, constituent une menace pour la santé humaine (AFSSA, 2009). Malheureusement, des méthodes pratiques et rentables à grande échelle pour détoxiquer les aliments contenant des mycotoxines ne sont pas disponibles. La seule solution est l’ajout à la ration d’adsorbants non-nutritifs sensés minimiser l’absorption gastro-intestinale des mycotoxines et de leurs métabolites (NIR, 2003). En effet, GUEYE (2017) rapporte que l’utilisation de Mycofix dans la ration du poulet de chair, améliore les performances de croissance. Par contre les travaux réalisés par TARE (2014) ont montré que l’incorporation dans la ration de Toxomx ou de Mycofix considérés comme des capteurs de mycotoxines, a plutôt un effet négatif sur l’évolution pondérale des oiseaux. Les résultats obtenus avec ces additifs alimentaires importés, sont donc controversés.
GENERALITES SUR L’AVICULTURE DANS LA REGION PERIURBAINE DE DAKAR
Présentation de la zone périurbaine de Dakar
La zone périurbaine de Dakar, située à la pointe extrême de l’Afrique occidentale, est une bande côtière comprise entre les isohyètes 400 et 600. Elle constitue une presqu’île reliée au reste du pays par un cordon sableux avec une longue côte entourant presque toute la région (SENEGAL/ANSD, 2011). La région Dakaroise présente un relief particulier, constitué de bas-fonds argileux provenant des dépressions des dunes littorales où les eaux de pluies persistent une grande partie de l’année, sous forme de marigots. Les dépressions sont périodiquement inondées par la remontée des nappes phréatiques. L’action de l’alizé maritime issu de l’anticyclone des Açores, confère à la zone périurbaine de Dakar un climat tropical de type sahélo-soudanien, maintenant toute l’année un air plus frais et une hygrométrie plus élevée que les autres régions frontalières rendant le secteur très favorable à l’aviculture. A partir du mois de mai, l’action de la mousson donne plutôt à la région un cachet soudanien. En août-septembre, les températures deviennent maximales atteignant 36°C tandis que durant les 4 premiers mois de l’année (Janvier – Avril), un minimum de 20°C est observé. L’existence quasi-permanente de l’eau et les alizés maritimes permettent de maintenir une humidité relativement élevée toute l’année, supérieure à 90%. La pluviométrie annuelle, comprise entre 300 et 900 mm caractérisée par de fortes précipitations entrainent souvent des inondations désastreuses sur la banlieue dakaroise (SENEGAL/ANSD, 2011). La saison des pluies dont la durée varie entre 3 et 4 mois (Juillet -Octobre), est la période la plus chaude de l’année.
La zone périurbaine de Dakar héberge une population estimée à 3.529.000 habitants (SENEGAL/ANSD, 2011), soit plus de 23% de la population du pays et cette dernière à un pouvoir d’achat élevé et des habitudes alimentaires citadines. Par ailleurs, cette zone est bien desservie en routes et pistes de production reliant les zones de production les plus enclavées avec Dakar. Tous ces éléments sont aujourd’hui à la base de l’implantation dans cette zone de l’essentiel des élevages avicoles modernes du pays. En effet, ces conditions bioclimatiques favorables et ce contexte socio-économique sont uniques dans le pays et expliquent le dynamisme agropastoral de la zone périurbaine de Dakar.
Systèmes d’élevage avicole au Sénégal
Au Sénégal, l’aviculture est caractérisée par deux systèmes d’élevage à savoir un système traditionnel et un système moderne.
Système traditionnel
RAVELSON (1990), définit l’aviculture traditionnelle comme un type d’élevage pratiqué essentiellement en milieu rural sous un mode extensif où chaque famille paysanne possède un effectif relativement faible de poules. Elle est pratiquée principalement par les femmes et les enfants (Traoré, 2006) sur la presque totalité du territoire national (SENEGAL/DIREL, 2008) L’aviculture traditionnelle a une croissance faible (4,6% en 5 ans) par rapport à l’aviculture moderne, son effectif représente 64% du cheptel avicole national en 2009 contre 80% en 2004 (SENEGAL/DIREL, 2004 ; SENEGAL/DIREL, 2009). L’aviculture traditionnelle joue un rôle important sur les plans nutritionnel, socioculturel et socio-économique.
BACHIR (2002), rapporte qu’au Sénégal, les aviculteurs croient à la protection de leur famille par le poulet et cela se justifie par la pratique de cet élevage dans beaucoup de ménages. En milieu rural, la consommation du poulet joue un rôle important dans l’apport protéinique pour la population lors des fêtes et des cérémonies religieuses. BA (1989) a constaté, sur le plan nutritionnel, qu’au Sénégal 87% des personnes enquêtées préféraient le poulet traditionnel à cause de sa saveur, son caractère salubre et sa conformité à l’Islam, contre 4% des personnes enquêtées qui eux préfèrent plutôt le poulet importé. La volaille est l’espèce la plus utilisée en milieu rural pour couvrir les besoins en protéines animales (GUEYE et BESSEI, 1995).
Sur le plan économique, les revenus tirés de l’aviculture traditionnelle provient de la vente des œufs, de la vente du poulet vivant mais aussi le troc là où il y a peu de circulation monétaire (GUEYE, 2003). La vente de la volaille constitue une source de revenu pour les couches les plus vulnérables de la société à savoir les femmes (70%) et les enfants (MISSOHOU et al., 2002). L’aviculture rurale contribue inévitablement à la sécurité alimentaire et à l’allègement de la pauvreté (FAO, 2004).
Système avicole moderne
LISSOT (1941) cité par SAVANE (1996) définit l’élevage industriel comme des élevages ou établissements qui « à la fois possèdent des effectifs importants, utilisent des poussins d’un jour provenant de multiplicateurs de souches sélectionnées, nourrissent leurs volailles avec des aliments complets ou complémentaires produits par une industrie spécialisée ». En Afrique subsaharienne de façon générale et au Sénégal en particulier, l’application directe de la typologie des élevages avicoles selon la nomenclature de la FAO (2014) s’avère très difficile. C’est pourquoi, la catégorisation des secteurs a été revue comme suit. En plus du système d’exploitation avicole traditionnel précédemment décrit et qui correspond au secteur 4 (Tableau I), le système d’élevage dit commercial peut être divisé en trois sous-systèmes ou secteurs (TRAORE, 2006) :
● Secteur 1 ou système d’élevage industriel et intégré
Il correspond à un haut niveau de biosécurité clairement défini et exécuté, avec des effectifs importants d’oiseaux. Les oiseaux sont nourris avec des aliments complets produits par des industries spécialisées. Dans cet élevage, on utilise des équipements modernes tels que les abreuvoirs automatiques, les chaînes d’alimentation, les systèmes d’évacuation automatique des déjections. Ce système a nombre d’éleveurs limité, n’est pas fréquent mais commence à se développer et regroupe moins d’une dizaine de producteurs majoritairement installés à Dakar. Toutefois, un aviculteur intensif est installé à Saint-Louis.
● Secteur 2 ou système d’élevage intensif de poulets commerciaux
Il correspond à un niveau modéré à élever de biosécurité. Les oiseaux sont en permanence confinés, empêchant rigoureusement le contact avec d’autres volailles domestiques ou sauvages. Ce secteur de haute production, regroupe l’essentiel des aviculteurs dits du secteur commercial (plus de 80% des effectifs avicoles élevés). Les oiseaux produits sont destinés habituellement au marché local. Les producteurs de ce groupe se rencontrent surtout dans la zone des Niayes de Dakar et de Thiès. Le plus souvent, ce type d’élevage est pratiqué par des salariés et des personnes de professions libérales, ou exerçant dans le tertiaire et qui engagent des contremaîtres pour gérer leurs fermes.
● Secteur 3 ou système d’élevage semi-intensif et élevages amateurs
Correspond à un niveau faible à minimal de biosécurité. C’est le système le plus répandu surtout dans la région de Dakar. Il se rencontre essentiellement dans les habitations en centre et en banlieue des grandes villes et autour de quelques autres agglomérations et communes rurales. Il utilise des poussins d’un jour importés ou produits localement par des couvoirs installés dans la région de Dakar et des aliments complets achetés sur place ou fabriqués par les éleveurs eux-mêmes. Cependant, on note dans la plupart de ces élevages, une mauvaise conduite de l’élevage et un non-respect des normes prophylactiques.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : GENERALITES SUR L’AVICULTURE DANS LA REGION PERIURBAINE DE DAKAR
I.1. Présentation de la zone périurbaine de Dakar
I.2.Systèmes d’élevage avicole au Sénégal
I.2.1 Système traditionnel
I.2.2. Système avicole moderne
I.3. Les contraintes de l’élevage avicole dans la zone périurbaine de Dakar
I.3.1. Contraintes zootechniques et économiques
I.3.2. Contraintes alimentaires
I.3.3. Contraintes pathologiques
CHAPITRE II : LES MYCOTOXINES
II. 1. Généralités
II.2 Produits alimentaires contaminés par les mycotoxines
II.3. Toxicité et effets des mycotoxines
II.4. Principaux types de mycotoxines et leurs effets en aviculture
II.4.2. L’ochratoxine A (OTA)
II.4.3. Les Fumonisines (FUM)
II.4.4. La zéaralénone (ZEN)
II.4.5. Les trichothécènes
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
CHAPITRE I : MATERIEL ET METHODES
I.1.Matériel
I.1.1. Poulailler
I.1.2 Additifs alimentaires
I.1.2.1 « Bioclean forte »
I.1.2.2 Mycofix
I.1.3. Matériel animal
I.1.4. Matériel d’élevage et de contrôle de performance
I.1.5 Matériel de fabrication des rations alimentaires
I.2. Méthodes
I.2.1 Conduite de l’élevage des poulets
I.2.1.1 Préparation du poulailler
I.2.1.2 Formulation et fabrication des rations alimentaires
I.2.1.3 Réception et répartition des poussins en lots
I.2.1.4 Prophylaxie
I.2.1.5. Alimentation
I.2.2. Evaluation du taux de contamination des rations par les mycotoxines
I.2.3. Evaluation des performances de croissance des poulets de chair
I.2.3.1. Collecte des données
I.2.3.2. Evaluation des paramètres de croissance
I.2.4. Evaluation de la rentabilité économique de l’utilisation du Bioclean
I.2.5. Analyses statistiques des données
CHAPITRE II : RESULTATS ET DISCUSSIONS
II.1. RESULTATS
II.1.2. Effets du « Bioclean forte » sur les performances de croissance du poulet de chair
II.1.2.1. Sur la consommation alimentaire et d’eau
II.1.1.2. Sur l’évolution pondérale
II.1.1.3 Sur le gain moyen quotidien
II.1.1.4 Sur l’indice de consommation alimentaire
II.1.1.5 Sur le rendement carcasse
II.1.1.6 Taux de Mortalité
II.1.3 Effet du « Bioclean forte » sur la rentabilité économique de l’élevage du poulet de chair
II.2. Discussion
II.2.1. Méthodologie
II.2.2. Effets du « Bioclean forte » sur le taux de contamination des rations par les mycotoxines
II.2.3. Effets du « Bioclean forte » sur les performances de croissance du poulet de chair
II.2.3.1. Effet sur la consommation alimentaire et hydrique
II.2.3.3. Effet sur l’indice de consommation et le rendement carcasse
II.2.3.4. Effet sur le taux de mortalité
II.2.4 Effets du « Bioclean forte » sur la rentabilité économique de l’élevage du poulet de chair
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES