Evaluation des anomalies cardiovasculaires et biologiques des individus porteurs du trait drépanocytaire

Répartition géographique de l’HbS

       La drépanocytose concerne plus de cinquante millions de personnes à travers le monde, ce qui en fait la maladie génétique la plus répandue (13). Bien qu’elle soit présente dans le monde entier, on la rencontre principalement chez les sujets de race noire, originaires d’Afrique équatoriale ou subsaharienne.. En Afrique sub-saharienne, 10 à 40% des individus sont hétérozygotes pour la mutation βS et 1 à 4 % des enfants naissent avec la drépanocytose selon les régions. Il est estimé que chaque année plus de 230 000 enfants drépanocytaires naissent en Afrique sub-saharienne, contre 2600 en Amérique du Nord et 1300 en Europe (13, 14). Au total, environ 20-25 millions d’individus souffrent de la maladie drépanocytaire dans le monde, dont 12 à 15 millions en Afrique sub-saharienne (13, 14). La prévalence des personnes porteuses de l’HbS atteint 10 à 40 % en Afrique équatoriale, alors qu’elle n’est que de 1 à 2 % sur la côte de l’Afrique du Nord et en dessous de 1 % en Afrique australe (Figure 1). La drépanocytose a une fréquence très élevée en Afrique subsaharienne, où il y’a des transmetteurs (14). Dans les pays comme le Nigéria, le Ghana, le Cameroun ou le Gabon, les taux de prévalence varient entre 20 et 30 % tandis que dans certaines régions de l’Ouganda, ils atteignent 45 %. Au Sénégal, la prévalence de l’allèle βS est estimée à 10% (14). La drépanocytose est à l’origine de 5% de décès d’enfants de moins de cinq (5) ans sur le continent africain. La proportion passe à plus de 9% en Afrique de l’Ouest, le décès étant provoqué soit par la drépanocytose elle-même, soit par des affections comme le paludisme et la septicémie à pneumocoques (15). Les migrations ont accru la fréquence du gène en Amérique et on la retrouve également depuis quelques décennies en Europe de l’Ouest. La drépanocytose prédomine en Afrique subsaharienne entre le quinzième (15ème) parallèle de latitude nord et le vingtième (20ème) parallèle de latitude sud, s’étendant d’Ouest en Est, du Sénégal à Madagascar (16). Ainsi, en 1954, Lehmann emploie le terme de « sickle belt » («ceinture sicklémique ») pour décrire la répartition géographique de cette maladie à travers l’Afrique (16).

Polymorphisme génétique de la drépanocytose

       L’origine unique du gêne βS a été remise en question ces dernières années par des études qui se sont orientées vers l’ADN de la région génomique 13 portée par le bras court du chromosome 11 sur des échantillons humains composés de noirs, de caucasiens et asiatiques (26). Des techniques enzymatiques de restriction ont été utilisées par des auteurs pour explorer cette région et ils ont pu décrire un polymorphisme situé à 5 kilobases (Kb) de la gêne β (25). En effet, l’endonucléase Hpa 1 spécifique reconnait la séquence G- T- T- A- AC et y crée un clivage, une mutation de cette séquence empêche la restriction enzymatique. La succession de séquence non mutée (clivage) et de séquence mutée (absence de clivage) correspond à un contexte génomique particulier appelé haplotype. La variabilité des haplotypes définit un polymorphisme (Figure 5).

Morphologie et propriétés du globule rouge normal

       Les globules rouges encore appelés érythrocytes sont des cellules du sang, leur nombre varie entre 4,5 et 5,7 millions par mm3 de sang chez l’homme et entre 4 et 5,4 millions par mm3 chez la femme. Le globule rouge normal a l’aspect d’un disque biconcave, mesurant en moyenne 8 μm de diamètre pour une épaisseur de 2 μm. Malgré ses dimensions, le globule rouge doit être capable de passer dans la microcirculation dont les vaisseaux ont un diamètre inférieur à 3 μm afin de livrer de l’oxygène aux différents tissus (41, 42). Cette caractéristique de déformabilité du globule rouge est indispensable à son intégrité car il subit des contraintes mécaniques importantes au cours de son transit dans les capillaires de la microcirculation (41). Les principaux facteurs qui déterminent les propriétés de déformabilité du globule rouge sont : la viscosité du cytosol, le rapport volume/surface et les propriétés élastiques de la membrane.
-La viscosité intra-cytoplasmique : elle est déterminée par la concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine (CCMH) qui normalement se situe entre 27 à 32 g/dl pour une viscosité intracellulaire de 6 mPas-1 à 37°C (43). Cependant, elle peut augmenter lorsque les globules rouges sont déshydratés pour dépasser parfois 40g/dl ; ce qui entraine des valeurs très élevées de la viscosité intra érythrocytaire comme c’est le cas dans la drépanocytose ou les globules rouges falciformes sont déshydratés et rigides (44). La viscosité intra cytoplasmique dépend également de la nature et de la qualité de l’hémoglobine que le globule rouge contient. Des études ont montré que la déformabilité des globules rouges peut significativement diminuer lorsqu’ils contiennent une hémoglobine anormale, par exemple l’HbS dans le cas de la maladie drépanocytaire (45).
-L’excès de surface du globule rouge : Le rapport surface/volume des globules rouges normaux est de 1,33 (caractéristiques d’une cellule érythrocytaire : surface moyenne = 130 ± 16 µm2 et le volume 98 ± 12 µm3 ). Cet excès de surface d’environ 30% par rapport à au volume permet aux globules rouges de se déformer considérablement en prenant une forme particulière (en parachute ou pantoufle) lors des traversées dans la microcirculation (41). Cependant, l’augmentation de la concentration en CCHM est un facteur d’altération de ce rapport et augmente par conséquent la rigidité érythrocytaire (41, 46).
-L’élasticité membranaire des globules rouges : La membrane érythrocytaire comporte des protéines et des lipides intriqués dans une structure complexe sous forme de bicouche phospholipidique dans laquelle baignent de volumineuses molécules protéiques enchâssées plus ou moins profondément. De la face interne de la membrane, un réseau protéique constitue le cytosquelette qui confère la forme discocytaire au globule rouge. Cette structure de la membrane de la cellule érythrocytaire est responsable de sa grande déformabilité qui lui permet de passer dans des capillaires à petits diamètres (41). Cependant, dans la drépanocytose, la déformabilité des globules rouges est altérée à cause des conséquences de la falciformation sur la distribution des constituants membranaires des globules rouges. En effet, la membrane des érythrocytes falciformes est caractérisée par une redistribution des lipides membranaires avec une expression de nouvelles molécules de phosphatidylsérines anioniques et de phosphatidyléthanolamine à la face externe de la membrane créant par ailleurs une surface pro-coagulante et un contexte inflammatoire (47-49).

Phénomènes de vaso-occlusions drépanocytaires

      La polymérisation de l’hémoglobine S dans les conditions désoxygénées entraine une diminution de la déformabilité des globules rouges falciformes. De plus, avec la répétition des phénomènes de falciformation/défalciformation, les propriétés membranaires des globules rouges sont perturbées, ils deviennent plus rigides même en dehors des périodes de falciformation. Ces différentes observations ont conduit à imaginer un schéma physiopathologique dans lequel des globules rouges moins déformables obstruent mécaniquement les vaisseaux sanguins de faible diamètre, engendrant alors les crises vasoocclusives (Figure 22). En revanche, le processus de falciformation des érythrocytes tout comme la polymérisation de l’hémoglobine S nécessite un délai de réalisation. C’est ainsi que Kato et ses collaborateurs ont proposé en 2007 un modèle de déclenchement et de propagation des crises vaso-occlusives impliquant plusieurs étapes parmi lesquelles il y a le ralentissement du flux sanguin (50). En effet, des études (50, 60) ont montré que la libération des cytokines pro-inflammatoires et/ou l’expression des molécules d’adhérence vasculaire sont nécessaires pour l’initiation des phénomènes vaso-occlusifs, car elles augmentent le temps de transit des globules rouges dans les territoires désoxygénés de la microcirculation ; ce qui pourrait déclencher les crises vaso-occlusives. L’importance d’avoir un temps de transit dans les territoires désoxygénés suffisamment long pour que la falciformation des globules rouges soit réalisée, fait penser à beaucoup d’auteurs que les phénomènes d’adhérence vasculaire pourraient avoir un rôle primordial dans le développement des crises vaso-occlusives (60). Pour mieux comprendre les phénomènes d’adhérence endothéliale des cellules circulantes, il serait important de faire des rappels sur la structure histologique ainsi que la physiologie de l’endothélium avant d’aborder les phénomènes d’adhérence endothéliale et leurs conséquences sur la fonction vasculaire.

Accidents liés aux exercices physiques chez les porteurs du trait  drépanocytaire

   Les adaptations physiologiques et les réponses cardiovasculaires à l’exercice physique des PTD font constamment l’objet de débats scientifiques et médicaux (107, 118, 121, 124- 126). La plupart des accidents et /ou de morts subites rapportés dans cette population portant l’hémoglobine HbS ont été décrits au décours des activités physiques réalisées dans certaines conditions environnementales (température ambiante et humidité élevées) (117 121, 122, 125). En 1970, des cas de morts subites ont été observés chez des militaires PTD au cours de leur formation militaire par Jones et ses collaborateurs (117) et une hyperkaliémie associée à une acidose métabolique post mortem ont été rapportées chez ces jeunes militaires. Des données épidémiologiques de l’armée des États-Unis (118) ont montré que le risque de mort subite lié au stress de l’effort chez des noirs porteurs du trait drépanocytaire était 30 fois plus élevé comparativement aux militaires noirs à hémoglobine normale. Dans le milieu sportif, plusieurs auteurs ont également rapporté des cas d’accidents et/ou de mort subite chez les PTD, possiblement liés à la pratique des activités physiques et le statut de trait drépanocytaire (127-131). Hedreville et ses collaborateurs par example, avaient rapporté en 2009, un cas de cycliste PTD qui avait une occlusion de la veine centrale de la rétine 24 heures (131) après une course cycliste prolongée réalisée dans un climat chaud et humide. Récemment, l’étude épidémiologique de Harmon et ses collaborateurs chez des footballeurs Américains de Première Division a montré un risque de mort subite lié aux efforts physiques 37 fois plus élevé chez des porteurs du trait drépanocytaire comparés aux non porteurs d’hémoglobinopathie (130). Le terme ECAST (Exercise Collapse Associated with Sickle cell Trait : Collapsus d’Effort lié au Trait Drépanocytaire) a été récemment introduit dans la littérature pour regrouper l’ensemble des complications sévères y compris les rhabdomyolyses fulminantes survenues chez les sujets PTD en réponses aux activités physiques (132) . Malgré la rareté des accidents et/ou des morts subites liés aux exercices musculaires chez les porteurs du trait drépanocytaire, plusieurs études se sont intéressées aux mécanismes physiopathologiques de ces évènements fatals (32, 128, 131, 133-139).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
REVUE DE LA LITTERATURE
CHAPITRE I : LA DREPANOCYTOSE – PRESENTATION DE LA MALADIE
1. Historique
2. Epidémiologie
2.1. Répartition géographique de l’HbS
2.2. Drépanocytose et Paludisme
2.3. Aspects génétiques et moléculaires de la drépanocytose
2.3.1. Polymorphisme génétique de la drépanocytose
2.3.2. Mode de transmission de la drépanocytose
2.3.3. Différents syndromes drépanocytaires majeurs (SDM)
3. Physiopathologie de la drépanocytose et symptomatologie clinique
3.1. Morphologie et propriétés du globule rouge normal
3.2. Mécanismes physiopathologiques
3.2.1. Polymérisation de l’hémoglobine S
3.2.2. Falciformation des globules rouges et ses conséquences
3.2.2.1. Généralités sur la mécanique des fluides et l’hémorhéologie
3.2.2.2. Déterminants de la viscosité sanguine et leurs altérations dans la drépanocytose
3.2.3. Phénomènes de vaso-occlusions drépanocytaires
3.2.3.1. Rappels sur l’endothélium et l’hémorhéologie
3.2.3.2. Mécanismes d’adhérence des globules rouges drépanocytaires et les vaso-occlusions
CHAPITRE II : GENRALITES SUR LE TRAIT DRÉPANOCYTAIRE
1. Statut clinique des porteurs du trait drépanocytaire
2. Accidents liés aux exercices physiques chez les porteurs du trait drépanocytaire
3. Mécanismes hypothétiques des accidents
CHAPITRE III : QUELQUES ASPECTS SUR LE RAMADAN
1. Définitions
1.1. Causes transitoires
1.2. Causes durables
2. Ramadan et état d’hydratation
3. Ramadan et Trait Drépanocytaire
CHAPITRE IV : RAPPELS SUR LE DIABETE DE TYPE 2
1. Définitions
2. Epidémiologie
3. Physiopathologie et complications vasculaires
4. Diabète de type 2 et trait drépanocytaire
CONTRIBUTION PERSONNELLE
LISTE DES PUBLICATIONS
1. Publications principales
2. Publications secondaires (annexes)
POPULATIONS D’ETUDE ET METHODES
1. Aspects éthiques et financiers
2. Population d’étude
2.1. Caractéristiques générales
2.2. Dépistage du trait drépanocytaire
2.3. Diagnostic des sujets diabétiques de type 2 (étude 4)
3. Description des protocoles
3.1. Protocole 1
3.2. Protocole 2
3.3. Protocole 3
3.4. Protocole 4
4. Matériels et méthodes de mesure des paramètres anthropométriques (études 1, 2, 3 et 4)
5. Matériels et méthodes de mesure des paramètres biochimiques (études 1, 3 et 4)
5.1. Glycémie à jeun, Hémoglobine glyquée, fibrinogène et bilan lipidique (études 3 et 4)
5.2. Densité urinaire (études 1 et 3)
6. Matériels et méthodes de mesure des paramètres caridovasculaires (études 1; 2 ; 3 et 4)
7. Mesure de la température rectale (Etude 1)
8. Matériels et méthodes de mesure des paramètres hématologiques (étude 3)
9. Matériels et méthodes de mesure des paramètres hémorhéologiques (études 1, 2, 3 et 4)
10. Matériels et méthodes d’évaluation de la fonction vasculaire (étude 4)
11. Matériels et méthodes de mesure du métabolisme du NO (étude 4)
12. Matériels et méthodes de mesure des marqueurs inflammatoires et du stress oxydatif (étude 4)
13. Matériels et méthodes d’exploration des complications vasculaires (étude 4)
14. Analyses statistiques
PRESENTATIONS DES RESULTATS DES ETUDES
1. Etude n° 1: Effets de l’hydratation et de la privation d’eau sur la viscosité sanguine chez les PTD during un match de football
2. Etude n°2: Meilleur profil de la viscosité sanguine de PTD sportifs comparés aux PTD sédentaires
3. Etude n° 3: Modifications hémorhéologiques induites par le jeune du Ramadan chez les PTD
4. Etude n°4: Effet du trait drépanocytaire sur les alterations du stress oxydatif, des anomalies hémorhéologiques et de la dysfonctionvasculaires induites par les diabéte de type 2
DISCUSSION ET CONCLUSION GENERALES, ET PERSPECTIVES
1. DISCUSSION GENERALE
1.1. Trait drépanocytaire, rhéologie sanguine et hydratation (études 1 et 3)
1.2. Trait drépanocytaire et pratique régulière d’une activité physique (étude 2)
1.3. Trait drépanocytaire, hémorhéologie, fonction vasculaire, stress oxydatif et diabète de type 2 (étude 4)
2. CONCLUSION GENERALE
3. PERSPECTIVES
REFERENCES 
ANNEXES

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