Evaluation de l’importance des infestations par les tiques Amblyomma
Généralités sur la maladie
La cowdriose ou heartwater est une maladie infectieuse, virulente, inoculable et non contagieuse quoiqu’elle soit classée en France parmi les Maladies Réputées Légalement Contagieuses, depuis sa découverte en 1980 aux Antilles, à cause des risques d’extension non seulement à toute la région des Caraïbes mais aussi au continent américain. La maladie est due à la rickettsie Ehrlichia ruminantium, appartenant à l’Ordre des Rickettsiales, Famille des Anaplasmataceae.La cowdriose est transmise par diverses espèces de tiques du genre Amblyomma et affecte principalement les ruminants domestiques (bovins, ovins, caprins et buffles) et sauvages (bovidés). Ces animaux représentent également les réservoirs sources d’infections des tiques. La maladie est cliniquement caractérisée par une augmentation brusque de la température avec forte fièvre suivie, dans les formes suraiguë et aiguë, de symptômes nerveux aboutissant souvent à la mort. Dans la forme subaiguë, le taux de guérison estassez élevé. Le tableau clinique peut être diffèrent selon l’espèce et la race de l’animal et selon la souche d’E. ruminantium. Ainsi, les animaux les plus sensibles à la maladie sont-ils, par ordre décroissant, les chèvres, les moutons et les bovins, surtout ceux de races améliorées ou provenant de régions indemnes. A l’autopsie le tableau lésionnel secaractérise par la présence d’un épanchement séreux dans le péricarde, d’où le nom de « heartwater » et d’un autre dans la cavité thoracique.La cowdriose est largement répandue en Afrique sub-saharienne. Elle existe également dans les îles autour de l’Afrique (Madagascar, Ile Maurice, La Réunion, Les Comores – dont Mayotte -, Zanzibar, Sao Tomé et Cap Vert) et dans plusieurs îles des Caraïbes (Guadeloupe, Marie Galante et Antigua). La distribution géographique de la cowdriose dans le monde se superpose à celle des tiques Amblyomma reconnues comme vecteurs. La cowdriose, comme les autres maladies transmises par les tiques, représente un handicap sérieux pour les programmes d’amélioration génétique du bétail dans les pays
où elle est endémique. La mortalité et la réduction de la productivité dans les élevages atteints sont autant de pertes économiques occasionnées par la maladie. Les stratégies de lutte actuelles contre la cowdriose consistent à traiter les animaux malades avec des antibiotiques (tétracyclines) si le diagnostic est établi rapidement, en un contrôle chimique des vecteurs par les acaricides et en la pratique de l’infection – traitement. Cependant les acaricides sont chers et des phénomènes de résistance des tiques peuvent également apparaître lors de traitements menés de manière intensive recommandés pour une lutte efficace contre la cowdriose en signalant toutefois qu’une seule nymphe ou tique adulte peut transmettre la maladie. Par ailleurs, l’infection – traitement présente des risques pour les animaux, la mort pouvant survenir si le traitement est appliqué trop tardivement, et en fonction de la virulence de la souche utilisée (Ball 3) sur les différentes espèces et de la sensibilité individuelle des animaux, des cas fatals peuvent être observés.Les recherches visant à développer des vaccins efficaces sont en cours. Il est désormais bien établi que E. ruminantium est un microorganisme présentant une diversité génétique et antigénique forte, le niveau de protection conféré par une souche vis-à-vis d’une autre variant entre la protection totale et l’absence de protection. Pour être mené à bien, le développement de vaccins nécessite par conséquent des connaissances plus approfondies sur l’agent pathogène.
Epidémiologie Spectre d’hôtes
Les ruminants domestiques (van de Pypekamp et Prozesky, 1987) et sauvages (Mebus et Logan, 1988 ; Peter et al, 2002) souvent atteints de formes cliniques fatales, ont été pendant longtemps considérés comme les hôtes préférentiels d’E. ruminantium d’où probablement son nom d’espèce. La mise en évidence du fait que des animaux non ruminants peuvent être naturellement ou expérimentalement réceptifs et sensibles (Oberem et Bezuidenhout, 1987) mais généralement sous des formes subcliniques, a changé ce concept. Cependant, Peter et al ont révisé en 2002 la liste de ces animaux et l’ont limitée à deux rongeurs sauvages, les autres animaux testés (pintade, tortues léopards) s’étant révélés réfractaires expérimentalement (Peter et al, 2001), ainsi que la mangouste (Camus et al, 1996), Des tests moléculaires ont montré que l’infection de carnivores tels que les chiens (Allsopp et Allsopp, 2001), de rongeurs (Peter et al, 2002), de reptiles comme les tortues léopards et les vipères (Kiel et al, 2006) ne seraient pas due à E. ruminantium mais à des espèces proches. L’extension de ce spectre d’hôtes à l’homme avec des cas fatals en Afrique du Sud (Allsopp et al, 2005) serait plutôt préoccupante. Cependant, il a été établi récemment que la PCR pCS20 utilisée dans ces études présente des réactions croisées avec E. chaffensis et E. canis (Steyn et al, 2008), ce qui amène à reconsidérer ces résultats .
Pouvoir pathogène d’E. ruminantium
Pour une même espèce, les formes cliniques de la cowdriose varient selon les souches d’E. ruminantium en cause. Les diverses souches n’infectent pas non plus les différents hôtes de la même manière. Ainsi le stock Kümm, hautement pathogène pour la chèvre et la souris, ne provoque-t-il pas de maladie chez les bovins (Du Plessis et Kümm, 1976 ; Bezuidenhout et al, 1994). Ces différences de virulence et de pathogénicité sont à relier à l’hétérogénéité génétique au sein de l’espèce. Cependant, la connaissance du génotype ne permet pas actuellement de prédire la pathogénicité. Les manifestations pathogéniques sont également différentes en fonction des espèces et des races des animaux affectés. Ainsi, les ruminants domestiques autochtones apparaissent-ils beaucoup plus résistants que ceux importés et Bos indicus est beaucoup moins sensible que Bos taurus (van der Merwe, 1979). Concernant les petits ruminants, des chèvres natives de Guadeloupe, éloignées depuis plusieurs années de leur région d’origine où la cowdriose est endémique, restent peu sensibles. Elles semblent donc avoir acquis une certaine forme de résistance, probablement associée à un gène récessif lié au sexe, par une sélection naturelle de gènes de résistance (Matheron et al, 1987).
|
Table des matières Introduction Chapitre 1 - La cowdriose 1.1 Historique 1.2 Généralités sur la cowdriose 1.3 Epidémiologie 1.4 Diagnostic 1.5 Lutte Chapitre 2 – Contexte général et problématique 2.1 Présentation de la rickettsie Ehrlichia ruminantium 2.2 Présentation du vecteur Amblyomma variegatum 2.3 Les zones d’étude 2.4 Objectifs de l’étude et démarche scientifique Chapitre 3 - Evaluation de l’importance des infestations par les tiques Amblyomma variegatum et de la diversité génétique de E. ruminantium 3.1 Mise au point d’outils et analyse de la diversité génétique (Article 1) 3.2 Cas des trois îles des Caraïbes : Guadeloupe, Marie Galante et Antigua (Article 2) 3.3 Cas du Moyen Ouest Malgache : Région du Bongolava Chapitre 4 – Etude de la Diversité génétique de E. ruminantium : apport de l’étude de plusieurs gènes map 4.1 Des marqueurs polymorphes pour la caractérisation de la diversité (Article 3) Chapitre 5 – Compréhension des mécanismes de transmissions hôte/vecteur des souches de E. ruminantium par une approche en conditions contrôlées : Application aux observations de terrain 5.1 Mise au point d’outils moléculaires 5.2 Mécanismes de transmission de souches hôte/vecteur et typage de souches lors d’infections multiples Chapitre 6 : Discussion générale, conclusions et perspectives Références bibliographiques
Télécharger le rapport complet